[L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

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Depuis la Déchirure jusqu'à la création de l'Empire et de la Bretonnie, revivez ces âges passés de légendes.

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[MJ] La Fée Enchanteresse
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Libérée de la jeune fille, Marfa put s’installer dans un coin et siroter une choppe de bière au long collier de mousse, tandis que Diederick venait tailler la discussion avec elle. Avec grande politesse, elle se contenta de sourire aux premières réflexions, et hocha solennellement de la tête.

« Ce sont de bons enfants, sire Diederick. Ils doivent faire votre bonheur. »

Elle continuait dans le vouvoiement, alors que son interlocuteur se permettait une familiarité amicale. Visiblement, les années d’absence marquaient encore sa manière d’être, ou alors, elle ne souhaitait pas permettre à Diederick d’être aussi à l’aise qu’il le souhaitait.
Alors qu’il commençait à lui poser des questions sur sa vie, elle sirota tranquillement sa boisson, laissant un temps de pause pendant lequel elle réfléchit probablement. Passant sa main sur sa bouche couverte de mousse, elle fit la moue et accepta d’un peu se dévoiler.

« J’ai abandonné l’escrime. Comme le dessin. Comme la musique aussi, mais ça vous n’étiez pas au courant. Je ne suis douée en rien, comme dit père. »

Elle eut un rictus jaune qui se dessina sur son visage. Elle faisait comme si ça l’affectait pas.

« J’ai passé le début de ma vie à Nuln, dans les propriétés historiques des Bildhofen. C’est votre frère, sire Léopold, qui m’a ordonné de rentrer à Middenheim l’année dernière — il souhaitait que je devienne une dame de compagnie de dame Anika-Elise von Nikse. Mais je n’ai pas encore pu intégrer sa maison, alors il semblerait que je sois bloquée ici jusqu’à ce que je plaise au duc-et-graf du Fauschlag…
…Ou jusqu’à ce que sire Léopold en ait assez de moi et me permette de revoir mes amis et ma vie à Nuln. On verra ce qui viendra en premier. »


Les Nikse, la grande famille régnante sur le Nordland, vassale des Todbringer depuis des siècles maintenant — leur relation était symbiotique, et les deux avaient pour le coup souvent mélangé leur sang. Que Todbringer épouse une Nikse était peu étonnant, étant donné l’importance que représentait le Nordland et son accès maritime ; mais que Boris se comporte en semi-polygame qui choisit la maison de son épouse, ça semblait déjà beaucoup plus étonnant. Ce n’était pas le Boris dont Diederick se rappelait.
Il pourrait probablement le voir de ses propres yeux quand il le rencontrerait.

Quand il changea de sujet pour parler de la fille du-dit Todbringer, elle retroussa ses lèvres un petit instant, avant de hausser des épaules.

« C’est la seconde fille illégitime du graf. Tout le monde l’appelle la Princesse, alors qu’elle n’a aucun titre qui lui en donne le droit. Elle est jeune — dix-huit ans — et magnifique — petite blonde aux yeux-bleus, fine et toujours parfaitement habillée. Elle donne aux artistes et aux pauvres, et tout le monde dans cette ville l’adore.
Je ne comprends pas que Léopold s’obstine à refuser les fiançailles. Elle aurait de quoi épouser le Prince-Héritier de l’Empire, voire celui de Bretonnie. Je pense que c’est par principe — Léopold ne veut surtout pas que l’on reconnaisse les enfants nés hors des liens du mariage. C’est seulement mon opinion, mais on dirait qu’il veut que seul Stefan soit reconnu comme héritier. »


Sous-entendu : Il veut que Middenheim soit dirigée par l’enfant lunatique et maladif.


Diederick trouva un moment où gratter l’amitié auprès d’Arnulf. Le grand bonhomme, encore entièrement en armure de plate, peau de loup sur l’épaule, buvait aussi tranquillement sa bière, discutant toujours debout avec autrui. Il sembla un peu surpris que l’on s’approche ainsi de lui, mais ça ne sembla pas le déplaire : il accepta donc de s’installer côte-à-côte avec le semi-Cathayen, qui engagea la discussion sur des choses un peu laconiques.
La première « question » sembla en tout cas le vexer.

« J’ai fait le serment de servir Ulric jusqu’à ce que je trouve la mort. Ce n’est pas une aventure. »

Piqué dans sa fierté, il n’offrit pas plus de détails sur les raisons de son choix. À moins que Diederick insiste pour lui tirer les vers du nez, il faudrait s’en contenter.
Et à la deuxième question, il se mit à lever le menton et à pérorer, sur un air de défi :

« La Drakwald est fort mal gérée par sires Léopold et Siegfried. Le graf et l’ar-Ulric doivent constamment les aider en envoyant des militaires, mais c’est avec plaisir que les chevaliers du Loup-Blanc participent depuis la naissance de l’Empire à la lutte contre les criminels et les bêtes de la forêt.
Dès cet hiver, quand les autres soldats seront trop malades et gelés sur place pour faire le devoir, notre chapitre reconstituera ses forts d’hivernage et nous passerons la mauvaise saison entière à semer la terreur chez les Bêtes. Blut und Ehre.
À cela s’ajoute l’insoumission, surtout celle des Sigmarites. Quand vous trouverez votre frère, messire, j’espère que vous lui direz de passer plus de temps dans sa province, plutôt qu’avec ses cocottes d’Altdorf et de Nuln. »


Il apparaissait clairement qu’il provoquait, attendant une réaction de sa part — dur de savoir laquelle.

Richter jouait excellemment bien à l’Alvatafi. Soit il avait eut le temps de s’entraîner, soit Diederick avait perdu ses réflexes — mais répondant à chaque coup de la lente avancée Naine, Richter put barrer ses pions et réussir en même pas cinq minutes à complètement détruire la chaîne de pièces de son adversaire, si bien que son prince eut une route royale pour tout simplement quitter le plateau.

Au mot prononcé, Richter pouffa d’un rire agacé.

« Salzenmund est une grande ville dans le Nordland. »

Et c’est tout ce qu’il offrit comme réponse. Il avait bien compris ce que Diederick voulait dire, mais comme Arnulf, il n’allait pas se confier comme ça aussi facilement — en ça, les ennemis semblaient proches.
Diederick réagit en tentant de parler lui aussi de la cité. Mais Richter semblait ne pas vouloir se prêter au jeu, et n’offrit que des miettes de réponses.

« Je réside à l’année à Salzenmund, où je travaille pour la famille Nikse — donc en fait pour Todbringer, contrairement à ce que mon père veut dire, puisque ces deux dynasties sont comme une seule. Parce que j’ai un diplôme d’études de géologie et d’alchimie de l’université d’Altdorf, on m’a nommé commissaire d’un bureau d’étude minier. Mais je suis encore trop jeune, je n’ai pas beaucoup de responsabilités. Un jour j’achèterai des mines dans le Nordland, et ça fera ma richesse, mais pour l’heure ce sont les Nikse que j’engraisse.
Je ne me plains pas. Je vis pour moi-même et les gages que j’obtiens m’assurent un bon train de vie. J’ai toute ma vie à Salzenmund : des amis, des clients, des alliés… C’est plus rustre que Middenheim, mais je m’y sens mieux.
Boris Todbringer veut que j’intègre sa maison parce que sa femme joue à l’entremetteuse. Je crois qu’il me veut comme architecte pour les puits de Middenheim ou prospecteur pour les mines du duché. Mais je ne souhaite pas passer ma vie entière à enrichir d’autres, il y a plus d’espoirs dans le Nordland qu’ici. »


La question sur Katarina le fit pouffer de rire à nouveau, mais cette fois-ci, plus moqueur qu’autre chose.

« Des rumeurs ? Sur la Princesse ? Et tu veux le crier plus fort aussi ?
C’est une Âme Vénérée qui respire. Pure, belle, adorée des artistes et des culs-de-jatte. Elle passe sa vie entre le Palais, le Collège Royal de Musique et les Jardins Royaux. Ah et les établissements du culte de Shallya, de temps en temps, quand il faut se faire voir.
N’espère pas entendre des rumeurs sur elle. Elle est toujours accompagnée de vingt chevaliers-panthères. Et c’est pas les plus grands défenseurs de sa personne, en plus : pour ça elle a un chaperon, la terrible et sanglante Hildegarde Zimperlich. »


Elle, pour le coup, Diederick la connaissait. Nourrice de Boris Todbringer, elle l’avait nourri de son sein. Puis, elle était devenue gouvernante de ses fils, Stefan et Heinrich. Aujourd’hui, elle devait avoir près de 80 ans, et pourtant, elle était encore en train de travailler.
Dure, austère, conservatrice, c’était une véritable marâtre qui expliquait sûrement l’éducation franc-du-collier des Todbringer. Jamais Diederick ne pourrait espérer s’approcher de Katarina avec un tel cerbère pour la protéger.

Ayant complètement humilié Diederick sur le plateau, Richter remit les pions en place, les tourna, et décida de rejouer la partie en prenant cette fois-ci le rôle des Nains.

« Oui, je suis au courant pour la rébellion de ton frère. C’est à Kastof, perdu en plein milieu de la Drakwald — un gros château en pierre bâti du temps de Boris l’Avide, mais l’ouvrage tient encore. Le responsable de la rébellion est le seigneur du château, le baron Torsten Kusch, un homme de la petite noblesse provinciale, autant dire qu’il ne fait pas le poids face à Léopold.
Il y a deux ans, des pèlerins Sigmarites qui passaient près de sa seigneurie se sont plains devant le palais du protecteur de la Drakwald — titre que détient Léopold — pour dire que des chevaliers du Loup Blanc les avaient molestés et exigé une rançon, ils tenaient un péage sauvage au milieu de la forêt. Les Loups Blancs, bien planqués à Middenheim, ont refusé d’envoyer quiconque comparaître devant le palais. Alors, les enquêteurs sont allés voir le seigneur de Kastof, puisque c’était sur sa juridiction qu’avait eu lieu l’agression. Kusch a très mal réagi, interdit aux enquêteurs d’enquêter, expliqué que les chevaliers du Loup Blanc étaient présents pour l’aider à protéger ses terres, et qu’il refusait de dénoncer les militaires incriminés. Les enquêteurs ont alors dit : « Très bien. Hé bien dans ce cas, vous payerez les dommages et intérêts des Sigmarites ».
Kusch a pété un boulon et strictement refusé. Du coup, le palais de la Drakwald a envoyé des prévôts pour venir saisir de force quelques biens pour rembourser la note — ils ont été accueillis par des militaires de la maison de Kusch et quelques chevaliers du Loup Blanc. Il y a eut des heurts, des blessés graves. Sire Siegfried a alors ordonné à Kusch de se présenter au palais de Carroburg pour s’expliquer, en personne, et il a répondu qu’il accepterait, à une condition : que Léopold se présente lui aussi en personne, mais difficile vu qu’alors Léopold était à Nuln, et qu’il n’allait pas revenir pour un minable baron de province…
…Alors, Kusch a été mis au ban et condamné à mort par contumace. Mais personne n’est allé chercher sa tête, parce que ses vassaux et les gens sous sa protection l’adorent, et parce que c’est un allié du Loup Blanc. Et aussi parce que les armées des Bildhofen étaient occupés avec plus important. Mais si Kastof et Kusch ne sont rien, ils risquent de faire domino, et d’entraîner d’autres seigneurs mécontents avec eux. Donc Léopold a décidé de rassembler une vraie force armée pour le liquider.
Et on est coincés là depuis des mois maintenant. Un problème mineur, mais ça en fait un de plus sur une montagne d’emmerdes. »


Même en jouant Nain, Richter s’avoua être beaucoup trop bon, ou Diederick beaucoup trop mauvais — cette fois-ci, il parvint à tisser une magnifique toile de pions, si bien que le prince Elfe se retrouva cerné de tous les côtés avec aucun espoir d’exploiter une fuite.

L’attitude de Richter, goguenarde et un peu hautaine, changea du tout au tout quand on lui parla d’Ulricht. Si jusqu’ici, le jeune homme s’était détendu, presque ouvert, il retrouva une mine sombre et froide. Il but son verre — lui ne prenait pas de la bière, mais un fond de véritable alcool fort, probablement de la vodka Kislévite. Et il mit du temps à répondre, au moins deux bonnes minutes d’un silence de plomb, où il se contenta de jouer en se concentrant très, très fort sur le plateau.
Mais c’est en levant ses yeux derrière ses cheveux qu’il expectora son mépris :

« Tu te donnes beaucoup trop d’importance.
Ulricht s’est tué tout seul. Il a suivi l’aventure et nous a abandonné, et il a trouvé la mort soit par malchance, soit par incompétence. Il laisse un vide, et je lui en voudrai toute sa vie pour m’avoir laissé ainsi seul, dans une place que je n’ai jamais désirée.
Je ne t’en veux pas, non. Si tu veux faire ami-ami avec moi par culpabilité, je n’en veux pas. Pas plus que de la pitié, si c’est ça qui te motive.
Je ne t’aime pas, mais c’est normal, tu es un étranger pour moi. Mais enfin, nous sommes de la même famille, alors nous n’avons pas d’autres choix que de faire semblant jusqu’à ce que Mórr nous prenne. »


Et faisant échapper son Elfe du plateau, il tiqua avec sa langue.

« Les jeux à boire c’est quand même plus amusant. »
Trois dialogues, donc trois jets de charisme : 14, 14 et 18 — comme ça c’est réglé.


Deux jets de jeu face à Richter :
15 de Richter, 20 de Diederick.
13 de Richter, 18 de Diederick.
Richter t’écrase complètement et t’humilie.

Il tourne le jeu pour échanger :
7 de Richter, 20 de Diederick.
11 de Richter, 20 de Diederick.
Hé bah putain, t’es nul à chier en jeu d’échecs ! Faut pas blunderer des pièces comme ça !
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Diederick von Bildhofen
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par Diederick von Bildhofen »

Aye. Tous les jours, dit il à Marta, bien qu'en haussant le sourcil au vu du ton qu'elle employa. ''Sire.''

Le titre le mis automatiquement mal à l'aise. Il jurait avec les souvenirs qu'il avait de sa cousine, la familiarité qui avait existé entre eux auparavant. Et le reste de la discussion ne cessa de le mettre davantage mal à l'aise. Il ne savait trop comment réagir à cette distance impromptue entre eux. Et que sa cousine Marta ait abandonné toutes les passions qu'elle avait pu avoir par le passé.... La pauvre.

Ça n'est pas vrai... Glissa-t-il néanmoins lorsqu'elle se dévalorisa. Il devait certainement y avoir quelque chose en quoi elle était capable de montrer quelque talent. Couture, équitation, culture... Marta von Bildhofen sait lire. Écrire. Compter. Danser. Est cultivée. C'est plus que ne peuvent en dire d'autres. Tout un chacun... est un métal qui ne demande... Qu'à être travaillé. Tu ne fais pas exception, essaya-t-il pour la faire cesser de se dévaloriser. Tout juste se retenu-t-il de placer ses mains sur celles de Marta, s'arrêtant au à mi-chemin. Ils n'étaient plus les même depuis.

Son visage exprimait clairement le soucis qu'il se faisait à l'idée que Marta puisse se dévaloriser de pareille manière.

Quand enfin elle mentionna ce qu'elle savait de la ''princesse'', Diederick ne put s'empêcher de hausser un sourcil. À part le statut de bâtard de la jeune fille, celle ci semblait être une véritable sainte. Un matériau parfait pour une épouse, et si en plus elle était capable d'esprit alors le refus de Léopold était d'autant plus inconfortable à digérer. Sans compter son escorte et sa chaperonne.

Redirigeant la discussion dans une autre direction, il essaya de relancer celle ci.

Nuln... Comment est la vie là bas ? Des passe temps ? Hobbies ? L'Universität a-t-elle quoique ce soit à envier au collegium de Middenheim ?

L'antique rancune entre ces deux établissements et le collegium de Middenheim, se voyant refuser encore et encore le statut d'université était presque une coutume. Cette petitesse de la part des reiklandais nourrissait les stéréotypes et passions dans les terres du Middenland. Elle était presque proverbiale. Mais mis à part ce morceau d'orgueil provincial qui ne demandait qu'à être caressé dans le sens du poil, ce qui intéressait surtout Diederick était la vie de sa cousine.
Sûrement, Marta devait bien avoir quelque talent qu'elle gardait de côté ? La vie était tellement triste sans passions. Et il cherchait également à sonder celle ci, pour déterminer si oui ou non sa cousine pourrait être éventuellement intéressée par le projet qu'il couvait, lorsqu'il se retrouverait sur le Reik...



Arnulf fut assez sec avec lui. Le parfait stéréotype du middenlander querelleur. Frusque, brusque, provocateur, rentre dedans, jusqu'à ce que l'interlocuteur réponde avec pareille véhémence. Du moins était ce que Diederick pensa du bonhomme.
Et quelle réaction à sa deuxième question... une bien belle diatribe. À mesure qu'il s'exprimait, le von Bildhofen senti la moutarde lui monter au nez. C'était son frère qu'il insultait à mots voilés. Un frère qu'il n'avait pas vu depuis bien trop longtemps, mais son frère tout de même.

Plissant des yeux, Diederick réfléchit à une quelconque répartie pour que ce cuistre y réfléchisse à deux fois avant d'insulter à nouveau sa famille.

Gouverner Carrobourg nécessite, une grande attention vis à vis du Reik. Ces nids de sigmarites fourbes, que sont Nuln et Altdorf sont une source constante d'inquiétude, pour tout bon ulricain. Mon frère sait certainement ce qu'il fait, lui lança-t-il avant de reprendre son souffle, avec le ton de la certitude.



Le match d'Alvatafi avait été un désastre avec Richter. Sa migraine semblait avoir reprit et à plusieurs reprises sa poigne sur ses pièces se relâcha, celles ci tombant dans la mauvaise place, au mauvais moment, le faisant faillir à chaque coup. Richter le menait tout au long du jeu et il n'arrivait pas à jouer à nouveau correctement.

Mais même si les tournures de Richter et piques lancées contre sa personne étaient désagréables, Diederick faisait de son mieux pour laisser couler l'eau sur les côtés, son cousin se révélant être une grande source d'information.
En particulier sur la rébellion.

Par les dieux mais qu'est ce qui lui est passé par la tête....

À mesure que Richter s'étendait sur le sujet, le visage de Diederick prenait en longueur, pour au final le regarder avec des gros yeux. C'était là le genre d'emmerdes qui pouvait vous exploser à la figure aisément si vous n'y prêtiez pas attention. Et de manière très vilaine. Combien d'incidents frontaliers avaient dégénérés en Cathay par la faute d'emmerdes de ce genre ? Rien que cinq ans auparavant il y avait eu ce fonctionnaire qui avait revendu l'aide alimentaire pour un comté touché par la famine, qui avait provoqué une révolte ayant nécessité l'intervention de l'armée provinciale. Celle ci se révélant gangrenée par la corruption et en sous effectifs après une série de défaites spectaculaires. Et du soulèvement de commencer à se répandre ailleurs jusqu'à ce que les notables locaux fassent équiper leurs propres bandes armées. Bilan : des milliers de morts et des dégâts pour les années à venir à l'échelle d'une préfecture.
Diederick était donc tout à fait conscient des dangers que Léopold courrait s'il laissait les chose empirer. Une révolte que l'on tardait trop à écraser pouvait trop facilement embraser les terres alentours. Il fallait l'écraser, ou acheter une partie du camp adverse pour gagner du temps ou le diviser, inciter la trahison ou même corrompre le commandement et négocier une paix en trompe-œil. À moins qu'il ne soit paranoïaque et ne se fasse des idées.

Malchance. Grosse malchance. Un peu de culpabilité, oui. Surtout car je découvre ici des étrangers. Des noms et des visages que je connais, mais sont devenus ceux d'inconnus.

Mais voilà alors qu'il était dans les étoiles il se faisait massacrer sur le plateau, à nouveau et le prince elfe s'échappait.

Poussant un gros soupir à l'invitation de Richter de changer de jeu, le semi-cathayen eut à refuser celle ci. Dans mon état, deux bières, et je suis sur le carreau.

Observant la famille alentours du coin de l'œil dans la salle, il chercha du regard son épouse et les enfants, pour voir si ceux ci passaient du bon temps, où qu'ils soient, avec qui ils étaient, ou bien s'ils commençaient à s'ennuyer. Dans le dernier cas, il chercherait à attirer leur attention pour venir apprendre à jouer, en compagnie de "tonton" Richter.,

Je pense que tu aurais davantage de plaisir à jouer contre les enfants... Après qu'ils apprennent à y jouer.
Sinon, il y a un très bon jeu cathayen....


Et de là de l'introduire à ce jeu de plateau cathayen où un groupe de joueurs débutent au même rang et avec les mêmes fonds. À chaque tour, chaque joueur, selon les résultats des dés, montaient ou descendaient en rang, étaient emprisonnés ou condamnés à mort, les fonds étant utilisés pour acheter des rangs, échapper à la justice et ainsi de suite. Et plus les joueurs grimpaient les échelons du pouvoir, plus ceux ci étaient mis en danger, le gagnant étant celui qui atteignait le plus haut rang administratif de l'Empire Céleste, provoquant la purge des autres. Un jeu très apprécié par la plupart des cathayens, et parfois un tantinet trop proche de la réalité du pouvoir... Il fallait pour y jouer des dés, un plateau, des cartes et des jetons. Il avait perdu dans son bagage son propre exemplaire très complet du jeu, en débarquant dans l'Empire...
Le savoir c'est le pouvoir. Et savoir quand le garder, le cacher, le partager, cela est la véritable épreuve de ceux le détenant.

Diederick Maria Reichenbach Bruno "Ruichen" von Bildhofen, Voie de l'étude de la connaissance
Profil: For 8 | End 8 | Hab 8 | Cha 10 | Int 10 | Ini 8 | Att 8 | Par | Tir 8 | Mag | NA 1 | PV 60/60

wiki-v2/doku.php?id=wiki:fiche_diederic ... _bildhofen



« Alors que tu défiais le couvre-feu, tu découvres une vertu trop zélée. »

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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Marfa eut un petit sourire qu’elle masqua vite en tordant sa bouche en cul-de-poule devant les assurances de Diederick. Elle agita la tête de gauche à droite, avant de regarder l’homme droit dans les yeux.

« C’est… Gentil. Même si je sais que vous dites ça pour être poli. »

Elle faisait comme si ça ne l’affectait pas, mais en réalité, Diederick pouvait déjà sentir que le malaise se dissipait un peu. Elle se mit à jouer avec une boucle de ses cheveux, un peu de gêne. Là, maintenant, la femme habillée en homme ressemblait à nouveau à l’enfant qu’elle avait été.

« Nuln a… Une vie universitaire magnifique. Les sujets ne sont pas différents de ceux à Middenheim, mais à Nuln l’université a beaucoup plus de crédits, beaucoup plus de bâtiments et de laboratoires. Et une grande liberté aussi — le recteur de l’Université est au conseil comtal, et les étudiants ont des dizaines de privilèges de justice qui les mettent hors d’atteinte de la loi.
Mais le vent tourne. Nuln fait un peu… Je sais pas comme dire. Vieillotte. L’université de Nuln est encore très puissante, mais j’ai souvent remarqué que les étudiants d’Altdorf, et surtout de Middenheim, avaient souvent l’esprit plus… Ouvert. Ils s’intéressaient à plus de choses, ils étaient plus novateurs. Ils n’avaient pas peur de la censure, car malgré toute la libéralité offerte par la comtesse de Nuln, il y a encore un certain conservatisme chez nos professeurs.
En gros, quand on sort de Nuln, on a le crâne bien bourré. Mais à Middenheim et Altdorf, on apprend plus à en faire quelque chose.
Pour ça que ce sont dans ces deux villes qu’existent les Nouveaux Millénaristes. »


Le nom semblait dire quelque chose à Diederick, sans en être certain. Quand il manifesta son envie d’en savoir plus, la jeune fille continua :

« Oui, pardon, je parle comme si vous étiez au courant de tout…
C’est… Une philosophie politique très récente et importante dans le Collegium de Middenheim. C’est inspiré des idéaux du culte de Véréna, même si c’est une relecture des traditions de la religion de la chouette.
Les Nouveaux Millénaristes veulent de grandes réformes. Ils pensent que la religion doit être séparée strictement de la loi, pour éviter l’intolérance et les conflits de foi. Ils pensent que la noblesse doit abandonner ses privilèges, et que la propriété doit être distribuée entre tous. Ils sont contre toutes les formes d’inégalité, due à l’argent ou à la naissance. Ils veulent que les coutumes soient rédigées, afin que nul ne puisse ignorer la loi et que chacun ait le droit de se défendre devant les tribunaux. Et ils veulent que la culture soit accessible à tous.
Pour l’heure, les Nouveaux Millénaristes ne sont que des jeunes étudiants qui écrivent des journaux et payent des sorties culturelles pour des enfants des bidonvilles de l’Ostwald. Mais parce qu’ils ont de bons diplômes, ils sont destinés à faire partie de l’administration du Graf dans les prochaines années, ce qui gêne beaucoup de monde, pour des raisons évidentes.
À Altdorf, il y a un problème similaire. Je m’y connais moins, mais on dit que des princes Kislévites en exil ont des idées proches, et qu’ils cherchent à faire l’éducation des masses pour exiger des réformes politiques et sociales.
Dans tous les cas, c’est un problème de jeunes gens des villes. On entend beaucoup moins de tels rêves dans les campagnes. »


Et là-dessus, elle hocha des épaules.

« J’admets avoir du mal à faire mon opinion là-dessus. Beaucoup de mes amis sont Millénaristes, et ce qu’ils disent a beaucoup de sens…
Mais bon, j’ai von Bildhofen dans mon nom, je vais pas dire que la noblesse et les privilèges c’est mal, quand je suis privilégiée depuis ma naissance. »

Arnulf fut mouché par la réflexion de Diederick. Élégante et simple, en une seule phrase, elle forçait l’Ulricain à former une nouvelle opinion sur la situation, une à laquelle il n’avait jamais songé. Il se gratta le menton, l’air d’un penseur en intense réflexion.
Même s’il se donnait un air braillard et violent, il ne fallait surtout pas penser qu’un homme comme lui était idiot et incapable de sensibilité…

« Léopold est plus Sigmarite qu’Ulricain. Ça se voit dans ses actes, dans sa manière de régner, dans qui il privilégie au gouvernement de sa province. Et ça se voit aussi dans son choix de relations plus intimes…
…J’espère que vous dites vrai, et que Léopold cherche vraiment à limiter l’influence des sudistes en fricotant avec eux. J’ai du mal à y croire, personnellement, mais vous vous ferez bien votre opinion en le voyant.
Toujours est-il — le Middenland est lié éternellement à Middenheim. Nous sommes au-dessus du Reik, et il faudrait que les fidèles de la Comète s’en rappellent. Ils sont des invités ici, rien de plus. »


Un vœu pieux. Mais Carroburg n’est pas le Middenland — Carroburg est la Drakwald, et plus proche du Reik que du Fauschlag.
Mais évidemment, Diederick ne gagnerait rien à essayer de convaincre un fanatique de l’inverse. Il avait déjà mis un petit grain d’idée dans le Loup Blanc, c’était une petite victoire en soi.

« Sire Léopold aura toujours le soutien du Graf et de l’Ar-Ulric s’il le demande. Et il le demande souvent. Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi en échange il montre aussi peu de respect envers sire Boris.
Quand vous le verrez, j’espère que vous saurez le convaincre de modérer sa position. Vous êtes un enfant de Middenheim, après tout, comme moi. »

Richter souffla du nez quand Diederick montra bien toute sa souffrance et son impossibilité à jouer.
Mais d’un coup, l’arrogant jeune homme fut fort surpris, quand on lui parla d’un autre jeu, et surtout, qu’on lui proposait de jouer avec des enfants.

« Heu… O-oui, sans doute ? »

Le garçon semblait un peu déstabilisé. C’était comme si, en un instant, tout son fiel et toute sa médisance avaient été expulsés de son corps. Alors, Diederick alla chercher son garçon, qui avait été si impressionné et si peureux dans l’église. Avec beaucoup de précautions, petit Hansel arriva, et, quand on lui demanda, il tendit sa main pour serrer la main de « monsieur Richter » — qu’il corrigea aussitôt, en autorisant le petit garçon à simplement l’appeler, « Richter », et à le tutoyer plutôt que le vouvoyer.

Ainsi, Richter, Diederick et Hansel commencèrent un nouveau jeu. Le frère d’Ulricht farfouilla dans les étagères du bar, avant d’aller demander à la taulière Petra Schmidt s’il pouvait emprunter des cartes. Les jeux Impériaux évidemment n’avaient rien à voir avec ceux du Cathay, mais tant pis, Diederick improviserait comme il pouvait.

Ainsi, pendant une bonne heure et demi, tout en mangeant à côté, les trois jouèrent — Diederick d’un côté, Richter assisté de Hansel de l’autre. Le petit garçon semblait reprendre des couleurs, parce que debout sur le banc, il s’autorisait à prendre les pièces et à donner très fort et à voix haute dans son petit reikspiel mal maîtrisé des « conseils » pour gagner.

Peu importe le vainqueur. Richter se prit à sourire, et à faire ami-ami avec le môme, en se mettant même à poser avec beaucoup de curiosité des questions sur le Cathay.
Comme quoi, contrairement à ce qu’il disait, on pouvait passer du bon moment en famille sans avoir à faire semblant.


Très mal entamée, la journée se termina donc étonnamment bien, et ce n’était pas en petite partie grâce à Diederick. Plus de heurts, plus d’engueulades — on se prit à sourire et à rire, de façon courte, mais bien présente.
Au bout d’un moment, tout le monde se réunit pour le dessert, et alors qu’on échangeait parts de forêts-noires (Que Hansel et Tiana réclamèrent en doubles-portions), tasses de cafés et verres de digestifs, une sorte de rituel un peu triste se déroula.

Richter se leva de table, et commença à raconter une anecdote sur Ulricht.

C’était une histoire un peu à la con. Il se souvenait d’une fois où les deux avaient dévalé le Salz en kayak, et qu’Ulricht, trop idiot et irréfléchi, avait fini par faire se retourner l’embarcation. Il y avait une pointe de colère dans son rire, mais tout le monde eut un sourire poli.
Alors, Marfa en fit de même, en expliquant comment son frère avait été le premier homme avec qui elle avait dansé une valse.

Et ainsi, tout le monde partagea son souvenir du défunt, avant que tout le monde se mette à regarder Diederick.

Qu’allaient-ils lui demander ?

Comment était-il mort ? Est-ce qu’il avait souffert ? A-t-il eu des dernières volontés ?

La main de la maman d’Ulricht se posa sur celle de Diederick.

« Mais du coup…
…Après tout ce temps, il a enfin appris à faire du kayak ou pas ? »

Le soir venu, Diederick avait eu le temps d’écrire une lettre pour Léopold, qui serait envoyée avec le convoi de vivres et d’argent pour l’aider.

Puis, deux jours passèrent, où Diederick continua sa convalescence. Il eut le luxe d’un peu sortir dehors, de se promener dans les Jardins Royaux… Mais il était encore très faible, et passait surtout beaucoup de temps alité. Ne supportant pas de voir son mari dans un état semi-végétatif, en revanche, Gao Li décida de vertement l’engueuler et le força à faire quelque chose — puisque son corps était faible, il n’avait qu’à travailler son esprit. Ainsi, elle alla emprunter des volumes de bouquins qui lui semblaient intéressants ; elle n’était pas une femme d’une grande culture, plus militaire qu’érudite, mais elle était très sensible à l’intelligence de son époux, et veillait bien à ce qu’il continue de la travailler. Gao Li prenait souvent dans leur mariage le rôle d’une marâtre autoritaire, mais bizarrement, ça ne faisait que renforcer l’amour que le sire éprouvait pour elle — chacune de ses engueulades avait pour but de le forcer à se dépasser et à s’améliorer, et elle semblait avoir entièrement lié sa vie à la sienne.

Pendant ce temps, Diederick demanda tout de même une faveur à la famille d’Ulricht, qu’ils n’étaient pas en mesure de refuser — il voulait qu’un artiste commande un fusain de tout le monde. Le père d’Ulricht promit d’organiser ça et de réunir tout le monde pour une séance avant le départ de Diederick, quand il serait assez en forme.

Il y eut un jour, où, tout de même, celui-ci ainsi que son épouse, prirent Diederick en traître. Seul dans son lit, ils arrivèrent tout deux pour poser des questions plus personnelles, et rien que pour eux, au sujet de leur fils décédé. Ils voulaient savoir toutes les choses dures à entendre. C’est-à-dire, la manière avec laquelle Ulricht avait quitté ce monde, et si Diederick avait quoi que ce soit à en dire…




Le 1er Sommerzeit, un Aubentag, Diederick fut enfin bien assez en forme pour marcher et retrouver une voix normale. Il toussait encore beaucoup, mais il n’avait plus l’horrible sifflement dans ses poumons. Les cristaux qu’un médecin lui avait fait boire et les inhalations répétées d’herbes que conseillait son épouse semblaient l’avoir définitivement sorti du trépas. S’il marchait à présent avec une canne, au moins il marchait.
Il se sentait même assez en forme pour demander à ce qu’on recontacte Josef Sparsam, et qu’on organise un dîner où lui et son épouse pourraient voir maître Boris. Mais évidemment, hors de question de se jeter dans la gueule du grand loup de l’Empire sans préparer un peu le terrain. Sa tante proposa donc de venir le voir pour le thé.

Il était quatre heures tapantes de l’après-midi, l’heure du goûter, quand Anna von Bildhofen se présenta dans un des salons de l’hôtel particulier des von Bildhofen — chez elle, en fait, mais elle traitait si bien Diederick qu’il s’en sentait chez lui. Bien habillé et bien propre, la barbe taillée et les cheveux peignés, Diederick s’y présenta à l’heure. Tatie Anna vint lui prendre les mains et commença par quelques politesses.

« Mon neveu. Comment vas-tu ? Ton épouse a dit que tu te remettais bien, c’est parfait.
Au mont d’Ulric, en ville, il y a un établissement, le Begierbaden… C’est un lieu de cures thermales, qui attire beaucoup de monde. De très nombreuses femmes de l’aristocratie s’y rendent, mais n’écoute pas les vilains qui disent que c’est réservé aux dames — ça guérit presque tous les maux. Avec tes difficultés à respirer, je pense que ça libérerait bien tes bronches. Nous nous y rendrons avant ton départ. »


Parfait, c’était décidé. On ne disait jamais « non » à la plus vieille des von Bildhofen, de toute façon. Son œil borgne et ses cicatrices rappelaient qu’avant d’être une gentille mamie attachante, elle était une violente mercenaire tueuse de chevaliers Bretonniens.

Dans tous les cas, elle s’assit sur un grand fauteuil. Une domestique amena un service à thé bouillant et des petits biscuits, puis laissa les deux seuls.

« Des années que tu n’es plus dans l’Empire… Tu dois avoir des dizaines de questions.
Je t’ai proposé ce rendez-vous ensemble, car je sais que ce soir tu rencontreras le Graf, puis bientôt ton frère — les deux hommes sont de puissants Électeurs de notre pays, et de fidèles alliés, et en même temps, il y a énormément de tensions entre eux.
Je suis très informée de tout ce qui se passe dans notre nation, et même au-delà d’ailleurs, je sais ce qui se passe dans les autres pays du Vieux Monde. Alors n’hésite pas à me harceler de tout ce que tu souhaites savoir : l’information est tout, pour les gens comme nous. »



Reroll de trois jets de charisme, mais cette fois avec bonus de +3, parce qu’en fait tu as très bien géré les trois situations :orque:
7, 5, 6 → Done.


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Diederick von Bildhofen
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par Diederick von Bildhofen »

Le ton peiné, les traits visiblement chagrinés, Diederick abandonna l'affaire.

Je suis sincère..... lui souffla-t-il.

En écoutant sa cousine parler de ses études à Nuln, Diederick parvenait à se faire un tableau du paysage qu'elle décrivait. Des têtes remplies sans pour autant savoir quoi faire. Quelque chose d'assez commun avec les nouveaux lettrés issus des concours. Nombre d'entre eux, après leur examen réussi avec succès, déchantaient en étant confrontés au manque de crédits de leur position, et les réalités du terrain auxquelles ils n'avaient pas été préparés par l'étude des textes classiques, les clientélismes locaux et ainsi de suite. Il fallait des mois ou des années à la plupart d'entre eux pour se faire à la réalité pratique du fonctionnaire de comté. Surtout qu'aucun mandarin n'était déployé dans sa province d'origine une fois l'examen passé. Hochant de la tête pour signifier à Marta de poursuivre, non sans une certaine fierté à l’idée que malgré la débauche de moyens du sud, le collegium ne se débrouille pas si mal. Par contre, lorsqu'elle évoqua ces ''millénaristes'', il ne sut par quel bout de la lorgnette prendre sa révélation. Il eut beau se creuser le crâne, cela ne lui disait absolument rien.

Constatant ses lacunes en la matière, Marta fut assez urbaine pour lui expliquer l'affaire. Concrètement, il s'agissait de la nouvelle génération de bureaucrates, officiers et autres jeunes diplômés, eux aussi désireux de changer le monde. À ceci près qu'eux semblaient plus radicaux, organisés et déterminés que leurs anciens. Ils semblaient avoir un corpus, une doctrine.
Et il ne savait trop par quel bout de la lorgnette les prendre. D'un côté leurs idéaux étaient... Eh bien idéalistes. Et de l'autre terriblement dangereux, pour eux, l'ordre social et pour ce qu'il représentait.
La séparation de la loi et des religions ? La belle affaire, quand la plupart des conflits dans les campagnes se réglaient en ayant recours avec le prêtre du coin. L'abandon des privilèges de la noblesse... Là il pouvait sympathiser. La limitation des privilèges nobliaux, ou du moins les politiques impériales menées en Cathay dans cette direction, avaient un certain mérite, au vu du passif et du passé de celle ci. En cela, l'absolutisme de l'empereur et de l'intendant suprême étaient bien utiles. Peu de faides et guerres privées venant foutre le feu à des comtés entiers. Et de plus grandes rentrées fiscales. La distribution de la propriété entre tous.... L'idée lui faisait grincer des dents. Sur le papier, cela était merveilleux. Dans la pratique... Il y avait eut des politiques similaires menées par des intendants suprêmes, par le passé au Cathay. Le partage du neuf, un carré de neuf parties avec celle au centre pour le gouvernement... Mais cette mesure devait être reconduite chaque décennie par un pouvoir fort réprimant avec violence les notables de province, qui avaient achetés les terres par les aléas climatiques et économiques. Au final elle avait été abandonnée. Toute réforme agraire était un dangereux exercice de balance demandant une grande attention au jour le jour, dans un cadre précis, avant d'être généralisée. Car sinon on courait droit à la catastrophe et aux troubles civils. Quand à la fin de l'inégalité.... Difficile. Très difficile. Toute inégalité provient de la richesse, en général. Et son abolition était ridicule. Non, si ces idéalistes souhaitaient lutter contre les inégalités, ils devaient s'emparer de la question par la base : l'alphabétisation des masses. Car sans celle ci, c'était tout un pan de la culture, du savoir, qui était détenu entre les mains de quelques uns. Et le savoir, la culture, était l'une des rares armes immatérielles pouvant être maniée par les faibles contre le forts. Dans une certaine mesure. Une sorte d'égalisateur partiel....
Mais il semblait, heureusement, que pour le moment, ces jeunes gens, menaient des activités philanthropiques relativement innocentes. Culture. Journaux. Charité. Pas de quoi casser trois pattes à un canard. On était loin des terribles sociétés secrètes nécessitant une répression brutale et sanglante. Pour le moment ?

''Mais qu'on les mette dans des positions d'autorité et alors il conviendrait que ceux ci fassent bien la distinction entre leur devoir, ce qui est attendu d'eux, et leurs idées. Car sinon gard....''

Mais au-delà de tout ça, Diederick était heureux que Marta ne se laisse entraîner pleinement dans tout cela. Elle gardait la tête sur les épaules, que ce soit en relevant la bipolarité entre sa propre condition et les idéaux du mouvement. Ou le fait que les campagnes étaient une question insurmontable.

Un sourire sympathique, il révéla à sa cousine une partie de sa pensée. Prenant le soin de s'exprimer avec des mots choisis et lentement, afin qu'elle puisse suivre avec aisance le raisonnement, ainsi que ses contradictions et angles morts, il lui révéla la chose.

La répartition de la richesse, est une bonne idée sur le papier... Mais dans les faits, c'est autre chose. Il faut le faire intelligemment. Ça a été tenté, durant des siècles au Cathay. La confiscation des grands domaines, pour les donner aux paysans sans terres. Et cinq à dix ans plus tard, les grand domaines étaient reconstitués. Car les paysans vendaient leur terre lors des mauvaises récoltes. Ou bien se faisaient ''presser'' par les gangs des notables, pour vendre leur terre. Ou bien les terres étaient achetées par des prêtes-noms, et leurs occupants réduits au statut de tenants. Et chaque fois que l’État impérial procédait à un nouveau découpage des terres, il engendrait une réponse violente des élites locales ; sabotages, corruption, assassinats, rébellions, trahison avec l'étranger dans certains cas....

Il fit une pause pour reprendre son souffle et se servir une nouvelle gorgée de sa tisane.

Et ça n'est qu'un exemple parmi d'autres. En bref. Ces jeunes gens sont dotés de belles intentions. Mais avant de lancer de grandes réformes dans un élan de vertu... Ont ils prit le temps d'analyser comment celles ci vont impacter la majorité ? Comment seront elles combattues par l'opposition qu'elles vont provoquer ? Détournées ? Et la majorité de ceux qu'elles vont toucher... Est elle elle même consciente de leur nécessité ?

Et avant qu'elle ne puisse l'accuser, il leva la main pour se défendre, un triste sourire aux lèvres.

Je sais, je suis un vieux cynique déjà à mon âge lui dit elle, les yeux pétillants. Mais si ces millénaristes parlent aussi bien par le cœur que par la tête, alors ils pourraient avoir quelque chose d'intéressant dans les mains... car après tout, une idée ne brille que plus fort à mesure que le métal la faisant est, raffiné, travaillé, sculpté.

Et de lui proposer de trinquer aux rêves et ambitions de la jeunesse. Et aux métaphores métallurgiques, puisque ces dernières semblaient tirer de sa cousine quelque morceau de bonheur.



Hochant de la tête tristement à Arnulf, Diederick fut heureux de constater que celui ci n'était pas imperméable à son argument. Il l'avait correctement jugé. Une discussion de middenlandais à middenlandais, où l'un et l'autre se rentraient dedans jusqu'à ce qu'une résistance soit percutée, signifiant de part et d'autre que l’interlocuteur n'était pas une petite chose frêle.
Par contre il eut à hausser du sourcil à un moment. Le Middenland unit pour toujours à Middenheim ? C'était un peu gros. Les deux allaient certes de pair, ensemble, mais de lier l'un à l'autre de manière... Subordonnée ? C'était exagéré. Mais au moins le solide templier se montrait circonspect vis à vis de Léopold.

''Et puis dans le pire des cas, Léopold s'entoure de sigmarites du Middenland et non pas de créatures et marionnettes d'Altdorf. Sigmarites oui, mais les nôtres. Le reste, dehors.''

Et Diederick de changer de sujet en l'interrogeant sur les stries qu'il avait au niveau cheveux. Et de là échanger quelques anecdotes. Lui même n'était pas dépourvu de récits sur le sujet, ayant échangé du bon acier impérial contre du sang elfe, pirate et mariebourgeois. Et de récolter des preuves de leur estime, à l'épaule et aux cottes et derrière la tête.



Diederick et Hansel passèrent un moment bien plus agréable avec Richter. Le paternel essayant même de corriger, le sourire au lèvres, son petit, en lui signifiant que Richter n'était pas un ''herr'' mais un ''tonton'', ou ''oncle''.

Tous les trois ils improvisèrent un imitation du jeu cathayen dont il avait expliqué les règles à Richter, s'aidant à l'aide d'un plateau de jeu improvisé, de cartes d'amateur marquée à l'encre sur lesquelles des équivalents impériaux maladroits aux titres cathayens étaient inscrits, et des jetons remplacés par des pièces de cuivre. Et tous les trois de participer à plusieurs parties du jeu, Hansel parvenant même à remporter une partie. Il fallait dire que le petit connaissait déjà le jeu. Lors des jours chômés, les enfants tout autant que les parents, reposés et de bonne humeur, passaient des soirées entières au jeu. Celui ci ou un autre.

Et Richter, par moment, de montrer un intérêt sincère pour la partie, les discussions ou le petit Hansel, l'interrogeant sur sa vie et le Cathay. Ce qu'il souhaitait faire quand il deviendrait grand – mandarin ''comme papa'', amiral ''comme mes oncles'', ''capitaine comme maman'' et, le dernier en date, chevalier, ''comme les messieurs avec les fourrures de loups'' – ou bien les pâtisseries qu'il avait en Extrême Orient.

Puis vint, à un moment, le temps de quitter le plateau de jeu. Le dessert allait être servit. Chacun retourna à table, Diederick et Hansel venant retrouver Gao Li et Tian Yi ainsi que Marta à leur table. Et l'on ne fut pas déçu. Leurs hôtes servirent à chacun une part de Drakwald, un gâteau de crème et de cette épice rare et exotique qu'était le chocolat. Toujours un peu affaiblit, et son estomac rapiécé depuis le débarquement, Diederick eut le malheur de rapidement caler, devant alterner pauses, eau chaude et nouvelle bouchée de gâteau. Mais trop était définitivement trop. ''La gourmandise, ça commence quand on a plus faim'', disait le proverbe halfling. Et lui était définitivement bourré, aussi se débarrassa-t-il de sa part. Et une cuiller à Gao Li, lui valant un gentil baiser sur la joue et une grosse pour Tian Yi, et une autre grosse pour Hansel.... Et le reste survivant, ce quarteron de gâteau, fut englouti dans un dernier effort, l'envoyant à moitié dans les vapes.

Ce ne fut que lorsqu'un café fut déposé sous son nez qu'il ne sorti de son état de mi sommeil, l'odeur des graines moulues et mélangées à l'eau le réveillant pour de bon de sa somnolence digestive. Et bien lui en prit car les invités dans la salle débutèrent alors cette funeste tradition... celle où tout un chacun racontait une anecdote sur le défunt. Et bien sûr Richter eut à parler de ce foutu kayak.

Et lorsque son tour vint, il s'attendait au pire. Que raconter sur Ulricht ? Qu'allait on lui demander ?
Finalement ce fut la mère du défunt qui délivra la sentence. Bien sûr que ça allait être à propos de ce foutu kayak avec lequel Ulricht avait toujours refusé de le lâcher.

Se levant.... Pour aussitôt tituber, rattrapé par Gao Li, il s'appuya sur l'épaule solide de son épouse pour rester debout, avant de raconter l'histoire.
Faisant de son mieux pour ne pas que sa voix flanche, il essaya de parler dans un timbre haut, afin de se faire entendre de toute l'assistance.

Lorsque l'on a relâchés à Sudenland... On a fait les cons. Pas de cheval ? On a montés des ânes, pour montrer les bons cavaliers qu'on était. Pour aussitôt retomber sur les fesses. Le kayak ? Il avait réussi à le faire embarquer depuis Neues Emskrank. Et on en a donc fait dans la rade. Puis la mer, malgré les vagues. Jusqu'à ce qu'on se fasse surprendre par le grain.

Ouille. Sa voix commençait à tirer. Il toussa deux fois bien lourdement, avant de se passer un mouchoir devant la bouche pour y cracher discrètement le mollard du moment et de reprendre le récit, malgré sa tempe qui semblait vouloir jouer du tambour.

Et qu'on pagaye comme des possédés pour faire demi tour. Puis les grosses lames sont arrivées avec la pluie, et le vent. Jusque là paniqués, on a cru qu'on allait nager avec Manann ce soir ci. Et effectivement il y a eu un festin chez lui plus tard. Arrivés dans la rade, on s'est échoués à toute vitesse sur la plage. Et aussitôt que l'on a touché terre, on s'est mangé un rouleau... On a rien comprit. On était comme des poupées jetées par la fenêtre. Le kayak en morceau, et nous les vêtements pleins d'eau salée et de sable. La pire tempête de Sudenbourg sur vingt ans. On a dîné avec Ranald, et gagnés. Jusqu'à ce qu'on touche la terre ferme, termina-t-il avec un sourire triste. Donc je pense qu'on peut dire oui, finit il en s'adressant à Hildegarde en particulier.


Lettre :

Mon cher frère Léopold.

C'est moi, Diederick Maria Reichenbach Bruno – dieux que mon nom entier prend de la place sur le papier – von Bildhofen qui t'écrit.
En cette belle journée du Festag 32 Sigmarzeit 2511, je t'écrit pour t'apprendre que suis en vie. Je suis en vie et suis rentré au pays, après treize années d'absence. Et je suis désolé que tu ne reçoives de nouvelles de ma part qu'après tout ce temps – à moins qu'un de mes courriers depuis le Cathay te soit parvenu par chance – depuis mon débarquement au port de Neues Emskrank. Il faut dire que j'étais alors mourant. La faute à une blessure durant un abordage, et une raclure de fond de latrines en l’existence d'une vermine de longues oreilles esclavagiste trop brave pour son propre bien. J'ai senti le souffle de Mórr sur sa nuque. Mais étant trop têtu, même pour lui, celui ci me refusant l'entrée de sa demeure. Ça et le fait que les locaux reconnaissent ma chevalière après m'avoir délesté de la plupart de mon bagage. Y compris les quelques plants de thé que j'avais ramené à grand peine. Et donc ai-je été trimballé sur les routes jusqu'à Middenheim où nos cousins m'ont offert gîte et couvert jusqu'à ce que mon corps bien têtu fasse un enfin un pas non pas vers la tombe mais la vie, Shallya soit louée. J'ai cessé de porter ce rictus trop similaire à celui de ce vieux Mórr pour enfin reprendre des couleurs.
J'ai hâte de rattraper tout le temps perdu avec toi. Ainsi que Siegfried et mère. Ce sera l'occasion de te présenter ma famille. Et oui, en treize ans j'ai trouvé le temps de me marier. Ta belle sœur est la belle et forte Gao Li Maria von Bildhofen, et tu as deux adorables neveux, Tian Yi Tiana et Han Lei Hansel von Bildhofen, mes deux jumeaux de quatre ans. Prochainement, un fusain de toute la famille te sera envoyé. J'espère que ça te donnera du baume au cœur pour crever ce furoncle à Kastof avant qu'il n'éclate et n'éclabousse le reste du coin. Richter – le fils d'Ulricht et Hildegarde – celui qui fait des mines vers Salzenmund, m'a parlé de cette triste affaire. Un jeune homme intelligent et industrieux. Il a eut de bons professeurs.
Que dire d'autre ? En vérité, ces dernières années, j'ai surtout flâné au Cathay. J'y ait vécu comme traducteur, secrétaire, comptable et intendant pour nos compatriotes corsaires au service de l'empereur du Cathay. Les mers sont riches en butin, mais certains se battent comme des loups. J'ai acquis de belles cicatrices. Et je me suis aussi fait un beau tatouage dans le dos aussi. Je te le montrerai. C'est du bel ouvrage.
J'ai décidé de ne revenir que cette année pour plusieurs raisons. La première était que mes enfants avaient assez grandis pour participer à pareil voyage. La deuxième était que le shaman que je consultais chaque année depuis mon arrivée m'a, cette fois ci, garanti que je ne périrais pas durant le trajet. Et non, il est aussi fiable qu'un astromancien. Enfin, tout simplement, il y avait une expédition diplomatico-commerciale dans les cartons. Joindre la flotte était plus sûr que de revenir dans l'empire avec un unique navire. Normalement l'ambassadeur du Cathay et sa suite devraient avoir atteints Altdorf.

Je reviens donc du Cathay avec un bagage bien réduit, ma famille, et quelques idées que j'ai obtenu au Cathay, dont dont nous pourrons parler, face à face, lorsque nous nous retrouverons.

J'ai hâte de te revoir pour rattraper le temps perdu avec toi. Et Siegfried et mère.

Portes toi bien

Ton frère, Diederick

P.S. : je n'ait appris que plus tôt dans la journée à propos de père. Je suis désolé de ne pas avoir été à tes côtés lors de cette épreuve. Je sais. C'est bien trop tard. Mais mon sentiment est sincère.



Le lendemain, drogué à coup de tisanes à la menthe et au miel, Diederick voyait son corps se réparer. Mandred, comme à son habitude depuis qu'il avait mi pieds à terre, se lovait entre lui et son épouse, pour profiter de leur chaleur corporelle. Il fallait dire que la pauvre bestiole était habituée à un climat bien différent. Le tueur de rat se mettait ensuite sur lui au petit matin, ronronnant, le forçant à se réveiller pour lui faire des papouilles.
Lorsque la force de ses bras lui revenait, il avait ensuite à se tourner vers le bord du lit pour se livrer à l'habituel exercice. S'approcher du pot du chambre. L'habituelle toux grasse du petit matin être éjectée dans celui ci. Puis prendre un bain d'eau terriblement chaude, afin de se débarrasser de l'odeur de sueurs de la nuit et se revigorer quelque peu. Se sécher. Être aidé par Gao Li pour s'habiller. Être escorté jusqu'à la table du petit déjeuner. Essayer de donner une apparence présentable aux enfants à table. Et donner au plus grand tueur de rats son festin, obtenant en échange davantage de ronronnements.
Puis retour à la chambre pour sommeiller à moitié endormi jusqu'au repas du midi. Promenade courte dans le jardin royal. Sieste sur le balcon en plein soleil, une couverture sur les genoux. Ou bien au coin du feu. Par moment les enfants venaient jouer autour de lui, mais ils passaient surtout la plupart de leur temps à découvrir les environs et tout ce que leur esprit pouvait déployer de curiosité face à la nouveauté.

Mais deux jours à ce régime là, et sa moitié lui tira l'oreille pour qu'il cesse de se laisser végéter ainsi, craignant sans doute qu'il prenne racine dans le lit.
Forcé à rester éveillé, chaque jour suivant elle lui amenait des ouvrages picorés dans la bibliothèque familiale. Couverture intrigante, dessins intéressants, ou simplement en s'aidant de quelqu'un pour sélectionner le ouvrages en se renseignant sur leur contenu, elle venait ensuite avec ses piles d'ouvrages pour qu'il les lise et affûte son intellect. Et pour se venger, il lui lisait les morceaux intéressants uniquement après lui avoir fait réviser les fondamentaux de l'étiquette impériale. Il avait à l'origine prévu de faire cela à mesure qu'ils progresseraient sur la route en diligence, afin qu'ils puissent tous pratiquer cela le long du trajet. Las, son état avait envoyé baladé le plan, et il fallut travailler le sujet à partir de leurs connaissances mutuelles de l'étiquette cathayenne.
Puis il y avait les lettres. L'alphabet cathayen comprenait des dizaines de milliers de caractères et ceux ci devaient être appris si un individu souhaitait passer les examens impériaux. Le reste des sujets sachant lire n'apprenaient qu'une fraction de ces caractères. Et Gao Li, heureusement pour elle, n'avait pour apprendre le reikspeil qu'à retenir moins d'une trentaine de lettres.

Alors qu'il était en train de lire l'ouvrage ''Histoire de l'Empire'' par l'exubérant maître Halstrum de Nuln, il éclata de rire. Rire qui se conclut sur une toux sèche.

Les yeux pétillants, il sourit à sa moitié qui avait cessée son travail pour le regarder avec inquiétude.

J'ai trouvé Mandred, se contenta-t-il de lui dire, en lui montrant la page concernée. Et devant son regard interrogatif, il la fit s’asseoir à côté de lui.

Regarde. C'est le chapitre sur le fameux tueur de rats. Comme notre Mandred à nous. Mandred von Zelt de Middenheim. Il y a mille ans, il combattu....

Et d'autres moments amusants de l'histoire impériale ou passages détenant quelque anecdote intéressante à raconter qu'il partagea avec elle et les enfants. Surtout ceux concernant le pauvre Mandred, baladé par ceux ci dans leurs bras quand ils changeaient d'endroit pour jouer. Ou quand Tian Yi ne lui faisait pas ses poils avec le peigne.



Un jour où il eut à passer la journée au lit à cause d'un vilain froid, il fut prit en traître par Ulricht et Hildegarde. Ceux ci venaient pour lui tirer du nez les détails sur... la fin de leur fils.

Las, Diederick n'avait pas grand chose à dire sur le sujet. Reprenant l'histoire à propos du kayak, il leur conta la suite de celle ci. Se réfugiant dans une taverne bien au chaud à l'abri de la tempête, ils y passèrent la soirée jusqu'au petit matin plutôt qu'à essayer de rejoindre leurs navires. Mais au petit matin, peu avant le lever du soleil, les cloches de la cité portuaire se mirent à sonner en continu, alertant d'une attaque. Armes à la main, lui même et Ulricht s'étaient élancés au sortir de la taverne en compagnie d'autres marins et locaux. Malgré la tempête, le son des combats semblait provenir d'une des portes de la cité. Celle ci semblait prise d'assaut.
Mais alors qu'ils progressaient péniblement à contre vent en direction des combats, l'attaquant lança par-delà les murailles ce qu'ils prirent dans un premier temps comme étant des cadavres. La plupart se brisèrent à l'impact. Mais abasourdis par l'horreur des tactiques de l'ennemi, ils ne purent, dans la pluie et l'obscurité, comprendre que certains des corps s'animaient. La mêlée qui s'ensuivit fut cauchemardesque. Les hommes agitaient leurs armes sous le torrent de pluie, sans aucune technique ou finesse, brutalement, animés par une fureur animale. Mais heureusement, les corps déjà abîmés ne faisaient pas de grands adversaires, aisément pourfendus, coupés, décapités, morcelés et détruits dans un déluge de violence.
Ce ne fut que lorsque le combat se termina que Diederick observa que Ulricht avait été blessé au ventre. Un squelette manchot lui avait percé celui ci avec l'os de son bras brisé.
Remarquant sa blessure, la soif de sang du combat dissipée, c'est à ce moment là qu'Ulricht faiblit. Aidé par Diederick, il fut assis contre un mur. Son corps chaud devint glacial, alors qu'il était en train d'agoniser. Il prononça quelques mots à son cousin avec que son visage n'affiche un rictus trop similaire à celui de ce vieux Mórr. Il n'y avait rien à faire.

Je suis resté avec lui. Que tout irait bien. Je... Les larmes lui venaient aux yeux lorsqu'il se remémora ce moment douloureux. Lorsqu'il a arrêté de chuchoter. Je lui ait récité la comptine, dit il en regardant Hildegarde cette fois ci. Celle pour les cauchemars. Et de se moucher pour faire partir la morve qui venait envahir son nez, tandis que ses joues étaient arrosées par l'eau salée. Il.... Non... Je suis désolé... Je...

Il n'y arrivait pas. Il ne parvenait pas à le dire. Ça ne voulait pas sortir. Par Shallya, il était horrible.

Ses derniers... Il appelait.... C'était... Maman.

Il ne pouvait regarder Hildegarde dans les yeux. Il avait honte. Il voulait qu'un trou s'ouvre sous son lit et qu'il se fasse engloutir par la terre, afin qu'il n'ait pas à la voir, les voir, qu'il se cachee de leur regard jugeur, moralisateur, rancunier. Les pires craintes le traversaient. Il se laissa s'afaiser contre son oreiller, attendant l'inéluctable diatribe de reproches que ses parents, les parents d'Ulricht, allaient lui donner. Ses pires craintes laissaient courir libre la partie irationnelle de son esprit alors qu'il ne réussissait pas à arrêter de sangloter, de se sentir misérable, jusqu'à ce que....



Après plusieurs jours de convalescence, Diederick avait assez recouvert de sa santé pour que le poids qui pesait sur sa poitrine chaque fois qu'il respirait durant un effort se dissipe. Et même si ses guibolles n'étaient plus aussi puissantes qu'auparavant, il pouvait à nouveau marcher, sans à avoir à s'accrocher au coude d'une aide. Il avait juste à s'aider d'une canne. Il réussissait même à monter les escaliers sans menacer de se briser la nuque à tout moment. Les espèces de cristaux étranges du physiciens semblaient avoir fait leur effet, même s'il accordait davantage son rétablissement aux inhalations de son épouse.
À l'issue de chacune d'entre elles, il lui était plus aisé de tousser, cracher, se moucher, expulser les mauvaises humeurs par la gorge. Et le tambour qui lui frappait sur le crâne se dissipait davantage.

Au point que l'invitation du Toddbringer pouvait à nouveau être considérée sous un jour favorable.

Évidement, celle ci ne serait acceptée qu'après avoir minutieusement préparée le terrain. L'absence d'éclaireur en ces affaires là précédait trop souvent le désastre.

Aussi fut-ce de prime abord une bonne surprise que tatie Anna l'invite à prendre le thé avec elle pour préparer la chose.

Hochant de la tête aux diverses remarques de tatie Anna, Diederick ne pouvait qu'agréer à celles ci. Non pas parce que les suggestions de la matriarche revêtaient un caractère impératif, mais par ce qu'il était tout à fait d'accord avec celles ci.

Avec plaisir, lui répondit il en se fendant d'un sourire sincère. Maria et les enfants apprécieront d'y passer un moment.

Mais hélas, les instants à prendre le thé avec gâteaux prirent une tournure bien moins agréable lorsqu'Anna entreprit de le mettre au courant de tout ce qu'il avait manqué.

Ne devrions nous pas attendre que mon épouse arrive ? Cela la concerne aussi. Et de réaliser, au regard d'Anna, que quelque chose clochait. Affutant son regard, il observa avec suspicion sa tante. Confirmé lorsqu'elle lui admit préferer ne pas en parler avec elle. Car elle ne lui faisait pas confiance. Aussi simple que ça.

Diederick et Maria avaient noués, dès le début de leur mariage, un solide lien de confiance, allant au-delà des serments échangés. Ils s'aimaient passionnément et chaque fois que les décisions de l'un pouvait entraîner des conséquences sur leur ménage, ils discutaient solidement celles ci. C'était d'ailleurs à l'issue de l'un de ces conciliabules qu'ils avaient fait le choix de voyager vers l'Empire de Sigmar, malgré les risques associés.
Et que tatie Anna lui suggère qu'elle ne puisse faire guère confiance à Gao Li... Dire qu'il fut déçu eut été présenter les choses de manière légère. Son visage souriant se fendit d'un horrible rictus, et la main qui tenait sa tasse renversa une partie de l'eau encore semi-bouillante sur le sol, alors qu'il fit mine de se lever.

Diederick fut, dans un premier temps, tenté d'argumenter et se disputer avec sa tante. D'introduire de force son épouse, imposant ainsi un ultimatum à Anna. De se lever et claquer la porte au nez de sa tante pour oser suggérer une chose pareille.
Puis la partie rationnelle de son cerveau chercha des excuses à Anna. Après tout, elle ne connaissait pas Gao Li. Celle ci était une étrangère, quand bien même elle lui avait donné deux adorables enfants. Elle maniait encore son reikspeil avec difficulté. Et ainsi de suite.

Se rasseyant, l'expatrié se pinça l'arrête du nez avant de péniblement soupirer, expulsant au passage la colère qui s'était emparée de lui sur le moment.

Il pouvait comprendre d'où venait Anna. Mais cela n'enlevait en rien la douleur qu'il avait dans la poitrine. Qu'il allait discuter de choses les concernant eux et les enfants, sans qu'elle soit dans les lieux. Était-ce là une trahison ? Non. Une désagréable contingence familiale. Et puis de toute façon, une fois cette discussion terminée, il irait immédiatement s'excuser auprès de son épouse pour ne pas avoir insisté davantage, et de lui communiquer ensuite tout ce dont ils avaient parlés.

Tante Anna.

Ça commençait mal. Il n'était pas parvenu à complètement effacer cette pointe de déception qu'il ressentait. Celle ci était aisée à détecter dans sa voix, ainsi que son expression.

J'ai une entière confiance en Maria. Et celle ci est mutuelle, totale. Nous n'avons aucun secret l'un pour l'autre. J'espère qu'à l'avenir tu pourras constater que cette confiance est méritée. Fiable. Et que tu pourras t'ouvrir à elle comme à moi.

Sur cette note attristée, Diederick soupira à nouveau, tournant son visage vers la fenêtre. Observant les rayons du soleil passant à travers le verre, il se remémorait les moments douloureux qu'ils partagèrent l'un avec l'autre avant de se marier. Les rêves et espoirs brisés par la brique de la réalité venant s'écraser sur la forêt noire de leurs vies. Les déceptions, trahisons, et victoires qu'ils avaient eut avant de se rencontrer.
Une larme lui vint à l’œil en se remémorant certaines histoires. Dieux que la vie était une peau de vache.

Ce qui dura peut être une minute à siroter du thé en silence fut enfin brisé lorsque l'expatrié s'extirpa de son océan de mélancolie, pour retourner aux affaires.

Bon. Le rendez vous avec Todbringer. Il va sans dire que moi même et Maria pourrions avoir besoin de revoir notre étiquette. J'ai essayé de m'y remettre ces derniers jours avec elle mais... Revoir les fondamentaux une dernière fois serait bienvenu. Celle de Cathay est bien différente. Et je n'ai pas eut de nombreuses occasions de pratiquer la manière impériale depuis mon débarquement. Un petit toussotement le prit, avant qu'il ne fasse couler à nouveau une gorgée de thé au miel dans sa gorge.

Ah.... Le graf va sans doute essayer d'obtenir de moi des engagements et promesses me mettant en porte à faux avec Léopold, les habituels jeux de pouvoirs quoi. À moins que son invitation soit purement courtoise et vise à satisfaire sa curiosité, lui dit il avec un sourire entendu.

Prenant le temps de réfléchir à ce dont il se souvenait des jeux de pouvoir entre les provinces impériales Diederick trouva un angle pour attaquer le sujet.

Concrètement, que veux le Graf ? Quelle sont ses ambitions, publiques, et privées, quels sont ses moyens, et où figure Léopold dans tout cela ? Et vice versa. Les deux sont alliés mais leur cohésion, leur... coordination ? Semble laisser à désirer. Les contentieux sont ils sérieux, ou bien une suite d'incidents attaquant leur patience, tolérance ? Ou alors c'est juste un bête histoire d'egos froissés ? Ou un mélange du tout ?

Hochant de la tête à mesure qu'elle développait sur le sujet, Diederick demanda des précisions, par ci par là, livrant une remarque ou non à mesure qu'il en apprenait davantage avant de passer à la suite.
Et en particulier le sujet de la bâtarde du Graf qui l'intriguait.

Du peu que j'en ait appris, celle ci est une vraie perle et un mariage permettrait de calmer le jeu. L'aîné de Léopold avait d'autres partis plus intéressant au Sud, sans que je n'ait un autre cousin auquel celle ci pourrait être mariée ? Ou bien y a-t-il des raisons plus... Personnelles, politiques, qui m'échappent ?

Il avait quelques soupçons sur les potentielles raisons pour lesquelles Léopold refuserait ce mariage en particulier, mais sans davantage de détails il allait rester dans le noir.

Quid du Reik ? Léopold semble passer plus de temps que nécessaire le long de celui ci. Et du culte de Sigmar ? L'affaire de Kastof avec ces troubles entre ulricains et sigmarites... Il y a en toujours eut, mais est ce que Kastof est l'arbre qui cache la forêt, ou bien est juste l'habituel bisbille qui a prit une tournure tragique ?

Et moins fort, de demander si l’Église de Sigmar d'Altdorf n'était elle pas en train – encore – de prépare quelque chose dessous les fagots. Empirant la situation exprès pour justifier de mettre ses gros doigts bien crasseux sur le bon Middenland.

Et Marienbourg dans tout ça ? À part leurs fromages, et l'inéluctable – et lointaine – réintégration de la province dans l'Empire ? Et leur commerce avec l'Extrême Orient ?

"Pourvu que leurs affaires avec le Nippon pâtissent de la piraterie. Moins pour eux et plus pour nous. Et peut être qu'un jour Cathay fera rentrer dans le giron impérial les daïmios méridionaux. Même si j'en doute. Tout comme je doute que tatie ait quoique ce soit à dire sur le sujet."
Le savoir c'est le pouvoir. Et savoir quand le garder, le cacher, le partager, cela est la véritable épreuve de ceux le détenant.

Diederick Maria Reichenbach Bruno "Ruichen" von Bildhofen, Voie de l'étude de la connaissance
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[MJ] La Fée Enchanteresse
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Refuser un ordre d’Anna von Bildhofen était suicidaire. Avec la mort de son père, Diederick aurait dû comprendre qu’elle était devenue, de fait, la matriarche de sa dynastie, la plus âgée, et donc la plus sage de toute la dynastie. Si elle n’avait pas de titres à son nom, sa place, son prestige, et sa prestance étaient sans rivaux — il n’y avait qu’à voir comment elle pouvait imposer son commandement sur tous ses proches avec un simple mot prononcé dans sa voix grave et grésillante.

Mais il insista pour que son épouse vienne avec lui pour le goûter. Dame Anna accepta, et accueillit dame Maria avec un sourire carnassier qui ressemblait plus à un rictus de hyène qu’un vrai sourire bienveillant — il ne savait pas encore comment, ni quand, mais l’injure qu’il venait de faire à sa tante serait payée, d’une manière ou d’une autre.


Mais qu’importe. Rapidement, en échangeant thé, café, et gâteaux, les questions se déroulèrent, tandis que Diederick se mettait à évoquer mille choses qui lui passaient par la tête, en attendant l’avis de la vénérable dame sur chacun de ses sujets. Et avec une droiture militaire et un ton froid, elle trouvait toujours presque instantanément de quoi rétorquer à tout ce qu’il abordait.

« Boris Todbringer n’est pas obsédé par les conventions et l’étiquette, il n’a pas de patience pour les flatteurs et les gens au ton mielleux. Mais il donne tout de même une grande importance au respect de son rang et de son titre.
Utilise le vouvoiement, parle-lui franchement, et appelle-le toujours « Votre Altesse », à moins qu’il ne t’autorise à être plus familier — il faudrait techniquement l’appeler Votre Altesse Illustrissime mais on ne va pas aller aussi loin.
Son épouse, Anika-Elise, lui ressemble sur ce point. Tu l’appelleras « Votre Excellence », parce qu’elle n’a pas de titre fieffé, mais bon, je suis sûre que dès qu’elle t’auras vu elle te demandera de l’appeler par son prénom et tu n’auras pas besoin de retenir la différence.
Je m’attends à ce que Todbringer et son épouse soient particulièrement accortes et accueillants avec toi. Pour cela que tu dois faire attention. Utiliser l’étiquette stricte te permettra de garder une distance avec eux. Bois avant eux, parle uniquement quand ils te laissent répondre, et initie des sujets quand ils sont silencieux. C’est mieux de paraître froid et distant que de faire l’amical alors que tu ne les connais pas.
Mais c’est qu’un conseil. »


Puis, des questions successives sur Todbringer s’enchaînèrent, qu’Anna instruisit d’une seule traite.

« Boris Todbringer a 57 ans, et il est une légende de l’Empire. Il a combattu de la Drakwald jusqu’à la Lynsk, contre les Bêtes, les Orques, les Norses et des créatures terribles des steppes glacées du Kislev. Il est adoré de ses soldats, il est vu comme un guerrier courageux, mais aussi un stratège redoutable. Il est un homme fort, à la vengeance terrible, mais aussi capable de pardonner. Il n’a pas beaucoup d’amis, mais ceux qui font partie de son cercle privé sont des gens de grande qualité, qui seraient prêts à donner leurs vies pour lui — le Tsar du Kislev, Boris Bokha, est quasiment un frère pour lui, ils ont tous les deux nommé leurs filles avec le même prénom d’ailleurs. Boris est également richissime : Middenheim la ville est un centre culturel et produit des cuirs et des draps de grande qualité, tandis que le duché permet d’extraire du bois de charpente et des minerais précieux des Monts-du-Milieu. À cela s’ajoute le Nordland, qui est devenue la façade maritime la plus importante de tout l’Empire. Enfin, Boris est en odeur de sainteté auprès des Ulricains : il a obtenu du culte l’épithète ban-Ulric, et il est connu dans tout le nord-Empire comme le protecteur de tous les fidèles du Dieu-Loup.

En comparaison de tout ça, tous ces énormes succès d’une vie, Léopold paraît… Moindre.

Ton frère est un homme talentueux, ne te méprends pas : Impulsif, irascible, à la rancune très tenace, ce qui parfois obscurcit son jugement. Mais il est également un étonnant stratège militaire, même si on loue peu cette qualité chez lui, et un administrateur infatigable, même si les rumeurs font croire qu’il est plus doué pour dépenser l’argent que pour en gagner. Il sait dans quels domaines il manque de capacités, mais est un excellent juge pour les caractères d’autrui, car il a nommé à des postes-clés des gens loyaux et très compétents, ce qui lui permet de facilement déléguer le pouvoir et de tout de même gérer correctement une immense province très divisée.

Boris aime bien Léopold. Et les deux hommes se ressemblent. Mais souvent, trop souvent, Léopold ressent « l’amitié » de Boris comme une condescendance énorme envers lui. Alors que la relation devrait être égale entre les deux, souvent, trop souvent, Boris agit comme s’il pouvait diriger les actions de Léo.

Il n’a pas totalement tort — Boris est immensément populaire dans le Middenland. Tous les ans, Middenheim envoie des régiments militaires pour défendre la Drakwald, en soutien contre les Bêtes. C’est clairement une manœuvre intéressée, et Boris préfère mener la guerre loin des frontières de son duché que de risquer de voir les bêtes débarquer dans sa province — mais tout de même, on chante à la gloire de Boris dans les tavernes du pays, alors que Léopold est loin, très loin d’avoir cette popularité parmi le peuple et les militaires…

Est-ce que Boris a le projet de prendre le contrôle du Middenland ? Il serait fou de faire ça. Il a besoin de l’alliance avec Léopold, et travaille beaucoup à la maintenir. Mais l’idée que cela puisse arriver est souvent agitée par des nobles Middenlander qui veulent démarquer leur indépendance contre Léo.

Je ne pense pas que ce ne soit que de l’ego, même s’il s’agit bien de deux hommes en chair et en os. C’est deux manières de diriger très différentes. Celle d’un homme qui a failli être l’Empereur, et celle d’un prince qui est obligé d’être plus modéré, tout le temps. Ils se méfient l’un de l’autre, et ils sont alliés, et pourtant très rivaux.

En fait, ce qui m’inquiète, c’est que je ne sais pas quelles sont les ambitions de Boris. Il est âgé, il sait qu’il ne deviendra probablement jamais Empereur. Il y a dix ans, il a épousé la petite Nikse en pensant pouvoir faire des enfants, et assurer son héritage — mais elle n’a pas pu concevoir. En tout cas, le mariage semble lui avoir donné une nouvelle fougue, et il est plus actif que jamais.
Je crains que ce soit Anika-Elise Nikse qui soit la véritable maîtresse de Boris dans l’ombre, et j’ignore ce qu’elle ambitionne, elle, pour le coup. Elle est discrète, comme une souris. Mais il y a quelque chose derrière cette façade… 

Quant aux ambitions de Léopold, c’est difficile pour moi d’entrer dans sa tête… Il a énormément d’amis et de relations au sud du Reik, mais il passe aussi beaucoup de temps au Middenland pour gérer son conseil et les relations avec ses vassaux — ses critiques disent que c’est un prince absent, mais c’est faux, il est sincèrement intéressé par le sort de ses sujets. Il a beaucoup investit de deniers pour développer tant Carroburg, que nos terres à Nuln, que la campagne du Middenland, et il a commencé à rédiger les coutumes du Middenland afin que tout le monde ait accès à une justice équitable — c’est un vrai novateur, tu peux remercier son épouse pour ça, ce n’est pas votre père qui y est pour quelque chose là-dedans.

Je crois que, secrètement, il ambitionne de devenir Empereur. Boris ne le supporterait jamais, c’est probablement ce qui le tuerait, mais Léo a plus de chance d’obtenir Ghal Maraz que Todbringer. »


Puis, Diederick évoqua le sujet de Katarina.

« Le mariage entre Katarina Todbringer et Primus von Bildhofen serait très avantageuse sur de nombreux points — elle assurerait le soutien de Middenheim sans nouvelles conditions pour leurs expéditions militaires, et, d’une manière très cynique, elle permettrait sûrement de nous établir sur Middenheim à la mort de Boris. »

Oui, parler avec autant de libéralité de la mort d’un comte-électeur, c’était plus que cynique. C’était proche du crime de lèse-majesté. Et elle avait dit ça froidement et sans sourciller.

« Boris Todbringer est riche, prestigieux et puissant — mais sa dynastie n’a pas été bénie par Rhya, et à sa mort commencera une immense crise de succession. Stefan ne sera jamais capable d’exercer la charge. Heinrich et Katarina sont des bâtards. Il y a de nombreux cousins des familles de Middenheim qui voudront le trône, mais ils sont tous faibles : Boris règne sans partage et peut se reposer sur des petits nobles nommés par lui à des charges qui le défendront jusqu’à sa mort, mais après sa mort tout ça va sauter. Avoir Katarina avec soi, c’est un bon moyen de conquérir le roc impossible à assiéger.

Le refus obstiné de Léopold de faire le mariage a quelques explications, je ne sais pas laquelle est vraie, tu lui demanderas quand tu le rencontreras.

D’après ce que je sais, Léopold a peur que le mariage profite plus à Boris qu’à l’inverse — c’est Boris qui a besoin de légitimer sa bâtarde pour assurer une succession, alors que nous pouvons bien laisser Middenheim se fractionner à sa mort pour retourner la relation. Épouser Katarina, c’est risquer de se retrouver avec tout le personnel et l’administration de son père en cadeau de dot.

Il est aussi possible que Léopold finisse bien par accepter le mariage, mais qu’il attend d’être dans une position de force pour négocier un mariage plus arrangeant : les conditions que Sparsam avait négociées la dernière fois que les fiançailles étaient proposées n’étaient pas franchement avantageuses pour nous, il avait proposé des rentes et des terres, mais qu’en échange, il fallait reconnaître que Katarina régnerait sans partage sur Middenheim, et pas son époux qui serait strictement séparé du trône, il ne serait que consort. Pas aimable pour se lier à une autre famille…

Et puis, il y a une autre raison plus sensible : Léopold n’est pas certain que ses enfants hériteront. Il désigne toujours son petit frère Siegfried comme héritier et n’est jamais revenu là-dessus. Primus est l’aîné, mais Léopold l’a déjà humilié en public à Carroburg, en rappelant à voix haute, devant tout le monde, qu’il ne nommerait son propre enfant héritier que lorsqu’il aura prouvé qu’il le mérite. Le mariage entre Katarina et Primus forcerait l’aîné à prendre le pouvoir, nécessairement, et Léopold n’aime pas que quelqu’un d’autre lui dise quoi faire avec sa propre famille. »


En parlant de famille — la prochaine question, sur le Reik, mêlait pas mal Léo.

« Léopold est un Sigmarite. Il ne le dira jamais en public — en public c’est un homme des deux cultes, des deux religions, un modéré qui pense que la loi du duc doit être supérieure à celle de la loi des clercs. C’est la position raisonnable à adopter quand on dirige un pays qui est véritablement divisé au niveau de la religion, et d’ailleurs, sa cour est assez équitable à ce niveau : il a des conseillers des deux fois qui le servent personnellement.
Mais dans son cœur ? Léopold n’aime pas Ulric. Pour lui, l’avenir est dans la vallée du Reik, sa capitale est Carroburg, une cité résolument Sigmarite. Ulric, c’est la religion de Boris, la religion des nobles factieux, la religion des hommes de la forêt et des marais, des chevaliers d’ordres qui ne lui sont pas loyaux. Il n’a rien à gagner à s’écraser devant l’ar-Ulric, même s’il doit constamment ménager le culte parce que la majorité de ses sujets sont des Ulricains, et même pour certains, des Ulricains très extrémistes.

Je le soupçonne même d’aller plus bas encore que Sigmar. Tu te souviens peut-être de l’affaire Neurath, sauf si tu veux une piqûre de rappel ? »


Cela remontait à tellement loin… Et déjà à cette époque, Diederick était coupé de Carroburg, puisqu’encore enfant.

Mais il se souvenait des grandes lignes : qu’à 16 ans, alors que Diederick n’était qu’un têtard, on avait fiancé Léopold avec une magnifique Teutogen pur-race, Klara von Neurath, future comtesse de Malstedt. D’après ce qu’il avait entendu, Klara était très amoureuse de Léopold, mais l’inverse n’était pas vrai. À 20 ans, alors que Diederick n’était qu’un bambin qui suçait son pouce, Léopold avait rompu les fiançailles de lui-même un mois avant le mariage qui avait été enfin négocié, et il avait déclaré avoir déjà épousé devant les Dieux une Tiléenne qu’il avait rencontré dans un long voyage dans la péninsule, et qu’il avait ramené avec ses bagages comme un souvenir de plus de Luccini.
Le patriarche avait été ulcéré. Piqué une colère monumentale. Condamné son fils à l’exil, et pendant trois ans, Léopold n’avait plus du tout mis les pieds dans le nord-Empire. Mais alors que ses enfants grandissaient tranquillement entre Nuln (Léopold avait quasiment usurpé les terres ancestrales de Magnus von Bildhofen au reste de la famille…) et la Tilée, finalement, le vieux décida de pardonner à son fils et de le ramener auprès de lui comme l’enfant prodigue.

« Trogia influence énormément Léo. Elle est plus que son épouse — elle est une véritable femme politique. C’est elle qui a convaincu Léopold de donner une charte de franchise à Carroburg, une décision qui a été reçue avec les applaudissements de toute la ville… Et la haine de la noblesse entière du nord-Empire. Léopold est entièrement occidentalisé, il passe tout son temps au sud du Reik car c’est là où il se sent le mieux, là où il excelle, et il laisse Siegfried et des hommes de confiance gérer les endroits plus « bruts » où il n’a pas envie de mettre les pieds. »

Elle prit une pause pour siroter son thé. À force de parler avec sa voix bizarre, ça allait pas faire du bien à sa gorge…

« Le culte de Sigmar est grandissant. Il faut dire qu’ils ont tout pour eux — on ne va pas se mentir, Diederick, quand notre ancêtre Magnus a franchi les flammes éternelles d’Ulric en professant son amour de Sigmar, et qu’il n’a pas été brûlé, ça a complètement ruiné le culte du Loup. Il ne s’en remettra jamais. Il est sur une pente glissante, et toute la noblesse et l'honneur Ulricains, c’est le chant du cygne. »

Elle disait ça avec une certitude assez fascinante.
Et elle insultait ainsi sans vergogne l’un des Dieux que priait fermement Diederick.

« C’est facile à calculer : le culte de Sigmar est plus riche. Dans le Middenland, toute la vallée du Reik, où sont les villes les plus riches — Scheinfeld, Carroburg, Ahlenhof — sont en majorité Sigmarite. Quand on monte vers le milieu, la répartition Ulricains/Sigmarites s’équilibre, il y a une majorité Ulricaine mais une minorité Sigmarite très importante, généralement un tiers de la population — c’est le cas dans le centre commercial de Delberz, ou au fort de Kutenholz. Les Ulricains sont en revanche archi-majoritaires dans tout le reste de la province, surtout dans les ruralités.

Plus le temps passe en revanche, plus les Sigmarites gagnent de l’importance. Et ils sont très prosélytes avec ça. Le Nordland est devenue une vraie terre de croyance Sigmarite ces dernières années, on voit des vieux Ulricains barbus jusqu’au nombril se la raser du jour au lendemain.

Action nécessite réaction. Plus le culte d’Ulric est menacé, plus il perd sa raison-d’être, et plus on voit les extrémistes gagner du terrain. L’ar-Ulric actuel est un homme modéré et raisonnable, qui tient à avoir de bonnes relations avec le culte de Sigmar, et il base son clergé sur des prêtres Ulricains d’un nouveau genre, plus instruits, plus sensibles, diplômés de théologie… Mais les franges dures de l’Ulricanisme gagnent beaucoup d’importance. On voit presque toutes les semaines à Middenheim une affaire religieuse traitée par les magistrats, que ce soit des simples graffitis anti-Sigmarites ou des injures publiques. Les pèlerins Sigmarites se plaignent souvent d’être attaqués ou harcelés par des chevaliers du Loup Blanc en rase campagne.
Il y a quatre mois, il y a eut une affaire extrêmement tragique dans la Marche d’Ouestrie — un morceau du Middenland sous l’autorité de Boris — un père de famille Ulricain a été arrêté par la loi pour le meurtre de son fils. Le mobile semble être que son gamin s’était converti au culte de Sigmar pour épouser une fille du Nordland qu’il aimait. C’est juste un vieux fou et sénile comme il y en a des milliers, mais l’affaire a fait grand bruit, c’est devenu un scandale d’État, et c’est allé jusqu’aux oreilles du Grand Théogoniste qui a publié une bulle ordonnant à la justice de Middenheim de condamner cet acte ignoble avec la plus grande fermeté.

Tout ça va mal finir. Et tu comprends la position terriblement indélicate où est Léopold. Il a des sujets des deux religions, la dernière chose qu’il veut, c’est une guerre religieuse. Mais il y a des fous dans les deux camps pour la souhaiter à voix haute… »


Heureusement, pour détendre l’atmosphère, Diederick parla de Marienburg. Anna grogna un peu.

« Que veux-tu que je te dise sur Marienburg ?
Ils sont les rois du monde. Ils ont des bateaux sur tous les océans, et des ambassades sur tous les continents. Leur commerce est plus puissant que jamais, ils avalent chaque jour toutes les ressources du monde et ils semblent être un marché inépuisable qui a toutes les denrées possibles et imaginables.
Ils sont les seuls habitants du Vieux-Monde ayant une enclave au Nippon — toutes les autres nations sont chassées par celui qu’on appelle le Shogun. Ils ont complètement dépassé Karl-Franz à la cour de l’Empereur du Cathay, et pourtant ce sont des diplomates talentueux q’on a envoyé là-bas… On dirait que Marienburg avale tout l’or des Nains, et l’utilise pour ramener du lointain porcelaines et soieries, avec lequel ils accumulent encore plus leur pécule.
Ironiquement, nous ne sommes plus du tout un danger pour eux aujourd’hui. On dirait plutôt que c’est la Bretonnie et son roi-enfant Charles III qui les foudroient de peur. Vu comment les Bretonniens ont aidé à leur sécession, je n’ai qu’une chose à dire : Bien fait. »


Comme quoi, Tatie avait étonnamment énormément à dire sur l’Extrême-Orient. Comment savait-elle tout ça ?

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Diederick von Bildhofen
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par Diederick von Bildhofen »

À mesure que l'entretien se déroulait, Diederick reprenait en main le paysage qu'il avait laissé derrière lui une décennie auparavant. Et ce qu'il apprenait lui montrait un paysage complexe et nuancé. Ainsi tante lui peignait un Graff et son épouse comme aisément chaleureux, et de là la nécessité de se montrer froid, maintenir une distance.... Pourquoi pas, quand bien même la première réflexion de Diederick eut qu'il ne coûtait rien de se montrer amical. Mais soit. Il se montrerait cordial et affable tout au plus, plutôt que d'être ouvertement amical... Ou essaierait.
Et quel homme était Todbringer ! Anna décrivait un chef de guerre talentueux et un homme d’État habile, doté d'amitiés puissantes et influent. Il est vrai qu'en comparaison Léopold palissait légèrement. Stratège, bon administrateur, bon juge de caractère - cette dernière qualité était la plus importante pour tout dirigeant - et bien entouré.

Et les deux se ressemblaient, donnant un tandem où pouvait régner une mésentente cordiale..Se tournant vers son épouse, il l'interrogea du regard.

La mésentente cordiale entre deux alliés de nécessité, mais de prestige différents.

La phrase visait à exprimer une simplification d'une situation complexe, sans pour autant rendre simple ladite simplification.

En revanche que Léopold visait des ambitions impériales, quand bien même l'actuel empereur était bien jeune... C'était préoccupant. Il avait le nom, le relations, la réputation... Mais c'était là un jeu dangereux.

Lorsque tatie évoqua au détour la mort probable de Boris, Diederick ne bâtit guère de l’œil. Le cynisme de la politique cathyenne rendait cela presque... Rafraîchissant. Des frères tuant des frères, fils complotant contre pères... Les crimes de sang, à mesure qu'un homme montait vers les sommets de la politique cathayenne, étaient par trop souvent violents, déshonorants et rendus publics, lorsqu'au bon moment par un ennemis. Cela et l'histoire de l'Empire montrait bien que les liens du sang, par rapport à l'attrait du pouvoir, ne pesaient guère souvent très lourd.

L'Empereur ne risque-t-il pas de les enterrer tous deux ? demanda-t-il de manière rhétorique.

Mais alors qu'on descendait sur le Reik, Diederick but de travers son thé, se mettant à tousser dans son mouchoir tandis que son épouse, légèrement inquiète, s'était levée pour solidement lui taper dans le dos.

''Léopold. Sigmarite. Sigmarite. Par les dieux... Pourquoi pas Tant qu'il ne se révèle pas en odieux zélote... Non. Il est trop malin pour ça. Mais tout de même quoi....''

Le recul du culte d'Ulric dans les cités et campagnes était également surprenant. Ulricain de cœur et méfiant à l'égard des serviteurs de l’Église de Sigmar du sud, il s'inquiétait de leur influence et du poids politique qu'ils pourraient chercher à manier contre les intérêts de sa famille.
Sans compter l'étonnante évolution que connaissait le Nordland, terre traditionnellement ulricaine. Cela faisait un peu mal au cœur. Mais après, si le culte se révélait incapable de répondre au défi des prêcheurs sigmarites... Eh bien il aurait à un moment ou un autre à se remettre en question. Car c'était par la lutte, la nécessité, que l'on se dépassait.

Une Grande secte convertissant les croyants d'une autre, senti-t-il le besoin d'annoncer à son épouse.

Bien entendu il était naturel que ce genre de dynamique entraîne une réaction de la part de la frange la plus radicale des ulricains, voir entraîne certains d'entre eux dans un militantisme violent. Shallya soit louée, l'actuel Arc-Ulric semblait avoir la tête sur les épaules et cherchait même à contrebalancer le prosélytisme sigmarite par une action plus instruite.
Non, ce qui l'inquiétait était les débordements inévitables des sectaristes violents et radicaux, et ceux cherchant à profiter de leur foi pour faire avancer leurs propres intérêts.

Mais lorsque sa tante lui parla du dernier incident, il écarquilla grand les yeux. Qu'un zélote aille jusqu'au filicide.... Maudit était aux yeux des dieux celui se livrant à pareille infamie. Surtout pour pareilles circonstances.

En tout cas, tante Anna était extrêmement bien informée.

Tes sources sont incroyablement renseignées, tante.

Et il ne disait pas cela pour la flatter. Il était sincère dans son compliment. C'était tout à fait digne de respect que de manier pareille quantité d'information et de la régurgiter de manière cohérente, sur autant de sujets. Son visage clairement démontrait le respect, voir l'admiration, pour les détails et l'analyse qu'elle livrait dans chaque phrase.

L'entretien se perpétua encore plusieurs dizaines de minutes Diederick faisant de son mieux pour aider Gao Li à se sentir incluse dans celle ci, bien qu'avec difficulté. La plupart du savoir de son épouse sur l'Empire et le Vieux Monde provenait de ce qu'elle avait découvert en arrivant dans celui ci, et des anecdotes racontées au coin du feu ou sous la couette, à l'autre bout du monde.

En parlant des bretonnis... Y a-t-il eut une nouvelle guerre Reikland-Parravon depuis mon départ ? Non pas que je compte aller à Ubersreik prochainement.

Écoutant sa tante sur les tensions le long des montagnes grises et les ambitions toujours aussi tenaces des ducs de Parravon, il laissa ensuite à sa tante le temps de se reposer la gorge, avant de reprendre la discussion.

Tu avais évoquée la charte accordée à Carrobourg par Léopold... Qu'a-t-il exactement cédé aux bourgeois, et contre quoi ? Et fut elle accordée ad vitam aeternam, ou bien celle ci est reconductible ? Et surtout, quelles sont ses provisions ?

L'administration cathayenne était toujours la plus forte et dense dans les milieux urbains, ceux ci étant bien plus exposés à l'influence de ces agents. Et donc aux rentrées fiscales. Que l'on accorde des chartes aux cités le gênait, par principe, bien qu'il puisse garder l'esprit ouvert. En certains cas, cela pouvait être bénéfique... Mais de céder une mesure de contrôle urbain aux bourgeois le gênait tout de même.

L'Empereur Karl Franz... Quelles politiques mène-t-il exactement ? En tant que maître d'Altdorf, prince du Reikland, et empereur ? Quelles sont ses visées exactement sur Carrobourg et Léopold ? Dans quelle mesure est il influencé par l’Église de Sigmar, et ce courrant de pensée.... Ces "millénaristes" ?

Bien entendu, après cet entretien, il prendrait son épouse à l'écart pour aborder plus en profondeur de tout ce dont ils venaient de parler avec sa tante, quitte à s'aider d'une carte de l'Empire issue d'un des atlas de la bibliothèque, répondre à ses immanquables interrogations et, bien entendu, la bichonner dans l'attente de leur toilette pour l'invitation du Graff.
Le savoir c'est le pouvoir. Et savoir quand le garder, le cacher, le partager, cela est la véritable épreuve de ceux le détenant.

Diederick Maria Reichenbach Bruno "Ruichen" von Bildhofen, Voie de l'étude de la connaissance
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[MJ] La Fée Enchanteresse
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

À la petite réflexion rhétorique de Diederick, Anna apporta quand même une réponse rapide : elle baissa un peu plus le ton (Même si sa voix était constamment basse) et approuva d’un hochement de tête.

« Sa Majesté Impériale a trente-cinq ans, et déjà un jeune héritier, Wolfgang. Il va être dur de reprendre le trône aux Holswig-Schliestein. »

Mais très vite, les questions de Diederick s’enchaînèrent. Cela n’avait pas du tout l’air de déplaire à tante Anna, au contraire même — la dame semblait avoir une vivacité impressionnante, elle répondait toujours à tout avec passion et exhaustivité. C’était impressionnant, de voir une telle force dans celle qu’on avait toujours vendue à Diederick comme une simple chienne folle, une mercenaire qui aimait la guerre et la violence ; il y avait en vrai un esprit éduqué et exercé derrière cette armature, à moins que ce ne soient les blessures et la vieillesse qui l’y aient contrainte.

« La dernière guerre Reikland-Parravon s’est terminée il y a trente-six ans, en 2475. Et comme tu l’as étudié au collegium, les négociations de paix ont mené à la création d’une principauté très originale, le Franc-Territoire de Frugelhorn. Concrètement, le duc Gaston de Parravon, et l’ex-duc d’Ubersreik von Jungfreud ont accepté tous deux d’enterrer leurs prétentions dynastiques et historiques sur toutes les terres à conflit d’un côté et de l’autre des Montagnes Grises, au profit d’un État-tampon indépendant et paritaire. Tout le monde pensait que ce compromis insatisfaisant ne tiendrait pas. Mais nous sommes en 2511 et il existe encore.

Concrètement, les terres du Franc-Territoire, qui vont de la Maisontaal à la source de la Vaswasser, sont dirigées par un jury de douze jurés-justiciers élus par les habitants de Frugelhorn, il y a toujours six Bretonniens et six Impériaux, et parmi un président et vice-président qui alternent entre une nation ou l’autre chaque année. Le but de ces jurés-justiciers est d’assurer la défense, la levée des impôts, les travaux publics, et les mises en place de règlements qui concernent le peuple. Ils sont aussi juges pour toutes les affaires de justice qui concernent le domaine public de Frugelhorn ou des conflits entre un Bretonnien et un Impérial — les conflits internes à une famille ou un espace privé sont généralement encore jugés selon la coutume de Parravon ou la loi du Reikland, mais c’est en train de changer très vite…

Les habitants de Frugelhorn adorent cette manière de vivre. Surtout qu’ils sont exonérés des taxes du Roy et de l’Empereur, et à la place, tous les impôts qu’ils payent, qui sont standardisés et égaux, sont rassemblés par un trésor commun — il n’y en a qu’une partie qui est reversée sous forme de redevance à Gaston et Sigismond von Jungfreud, afin de les contenter et calmer leur appétit, mais globalement, on paye beaucoup moins d’impôt à Frugelhorn que d’un côté ou de l’autre des Montagnes. Tu vas me dire, pourquoi Karl-Franz et le Roy ne font rien ? Karl-Franz parce qu’il ne se sent pas encore assez fort pour combattre Jungfreud, il a plus pressant, et Charles III, parce qu’il n’est devenu officiellement adulte que l’année dernière — jusqu’ici, le vieux Gaston, qui doit avoir soixante-dix ans maintenant, était le régent, ce qui tu te doutes bien facilite les arrangements sur le côté.
Ce statut spécial a permis une grande prospérité à Frugelhorn. Ils se sont enrichis, par le commerce, par le développement de l’élevage, par les concessions offertes au royaume Nain frontalier de Karak Azgaraz.

Mais aujourd’hui, leur situation est tendue. Il n’arrête pas d’y avoir des conflits d’usage, des violations de frontières par des nobles d’un pays ou de l’autre, ils ont de très nombreux défis devant eux.
Une nouvelle nation est née. On multiplie les mariages mixtes à Frugelhorn, et de plus en plus, les habitants de cette petite province se sentent plus unis et loyaux entre eux qu’encore loyaux à l’Empereur ou le Roy. Dis-toi qu’une génération entière d’enfants sont nés, ont grandi, et sont maintenant adultes dans ce pays. Ils sont devenus très patriotes de ce pays artificiel, et ils veulent tout faire pour le sauvegarder. »



Diederick ne pouvait pas mieux faire en relançant le sujet sur quelque chose de plus proche. Là, Tatie sembla tirer une sale gueule, et grommela fort.

« La charte de franchise de Léopold est la charte de franchise la plus généreuse qui aie jamais été accordée à une ville — peut-être exception faite de Kemperbad. Il ne s’est pas inspiré des chartes de Freistadte du sud-Empire, mais carrément de l’organisation de Marienburg.

Il a officialisé le gouvernement communal, composé d’échevins entièrement élus — il ne nomme plus personne à la ville, excepté un rapporteur et ses assesseurs qui n’ont qu’un rôle de… Rapporteurs. Le conseil a le droit de délivrer des sauf-conduits, et met en place tous les règlements de police, de salubrité et de tranquillité publique.
Il a cédé la quasi-totalité de ses pouvoirs judiciaires, ne prend plus un sou d’amende, et à la place, il y a une cour de justice dirigée par des clercs de Véréna qui s’occupent d’appliquer la justice — les sujets de Carroburg pauvre ont d’ailleurs le droit à un avocat gratuit dont les honoraires sont payés par la commune. Il a d’ailleurs retiré leur pouvoir de justice aux Temples et leurs répurgateurs, et tout litige doit exclusivement passer par cette cour.
Il a fermement catégorisé tous les impôts qu’il peut toucher, il y en a essentiellement trois — un péage sur les portes de la ville, une aide sur les ventes au marché, et un impôt foncier pour les propriétaires. Ah, il a fait sauter le péage sur les ponts internes à la ville, qui rapportaient beaucoup d’argent et étaient immensément impopulaires. La corvée pour les Troupes d’État existe toujours, en revanche, mais en échange, il a autorisé le conseil communal à pouvoir demander le licenciement d’un capitaine des régiments de Carroburg s’ils n’en étaient pas satisfaits, ce qui fait qu’il admet partager son pouvoir militaire avec la ville. De même, la taille pour les habitants, il l’a entièrement refusée, et maintenant, c’est devenu le budget propre du conseil communal pour les travaux publics.
Ah, et aussi, il a accordé le droit de commune à tous les résidents étrangers qui vivent cinq ans à Carroburg, l’égalité civile complète pour les Nains, y comprit celui de se marier avec un Humain, officialisé le droit de grève, le droit d’expression, le droit de recourir à l’assistance publique, abolis le crime de lèse-majesté et le recours à l’ordalie judiciaire.

Cette charte terriblement généreuse a été accordée à perpétuité, et il l’a juré sur les reliques de Sigmar, Ulric, et Véréna. En échange, il a obtenu une somme d’argent extrêmement généreuse — dix ans de revenus de la ville en trois traites. Mais il n’a pas gardé cet argent longtemps, Léopold l’a totalement dépensé en travaux publics ; il a fait rénover des temples partout dans le Middenland, construit trois ponts sur le Reik, creusé deux routes à travers la Drakwald, investit dans des auberges-relais un peu partout, remis en état des écluses, et attribué une donation vraiment importante à l’École Oratoire Royale de Carroburg. Boris Todbringer est devenu rouge en apprenant ça, d’ailleurs — pour lui, l’argent de la charte aurait dû logiquement revenir aux Troupes d’État du Middenland, vu qu’il s’embête à envoyer des militaires soutenir notre défense de la région, et pas à des projets publics.

Tout ceci a fait que Léopold est devenu populaire comme jamais à Carroburg. C’est le héros de la ville, et tout le monde l’honore constamment. Il est aussi maintenant en froid avec les Temples, sauf ceux des Dieux Classiques, et surtout avec la noblesse de tout le nord-Empire, qui se rend compte qu’ils vont devoir s’aligner sur ses innovations qui vont faire longue date pour tous les bourgeois des nations Ulricaines.
Le pire c’est qu’il prévoit en ce moment même une charte de franchise pour Delberz, et il a prévu qu’elle sera encore plus libérale. »


Elle soupira très, très longuement.

« L’Empereur Karl-Franz est un Empereur intelligent, puissant et populaire. Dès le début de son règne, il a fait ses armes dans le Nordland, aux côtés du Nordsmarschall Gausser. C’est un meneur d’hommes, et un politicien bizarrement accompli pour le jeune homme qu’il est. Il est apprécié de tous les Électeurs, notamment parce que globalement, il les laisse faire, et utilise l’influence et le charme plutôt que l’appareil légal ou son autorité d’Empereur. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’ait pas d’autorité — il est prestigieux et respecté, dans sa province et au-delà. Il est très Sigmarite, et absolument allié au Grand Théogoniste, mais ce n’est pas un pantin de la religion pour autant. Tout ceci rend absolument aigri Boris Todbringer.
Lors de l’élection, il y a dix ans, le premier vote ne s’est joué qu’à une seule voix. Le second en revanche a été un raz-de-marrée pour Karl-Franz. Boris Todbringer était tellement en colère qu’il a quitté la province de son père, s’est auto-exilé dans le Kislev, et n’est revenu qu’à la mort du vieux patriarche Todbringer.

Il essaye ouvertement de draguer Léopold. Les deux passent beaucoup de temps ensemble quand Léo est à Altdorf. Ironiquement, Léopold semble apprécier sa compagnie et essaye tout le temps de se montrer avec lui. Tu te doutes bien que c’est aussi un moyen d’affirmer son indépendance face à Middenheim.

Malgré tout, je ne sais pas si Karl-Franz sera un monarque qui fera date. Comme tous ses prédécesseurs, c’est un modéré un peu mou, mais il est vrai qu’il a aussi plus de volonté et d’ambition que son talentueux père, et surtout, un personnel politique important, très éduqué, et absolument loyal envers lui et l’idéal qu’il incarne. Le Reikland est la province la plus riche, la plus peuplée et la plus importante de tout l’Empire, et ça se sent dans la préséance Impériale. Le futur montrera vite si Karl-Franz sera capable d’en faire quelque chose, mais ça pourrait bien impliquer de grands changements pour l’Empire. »
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Diederick von Bildhofen
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par Diederick von Bildhofen »

Cette histoire de territoire franc était surprenante, mais si les indigènes parvenaient à stabiliser leur situation et à s'ériger en autre chose qu'un château de sable.... Peut être bien que la frontière avec le Parravon pourrait enfin être sécurisée contre les velléités d'expansion bretonienne ? C'était un bien gros "si". Ça et le fait qu'un noble en puissance ne fasse pas quelque chose de stupide. Ou que ce nouvel État ne soit pas détruit par des bandes de peaux vertes en maraude.

Las, lorsque tante Anna exposa plus en détail la charte de Léopold, Diederick se pinça l'arrête du nez à nouveau, fermant les yeux, il soupira pour évacuer son envie de se cogner la tête contre le mur.

Léopold avait cédé de grandes libertés à la ville. De bien trop grandes libertés, contre pas assez. À perpétuité. Et peu de contre pouvoirs gardés en place. Oui tout ce qui avait été accordé était magnifique. Oui l'argent semblait ne pas être parti dans la gadoue entièrement... Ponts, routes, auberges relais, écoles.... Pourquoi pas. C'était là des investissements qui encourageaient au commerce, permettant d’accroître les revenus des taxes... Mais si les ouvrages d'économie politique cathayens lui avaient enseignés une chose, c'était bien que la véritable richesse provenait avant tout de la production agricole, minière, artisanale, et ensuite seulement des taxes et du commerce. Ce qui était ''dur'' restait.

Il espérait sincèrement que ces investissements allaient se révéler intelligents dans la décennie à venir.

Par les dieux... Il aurait du demander plus. Garder la main. Encore heureux qu'il n'ait pas bradé davantage.

Dire qu'il fut choqué par ces détails eut été insuffisant. Son visage avait prit une teinte de plus en plus pâle à mesure qu'il prenait conscience des ramifications de pareilles libéralités.

Lorsque en revanche elle s'exprima sur le jeune empereur, il n'eut sur celui ci pas d'avis. Un souverain prometteur pouvait signifier autant de bien que de mauvais. Un souverain avisé saurait tempérer ses propres ardeurs, s'entourer correctement de conseillers et gouverner avec modération. Mais d'un autre côté, sa jeunesse pourrait lui faire courir le risque de laisser s'exprimer ses passions, de confondre ambition et mégalomanie. Et s'il venait à être aussi politiquement adroit qu'il était bien servit, il pourrait même tenter de circonscrire la puissante autonomie des provinces et les pouvoirs des noblesses... Ce qui n'était pas forcément une mauvaise chose en soit... Si lui même n'était pas un de ces nobles, jouissant de privilèges importants du seul fait de son nom. Mais en ce temps, pouvait on encore jurer par le gouvernement de l'aristocratie et ses vertus ? L'apparition d'un courant philosophique tel que les millénaristes.... Il n'y avait guère de fumée sans feu.

La plaisante discussion qu'il avait avec Anna se termina agréablement, et le couple reparti dans leur logis.

Là, Diederick s'empara de plusieurs ouvrages et en particulier d'une carte, qu'il étala en grand sur une table. Une carte de l'Empire, ses principales villes, cours d'eau et routes principales.

Je suppose que tu as des questions mon cœur, invita-t-il Gao Li en se penchant sur la carte.

C'est quoi un bretonnien ?

Hum...

Par où commencer pour répondre à pareille question ? Il n'était pas simple de trouver quelque chose de court et synthétique pour expliquer une nation ? Ou bien était-ce vraiment le cas ?

Alors qu'il se déplaçait pour chercher un ouvrage portant sur la Bretonnie, Diederick commença son ''cour introductif à la géographie du Vieux Monde''.

Imagine l'Inja.

Ils avaient tous deux participé à une expédition contre l'un des innombrables Rajas du pays. Ça faisait un point commun avec lequel ils pouvaient comparer les choses.

Unit, divisé en quatorze parties. Et expansionniste. Sa population est divisée en deux groupes. La noblesse, qui détient plus de pouvoirs sur la population que ne pourraient en rêver l’aristocrate cathayen le plus décadent, mégalomane et immoral. Les nobles traitent les femmes comme du bétail. Puis le reste, les paysans, qui sont traités pire que du bétail, et composent plus de 9 personnes sur 10 dans le pays. La Bretonnie est riche de terres agraires et élevages nombreux. Belles laines, cuirs, céréales, alcools.... Et sa noblesse est obsédée par les chevaux. Ses armées sont dotées d'une cavalerie très puissante, et de levées paysannes à la qualité... Discutable. À la guerre, les bretonniens montrent autant de retenue que les khans hobgobelins. Et le duc du Parravon, dit il en ouvrant l'ouvrage sur la page qu'il recherchait, gouverne ces montagnes là. Et de l'autre côté se trouve la ville d'Ubersreik, dans la province impériale, du Reikland. Au cours des millénaires précédents, il y a eut de nombreuses guerre entre les deux, souvent à l'initiative du Parravon. En général, elles se déroulent de la manière suivante : le Parravon attaque, met à feu et à sang la campagne, égorge les prisonniers, ou bien en fait des paysans qu'ils emmènent en Bretonnie, et mettent le siège devant Ubersreik. S'ils prennent la ville, ils en tuent toute la population qui ne s'est pas réfugiée dans la citadelle et se retirent, parce que l'armée du Reikland réagit enfin, ou bien le prince électeur achète littéralement la paix.

Faisant une pause pour lui laisser le temps d'ingérer ces informations, Diederick reprit son cour. Et le problème causé par les bretonniens ne s'arrête pas là.

Si tu veux, tante Anna a de nombreuses anecdotes qu'elle peut te raconter sur les bretonniens. C'est contre un de leurs chevaliers qu'elle a perdu son œil.

Passant à une autre carte, celle de l'Empire cette fois ci, il passa son doigt le long du Reik et ses affluents.

Le commerce principal de l'Empire transite par ce fleuve. Il est aussi le seul à se jeter dans la mer. Cette façade maritime est la province du Westerland. Dit aussi, ''pays perdu'', fit il avec une grimace.

Au siècle dernier, les marchands ont littéralement achetés l'indépendance de la province auprès de l'empereur. Peu après, celui ci a été destitué devant le scandale. Lorsque le nouvel empereur a levé une armée pour reprendre la province, il fut défait, par les rebelles. Ils usèrent de guérilla, et étaient alliés à de puissants mages aux longues oreilles, de la lointaine Ulthuan. Ce fut une humiliation. Et coûteuse, puisque des tarifs faisant augmenter les prix de plusieurs ordres de grandeur sont en place sur toutes les marchandises qui transitent par le port de Marienbourg. Et si l'Empire montre des dents pour reconquérir la cité, celle ci le fait chanter en plaçant un embargo sur le Reik, ou bien en le menaçant de se livrer aux bretonniens. Sans compter le danger des longues oreilles, qui dominent les mers. Ou le fait que la ville de Marienbourg prête des quantités d'argent colossales à la moitié de la noblesse impériale. C'est une situation presque aussi embarrassante que l'indépendance du Nippon pour la cour impériale. A ceci près qu'il ne s'agit que d'une ville. Qui contrôle la sortie du seul fleuve important. Et qui se trouve littéralement à côté de la capitale de l'Empire.

En parlant de l'Empire... Il est ici, dit il en désignant de la main toute la carte. Au Nord, la mer des Griffes, et encore plus au Nord, la Norsca, terre glaciale, peuplée de tribus barbares, certaines se livrant à l'adoration des dieux noirs, d'autres pas, toutes se livrant à la piraterie et au commerce selon les saisons. A l'Ouest, les forêts, le Pays Perdu, ses marécages et salières. Au Sud, les montagnes avec la Bretonnie de l'autre côté, les cités État tiléennes, la désolation des principautés frontalières et l'éventuelle forteresse de nos alliés nains. Et moult tribus de peaux vertes. A l'Est.... Son visage se contorsionna à la suite d'un rictus. Le Stirland. Qui a intégré la Sylvanie. Une région arriérée, hostile, pauvre, et dont on dit que règne dans les campagnes, la nuit venue, les vestiges des guerres vampiriques, et la non vie. Et au Nord... Le Kislev. Un puissant royaume, mais aussi le premier à être attaqué lorsque le chaos cherche à envahir nos terres. Mon ancêtre, l'Empereur Magnus le Pieux von Bildhofen, a mené les renforts de l'Empire pour vaincre les serviteurs des dieux noirs à la bataille de Kislev. C'était il y a deux cent ans. Mais bref. L'Empire et Kislev ont des prétentions territoriales sur les terres qui constituent leur frontière commune. Mais rien d'aussi violent qu'entre le Reikland et Parravon. Et Kislev a le deuxième plus grand port du continent.

Refermant l'ouvrage qu'il avait utilisé, il prit par la main Gao Li pour que tous deux se penchent sur l'autre carte, celle de l'Empire à proprement parler, et non pas la pâle œuvre cartographique cherchant à représenter l'Empire et ses voisins.

Nous avons débarqués dans la baronnie du Nordland, au port de Neues Emskrank. De là, en faisant descendre son doigt le long du tracé, jusqu'à ici. Nous avons descendus la route de l'argent vers Salzenmund, jusqu'à entrer dans le duché de Middenheim, où nous nous trouvons. Et nous irons retrouver mon frère à Carroburg, capitale du duché du Middenland. Et son excellence l'ambassadeur du Cathay, lui, est à Altdorf, capitale du Reikland, et de l'Empire, car c'est le prince du Reikland qui a été élu nouvel empereur.

Plaçant une autre carte par-dessus celle qu'ils avaient sous les yeux, ils observèrent une représentation du duché de Middenheim.

Middenheim est une cité sainte. C'est là où se trouve le temple le plus sacré du dieu de l'hiver, Ulric, le dieu loup. Il y a la flamme d'Ulric dedans. Magnus le Pieux, qui n'était pas un grand zélote d'Ulric, s'est jeté dedans, pour prouver qu'Ulric soutenait son règne. Et il en est ressorti indemne. Peu l'ont imités par la suite, lui dit il avec un sourire entendu. Et aucun n'a eut de succès depuis. Et le culte de Ulric a depuis commencé à perdre en influence et en croyants, finit il en faisant mourir son sourire. Le fondateur de l'Empire était une fervent ulricain. Sigmar, qui a vécu sur ces terres, il y a quelques 3500 ans. Il a unit les tribus humaines, reconquit les forêts contre les hommes bêtes, pourfendu à plusieurs reprises les wag des peaux vertes, tué les adorateurs des dieux noirs, et fondé une alliance millénaire avec le puissant peuple souterrain des nains. Qui n'ont rien à voir avec ceux des terres sombres. Il n'a pas laissé de descendant, et a mystérieusement disparu vers l'Est, avec son marteau de guerre. Les principaux chefs humains se sont alors réunis pour élire un nouvel empereur. C'est depuis la coutume. Et chaque chef a un vote. Plus tard, un prédicateur déclara avoir eut une vision, où les dieux de l'Empire reconnurent Sigmar comme un de leurs égaux. C'est là que le culte de Sigmar a été créé et soutenu par le pouvoir impérial, comme facteur idéologique d'unité. C'est aujourd'hui une Église très puissante, avec des terres, un clergé, des armées, et un vote. Et une grande influence. Partout, encore aujourd'hui, en tant qu'empereur, Sigmar est loué. En tant que dieu, en revanche, c'est une question plus compliquée.

Et l'empereur laisse cette influence en place ?

L'idée pour elle que des religions puissent avoir leur mot à dire à une échelle aussi grande, aient une influence telle qu'elles puissent se doter d'ordres guerriers indépendants du pouvoir central différait grandement du Cathay.

Haussant les épaules, il lui répondit.

Oui et non. Disons que des siècles de guerre civile, un effondrement total et complet de l'empire, la destruction entière d'une capitale, des successions de schismes et d'assassinats tendent à rendre les empereurs prudents. Les empereurs cherchant à purger intégralement l'influence des cultes tendent à mal finir. Mieux vaut s'en prendre morceau par morceau... Si tant est que cela est possible sur plusieurs générations. Sans compter le fait que lesdits cultes monnayent leur vote lorsqu'un nouvel empereur doit être élu. Il reste plus simple de faire avec et pour un prince de s'arranger pour placer ses hommes aux postes clés. Et s'arranger derrière des portes closes. Un peu comme en Cathay. Sauf que ça marche bien mieux. Le fait d'avoir un véritable dragon pour Empereur n'y est pas pour rien, lui souffla-t-il avec un sourire entendu.

Lui prenant la main pour y déposer un baiser, il se senti d'humeur pour la titiller.

Bien que je pense que ton ire soit tout aussi efficace, lui susurra-t-il dans sa langue natale, avec cette fois ci un sourire qui parvenait jusqu'à ses yeux.

Dieux leurs réactions d'occidentaux lorsqu'ils avaient découvert l'Empereur Dragon, et surtout posés leurs yeux dessus. C'était mémorable. Et amusant que d'imaginer l'ambassadeur impériale ayant eut la même réaction, après temps.

Soupirant péniblement, il prononça d'un ton entendu son opinion.

Politiques....

Mais du coup... Il n'y a pas de bureaucratie impériale ?

Il soupira à nouveau. Là encore... Oui et non. L'Empire est une terre complexe et pleine de contrastes. Oui il y a une bureaucratie liée au trône impériale, des chancelleries, des yamen, qui peuvent être trouvés dans les principales cités, mais non, dans le sens que la bureaucratie au jour le jour est extrêmement décentralisée, et fonctionne généralement au niveau de la province. Et l'Empire est encore un pays où le règne du papier ne... ''règne'', surtout, que dans les villes. Ailleurs, c'est le règne de l'oral. Des promesses d'honneur. Surtout qu'il n'y a pas le même élan pour alphabétiser le peuple. Même dans les villes. Car il n'y a pas de système de concours. La propriété terrienne est détenue par la noblesse, éventuellement par les temples. Ils dirigent, taxent, et permettent aux tenants de travailler contre une part des récoltes. Et dans les bourgs, ils appointent un bourgmestre, qui répond à la noblesse. Dans de très rares cas, celui ci est élu. Et dans les plus grandes villes, il peut arriver qu'il existe une bureaucratie, tiraillée entre la noblesse, les guildes, qui sont des regroupements d'artisans formés pour protéger leurs membres, avec leur propre hall, leurs traditions, et parfois leurs propres lois, justice et milices. Et oui, je sais, aussi étonnant que ça puisse être, ça fonctionne. Même si le système est très facilement corrompu. Et change d'une région à l'autre. Par exemple à Middenheim, Boris Toddbringer tient en laisse la cité, ses impôts et tout ce qui y touche. Seul le Collegium a une forte autonomie. C'est le principal centre d'éducation du duché. Et plus au Sud, à Carroburg, mon frère Léopold a accordé à la cité, contre une somme très importante, de donner à la ville sa propre justice, et des libertés qu'on ne retrouve nulle part. Nulle part sauf.... A Marienburg, dit il en dernier, comme s'il avalait une couleuvre.

Et concernant les armées... Si le pouvoir central est aussi faible... Comment ça marche ?

Eh bien il y a deux cent ans, sous l'empereur Magnus le pieux, ont été mises en place de nombreuses réformes. Parmi lesquelles celles portant sur les troupes d’État. Chaque province était obligée d'entretenir un certain nombre d'hommes en armes, aux frais de la province. Avec les particularités locales bien sûr. Archers du Stirland, lanciers du Tabalecland, arquebusiers du Wissenland, épéistes du Reikland et ainsi de suite. C'étaient des troupes régulières, et payées, même en temps de paix. Et paix il y eut. Et depuis le système est complètement foutu en l'air. Dans les faits, les nobles, villes libres et cultes ont leurs propres forces armées, à leurs frais. Rares sont les sous officiers permanents. Les officiers, eux, sont choisis par népotisme et en achetant littéralement leur charge.

Le dégoût que Diederick avait pour cette dernière catégorie se sentait. Influence cathayenne quand à la méfiance de la ploutocratie, mais également l'expérience qui parlait.

Les troupes d’État sont juste l'occasion pour des milices de porter de jolis vêtements, charmer les paysannes une fois de l'an et revendre leurs armes et matériels le lendemain. Les princes des provinces impériales ont leurs propres gardes d'honneur et autres, bien plus fiables et solides, et s'il faut du nombre... Il y a l'appel au mercenariat. Un peu comme les auxiliaires tribaux du Cathay, sauf que ceux ci le font uniquement pour l'argent. Certains sont même de complets étrangers ! La plupart du temps les mercenaires sont des combattants expérimentés, dirigés par des officiers de métier... Mais également prompts au pillage et aux atrocités. La plus grande compagnie de mercenaires impériaux est même réputée pour en redonner aux chevaliers bretonniens en terme de massacre et de violence. A côté de cela, il y a bien sûr les habituelles levées... Mais honnêtement, à part en défense, derrière un rempart, leur fiabilité est pour le moins... Hasardeuse, les meilleurs jours. En temps de guerre, la plupart des bandits et autres coupes jarrets deviennent également "fréquentables". Pardons et promesses sont offertes. Enfin, il y a les milices. Et en terme de qualité et de courage, je préfère ne pas m'approcher d'autre chose que de celles des villes. Elles sont en général correctement payées, équipées, encadrées, et parfois, entraînées régulièrement. Et d'autres ne valent rien. Et selon l'ennemi, les officiers et le conflit, une armée peut être accompagnée d'ordres de chevalerie ou religieux. La Reiksguard peut se vanter de disposer de centaines de cavaliers en armure complète montant de solides chevaux de guerre. Le culte de Taal peut lever des phalanges de piquiers. La religion d'Ulric a des ordres combattants solides, hardis, violents. Et il y a aussi les rares combattants à demi-griffon, griffon ou pégase. Un cheval avec des ailes d'oie. Puis il y a les collèges de magie...

Faisant une pause, Diederick but un coup afin de se rafraîchir la gorge.

En l'Empire de Sigmar, toute personne faisant usage de sorcellerie est soit livrée aux flammes, soit aux collèges de magie. Ce sont des.... Écoles ? Les.... "praticiens", y reçoivent les connaissances nécessaires pour utiliser leur "art", sans être corrompus par les démons et les sombres puissances. Ils ont été fondés sous Magnus le pieux, encore lui je sais. Et avec l'aide des longues oreilles d'Ulthuan. A Middenheim il y a la guilde des alchimistes, qui est liée à l'un de ces collèges je crois. Bref. En temps de guerre, certains sorciers peuvent offrir leurs services aux armées. Surtout si en face il y a des serviteurs des puissances sombres. Je crois que l'empire compte... Hum... Je crois qu'il y a sept ou huit collèges différents. Métal, vie, nature, ciel, feu, lumière, mort.... J'aurais juré qu'il y en avait un dernier.... Bah. Ça ne devait pas être important. Je m'en souviendrais un autre jour. Manque de chance, lors de la sécession de Marienburg, les collèges avaient été dissous. Politiques. Résultat l'armée impériale fut victime de la magie des sorciers longues oreilles sans pouvoir la combattre. Ce fut un désastre...

Mais assez parlé de tout ça. Il faut que je te demande quelque chose de la plus haute importance.

Les deux étaient très proches depuis qu'ils s'étaient penchés sur les cartes et ouvrages. Joignant ses mains aux siennes, il leva ses yeux pour contempler son beau visage.

J'avais pensé me laisser pousser la barbe, mais j'ai peur qu'elle cache trop mon beau visage.

Et tous deux de pouffer de rire. Une fois calmé, il se reprit.

Mais cette canne, fit il en la faisant tinter contre le bois du parquet, me donne elle un air sagace, séduisant à tes yeux ?
Le savoir c'est le pouvoir. Et savoir quand le garder, le cacher, le partager, cela est la véritable épreuve de ceux le détenant.

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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Gao Li avait toujours été discrète. Ce n’est pas ce que la plupart des gens s’imaginaient en la découvrant — c’est qu’elle n’était pas taillée comme une petite souris : grande comme la moyenne des hommes, avec des grosses épaules développées, une mâchoire qui tendait vers le carré, une voix rauque qui faisait qu’on pouvait la confondre avec un homme quand elle parlait et qu’on ne la voyait pas. Tous ces traits avaient provoqué à son encontre pas mal de moqueries, et les larges cicatrices qui avaient failli la laisser borgne n’amélioraient pas sa physionomie.
Et pourtant, avec Diederick, cette guerrière nomade se comportait naturellement comme une douce épouse. Toujours avec un magnifique petit sourire, les mains liées devant elle, elle semblait s’intéresser à chacune des paroles du long exposé de son époux ; si elle ne posait jamais de questions, ce n’était pas parce que ça l’ennuyait et qu’elle n’écoutait pas, même si parfois certains se vexaient et s’imaginaient ça. Mais Gao Li avait un tempérament doux, attentif, celui d’un écolier qui prend des notes et ne lève la main que lorsqu’il a réellement besoin d’une réponse. Et puis, quand Diederick partait dans des diatribes passionnées sur tel ou tel sujet, souvent elle s’asseyait dans un coin et regardait amoureusement son mari plus petit et plus fin qu’elle s’étaler dans de grands détails…

Après la petite tentative de blague de son époux, elle ricana poliment en couvrant sa bouche. Penchant la tête de côté, elle lui fit un clin d’œil.

« Je ne sais pas pourquoi tous les hommes que je rencontre depuis que je suis arrivée ici portent la barbe ou la moustache. On dirait que les gweilo y trouvent toute leur virilité…
Je comprends que tu ne veux pas choquer tes compatriotes, mais j’ai très hâte que tu te rases, que je puisse revoir ta bouille. »


Du bout du doigt, elle se détourna de Diederick pour toucher l’une des nombreuses cartes qu’il avait déployés sur la table. Avec l’index, elle traça les frontières des seigneuries féodales, et comparait les aplats de couleurs qui séparaient de manière chaotique (Mais bizarrement ordonnée…) les circonscriptions que des nobles se partageaient selon leurs héritages et leur influence.

« Mais je ne comprends pas… Pourquoi ce morceau-là en plein milieu, l’Ouestrie, appartient à Todbringer, alors que tu m’as dit que le Middenland appartient à ton frère ? Et le Nordland, c’est aux Nikses ou à Boris ? Si c’est son gouverneur, pourquoi Boris doit-il se marier avec sa fille ? »

La migraine allait s’emparer de Diederick alors qu’il fallait expliquer le système féodo-vassalique. Ce qui lui paraissait entièrement naturel semblait très bizarre et arriéré pour beaucoup de gens sur les autres continents…
Mais en fait, Gao Li ne cherchait pas vraiment une réponse à cette question. Alors que Diederick commençait à renchaîner, elle continuait de dessiner les frontières, descendant vers le Reik, et Carroburg.

« Ton frère a l’air d’être un homme bon. Il est rare que les princes ne soient pas cruels et cherchent à réellement œuvrer pour leurs sujets.
Je pense donc que c’est cela, notre avenir ? Vivre dans cette ville près du fleuve ? »








Le soleil commençait à se coucher. Devant l’hôtel particulier des von Bildhofen, les gardes de la maison étaient sur le qui-vive. Bien logé au milieu du Grasfmund, la demeure était une sorte de véritable château miniature — une sorte de triangle isocèle au milieu duquel se trouvait un magnifique jardin avec des arbres, et tout le reste un étrange bâtiment, où les étages étaient faits de bois d’œuvre mêlé à un colombage à la mode pour permettre de vivre dans un domicile moderne et confortable, tandis que le rez-de-chaussée était fait en pierre lourde, avec des barreaux aux fenêtres et des portes en acier de manière à résister à un siège urbain. Il y avait toujours des guetteurs pour jeter un œil sur la rue, quand bien même le quartier nord de Middenheim n’avait qu’une population faite d’aristocrates et de leurs domestiques, et que ce n’était pas ici qu’on allait craindre le brigand et le matamore. Mais les militaires et leur obsession avec le protocole était trop bien connue…

Un des véhicules ferrés quitta le garage pour se retrouver dans la rue, avec son escorte de deux cavaliers. Un valet (Un certain Varen, vieux bonhomme fidèle quarantenaire, si Diederick se souciait de connaître son nom…) avait préparé l’habitacle, et ouvrit la portière de la voiture tandis qu’on déverrouillait l’immense porte blindée de la maison pour permettre aux deux invités du Graf de sortir. Les enfants resteraient avec la famille pour ce trajet, ce qui semblait beaucoup embêter Gao Li qui n’était pas encore habituée à se séparer d’eux…
Pour l’occasion, ils s’étaient fait beaux. On avait rafraîchi les toilettes qu’ils avaient transportés depuis le bateau, mais pourtant, Gao Li avait refusé ses robes traditionnelles, pour à la place s’habiller à « l’Impériale », en fait à la mode d’Altdorf, un peu mise au goût et à la température du nord : une grande écharpe de vison, des couches de textiles et de corsets, un col qui couvrait toute sa gorge et un chapeau en feutre sur sa tête. Il n’y avait aucun vêtement dans le manoir à ses mensurations, mais visiblement l’une ou l’autre des femmes von Bildhofen s’était embêtée à ordonner à un tailleur de venir pendant le coma de Diederick afin d’habiller la jeune maman…



Le cocher fouetta les chevaux, et alors, le léger convoi se retrouva à nouveau dans les rues pavées de Middenheim, le côté joli de l’immense ville verticale. Ils étaient dirigés vers un endroit qui recevait extrêmement peu d’invités. Diederick avait déjà entendu que, dans le pays de Bretonnie, le palais royal était un lieu ouvert au public, et que n’importe qui, même le dernier des roturiers, pouvait entrer dans ses jardins et ses chambres pour voir de ses propres yeux les aristocrates, et peut-être, si Ranald était de son côté, croiser le monarque en personne se balader d’une chambre privée à une autre avec ses gendarmes.

Le palais du Graf de Middenheim n’avait strictement rien à voir avec cette philosophie. Il était bâti de façon impérieuse tout en haut de la ville, le plus en hauteur possible. On y accédait en passant par la Place d’Honneur Martial, une immense étendue pavée qui servait (Entre autres choses) aux exercices et aux revues des Troupes d’État de Middenheim, avec notamment le beau rôle offert au Régiment Propre de Todbringer et aux Panthères. Dans cette ville, les constructions neuves étaient fort compliquées à bâtir et les appartements se trouvaient fort limités en taille, la faute d’avoir fondé une cité sur une montagne par essence incapable de s’étendre, il pouvait facilement être perçu comme une insulte d’avoir un tel espace vide qui n’était jamais utilisé ni pour des foires ni pour des cérémonies religieuses, mais uniquement pour la gloire martiale du prince. Enfin, pas tout à fait : pendant le carnaval, une sorcière de glace du Kislev avait l’habitude d’utiliser sa magie pour transformer la totalité de cette place en immense patinoire pour le plaisir des Middenheimer, puis lors du dégel, le square transformé en piscine servait à des compétitions de water-polo. C’était un des moments fantastiques de la vie des locaux.

Passée la statue de Gunthar Todbringer, la voiture se retrouvait à longer les longues douves qui séparaient le Middenpalaz du peuple sur lequel il régnait, offrant à la vue de tous ses grosses tourelles élevées par une impérieuse pierre.


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La voiture passa sous la Grande Porte, celle-là même qui symbolisait Middenheim, celle qu’on trouvait sur tous les blasons de leurs Troupes d’États et l’héraldique personnelle des Todbringer. Des chevaliers-panthères faisaient le piquet devant, probablement les sentinelles les plus chères de l’Empire, mais à la vue de la bannière des von Bildhofen flottant sur l’habitacle, ils soulevèrent l’immense herse de fer forgé et ouvrirent les doubles-portes de bois qui menaient à un sas qui fut verrouillé avant que l’on ouvre l’accès à la cour. Et dire que cette bastide datait de l’ère d’Artur…

La voiture se retrouva dans la cour, et passa devant les grands bâtiments qui servaient de résidence et de lieu de travail pour le Graf et son conseil. On s’arrêta devant la porte principale, les militaires des von Bildhofen mirent le pied à terre tandis que de jeunes pages s’approchèrent pour attraper les rênes de leurs chevaux. Varen ouvrit la porte et étendit le marche-pied, avant d’offrir sa main gantée à ses deux maîtres, s’ils la voulaient, pour descendre.

La façade du château était magnifique. Et pour le coup, bien moderne, étrangère même — alors que toute l’architecture de Middenheim était brute, traditionnelle, du gothique de brique archétypique du nord-Empire, les yeux de Diederick se surprirent à cligner plusieurs fois des paupières pour bien s’assurer qu’il voyait les choses correctement : c’était du marbre blanc, avec de magnifiques rebords d’albâtre, et d’immenses fenêtres en verre cristallin. Il se rappelait en avoir vu dans des gravures et des tableaux : on aurait dit un mélange entre l’art Tiléen et l’art Bretonnien, ce fameux Style d’Oisillon dont raffolaient les mangeurs de grenouilles.
Au garde-à-vous, des hallebardiers en magnifiques uniformes du Régiment Propre de Todbringer tenaient les marches de l’escalier à droite à gauche. Mais ce sont deux chevaliers-panthères qui descendaient les-dites marches pour escorter les chambellans et domestiques qui se mettaient au service des arrivants — avec leurs armures de plates de Miragliano, et leurs cimiers et tanneries en peaux d’animaux d’Arabie, ils resplendissaient brillamment.

Devant toute cette petite escouade d’hommes et de femmes en jolies tenues bourgeoises, se tenait un bonhomme à la calvitie débutante, vêtu de doublets noirs et d’une fraise en soie de Cathay, le visage vieillissant légèrement poudré de blanc. Il respirait l’autorité et l’importance, surtout grâce au bâton à sa main, mais contrairement à Sparsam qui avait été froid et avait refusé de s’incliner au cimetière, celui-ci eut la courtoisie d’offrir une élégante révérence, courbant son dos avec un mouvement de la main devant Diederick et son épouse. C’est une fois tout droit qu’il se présenta.
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« Je suis Breugal, hausmeister du Graf. Bienvenue au Middenpalaz, sire Diederick et dame Maria.
Je me tiens à votre disposition pour la moindre requête, tout comme mon personnel. Si vous souhaitez bien me suivre, je vais vous amener jusqu’au Graf. »


Les deux militaires de la mesnie Bildhofen furent invités à aller garer la voiture et leurs chevaux ailleurs, alors que maintenant, Diederick était escorté par les deux Panthères et la petite foule de valets et soubrettes, jusqu’à l’intérieur.

Le changement de température était assez soudain. Alors que dehors, il faisait très frais, tant par la faute de l’heure pré-nocturne qu’à cause du climat peu clément de Middenheim (Même en ce tout premier jour d’été), à l’intérieur, il faisait doux. D’immenses cheminées creusées dans des alcôves de marbre répandaient la chaleur par des canalisations un peu partout, et si ça chauffait ainsi tout l’hiver, on ne pouvait être qu’horrifié par la facture en bois que ça devait représenter pour la maison ducale en fin d’année.

Diederick, son épouse au bras, remontait un immense couloir où se trouvait au sol un long tapis de pourpre. À sa droite comme à sa gauche, les épais murs de pierre étaient couverts de broderies et de tapisseries, et l’on voyait sur des râteliers des pièces d’armures dans un garde-à-vous désincarné, ainsi que des grandes toiles de maître qui représentaient des événements importants de l’histoire de Middenheim. Breugal, qui devait être habitué à jouer au conférencier, se permettait de dire à voix haute les noms de tous les peintres et de tous les titres des compositions — probablement pour bien montrer le prestige de la maison qu’il servait.

« Griselda Mettant Au Monde l’Enfant d’Ulric, peint par Gottio. Notez le jeu d’ombre et de lumière — le peintre est allé dans les caves de Middenheim pour son étude.
Myrsa le premier Chevalier Éternel, de Marco Giannetti. C’est l’un des fils du graf Gunthar Todbringer qui a servi de modèle — étudiez la blondeur des cheveux et le bleu-océan de ses yeux, ce tableau représente le plus bel idéal de l’homme Teutogen.
La Bataille de Beeckerhoven, peinture militaire de Hal Sesan. Il y commémore le moment où Einrich Moltke du Nordland, combattant le nécromancien Helsnicht, a été sauvé par une immense charge de l’armée de Middenheim sur son flanc. Quel plus bel exemple de l’importance de l’union entre toutes les provinces de l’Empire du Nord ? »


Le couloir amenait jusqu’à la salle de trône. Et il était facile de savoir où ça se trouvait : les portes étaient grandes ouvertes tout au bout, et on entendait très fort de la musique, et des applaudissements de mains rythmés. Et voilà que Diederick se retrouvait dans ce immense hall où les rois du Fauschlag, les Empereurs-Loups de l’âge des trois empereurs, et les grafs de la grande dynastie Todbringer avaient régné depuis des millénaires.


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Assis confortablement sur son grand trône, caressant son immense barbe rousse, Todbringer ricanait doucement, alors que la petite Halfeline à ses côtés était morte de rire. Josef Sparsam faisait un petit sourire sous son mouchoir, tandis qu’un grand chevalier participait aux applaudissements offerts au ménestrel responsable du mélodieux vacarme qui s’agitait avec son luth. Dans le reste de la salle, des dames et des sires nobles, impeccablement vêtus à la grande mode d’Altdorf-Middenheimisée claquaient en rythme.

Au milieu de la salle, chantait un grand homme altier et beau garçon, dont les longues oreilles le désignaient immédiatement comme un Elfe. Et, piégé dans son rythme, il offrait un couplet qui donnait envie à tout le monde de danser :

♫« Alle tage ist mîn klage,
von der ich daz beste sage
unde ir holdez herze trage,
daz ich der niht wol behage.
von den schulden ich verzage,
daz mir nie gelanc,
alsô noch genuogen an ir dienest ist gelungen,
die nâch guoter wîbe lône höveschlîchen rungen.
nu hân ich beidiu umbe sust gedienet und gesungen. » ♪


Et presque tous les hommes et les femmes de l’assemblée, Boris compris, se mirent à chanter en cœur comme d’une seule voix le refrain :

♫« Lieben wân, den ich hân,
gein der lieben wolgetân,
der ist immer unverlân
unde enkan noch niht vervân.
sol diu guote mich vergân,
sanfter waere ich tôt. » ♪



L’Elfe arrêta son instrument. Alors, il eut droit à une chaleureuse ovation, tandis qu’il offrait des courbettes dans tous les sens à tout le monde.

Breugal, qui s’était poliment arrêté aux portes de la salle du trône, utilisa sa grosse voix pour jouer au héraut :

« VOTRE ALTESSE :
MESSIRE DIEDERICK VON BILDHOFEN, ET DAME MARIA VON BILDHOFEN. »


Tout le monde s’écarta pour offrir un couloir humain qui menait vers le trône. Plusieurs têtes se baissèrent, sans pour autant aller jusqu’au bout dans la révérence — c’était plus un salut poli qu’une vraie marque de soumission. Boris Todbringer, lui, toujours assis avec un genou sur l’autre, caressait sa barbe avec un grand sourire. Il leva son verre bien haut, et avec une voix claire, le puissant graf de la ville s’exprima bien haut :

« Bonsoir à vous, messire, madame ! Un plaisir pour moi de vous recevoir ici !
Breugal, faites donc servir à boire à ces bonnes gens ! Qu’ils soient reçus avec tous les bienfaits que ma maison puisse offrir ! »

Il suffit d’un ordre pour que le Hausmeister agite une jeune femme de la main. La soubrette s’agita au trot, un peu terrifiée, pour ramener deux magnifiques coupes en argent, qu’elle tendit aux deux époux. Mais ce n’était pas elle qui offrit à boire — à la place, c’était une femme richement parée, qui n’hésitait pas à les regarder droit dans les yeux. Avec sa jolie bouille et son maquillage, il était sûr et certain qu’elle était une des dames de la cour.
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Elle regardait Diederick droit dans les yeux, tandis qu’elle tenait dans la paume de sa main un magnum de vin mousseux avec lesquels elle remplit les verres des invités.

« Château-Fernel, de la province de Gisoreux — ne le répétez pas à Karl-Franz, il ferait débarquer ses douaniers ici. »

Elle conclut ça d’un clin d’œil aussi chaleureux que celui de Maria. Et sa plaisanterie provoqua un léger amusement ponctué de petits rires dans la foule.

« Vous devez être fatigué, sire Diederick — nous allons donc mettre fin à ses réjouissances et se retrouver en petit comité pour dîner. Si vous-
– Ooooooh noooon… Pourquoi mettre fin à tant de gaieté ? Nous sommes le premier jour de l’été, ce devrait être un moment de fête pour oublier le temps de l’hiver ! »

Celle qui avait parlé était une élégante dame, plus belle, et mieux vêtue que toutes celles dans la pièce. Sans pudeur, elle s’approcha du trône, et s’assit sur un des accoudoirs, en se mettant à caresser elle-même la barbe du Graf.
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Elle se redressait, s’approchait du couple, et fit une petite révérence à l’un peut à l’autre.

« Bonsoir sire, bonsoir, madame…
Han ! Que vous êtes belle ! J’en ai des frissons — je n’ai jamais vu un visage aussi exotique que le vôtre ! On devrait vous peindre !
N’est-ce pas, mon loup ? Nous devrions la peindre ! »


L’Elfe ménestrel, comme s’il faisait partie de la discussion, approuva d’un hochement de tête.

« Je pourrais honorer sa figure en musique — sire Diederick, si vous ne vous sentez pas offensé, je vous offrirai un poème que vous pourrez chanter à votre muse !
– Tais-toi donc, satyre ; même tes beaux couplets n’honoreront point une telle beauté !
Je me présente, sire, dame — Anika-Elise von Nikse. Mon doux mari pense que vous préféreriez un dîner calme, mais je pense qu’il a tort. Après un voyage si éprouvant, comme nous l’avons tous entendu, peut-être vous sentiriez vous mieux à vous détendre avec de la musique et des rires ?

– Anika…
– Alleeeez, Diederick ! Vous pourrez dire que vous avez vu l’Empereur du Nord danser avec moi ! Savez-vous comment c’est dur pour moi de trouver une excuse pour faire danser ce vieux loup ? Je suis sûr que votre épouse doit dire en même de vous, tiens ! »

Maria eut un petit rire soudain, qu’elle cachait en baissant la tête. La Cathayenne était toute rouge, pivoine, dans un mélange de gêne timide et d’amusement. Visiblement, elle aimait le jeu de la noble un peu délurée tout autant qu’elle était mise mal à l’aise par les commentaires des nobles la regardant tous.

« Il a trouvé une excuse pour ne pas danser, comme vous voyez… » fit-elle avec une toute petite voix, en désignant la canne des yeux.
« Il a trouvé une excuse pour ne pas danser, dit-elle ! » répéta Anika-Elise plus fort, ce qui fit rire les dames et les nobles. « Ménageons tout de même sa patte. Allons, Breugal, que faites-vous encore debout là ?! Une chaise pour monsieur Diederick, hop hop hop ! »
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Diederick von Bildhofen
PJ
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Re: [L'Ennemi Intérieur] [Diederick] Les Deux Empereurs

Message par Diederick von Bildhofen »

Alors... Imagine les Nikse comme des gouverneurs héréditaires devant une allégeance personnelle à Boris. Un peut comme les tributaires du Cathay, mais c'est un lien plus ferme, mais toujours moins solide que celui entre un vice-roi et l'Empereur.... Boris dirige le Nordland par l'entremise des Nikse, jusque dans la mesure où ceux ci y consentent. Et les plus solides allégeances, dans la noblesse, sont scellées par le mariage. Quand au Middenland....

Mais alors que Diederick commençait à balbutier en essayant de formuler une réponse cohérente, Gao Li décida de rediriger la discussion.
Lorsqu'elle complimenta son frère, Diederick se senti d'une part heureux, et d'autre part un peu maussade. Heureux parce qu'elle parlait en bien de son frère préféré. Maussade parce que... Eh bien il n'était pas tout à fait en accord avec ce qu'il faisait.

Je suis moi même surpris qu'il soit aussi... libéral. Mais j'ai peur qu'il s'aliène ses vassaux ainsi. Et qu'il néglige l'entretien et le développement de ses troupes. Surtout qu'il dépend de l'aide de Boris. Mais oui, selon les événements, nous irons vivre à Carrobourg. Ou bien, si je parviens à convaincre mon frère de mon projet...

Prenant tendrement la main de son épouse, il fit se déplacer celle ci quelque peu à l'Est, jusqu'à placer son doigt sur Altdorf.

Il pourrait nous aider à nous établir ici. Altdorf. La capitale actuelle. Également là où devrait se trouver l'ambassadeur du Cathay, finit il en grinçant des dents.

Le fait qu'il ait terminé le voyage gravement alité et que pas un des bonhommes de l'ambassade n'ait cherché à assister son épouse paniquée, malgré le temps qu'il avait passé à les distraire durant le trajet, sur les subtilités de la langue impériale et les moult questions qu'ils pouvaient parvenir à formuler... Ç'avait été très peu urbain de leur part.

Estimant qu'il valait mieux être en forme pour la soirée, Diederick fit le choix d'entamer une petite sieste sur les genoux de son épouse. Il sommeilla longuement tandis que celle ci jouait avec ses cheveux avant de le laisser dormir.

C'est confus qu'il se réveilla. Son rêve interrompu par un bruit étrange, et une chaleur au niveau du ventre. Pleinement conscient, il fut prit de remords à l'idée de se lever et se préparer. Mandred était endormi, à roupiller sur son ventre. Aussi fut-ce avec l'âme en peine qu'il essaya de dégager l'adorable boule de poils pour que celle ci continue sa sieste ailleurs sur le lit. En vain.
Résultat il passa cinq longue minutes à gratter Mandred entre les oreilles avant de le laisser.

Ce fut donc en cette fin d'après midi que les tourtereaux eurent à s’apprêter. Certaines toilettes avaient survécus au trajet depuis le Cathay, mais il fallut tout de même user de nombreux accessoires, courtoisie de leurs hôtes.
Ainsi Gao Li délesta ses robes traditionnelles pour quelque chose qui ressemblait fortement à ce que portait Marta. Mais tout ce qu'elle portait ne pouvait qu'à ses yeux la rendre désirable, même en garçonne. Surtout que c'était dans des atours de cavalerie qu'il l'avait rencontrée et courtisée.
Quand à sa propre personne, l'império-cathayen avait prit le choix de se revêtir de ses soieries traditionnelles et son pantalon en cuir de tigre du Beng'aal. Un présent obtenu lors de son mariage, cadeau de son épouse. Et il portait également une fourrure, par-dessus ses atours, afin de rester chaud malgré l'air froid et le vent. Ça et sa canne.

Ils formaient tous deux un duo atypique.



Alors qu'ils étaient tous deux descendus après avoir souhaités un bon repas aux enfants, les rassurant – et rassurant également Gao Li – qu'ils rentreraient juste après que les jumeaux seraient endormis, ils eurent à patienter qu'on sorte l'un des véhicules renforcés du garage. Pendant ce temps, Diederick tapé le bout de gras avec l'homme qui allait leur servir de valet pour le trajet. Un bonhomme grisonnant, du nom de Varen. Ils discutaient de tout et de rien, mais durant cette courte discussion, l'expatrié pu observer que l'homme avait des mains usées. Par ailleurs, sa posture, automatiquement droite, presque par réflexe, suggérait un passé militaire. L'homme devait avoir servit dans l'une des troupes de la famille avant de se voir offrir l'occasion de servir les Bildhofen au plus près. Comme nombre de domestiques. En général, si un homme se démarquait en campagne dans le service de son officier afin de lui prodiguer les conforts appropriés à son rang, il était courant dans la noblesse d'offrir à pareille perle un emploi dans sa maisonnée.

Confiant qu'ils allaient être entre de bonnes mains, l'impérial monta à bord en premier, son épouse juste derrière lui, prête à le rattraper s'il venait à glisser. Puis les chevaux furent fouettés en avant Simone.
c'était le crépuscule, le ciel venait se teinter des derniers éclats du soleil tandis qu'une armée d'ombres venait habiller les rues traversées. Tout du long, le couple se tenait la main, Diederick frottant son pouce sur le dos de la main de Gao Li, essayant de la consoler alors que les jumeaux allaient passer la soirée sans eux. Puis il somnola le long du trajet, avant de se réveiller pour de bon lorsqu'ils arrivèrent en vue du palais du Graff, depuis la Place d'Honneur Martial.

Celle ci lui évoquait plus la danse et les amours d'un soir que l'honneur martial. Combien de fois lui et Siegfried avaient ils glissés sur la glace avec une donzelle au bras ? Trop pour les énumérer, comme de nombreux étudiants.
Les yeux dans le vague, Diedderick était en train de revivre des souvenirs passés plutôt que d'accorder quelque attention à l'architecture alentour. Il n'accorda à la statue de Gunthar qu'un coup d’œil.

Lorsque leur véhicule pénétra enfin dans la cour du grand loup, Diederick se pinça l'arrête du nez, ferma les yeux, soupira un coup, puis les rouvrit. Il était à nouveau concentré. Et bien lui en prit, car il eut sinon manqué le remarquable ouvrage artistique qu'était la façade du château, et les influences xénos qui étaient gravées sur celle ci. Il reconnaissait tout à fait le style néo-classique qui avait été en vogue dans les cités tiléennes, ayant lui même observé divers ouvrages en la cité de Los Cabos, sur la côte estalienne. Mais à cet art méridional venaient également se mêler des influences qu'il ne parvenait guère identifier. Ce n'est qu'en se remémorant certains tableaux qu'il parvint à placer son doigt sur ce qui le dérangeait. Les influences venaient de ce pays de baiseurs de chevaux, la Bretonnie. C'était très beau. Et agréable à l’œil. Mais cela n'enlevait pas le défaut intrinsèque de ce style : l'influence bretonnienne, qui comme tout ce qui venait de ce pays arriéré et sa noblesse barbare et lubrique, devait être tenu à bout de bras... Par précaution.
Non pas qu'il ait quoique ce soit contre les bretonniens. À part leur expansionnisme agressif. Leurs lois. Leurs coutumes arriérées. Le lamentable état de leurs libertés et le statut de presque esclave de la majorité de leurs sujets. La menace qu'ils représentaient pour l'Empire. Et le fait qu'ils étaient l'un des piliers usés par Marienbourg pour prévenir toute reconquête de la cité. Ainsi que leur noblesse au caractère exécrable, encore pire que les stirlandais.


La garde des lieux était richement équipée et habillée. Ce n'était pas l'Ostland. Tout ou presque respirait le prestige. Uniformes avec velours, armures gravées, peaux exotiques... La richesse et la puissance alliées.

Sortant le premier de l'habitacle, une main sur sa canne et l'autre attrapant celle de Varen, Diederick descendit pour se faire coiffer par l'air frais.

Merci Varen.

Se retournant, il attendit que son épouse échappe de la boite de fer et de bois, pour ensuite progresser à son côté, coude à coude. Mais lorsque ses yeux tombèrent sur maître de maison du Graff, l'impérial eut à battre des yeux quelques instants avant que l'aspect déconcertant du personnage ne lui passe. Il n'avait guère comprit le pourquoi du comment, mais il se sentait décontenancé et légèrement dégoûté par son aspect. Ce qui ne l'empêchait guère de faire de son mieux pour rester impassible et masquer son dégoût qu'il enterra sous l'étiquette.
Il ne connaissait guère l'homme mais étrangement ne pouvait s'empêcher d'être répugné par... Quoi au juste ? Sa calvitie ? Sans doute un peu. Son regard ? Également. Et milles petites autres choses.

Mais ses courtoisies restaient imprégnées dans ses manières, et il salut l'homme de la tête, poliment.

Menés vers l'antre du duc, les lourds battants de chêne gravés furent ouverts, permettant aux Bildhofen de pénétrer les lieux, et immédiatement être assaillis par la chaleur. Une température douce, en vérité, mais tout de même. L'écart de température entre l'intérieur et l'extérieur allait être peu agréable au retour. Surtout avec la fraîcheur nocturne qui viendrait s'accentuer à mesure que le temps s'écoulerait.
Lorsqu'ils évoluèrent à travers les couloirs du palais, Diederick observa de nombreuses cheminées et leur âtre allumé. Il doutait que celles ci soient allumées tout le temps durant toute la saison. Non, cela devait être l'occasion uniquement lorsque le Graff recevait des invités. Ce qui pouvait arriver souvent, mais tout de même.
Gao Li à son bras, il observa avec un œil intéressé les pièces d'armures le long du couloir. Les toiles de maître, quand à elles, l'intéressèrent. C'était de la belle œuvre que voilà. La finesse des détails, les jeux d'ombre, les symétries, la richesse des couleurs, les belles proportions et l'abime démontraient à quel point non seulement l'artiste maîtrisait son outil et sujet, mais aussi la richesse que le commanditaire était prêt à déployer pour la réalisation de l’œuvre.
La mention de la bataille de Beeckerhoven, éternelle querelle des historiens en tout poil, lui fit tirer un petit sourire en coin. Combien de fois des étudiants s'étaient pris le chignon lorsque venait le temps d'étudier ou débattre d'une bataille ou un fait passé, venant froisser les humeurs provinciales ? Nordlander et habitants du Middenland avaient chacun leur propre version de l'évènement, et seuls les morts auraient été en capacité de les départager une bonne fois pour toute. Ou l'accès à des sources de l'époque, ayant peu d'intérêt à altérer la réalité des faits... Si ceux ci avaient été en capacité d'être analysés objectivement. Donc poubelle les archives de Middenheim et Salzenmund. Décortiquer les registres communaux ou de temples qui existaient depuis l'époque aurait sans doute été plus fiable... Si ceux ci existaient toujours.
Mais malgré la splendeur des toiles impériales, l'esprit de Diederick ne pouvait s'empêcher de comparer le pinceau du reik aux magnifiques estampes de l'Extrême Orient. Non pas qu'un style soit supérieur à un autre. Juste... Différent. Et il devait admettre avoir une petite affection supérieure pour le style cathayen. Non pas que les techniques ou les artistes soient meilleurs. Après tout, il y avait ceux qui aimaient le sucré et ceux qui aimaient le gras. Juste une question de bon goût.
Ce qui était certain était que l'altérité cathayenne dans le domaine artistique en avait à revendre à l'art impérial. Mais peut être cela changerait il dans les années suivantes avec la présence de l'ambassade cathayenne à Altdorf ?

En attendant il n'allait pas jeter la pierre à maître Breugal d'être fier de servir le Todbringer. Si le personnage était fier de servir la famille, c'était alors tout à son honneur – et celui de son maître.

À mesure que leur petit groupe progressait à travers le palais, le brouhaha de la petite sauterie du Graf s'accentuait. Ils avaient visiblement commencés sans eux et s'amusaient comme des fous. Et à raison.
Lorsqu'ils eurent sous les yeux les festivités, Diederick fut dans un premier temps surpris de voir, près du trône, Sparsam en train de sourire. C'était surprenant. Mais au vu de l'air en place et la musique jouée, difficile de ne pas se prêter à sourire.

Et quelle musique... Le troubadour qui était l'attention de tous était un longues oreilles. Cela faisait un moment qu'il n'en avait pas vu de leur espèce. Le collègue Tartomiel avait été un des rares longues oreilles qu'il avait rencontré. Et socialisé avec, au long de leur longue expédition vers le Cathay. Grièvement blessé, l'elfe s'était heureusement remit de ses blessures.

Mais voilà que le refrain de la chanson chassait ces douloureux souvenirs et qu'il se mettait à le réciter dans sa tête jusqu'à la conclusion de celui ci.

C'est lorsqu'un calme relatif s'établit enfin après cette performance que le maître de maison décida de jouer au maître des cérémonies en beuglant comme animal leur arrivée. Diederick eut même un mouvement de réflexe sur le côté tant il fut surpris. Heureusement solidement accroché à son épouse il ne s'écroula pas à quatre pattes. Il était entre de bonnes mains, et la canne faisait son usage.

Presque immédiatement, un couloir humain menant vers le trône s'ouvrit, tandis que la plupart des invités présents saluèrent les derniers venus poliment. Et du haut de son trône, le puissant souverain de l'hiver leur souhaita la bienvenue, ce à quoi Diederick répondit en baissant de la tête à quelque trente degrés, pour bien remercier leur hôte de leur accueil.

Mais lorsque sous le commandement de de Todbringer une servante anxieuse vint leur amener de la boisson, une étrange femme dotée d'atours riches s'introduisit. Et quelle femme. Élégante, elle regarda Diederick et Gao Li droit dans les yeux, causant l'impérial à hausser du sourcil de manière interrogateur. Et dotée d'esprit également, au vu de la boutade de bon goût au lointain empereur qui provoqua de l'amusement dans les rangs.

Coupe en main, Diederick observa le fond de sa boisson avant d'humecter celle ci, puis de se décider à tremper ses lèvres dans l'alcool se contentant d'humecter sa langue de la boisson poliment. S'il voulait ne pas commettre d'impair, il allait à avoir à garder son esprit aussi clair que son sabre, et certainement pas embrumé par les vapeurs de boissons.

Sans doute quelque peu consciencieux quand à l'état de l'un de ses invités, Todbringer proposa au couple de le retrouver en privé, avant d'être très impoliment interrompu par une jeune dame.
Il se dégageait d'elle une fraîcheur étrangère et un charme quelque peu... enfantin ? Son comportement, la manière aisée par laquelle elle sortait des conventions et cadres normalement en vigueur... Était-ce là sa fille ? Cela ne semblait guère coller avec l'image qu'on lui avait donné de sa bâtarde. Mais non, il s'agissait là de l'épouse du sire. Anika von Nikse.

Et elle semblait être une très bonne vivante, tout aussi gaie que la pièce au moment de leur arrivée. Mais en permanence. Peut être avait elle un peu trop tirée sur la boisson. Ses petites piques amusantes semblaient indiquer cela. Mais la maîtrise de son discours, la clarté de ses phrases... cela mettait quelque peu l'idée en doute. L'explication la plus simple était de dame Nikse était naturellement délurée.

À l'invitation du longues oreilles, il se contenta de hocher de la tête, acceptant son invitation. Après tout, si le troubadour trouvait quelque chose de bon goût à déclamer, alors pourquoi pas ?

Mais quand au reste... Adoptant un sourire en coin, il voyait bien que Gao Li était gênée et dansait un pied sur l'autre, pas tout à fait à l'aise à l'idée de danser avec tous ces inconnus et ces nobles qui la regardaient. Autant l'attention des autres dans un combat ne la dérangeait pas, autant dans l'arène d'un bal en terre inconnue... Qui pouvait en toute honnêteté lui jeter la pierre ? Lui même avait été extrêmement mal à l'aise lorsqu'il fut introduit la première fois devant l'Empereur Dragon du Cathay.

Prenant discrètement la main de son épouse, il resserra légèrement sa prise sur celle ci pour la rassurer. Et lui offrir une porte de sortie.

Commençant avec un ton doux, il s'apprêta à rebuter poliment - et avec humour, espérait il - la requête de la noble. Dame Anika-Elise... J'ai bien peur d'être un mari désespérément jaloux et possessif, débuta-t-il avec un expression peinée. Un fin sourire, il continua. Et vu le nombre de charmants sires en ce lieu, poursuivit il en plaçant la paume de sa main sur son torse, je crains que mon pauvre cœur ne succombe à une tempête d'envie. Et je ne voudrais pas gâcher cette soirée par pareil éclat, finit il avec une expression mi-désolé, mi ironique.

Il espérait qu'en portant cet habit il tire quelques sourires de l'assemblée et que leur hôte se saisisse de cette main tendue pour les escorter dans la suite de la soirée dans un cadre plus privé.
Le savoir c'est le pouvoir. Et savoir quand le garder, le cacher, le partager, cela est la véritable épreuve de ceux le détenant.

Diederick Maria Reichenbach Bruno "Ruichen" von Bildhofen, Voie de l'étude de la connaissance
Profil: For 8 | End 8 | Hab 8 | Cha 10 | Int 10 | Ini 8 | Att 8 | Par | Tir 8 | Mag | NA 1 | PV 60/60

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« Alors que tu défiais le couvre-feu, tu découvres une vertu trop zélée. »

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