La Dame Blanche était un beau navire, mais sa taille réduite empêchait de disposer d’une belle cabine personnelle — mais il y en avait bien une, un luxe comparé à son ancien bâtiment. Bien isolé, l’étage juste en dessous de la barre, c’était une pièce avec de vrais lits (Et non de simples hamacs), qu’il partageait avec son staff personnel, et éventuellement des passagers importants s’ils devaient en récupérer durant leur court voyage. Il y avait là un bureau avec de quoi écrire, c’était d’ailleurs là que Hylke tenait le journal de bord — peut-être par galanterie plus que parce qu’elle faisait partie des officiers, d’ailleurs. Pourbus était déjà reposé dans ses draps, à lire une sorte de papier, peut-être quelques sombres choses liées à son art magique — ou bien ses papiers de futur divorcé. Surcouf put profiter de son temps libre ici, peut-être à commencer la lecture du cadeau de son écrivaine, à moins qu’il ne préfère tailler la discute avec son magicien de bord…
Toujours est-il, le réveil fut matinal. Personne ne vint réveiller Surcouf, mais l’habitude le faisait toujours être aux aguets tôt. Après une courte toilette à base d’eau froide jetée sur le visage, il put remonter sur le pont : il faisait un temps clair, mais bizarrement frais et très venteux pour un jour d’été.
Là-dessus, il trouva son bosco avec de grosses cernes autour des yeux — il avait veillé toute la nuit et maintenant devait bientôt venir son tour de dormir. Ingvar salua son capitaine, sans hurler à mort cette fois-ci (Il ne devait plus avoir la foi), et reprit comme si de rien n’était la conversation d’hier.
« Mon capitaine — tout l’équipage m’a notifié leur approbation. »
Il avait dit ça sur un ton bizarre, peu convainquant.
« Ce qui m’étonne assez peu : ils ont signé un contrat et aucun d’entre eux a envie d’être lâché à l’autre bout de Marienburg pour un voyage de vingt jours. Et puis la pression du groupe joue.
Mais moi j’suis fort pour noter le comportement des gens : deux d’entre eux semblent vraiment pas à l’aise, et comme par hasard, c’est les deux Impériaux ! Faut comprendre — leurs villages où ils sont nés et où ils comptent retourner faire leurs vieux os, c’est sous l’autorité de Karl-Franz. Ils risquent plus que nous à faire de la contrebande.
Officiellement, ils m’ont confirmé qu’ils obéiraient aux ordres, mais personnellement, je mets leur confiance en doute. »
C’était le travail d’un bosco d’assurer la discipline et l’obéissance sur le navire — autant dire, Surcouf avait bien le droit de dire à Ingvar de se démerder avec ça.
« Je sais pas trop c’est quoi votre style de commandement, capitaine, alors j’ai besoin que vous m’aidiez un peu :
Vous voulez que j’aie une discussion franche avec eux ? Ou je laisse couler en les surveillant juste ?
On peut aussi les dégager de force du navire et rompre leur contrat à la prochaine ville. C’est des Impériaux, pas sûr que leur plainte aille bien loin devant les prud’hommes de Marienburg… »