Celle-ci ressemblait plus à une loge de lupanar d’un cultiste du Serpent Suprême qu’à un antre de sorcier. Un très grand lit à baldaquins trônait, adossé contre le centre du mur opposé à l’entrée. Il semblait suffisant pour accueillir non pas deux, mais trois voire quatre personnes confortablement. Ses rideaux étaient d’un mauve tirant sur le violet, de même que ses couvertures et ses coussins. Les draps, eux, étaient d’un rose éclatant. Le tout semblait fait de tissus très délicats, très doux et très précieux. Les montants du lit étaient eux gravés de runes chaotiques slaaneshies et de scènes de luxure très réalistement sculptées. Le « plafond » du lit était lui fait d’une peinture dont la simple vue aurait suffit à faire brûler son propriétaire par des répurgateurs. Effectivement, des démons, des bêtes, des elfes, des hommes et des femmes y étaient représentés copulant dans toutes les positions imaginables, sans aucune distinction de race, le tout formant un spectacle d’orgie indescriptible où la morale n’existait pas. Etrangement, peut-être grâce aux runes gravées sur les montants, Zack aurait juré que les scènes n’étaient pas figées, mais que les acteurs de cette débauche slaaneshie bougeaient, essayant sans cesse de nouvelles positions qui repoussaient encore plus les limites de l’imagination et de la luxure.
D’ailleurs, les motifs étaient étrangement fascinants. Le kislévite était de plus en plus excité par les représentations de peinture qui réalisaient sous ses yeux fantasme sur fantasme, s’enfonçant toujours plus loin dans l’interdit, dans le tabou, dans... Le plaisir ?
Le Tokavaleskï se sentait comme absorbé par la peinture, à tel point qu’il ne distinguait plus rien d’autre que les scènes dont il semblait toujours plus près à mesure que son désir montait. Il se rapprochait de cette femme, de ce chien, de cette démonette, bientôt il pourrait lui aussi prendre sa place dans l’orgie et laisser libre cours à des instincts si bas qu’il ignorait même les avoir…
Un léger gémissement de Réglisse qui avait bougée dans son sommeil suffit à rappeler le monde extérieur au kislévite. Cette fraction de seconde de lucidité lui suffit pour se rappeler pourquoi il était là. Cette fresque envoûtante n’était pas l’expression de ses propres désirs cachés, mais l’expression de la perversité même, des fantasmes d’un esprit dérangé, malsain, amoral et entièrement dirigé vers le Prince du Chaos. Sans doute y avait-il de la magie là-dedans, et peut-être maintenant le comportement de Réglisse s’expliquait-il mieux. Si Zack n’était resté que peu de temps à la contempler, bien qu’il lui semblât de prime abord n’avoir regardé la peinture que quelques secondes, il se rendit compte à la douleur dans son cou qu’il avait dû rester plusieurs minutes les yeux rivés vers le plafond du lit, il pouvait imaginer l’effet dévastateur sur la santé mentale que devait avoir eu des heures de contemplation forcée du tableau, couplée avec les tortures et humiliations du vitki. Réglisse avait dû vivre un véritable enfer ici, un enfer qui chez Slaanesh se confondait vite avec paradis…Test d’INT : 3. Réussite.
Le reste de la pièce était lui chargé de meubles, de boiseries et de toutes sortes d’objets raffinés tous sculptés ou ornés de symboles ou de scènes ne laissant aucun doute sur la soumission de leur propriétaire au culte du prince des plaisirs et des souffrances. Outre des vases et autres objets d’ornements inutiles, il y avait surtout là des accessoires de beauté, des parfums, des peignes, des maquillages et toutes sortes de choses de ce genre.
Un énorme coffre de bois et de fer couvert de runes qui scintillaient d’un éclat rosâtre aux contours noirs était au fond de la pièce. Sans même avoir tenté de l’ouvrir, Zack comprit qu’il serait non seulement inutile, mais dangereux de tenter de le forcer. C’était sans doute là que le sorcier gardait ses objets les plus utiles, ceux qui justement auraient pu intéresser l’ex-noble.
Les murs, la porte et le plafond de la pièce étaient eux entièrement recouverts de tapisseries d’une gamme de couleurs allant du rose très pâle au violet foncé, qui représentaient des scènes de luxure et de plaisirs interdits, avec la présence également de moult sigles slaaneshis. Au moins ces tapisseries, elles, n’étaient pas magiques, sans quoi il aurait été difficile à quiconque ouvrait les yeux et restait à regarder les scènes pendant des heures de rester totalement sain d’esprit.
Enfin, l’examen lui révéla des anneaux de métal solides où l’on pouvait des chaînes, cachés sous la tapisserie à divers endroits. Cela devait permettre d’entraver plusieurs esclaves à peu près n’importe où et n’importe comment dans la pièce. Sûrement le vitki devait-il user d’un tel système pour s’assurer que les esclaves qu’il n’avait pas encore brisés soient inoffensifs pendant son sommeil. Et il se pouvait même qu’il les utilise pour « jouer » avec des esclaves à des « jeux » dont il raffolait.
Ayant pu constater qu’il n’y avait rien d’intéressant à voler chez son maître, du moins rien qui ne soit à sa portée, le Tokavaeslï se rappela qu’il devait rapporter le seau dans la salle de bain du jarl. Quand il entra dans la pièce confortable où trônait une riche vasque sous laquelle un ingénieux système de poêle permettait de chauffer l’eau, il reposa le seau à sa place. Décidément les norses savaient y faire en matière de salles de bains, car celle-ci, tout comme celle des Grouchenko, était au moins digne d’un riche boyard. Alors qu’il s’apprêtait à repartir, il entendit quelqu’un remonter la fenêtre derrière lui, de l’extérieur, et une voix connue l’appela en chuchotant avec insistance :
Psst ! C’est Lovisa !
Les murs et la porte de l’isba du jarl étaient très épais et bien isolants à tous points de vue. Il était donc totalement impossible qu’on l’entende. D’autre part, les autres pensaient qu’ils devaient prendre son bain pour se laver comme cela lui avait été ordonné par l’une des femmes du chef qui lui avait transmis les ordres du vitki. A priori, personne ne viendrait donc le déranger. Ainsi le kislévite ne prit-il même pas la peine de fermer le verrou de la salle de bains. Quand il se retourna pour faire face à la princesse, celle-ci put constater que son visage portait encore très clairement les traces des gifles infligées par Wilhelm Lutz.
-Oh par tous les dieux alors c’est vrai tu as été… Interrogé par « l’étranger. »
La princesse norse, bien qu’elle fut sans doute soit effrayée soit indignée ou peut-être juste surprise comme le laissait entendre ses paroles, gardait toujours un contrôle d’elle-même magnifique. Elle n’avait pas froncé un sourcil, pas tremblé, pas même dévié du regard. Son teint était resté le même, elle n’avait ni pâli, ni rosi. Son expression faciale restait noble, neutre et légèrement hautaine, comme à son habitude. Elle jeta un rapide coup d’œil derrière elle, à sa droite et à sa gauche pour vérifier que personne ne venait dans l’arrière-cour privée du jarl, puis elle reprit la parole, sur le même ton confiant et rapide que d’habitude :
-Nous n’avons pas beaucoup de temps si on ne veut pas être surpris, cette fois, donc, j’irai droit au but. Tu es avec nous ou pas ? Ce soir, je prendrais tous les risques et mes hommes récupéreront les armes, tu n’auras rien à faire et tu pourras les aider à atteindre le feu sans éveiller les soupçons. Mais j’ai besoin de savoir si on peut compter sur toi demain soir pour la fuite.
Crois-moi je suis ta seule chance de survie. Tu dois le savoir maintenant que tu as fais connaissance avec ce monstre. Et n’oublie pas, même si je peux te paraître désespérée, j’ai un atout majeur dans ma manche, garde ça en tête. Avec moi, tu vis, sans moi, tu meures.
Quel est ton choix ?
Elle avait parlé avec son ton neutre et attendait en surveillant les environs extérieurs, pour ne pas être surprise cette fois-ci. En fait, elle n’aurait pas eu un ton différent si au cours d’un dîné qu’elle aurait donné elle avait demandé à Zack s’il voulait ou non du sel sur son plat. La princesse était peut-être sans pouvoir, mais elle avait tout le port et le comportement qui seyait à une fille de roi de son rang. Ou en tout cas qui aurait sis à une altesse royale comme elle dans un pays plus civilisé. Ici, être fils ou fille de roi ne signifiait rien, car ils se succédaient à grande vitesse au fil des combats et des années. Seule la valeur individuelle permettait une distinction, et aux yeux des tous les autres elle n’était rien d’autre qu’une prétentieuse qui essayait de se donner un genre.