[Ludwig] Celui qui a vu l'abime

La Sylvanie inspire la peur dans le reste du Stirland. Depuis la sombre ville de Tempelhof, qui n'a pas eu de prêtre de Morr attitré depuis 800 ans, jusqu'aux contreforts des Montagnes du Bord du Monde, entre le bief de l'Aver et le Stir, la plus grande région du Stirland est un lieu de terreur et d'obscurité. On dit que les fantômes y évoluent en toute impunité à la nuit tombée parmi les collines Hantées et que l'épais brouillard des bois sylvaniens emprisonne parfois les âmes, les obligeant à y errer à jamais. La portion orientale de la province est la plus désolée, là où d'anciens châteaux noirs sont juchés sur leurs pics escarpés comme des vautours scrutant les villes en contrebas.

Modérateur : Equipe MJ

Avatar du membre
[MJ] Le Djinn
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Messages : 1199
Profil : FOR / END / HAB / CHAR / INT / INI / ATT / PAR / TIR / NA / PV (bonus inclus)
Localisation : Dans ma lampe...

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par [MJ] Le Djinn »

Un peu fâchée par l'obstination de Ludwig à étouffer sa soif d'aventure, la jeune Greta ne tarda pas à se mettre au lit, tournant le dos au héros du jour. Décidément, les femmes et leurs manies… Enfin! La nuit promettait d'être tranquille, malgré l'absence de pluie à l'extérieur. Après tout ce n'est pas comme si les morts du marais d'à côté allaient se réveiller pendant la nuit? En revanche il semblait que Morr se soit accaparé les rêves du jeune noble, ou plutôt ses cauchemars.

Car il se voyait, seul dans une forêt, entouré des conifères du Stirland. Le sol mousseux était remplacé par une épaisse couche de neige, qui tombait par flocons des branchages épineux. Des cris hurlaient partout autour de lui, gutturaux et affamés, porteurs de grands malheurs. Et nombreuses étaient les formes, jouant avec l'obscurité, qui se massaient autour de lui. Il courrait, fuyait, mais rien n'y faisait: elles étaient de plus en plus nombreuses à sa poursuite. Alors il chutait et la curie commençait: un orchestre de crocs, dents et griffes qui arrachaient sa chair, ouvraient son ventre et en extrayaient les organes pour les dévorer sous ses yeux. La mort refusait de le prendre et il souffrait tellement… Les grognements et bruits de mastication furent soudain percés par un chant caractéristique, très aigu et régulier.
Ludwig ouvrit les yeux face à un bec et un regard prédateur. Un "tchip?" interrogatif ne manqua pas de le faire sursauter jusqu'à ce qu'il comprenne la situation. Dehors le soleil était haut, Greta était déjà levée et avait trouvé dehors un animal pas comme les autres. Un oiseau de proie qui lui avait semblé étonnamment connu et qui n'avait pas cherché à s'enfuir quand elle s'était approchée de lui. Sigmurd était là, en chair et en os!

Les retrouvailles furent à la hauteur de la joie éprouvée par Ludwig, cependant il fallait faire vite! Le harnois n'allait pas se livrait tout seul et sortir de ce marais puant serait plus que profitable à la santé de tous les protagonistes. Par chance lors de leur traversée du marais des morts il n'y eut aucune victime de la guerre pour saisir un pied ou sortir de la tombe. Il semblait bien, à l'absence des silhouettes dans la brume, que ce phénomène de résurrection ne se produise que dans des endroits spécifiques, ce qui était plutôt rassurant.
A Schwarthafen ils se retrouvèrent attendu par Maître Rémy et une demi-douzaine de villageois de forte carrure équipés de lourdes massues. Le bourgeois, toujours dans ses éternelles robes sombres et un sourire ironique sur le visage ne tarda pas à parler, ouvrant les bras comme en signe de bienvenue. Sans doute avait-il été averti par les tours de garde du retour du duo et s'était préparé un petit texte en conséquence.


-"Bien le bonjour mes chers amis! Le harnois est-il avec vous? Oui je le vois. Voilà qui est parfait, oui vraiment parfait… Hé bien je ne vais pas vous retenir plus longtemps: votre navire est prêt à partir. Sachez que le comte sera plus que ravi de votre dévouement, il serait bien venu vous voir en personne mais il se prépare à aller chasser dans les Collines Hantées. Ne doutez pas qu'il sera informé de votre réussite avant son départ! Mais je parle, je parle, je parle, et vous voulez sans doute partir tant qu'il est tôt! Très bien, très bien. Donnez-moi le harnois."

L'homme fort de la bourgade se saisit sans ménagement de l'objet et l'observa sous toutes les coutures, un énorme sourire sur son visage blafard. Il laissa l'objet à un de ses hommes auquel il jeta un regard d'une violence sans équivoque. Une petite marche supplémentaire fût nécessaire pour arriver jusqu'aux quais, si on pouvait appeler deux rondins de bois des quais. En revanche une barque de pêche à peu près correcte mouillait là, attendant ses passagers. Ils devraient se conduire eux mêmes, mais vu la rusticité et la simplificité de l'engin, ce ne serait pas bien difficile.

-"Vos amis m'ont demandé de vous transmettre leurs salutations. C'est qu'ils se plaisent ici, voyez-vous? Ils ont décidé de rester et comme je les comprends! Quant à vous… Pour aller à Leichberg c'est d'une simplicité extrême: vous prenez à droite au premier virage du fleuve puis vous suivez le cours d'eau principal jusqu'à arriver. Enfantin. Il y a là un peu de provision pour une grande journée, le temps d'arriver.

Je vous souhaite bon voyage, damoiselle et messire. Sachez que le comte suivra vos progrès avec attention..."


Greta avait manqué de s'étouffer à la mention des autres voyageurs qui voulaient rester ici mais les brutes de Rémy avaient alors serrés d'autant plus leurs armes. La route de la liberté s'offrait à eux... Etait-il temps d'avancer sans se retourner ou de se battre contre ce qui semblait bien être des menteurs et des meurtriers, comme Arianka le voudrait?
Enfermé dans une lampe pendant des siècles, cloisonné dans une pièce de métal par une malédiction... Puis un jour un naïf est venu, me libérant dans sa sottise... Tant pis pour lui... Et pour tous les autres.

Avatar du membre
Ludwig Von Hoffenbach
Warfo Award 2018 du Dévot
Warfo Award 2018 du Dévot
Messages : 120

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par Ludwig Von Hoffenbach »

Ludwig bougeait dans son sommeil comme un possédé. L’horreur de son cauchemar terrifiait ses membres et son esprit. Alors que la terreur arriva à son apothéose, des cris aigus déchirèrent la consistance de ses songes. Ces cris chantant ne faisaient pas partie du rêve. Non. Ils venaient de l’extérieur et ils appelaient Ludwig. Le jeune homme ouvrit alors les yeux difficilement. Aveuglé par la lumière du jour, il lui fallut quelques secondes à cligner pour s’habituer à la clarté. Dans un premier temps, il ne reconnut pas la silhouette aviaire qui s’était posé sur lui. Puis doucement, tout lui revint. Ce cri, il le connaissait.

- Siiiiigmurd, hurla le jeune homme avec une voix enrouée, typique du matin.

Ludwig n’aurait jamais cru se livrer à une telle joie au retour de son compagnon. Peut-être avait-il déjà préparé son esprit au pire. Et bien non, Sigmurd était toujours en vie et il se portait comme un charme. Guy ne l’avait pas rôti. Malgré ses courbatures liées à sa nuit agitée, Ludwig se releva brusquement, ravi de retrouver son camarade à plumes. C’est alors qu’il vit Greta. Intrigué par tout ce remue-ménage, elle lui demanda la cause de tout-ceci. C’est ainsi qu’elle lui raconta qu’elle avait trouvé la pauvre buse des voûtes dehors. Ne semblant pas effarouché par sa présence, la jeune femme avait décidé de ramener Sigmurd jusqu’à la masure. Bien lui en avait pris. Jamais Ludwig n’aurait cru retrouver son oiseau de proie, aussi vite et en aussi bon état.

Après ce moment de joie intense, la réalité rattrapa Ludwig. Il fallait rejoindre Schwartzhafen au plus vite. Le jeune homme était pressé d’en finir avec cette quête humiliante. Après avoir rangé les quelques affaires qu’ils avaient sortis pour la nuit, les compères qui étaient désormais au nombre de trois, prirent la route. Par chance, les marais ne leur posèrent aucun problème. Il n’y eut ni morts-vivants, ni apparitions, ni glissades dans la fange.

C’est avec cette relative facilité qu’ils arrivèrent en vue de la ville décrépie de Schwartzhafen. Comme ils auraient pu s’y attendre, Maître Rémy, l’air narquois, les attendais avec une demi-douzaine de gros bras. Plus ils s’approchaient, plus Ludwig pouvait voir ce rictus ironique qui couvrait le visage arrogant du maître de Schwartzhafen. Cet homme était véritablement répugnant. Le fiel qu’il déversa lorsqu’il les héla, ne fit que renforcer le dégoût de Ludwig. Sans cérémonie et sans mot, il lui donna le harnois. A la grande surprise de Ludwig, Rémy fut véritablement satisfait du travail qu’ils avaient fait. La pièce d’armure était dans un excellent état et ils avaient faits vite. Il n’y eut qu’un bémol et cela il le comprit en plongeant ses yeux dans l’iris plein de noirceur de Rémy. Il n’avait que trop peu souffert lors de cette quête. Certes l’aristocrate voyait bien que la jeune femme était amochée, mais l’arrogant citadin n’avait nullement souffert de sa mission dans les montagnes. C’était agaçant pour le maître de Schwartzhafen, mais visiblement il n’en tint pas rigueur à Ludwig. Étrange preuve de miséricorde, ou inquiétante preuve de sa sociopathie ? L’Elu d’Arianka devait rester sur ses gardes.

Une nouvelle fois, le pire n’arriva pas. Bien qu’expéditif, Rémy resta conciliant et mieux que ça, il accéda aux demandes de Ludwig. Le jeune homme, Greta et Sigmurd allait pouvoir quitter cette ville damnée en bateau. Le terme était un peu exagéré. Lorsqu’ils arrivèrent aux quais, ou du moins au bord de la rivière, car la aussi le terme « quais » était exagéré, ils découvrirent que leur navire n’était qu’une simple barque et qu’ils allaient devoir ramer pour aller jusqu’à Leicheberg.


-"Vos amis m'ont demandé de vous transmettre leurs salutations. C'est qu'ils se plaisent ici, voyez-vous? Ils ont décidé de rester et comme je les comprends! Quant à vous… Pour aller à Leicheberg c'est d'une simplicité extrême: vous prenez à droite au premier virage du fleuve puis vous suivez le cours d'eau principal jusqu'à arriver. Enfantin. Il y a là un peu de provision pour une grande journée, le temps d'arriver.

Je vous souhaite bon voyage, damoiselle et messire. Sachez que le comte suivra vos progrès avec attention..."
.

Le souffle de Ludwig se coupa, alors que la colère monta des tréfonds de son corps. Qu’est-ce que ce monstre avait fait de ses camarades du radeau ? Il les avait tués, ou pire ? Face à cette évidente preuve de cruauté, Greta se raidit tout comme les molosses de Maître Rémy. Sentant la tension parcourir les humains, Sigmurd lâcha un cri aigu. Visiblement la buse des voûtes était lui aussi en colère. Bien que c’était probablement plus pour son repas du midi, que pour le sort réservé aux naufragés du navire « Averheim-Leicheberg ».

Pendant plusieurs secondes, Maître Rémy et Ludwig se regardèrent en chien de faïence. L’aristocrate n’attendait qu’une chose. Que le jeune nulner se jette dans la gueule du loup et qu’il puisse le massacrer, là où le revenant avait échoué. Mais bien vite le jeune homme se détendit, rattrapé par le bon sens. Greta était assez gravement blessée et en face Maître Rémy était accompagné de six hommes. Il était impossible de tenter quelque chose à l’encontre de cette vermine pour l’instant… Ludwig était hors de lui. Il avait en face de lui la pire ordure jamais rencontrée et il ne pouvait rien tenter contre lui. Arianka louait le courage et la loyauté, mais il doutait que cette dernière loue aussi la stupidité, l’arrogance et l’inconscience. Du moins c’est l’idée qu’il s’était fait du dogme de l’Ordre lors de ses recherches à la bibliothèque de Nuln.

En pleine conscience de ses actes, Ludwig fit alors un pas en arrière et tira le bras de Greta vers la barque. Il fallait quitter ce cloaque avant qu’il les aspire à jamais. Ils n'étaient plus les bienvenus ici. Ils ne pourraient pas aller explorer les montagnes de la veille. Il fallait partir. Le grand sourire narquois qui lui lança Rémy faillit le faire changer d’avis. Mais il tint bon. Le comportement insupportable de ce psychopathe ne devait pas le faire dévier. Il devait quitter cette ville en direction de Leicheberg.

Ils montèrent donc rapidement dans la barque de pêche et d’un coup de pied franc, il dégagea l’embarcation du rivage. Dans les premiers mètres, il ne put s’empêcher de fixer Rémy dans les yeux. Ils se reverraient, il en était sûr. Rapidement la distance entre leur barque et Schwartzhafen grandit. L’emprise de Maître Rémy quitta leurs épaules. Un certain sentiment de liberté soufflait à nouveau dans l’air. Probablement tout aussi relatif que la vie dans ces contrées hostiles, mais cela leur faisait du bien. Greta semblait particulièrement choquée par les dernières paroles de l’aristocrate. Nul ne sait quelles horreurs il avait pu faire subir à ses anciens compagnons d’infortunes. Et dans l’instant, Ludwig ne préférait pas le savoir. Sa colère atteignait déjà des niveaux difficilement supportables.


- Je reviendrai ici Greta. Je le promets. Nous n’avions aucune chance tout à l’heure. Mais à l’avenir, des chances se présenteront à nous. Nul ne peut se permettre d’exercer une telle cruauté et de bafouer des règles établies dans tout le reste de l’Empire. Un jour, Rémy sera vaincu, déposé et condamné à des supplices à la hauteur de ses actes. Je prie pour avoir les moyens de livrer à la justice de tels criminels… Arianka… Père…. Les derniers mots de Ludwig ne furent que des murmures dans la légère brise qui soufflait sur le Cours Noir, la rivière menant à Leicheberg.

Il fallait absolument qu'il retrouve son père. Il avait tellement de choses à lui dire...
Modifié en dernier par [MJ] Le Djinn le 07 févr. 2020, 22:21, modifié 1 fois.
Raison : MAJ XP! + 66 XPS!
Ludwig Von Hoffenbach. Voie de l'Inquisition. Répurgateur.

Profil: For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 11 | Par 11 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Profil (avec bonus): For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 10 | Par 10 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Médaillon de Morr: +1 PAR contre les morts-vivants.

Lien Fiche personnage: http://warforum-jdr.com/wiki-v2/doku.ph ... hoffenbach

"Mieux vaut un corps brisé, qu'un esprit corrompu!"

Avatar du membre
[MJ] Le Djinn
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Messages : 1199
Profil : FOR / END / HAB / CHAR / INT / INI / ATT / PAR / TIR / NA / PV (bonus inclus)
Localisation : Dans ma lampe...

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par [MJ] Le Djinn »

Enfin parti, songea sans doute Ludwig alors qu'il jetait son dernier regard vers la cité de Maitre Rémy. Pourtant, sur le dock, ce n'est pas la silhouette du dirigeant fou qu'il vit, mais une forme humanoïde immobile, lourdement encapuchonnée. L'air ne soulevait que quelque fois son capuchon pour révéler un visage aux traits squelettiques et aux yeux absents.

Avec un soupir de chagrin, Greta laissa sa tête retomber en arrière, s'allongeant ainsi à moitié dans la barque, observant un ciel gris qui ne voulait décidément pas se dégager. L'odeur de la vase montait au nez et Ludwig devait donner de puissants coups de perche dans la tourbe pour décoincer l'embarcation. Seul point positif: une brise modérée soufflait dans les voiles percées, permettant d'atteindre une vitesse de croisière correcte. Les abords du fleuve n'étaient pas des plus tranquilles: les éternels feux follets étaient de retour et des formes étranges, appartenant à des animaux fantastiques se perdaient de vue dans les roseaux et les hautes-herbes. Impossible d'identifier correctement une cible et notre héros avait bien intérêt à naviguer au centre de la voie pour éviter une mauvaise surprise sur les côtés.
A mi-parcours, après quelque heure de ce régime et alors que les rôles allaient être inversés, il fût temps de casser la croûte. Sigmurd, que ce voyage amusait fort peu, piailla de toute ses forces pour qu'au moins on lui file un bout de pain, ce que Greta lui donna sans se faire trop prier. A la surprise de Ludwig elle ne lui proposa même plus de partager la viande mais la garda pour elle, croquant dedans avec une avidité explicable uniquement par une grande faim. Cette collation terminée, la jeune femme récupéra la perche et appuya sur le fond tout en remettant la grand voile. Prochain arrêt: Leicheberg.

Et bientôt, en effet, la bourgade fût en vue! D'une taille similaire à Schwartzhafen, elle était pourtant bien mieux portante. En fait, si comparaison il devait y avoir, ce serait comme entre deux humains blessés. Sauf que l'un serait un vieillard bien portant, certes dans une région malade qui voit arriver avec optimisme ses dernières années, alors que l'autre serait peut-être un peu plus jeune mais malade au possible, couvert de miasmes incurables. Voilà la réalité de la Sylvanie: cette région empoisonnait tout.
Rien que l'accueil sur les pontons était différent. Là où avant ils n'avaient eu droit qu'à des marauds décharnés murmurant des menaces, là ce furent deux solides gaillards à peine amaigri qui vinrent aider aux attaches. D'un bon, Greta sauta du bateau pour donner un coup de main, lâchant à la fin du travail.


-"Merci messires! On arrive droit du Sud, de Schartz! Honnêtement vous êtes plus agréables qu'eux!"

-"Merci pucelle! Hé, c'pas dur d'être plus sympa que les gars d'en-dessous, c'est des tarés là bas, ils forniquent avec des monstres, on en est sûrs."

-"Oh. Si vous le dites... Bon, mon ami et moi nous recherchons les Gardes Noirs, on nous a dit qu'ils sont dans le coin, vous avez une idée d'où les trouver?"

Les deux marins s'entre-regardèrent et semblèrent réfléchir un moment. Après une hésitation ils se mirent d'accord sur l'église de Morr désaffectée, un peu en bordure du village. Un remerciement plus tard, le duo était en route. Il commençait à se faire tard et les rues se désemplissaient, pour autant le caractère très resseré de la bourgade avec ses maisons hautes à étages avancés donnait toujours une sensation d'engorgement et d'étroitesse. Effectivement, sur une petite colline à la pérophérie un temple partiellement en ruine était illuminé de nombreuses torches et recouvert de tentes qui avaient poussé à ses pieds comme des champignons beiges. En s'approchant il ne fût pas difficile de deviner dans les ténèbres et dans les ombres de lourdes armures nories, typiques des templiers du dieu des Morts. Ludwig touchait enfin au but.
Aux abords du camp, les lourdes sentinelles arrêtèrent net Ludwig, qui fût contraint de se présenter et d'expliquer à une montagne noire silencieuse le motif de sa visite. Dès que ce fût fait, le second des gardes, sans un mot encore, partit vers le campement qui devait abriter une cinquantaine de chevaliers. Il revint avec un homme d'âge mûr, à la longue barbe et la chevelure épaisse, engoncé dans une lourde armure. Ses traits étaient marqués par un chagrin passé et de cicatrices dont certaines semblaient récentes. Haut et fort, il dominait son fils d'une demi-tête et affichait à son encontre un air indécis, mêlant étonnement et indécision. Friedrich von Hoffenbach était son nom.


Image



Sans tarder et sans un mot il s'enfonça dans les ténèbres lointaines du camp, suivi par son fils et Greta qui se demandait bien à quoi rimait tout ce charivari. Finalement, quand ils furent hors-de-portée de voix, Friedrich attrapa les épaules de son enfant et les serra dans ses mains gantées de métal, fixant Ludwig droit dans les yeux avec un air fou.


-"Ludwig?! Ludwig c'est bien toi?! Mais qu'est-ce que tu fais ici bon sang? Tu es fou! Cette région est un piège! Tu ne devrais pas être là! Pourquoi es-tu venu?!"
Enfermé dans une lampe pendant des siècles, cloisonné dans une pièce de métal par une malédiction... Puis un jour un naïf est venu, me libérant dans sa sottise... Tant pis pour lui... Et pour tous les autres.

Avatar du membre
Ludwig Von Hoffenbach
Warfo Award 2018 du Dévot
Warfo Award 2018 du Dévot
Messages : 120

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par Ludwig Von Hoffenbach »

Ludwig ne bougeait plus d’un pouce, pétrifié par ce qu’il voyait. Ce n’est plus le visage arrogant de Maître Rémy qu’il regardait sur le ponton, mais celui d’un squelette encapuchonné, mort depuis des années. Rêvait-il ? Ce n’est qu’en se pinçant vigoureusement qu’il comprit que non. Même après avoir cligné plusieurs fois des yeux, l’apparition de disparaissait pas. Quoi ? Comment ? Ludwig ne comprenait pas ce qu’il se passait. Etait-ce une hallucination ? Ou peut-être était-ce un mirage ? La Sylvanie avait son lot de choses étranges et ceci en était peut être une. Perturbé, Ludwig se tourna brusquement vers Greta pour voir si elle avait vu la même chose. L’empressement du jeune homme fit violemment tanguer la barque. La jeune femme semblait perturbée, certes, mais plutôt par les événements récents. Son visage ne trahissait aucune peur ; elle ne semblait pas avoir vu ce mort vivant encapuchonné qui avait pris les traits de Maître Rémy. Et désormais, la seule chose qu’elle voyait c’était ses morceaux de porc sucrés qu’elle dévorait par dizaines. Le jeune homme se retourna en soupirant. Greta avait vraiment changé. Sa nonchalance devenait presque agaçante…. La barque ayant avancée, en se retournant Ludwig ne put revoir le visage décharné de cette chose. Il ne distinguait d’elle que son capuchon. De loin, on aurait dit une représentation du dieu Morr. Mais Ludwig savait que cette chose était bien moins sainte que ça.

Image
***

Après seulement quelques heures de navigation, les deux compères arrivèrent en vue de Leicheberg. La ville semblait clairement plus attrayante que Schwartzhafen. Les maisons étaient anciennes et architecturalement pauvres, mais elles n’étaient pas aussi délabrées que leurs homologues de la ville de Maître Rémy. La ville semblait entre de meilleures mains. Il y avait quelques hommes en armes sur les quais, il y avait des semblants d’infrastructure de défense et les lieux de cultes paraissaient plus ou moins entretenus. La corruption et la déchéance étaient tenues à distance de la ville, contrairement à Schwartzhafen qui pataugeait allègrement dedans.

D’ailleurs, lorsque Ludwig et Greta accostèrent, ils furent immédiatement pris en charge par de solides gaillards qui avaient l’air totalement sain d’esprit. Pendant l’espace d’un instant, il se serait cru en dehors de Sylvanie, dans un lieu entièrement soumis aux lois impériales. Bien que Leicheberg était à la frontière entre la Sylvanie et le Stirland, la ville étaient bien plus proches des coutumes sylvaniennes que de celles de Wurtbad.


-"Merci messires! On arrive droit du Sud, de Schwartz! Honnêtement vous êtes plus agréables qu'eux!"

-"Merci pucelle! Hé, c'pas dur d'être plus sympa que les gars d'en-dessous, c'est des tarés là-bas, ils forniquent avec des monstres, on en est sûrs."

-"Oh. Si vous le dites... Bon, mon ami et moi nous recherchons les Gardes Noirs, on nous a dit qu'ils sont dans le coin, vous avez une idée d'où les trouver?"

Encore une fois, Ludwig fut agacé par Greta. Elle faisait un périple éprouvant dans une des régions les plus dangereuses de l’Empire et elle se comportait avec la désinvolture d’un Halfling dans sa cuisine. Heureusement qu’ils avaient quittés Schwartzhafen, car il n’aurait pas toléré un nouveau « Schwartz’ » dans la bouche de la jeune femme. Excédé par le comportement de Greta, Ludwig se concentra sur la phrase du gaillard qui les avait fait accoster. Ainsi la corruption de Schwartzhafen était de notoriété publique ici ? Très bien. Il trouverait bien un jour le moyen de lancer une expédition punitive contre cette ville damnée. Si même les autres villes la haïssait, il n’y avait pas de raisons que Wurtbad s’oppose à un petit nettoyage. Mais bon… Il était encore très loin de là. Il n’était pour le moment, qu’un pyromane en cavale qui avait de nombreux assassinats sur le dos. Bien que ces assassinats étaient pour lui, plus que justifiés, son statut au guet de Nuln avait probablement été révoqué depuis plusieurs semaines et il était même possible que des avis de recherches le concernant avaient fleuris sur les murs de l’Empire. Il allait rapidement avoir un choix à faire. Continuer sa vie de justicier de l’ombre, ou revenir dans la légalité pour continuer son œuvre de justice. La deuxième solution était pour l’instant inenvisageable. Peut-être que son père y pourrait quelque chose.

- Mon père sert la garde noire de Morr. J’ai à lui parler.

Visiblement la phrase de Ludwig finit de convaincre les deux hommes qui leur avaient prêté main forte pour accoster. Ils se mirent alors en route vers le campement des gardes noirs. Après avoir traversé la ville, il n’y avait plus de doutes, il n’y avait nulle comparaison possible entre Leicheberg et Schwartzhafen. La ville semblait bien moins malsaine, bien mieux entretenue et mieux défendue. Bien qu’il y ait d’évidentes traces d’extrême pauvreté parmi la population, celle-ci semblait moins sauvage, moins désespérée et surtout moins haineuse. Une gouvernance à la fois bien plus stricte, mais aussi bien plus humaine avait visiblement eu des conséquences bénéfiques. Ludwig aurait aimé avoir l’avis du dirigeant de cette ville, sur celui de sa voisine de Schwartzhafen.

Après une dizaine de minutes, dans les rues de Leicheberg, l’Elu d’Arianka arriva en bordure de la ville, à proximité du camp des gardes noirs de Morr. C’est à ce moment que les deux gaillards qui les avaient accompagnés décidèrent de les laisser continuer seul. Ludwig les remercia et il continua en direction du camp. Son cœur se mit à battre à la chamade. Enfin, après plusieurs mois, il allait enfin pouvoir retrouver son père. Quelles seraient leurs réactions quand ils se reverraient pour la première fois depuis plus de dix ans. Il ne savait pas répondre à cette question. Déjà, serait-il heureux de revoir son fils ? Là non plus, Ludwig n’en avait aucune idée. Des dizaines de questions affluaient dans l’esprit de Ludwig, et pour la plupart il ne savait pas y répondre. Il allait falloir improviser.

Il fut sorti de ses pensées par un colosse en armure noire qu’il l’arrêta net. Sans un mot, il lui fit comprendre qu’il n’avançerait pas d’un pouce tant qu’il n’aurait pas décliné son identité.

- Je m’appelle Ludwig Von Hoffenbach. Je suis le fils de Friedrich Von Hoffenbach, qui est en faction ici. Je dois lui parler. Je suis venu de Nuln pour cela ! Cette jeune femme m’accompagne.

Le garde impressionnant de par sa carrure, ne dit mot. C’est son camarade qui partit en direction des tentes, avertir de l’arrivée de Ludwig. Le jeune homme se sentit soulagé. Il aurait cru que cela aurait été plus difficile de rentrer dans le camp. Il n’avait même pas eu à montrer l’acte officiel du Stirland qui était dans sa poche.

Le corps entier de Ludwig se contracta quand il vit arriver avec le garde en faction, un homme barbu aux cheveux grisonnants. Bien loin de l’image qu’il en avait dans ses souvenirs, Ludwig n’avait pourtant aucun doute sur l’identité de l’homme. Son visage taillé à la serpe et ses sourcils broussailleux le dévoilait. C’était un Von Hoffenbach. C’était son père. Ludwig prit quelques instants à l’observer. Il semblait étonné de voir son fils. L’incompréhension se lisait dans ses traits. Le temps et les évènements l’avaient aussi vieilli. Malgré tout, il paraissait toujours aussi fort, toujours aussi déterminé. Au vu de quelques vilaines cicatrices sur son visage, il avait récemment combattu. Il faut dire que les gardes noirs devaient avoir pléthore de monstres à abattre dans les environs…

Ludwig ne pouvait pas se détacher du visage de son père. Treize ans, treize longues années qu’il ne l’avait plus vu. Ils ne savaient presque rien l’un de l’autre. Ils avaient tant de choses à rattraper. Mais le pouvait-il ? Il était peut-être trop tard. Avant que le moindre son puisse sortir de la bouche de Ludwig, Friedrich l’emmena loin en bordure du camp, à l’abri des oreilles indiscrètes. Visiblement il y avait une autre raison à cet éloignement. Les gardes noirs restaient muets. Aucune voix n’émanait du camp. Tous vaquaient à leurs occupations sans bruit. Une règle de silence avait visiblement été imposée aux templiers de Morr.

-"Ludwig?! Ludwig c'est bien toi?! Mais qu'est-ce que tu fais ici bon sang? Tu es fou! Cette région est un piège! Tu ne devrais pas être là! Pourquoi es-tu venu?!"

- Père…. C’est bien moi père. Le voyage ne fut pas de tout repos en effet, mais je suis là. A Leicheberg. Grâce à ceci.

Ludwig plongea la main dans sa poche pour en ressortir l’acte officiel du Stirland. Le document avait souffert du périple, notamment des divers plongeons dans les marécages, mais il était encore lisible. Ludwig le tendit alors à son père. Il n’en avait plus besoin. C’est à ce moment que Greta compris qu’elle ferait mieux de se retirer. Les affaires personnelles de Ludwig ne la regardaient pas. Sigmurd, lui, resta fasciné par le vieil homme en armure qu’il avait devant lui.

- Il n'y aura ni reproche, ni rancune dans mes propos, mais du temps a passé depuis mes six ans. Je ne sais pas si des bribes d’information vous sont parvenus depuis Nuln, mais je dois vous faire part des événements qui ont eu lieu ces treize dernières années. Après votre départ, tout a changé. Katha… mère s’est fait aspirer par le désespoir. Rapidement tout est devenu de mal en pis. Les finances ont chuté, notre vie a déraillé. Je me suis retrouvé à la rue, pendant que Mère et Johanna vivaient des maigres rentes. Bien loin du cocon familial et de l’amour d’une mère j’ai souffert, j’ai maudit, j’ai pleuré, mais j’ai survécu. Il y a quatre ans, j’ai réussi à intégrer le guet. J’ai pu renaître, prendre un nouveau départ. Mais c’était naïf de ma part. Le passé devait me rattraper un moment ou un autre.

La colère, la haine et la honte submergeait Ludwig alors qu'il se rappelait les événements de cette nuit qu'il n'oublierait jamais. Serrant les poings à s’en faire blanchir les phalanges, il continua son récit.

- Le désespoir n’avait fait que croître dans le cœur de mère. Perdue et attirée par des sirènes, elle a sombré dans un océan de vices et de blasphèmes. Guidée par des personnes abjectes, elle a aussi entrainé Johanna dans la damnation. Quand je les aie retrouvées, toute leur bonté avait disparu de leur âme. En ce jour, ma tristesse fut atroce. Elles n’étaient plus que des copies inhumaines de ce qui furent ma mère et ma sœur. Dans la panique et la tristesse, je me suis juré d’annihiler les personnes qui avaient enraciné le mal dans notre famille. J’ai réussi. Les responsables de cette hérésie ont été châtiés. Enfin, quasiment tous… Et avant que l’Inquisition se mêle de ces crimes de foi, j’ai aussi dû mettre fin aux souffrances infinies de maman et de Johanna. Jamais je n’ai connu plus de honte et de colère. Mais je ne pouvais me soustraire. Je devais les libérer des démons auxquels elles avaient accordé leur confiance.

Avant que Friedrich puisse dire quelque chose ou qu’il montre la moindre réaction, Ludwig enchaîna.

- La damnation de maman et de Johanna a été vengée, mais mon âme et mon corps en seront marqués à jamais. A jamais je serais le témoin des atrocités des puissances de la Ruine…

D’un geste vif, Ludwig retira son capuchon, dévoilant intégralement à la lumière de la lune, son visage ravagé. Son père eu tout d’abord un mouvement de recul. Le templier de Morr était habitué à la guerre et à son lot de blessures spectaculaire, mais celle-ci le choqua. Certes c’est son fils qu’il l’arborait, mais pire que cela on pouvoir qu’elle avait été faite par une lame précise et méticuleuse. Elle n’avait pas été causée lors d’un duel effréné, mais bien à la manière d’un charcutier qui dépèce sa pièce de barbaque. C’était tout bonnement effrayant. A nouveau, avant que Friedrich ne puisse parler, Ludwig continua son monologue.

- C’est la raison pour laquelle je vais te poser une question. Une question qui m’a fait venir jusqu’ici. Je voudrais que tu me répondes sincèrement, car la réponse me donnerait ainsi la cause de tout ceci. J’aimerais que ces tourments cessent et que je puisse repartir de l’avant en faisait fi du passé. Qu’est-il arrivé à oncle Kurt ? On m’a dit que tu étais avec lui ce jour-là. Que s’est-il passé ? Papa, je t’en prie…

Friedrich semblait horrifié. Quel sombre secret cachait-il derrière ce visage tourmenté ? Zania la pécheresse avait-elle raison ? Ludwig ne savait que penser. Il préférait attendre que son père s’explique. Du moins s’il en avait le courage. Le mensonge serait la seule façon pour qu’il le déçoive. Le jeune homme savait qu’il ne pourrait pas rattraper treize ans de vie avec son père, mais au moins il attendait de lui de la franchise et de la dignité. Au fond de lui, Ludwig priait pour que le dernier membre en vie de sa famille proche, soit une personne intègre.
Modifié en dernier par Ludwig Von Hoffenbach le 25 févr. 2020, 23:51, modifié 2 fois.
Ludwig Von Hoffenbach. Voie de l'Inquisition. Répurgateur.

Profil: For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 11 | Par 11 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Profil (avec bonus): For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 10 | Par 10 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Médaillon de Morr: +1 PAR contre les morts-vivants.

Lien Fiche personnage: http://warforum-jdr.com/wiki-v2/doku.ph ... hoffenbach

"Mieux vaut un corps brisé, qu'un esprit corrompu!"

Avatar du membre
[MJ] Le Djinn
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Messages : 1199
Profil : FOR / END / HAB / CHAR / INT / INI / ATT / PAR / TIR / NA / PV (bonus inclus)
Localisation : Dans ma lampe...

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par [MJ] Le Djinn »

Un éclair noir traversa les yeux fatigués de Friedrich von Hoffenbach. Visiblement pris de vertiges ou de douleur, il lâcha l'épaule de son fils, le regard perdu dans le vide, semblant observer une présence invisible au loin. A tâtons le vieil homme trouva une pierre sur laquelle s'asseoir. Dans sa détresse il pris sa tête entre ses mains, respirant fort et suant à grosses gouttes. Pris par cet élan de folie, le garde noir paniquait. Quelques mots s'échappèrent alors de ses lèvres, alors qu'il tentait de traiter les informations et les questions qui se pressaient dans son esprit.

-"Katharina... Johanna… Pourquoi… Pourquoi?!"

Loin d'avoir écouté la suite, l'ancien marchand, dévasté, fixait le sol. Il passa une main sur ses yeux et gémit durement. Si les événements contés par Ludwig semblaient à lui-même lointains et passés, ils étaient annoncés d'un bloc à un homme loin de chez lui, sans doute rendu inquiet et anxieux par les années d'éloignement de sa famille. Un certain malaise s'installait alors que le fervent d'Arianka ne pouvait qu'observer son géniteur, effondré, perdre tous ses moyens. Il ne pouvait plus articuler d'avantage qu'une syllabe, comment dans ce cas obtenir une réponse à la question qui tourmentait son fils?
D'ailleurs l'implication de l'interrogation était un poignard supplémentaire planté en son cœur. Le fait de demander ce qui était véritablement arrivé quand Kurt von Hoffenbach avait été retrouvé mort était lourd de sens. Loin d'être innocent, ce questionnement accusait indirectement Friedrich d'avoir participé de près ou de loin à l'assassinat de son propre frère. Il lui fallut trois bonnes minutes pour reprendre suffisamment ses esprits pour répondre. Et quand il le fit, il y avait un chagrin dans ses iris, une détresse sur son visage. L'homme souffrait, sans le moindre doute.

Rassemblant pourtant ses forces, il leva le visage vers son fils, fixant sans le vouloir sa vilaine cicatrice. L'heure de la vérité avait sonnée, mais elle ne serait pas belle à entendre.


-"J'étais là Ludwig, quand Kurt a été tué, c'est vrai. Kurt et moi… Nous avions des dettes, de lourdes dettes, de l'argent perdu dans des spéculations. Nous avions appelé un usurier pour nous refaire, Isidore Karlung, un sale type des bas-fonds, mais qui voulait bien nous prêter. Rien n'y a fait et nous nous sommes retrouvés encore davantage sur la paille. Kurt a découvert peu après que cet usurier était impliqué dans notre déveine, il avait tout manigancé."

Il avait reposé ses mains le long de ses jambes. Il serrait tant des poings que ses articulations devenaient blanches alors que ses dents grinçaient. Le flot de mots se faisait torrent de haine et de colère.

-"Kurt m'avait demandé de venir ce jour-là pour me montrer ses découvertes, mais Isidore et ses hommes me suivaient. Ils sont entrés après nous et on décapité Kurt, les salauds! Ils m'ont emmené dans un hangar pour me torturer et me forcer à leur vendre tous mes biens. J'ai pu me jouer d'eux et les tuer, tous! Mais je savais... Je savais que les associés d'Isidore me chercheraient. Je me suis engagé dans la Garde Noire pour les éloigner de vous et gagner ma tranquillité."

Épuisé par cette révélation, le père de Ludwig passa sa main sur son front qu'il avait humide de sueur. Encore une fois il baissa la tête, hagard et perdu mais quelque part soulagé d'avoir tout révélé.

-"Je pensais qu'après quelques mois de service je pourrais quitter la Garde Noire et vous retrouver. Pourtant... Quelques semaines après sa mort, le cadavre d'Isidore a été dérobé dans le cimetière de Nuln, avec une dizaine de cadavres de meurtriers et criminels. J'ai été pris d'un pressentiment et je me suis engagé auprès des prêtres en charge de l'affaire. Nous avons découvert que des centaines de corps de tueurs, bandits et assassins ont été ramenés ici, dans les Collines Hantées. Nous sommes venus, avec le Frère-Commandant Hidrago, pour tirer cette affaire au clair."

Réaffirmer l'objectif de sa mission devait avoir eu un effet cathartique. La peur dans sa voix avait cessé et la douleur semblait avoir diminuée. Lentement il caressa la cicatrice de son fils.

-"Et quelle est l'histoire de cette... Balafre... Elle ne te sied pas, fils..."
Enfermé dans une lampe pendant des siècles, cloisonné dans une pièce de métal par une malédiction... Puis un jour un naïf est venu, me libérant dans sa sottise... Tant pis pour lui... Et pour tous les autres.

Avatar du membre
Ludwig Von Hoffenbach
Warfo Award 2018 du Dévot
Warfo Award 2018 du Dévot
Messages : 120

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par Ludwig Von Hoffenbach »

Les nouvelles avaient fauché la vigueur dont semblait faire preuve son père, cinq minutes auparavant. La mort de Katharina et de Johanna l’avait mis plus bas que terre. Le vieil homme semblait perdu et en proie à de terribles souffrances. Il paraissait comprendre le geste de son fils, mais ce qu’il n’intégrait pas, c’était la raison pour laquelle sa femme et sa fille étaient tombées aussi bas. Son départ avait-il causé plus de mal qu’il avait prévu ? Quoiqu’il en soit, Friedrich était livide. Brusquement rattrapé par le passé et par les conséquences de ses actes, son père semblait au bord de l’apoplexie.

La tirade qu’il lui avait dite il l’avait tellement récité dans sa tête des mois et des mois, tel un mantra, que quand il s’était retrouvé devant lui, elle était sorti de sa bouche à une vitesse incontrôlée. Surement en avait-il trop dit en trop peu de temps. Mais bon. Son esprit avait tellement souffert depuis que cette histoire avait commencé, que le fait de tout raconter à son père l’avait probablement soulagé, apaisé. Maintenant il fallait espérer que ses mots n’aient pas trop heurtés Friedrich et que son géniteur puisse enfin lever le voile sur cette sombre affaire qui avait pris ses racines dans sa plus tendre enfance.

L’état de son père rendait le pauvre Ludwig mal à l’aise. Sans savoir comment agir, il le regardait se déconfir sous ses yeux. L’innocence semblait prendre le pas sur les doutes qu’il avait nourri à son égard. Mais était-il pour autant, blanc comme neige ? Apparemment choqué par la mort de sa femme et de sa fille, sa scène de tristesse pouvait très bien cacher une vérité bien plus glauque au sujet de l’assassinat de son frère. Après tout, cet homme qu’il avait devant lui, il ne le connaissait pas vraiment. Quelques souvenirs heureux de son père remontaient dans l’esprit de Ludwig, mais tous étaient si vieux, si embrumés, qu’il ne savait pas s’ils avaient été véritablement vécus. Dans son esprit, ses six premières années dans ce monde avaient été heureuses. Il n’avait manqué de rien, les revenus de ses parents assurant largement sa vie de petit garçon de l’Altestadt. Ses parents avaient été aimants et sa sœur avait été complice de tout ses amusements enfantins. Bref, pour un citoyen de l’Empire, il avait eu ce qu’on appelle une enfance dorée. Malheureusement, bien des choses avaient changées depuis. Et qui sait quelles marques le temps avaient pu laisser sur Friedrich Von Hoffenbach. Restait-il toujours le bon père de ses souvenirs ? Ludwig l’avait toujours cru. C’est d’ailleurs ce sentiment qui l’avait poussé à retrouver son père alors que tout son monde s’écroulait sous le rire railleurs des dieux hérétiques. Mais maintenant qu’il se trouvait devant lui et qu’il était à quelques instants d’entendre la vérité ; il n’en n’était plus aussi sûr.

Comme pressenti, la vérité ne se fit pas attendre. Lorsque les lèvres de son père se mirent à bouger, Ludwig se crispa, suspendu à ce qui allait être dit. Son monde pouvait très bien s’écrouler une nouvelle fois et il doutait que son esprit s’en sorte indemne dans ce cas. Trop de déceptions, trop de tristesse, trop de honte avaient déjà fait pâlir l’âme du fidèle d’Arianka. Fort heureusement, les explications de Friedrich furent claires et abondèrent rapidement vers son innocence. Au fil des mots, des phrases, des secondes, le corps de Ludwig se relâcha. L’homme qui se tenait devant lui semblait honnête et bon. Les chuchotements du passé à l’oreille de Ludwig étaient véridiques, et rien n’avait enlaidit le portrait qu’il s’était fait de son paternel. Friedrich n’avait pas tué Kurt Von Hoffenbach. Zania la pécheresse lui avait menti. A vrai dire cette putain avait bien réussie son coup. Cédant à la naïveté il avait rapidement succombé aux doutes que lui avait instillé la slanneshie. A cause d’elle il avait souffert des semaines durant, assaillis par des pensées atroces. Non, son monde et sa famille n’avaient pas été aspiré entièrement par le malin. Les racines de la corruption peinaient toujours à élargir la tumeur qu’elles avaient façonnés dans la famille Von Hoffenbach. L’étoile de la bonté luisait encore dans le cœur de Ludwig et Friedrich. Ensemble, père et fils pourrait donc continuer à repousser les forces du chaos loin de leur monde... D’un clignement de cils nerveux, Ludwig mit fin au délire manichéen qui se jouait dans son cerveau. La vie l’avait tellement marqué qu’il devait souvent se concentrer pour voir la vie avec des filtres autres que blanc et noir.

Le jeune homme avait été si soulagé d’apprendre l’innocence de son père qu’il en avait même éclipsé le fond de ses paroles. Ainsi donc, toute cette histoire avait commencé par une banale histoire de dette... Rapidement, son père et son oncle avait donc du faire appel à des hommes malhonnêtes pour tenter de se refaire une santé économique. Et comme cela fut probable, ces criminels n’avaient eu que pour seul volonté de tirer la famille Von Hoffenbach dans son filet.

Ludwig maugréait. Ce Isidore Karlung et ses associés étaient des ordures de la pire espèce, mais comment Friedrich et Kurt avaient pu faire preuve d’autant de naïveté et d’irresponsabilité. C’est à cause de cette folie que la vie de Katharina, Johanna et Ludwig avait complètement déraillé. Les deux hommes avaient été punis pour ce qu’ils avaient engendrés. Mais à quel prix ? Ludwig était un peu secoué par les nouvelles. Ainsi donc ce n’était pas les dépenses de sa mère qui avaient détruit les finances familiales. Elles étaient déjà inexistantes quand son père avait quitté la maison. Les deux femmes avaient donc du vivre avec de maigres rentes et peut-êtres quelques subsides émanant de la comtesse Emmanuelle pendant près de vingt ans. La chute de niveau de vie avait dut être dur à vivre, mais pas autant que ce qu’avait du affronter Ludwig dans les bas fond, à l’age de six ans. Ceci était une des choses qu’il n’arrivait toujours pas à s’expliquer et qui expliquait son dégoût encore plus profond pour sa mère. Comment avait-elle pu abandonner son fils de six ans à la rue, alors qu’elle même continuait de vivre avec sa fille de neuf ans sous un toit. Cette question hanterait Ludwig probablement toute sa vie.

Sortant de ses songes ou il se ressassait inlassablement le passé, Ludwig prit la parole alors qu’il voyait son père angoissé par la signification de long silence.


- Quelle folie.... Soit. Le passé laissera des traces indélébiles dans nos esprits et dans nos cœurs, mais pour autant nous devons continuer à avancer... A ce sujet, pourquoi diable aurait-on voulu récupérer les cadavres de Isidore et de ses séides dans le cimetière de Nuln, pour les amener ici en pleine Sylvanie ? Cela n’a aucun sens. En savez vous plus ?

Pour argumenter et éviter que son père ne lui assène un non définitif, Ludwig enchaîna.

- Ma vie a été à ce point chamboulé que je ne sais plus trop quoi faire, ni où aller maintenant que je vous ai retrouvé et que vous m’avez dit la vérité. J’aurai une faveur à vous demander père. Afin d’en finir définitivement avec cette histoire sordide qui à détruit près de dix-huit ans de ma vie, j’aimerai si c’est possible, vous rejoindre dans la quête dans laquelle vous vous êtes lancé. Avez vous la possibilité de m’amener devant le Frère-Commandant Hidrago ? J’aimerai que tout se termine et que mère et Johanna puisse reposer en paix définitivement, et ce malgré leurs crimes impardonnables. Je vous en prie père...

- Et cette balafre ? Elle m’a été causé par l’une des chefs de l’organisation dans laquelle se sont fourvoyées mère et Johanna. Au dénouement d’un rude combat cette putain à réussi à trouver une faille. J’ai perdu connaissance et je me suis retrouvé quelques temps plus tard, au sol, grièvement blessé au visage. Pendant ce temps, cette catin avait fui honteusement, comme en témoignait les traînées de sang dans les escaliers. Ma profonde blessure à la jambe l’avait considérablement ralentie, mais le temps que je reprenne connaissance elle était bien loin. Je ne l’ai jamais revue. Elle se faisait appeler Red Karla... Je ne veux plus tomber dans des folies vengeresses, mais je jure qu’un jour, son sang coulera sur ma lame.

Se laissant caresser le visage par son père, Ludwig lui rendit un sourire timide. Un sourire de petit garçon. Le sourire qu’il lui faisait surement lorsqu’il avait six ans... Les sens apaisés, il se laissa tout doucement envahir par la joie de retrouver celui qu’il avait tant rêvé revoir. Malheureusement, ils avaient encore fort à faire avant que cette tragédie soit loin derrière eux. Rencontrer le Frère-Commandant Hidrago était un bon pas vers la fin de ce cauchemar.
► Afficher le texte
Ludwig Von Hoffenbach. Voie de l'Inquisition. Répurgateur.

Profil: For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 11 | Par 11 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Profil (avec bonus): For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 10 | Par 10 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Médaillon de Morr: +1 PAR contre les morts-vivants.

Lien Fiche personnage: http://warforum-jdr.com/wiki-v2/doku.ph ... hoffenbach

"Mieux vaut un corps brisé, qu'un esprit corrompu!"

Avatar du membre
[MJ] Le Djinn
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Messages : 1199
Profil : FOR / END / HAB / CHAR / INT / INI / ATT / PAR / TIR / NA / PV (bonus inclus)
Localisation : Dans ma lampe...

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par [MJ] Le Djinn »

Un piaillement aigu de Sigmurd interrompit la conversation. Le jeune volatile semblait avoir faim ou alors ressentait-il le ton sombre de la conversation, ce qui l'inquiétait. Friedrich von Hoffenbach sembla alors remarquer la buse des Voûtes et lui rendit un regard oblique, très incrédule. Son expression mi-figue, mi-raisin raisonna avec l'attitude butée et méfiante et l'oiseau qui lui rendait bien sa moue.

-"Allons Ludwig, quel animal est-ce donc là?"

Une fois la réponse donnée, la tension redescendit d'un cran, permettant à Sigmurd de se détendre également. Restait la question d'amener le fervent d'Arianka au commandeur des Morriens. Le père parut un peu déstabilisé par cette demande et se gratta l'arrière du coup de désarroi. Ses yeux cherchaient quelque chose au sol sans que l'on puisse dire quoi: il présentait les signes de la gêne.

-"M'accompagner? Mais voyons Ludwig, c'est très dangereux! Nous serons face à des morts et des sans doute bien pire! Tu ne peux pas sérieusement penser que..."

L'ancien noble vit alors l'étincelle dans les yeux de son fils, tout comme la détermination un peu puérile qui l'habitait. Etait-ce cette flamme dans le regard qui le décida à accepter ou alors le sentiment que de grandes choses se joueraient? De grandes choses dans lesquelles Ludwig pourrait avoir un impact positif?

-"Je vois. Si tu te sens prêt pour venir avec la Garde, fils, alors je ne m'y opposerai pas. Viens."

D'autorité le vétéran attrapa son enfant par l'épaule pour le guider vers le campement. Avec un signe de tête il indiqua à la jeune Greta qu'elle pouvait les suivre, bien que cette dernière ne paraissait pas très sûre de son coup. Quelque peu perturbé par la tournure des événements, Sigmurd lâcha une série de piaffement sonore droit dans l'oreille de son maître.

-"Tu ne devrais pas trop songer à la vengeance, Ludwig. Elle n'apporte jamais rien de bon, quoi qu'en dise les bardes et les poètes. On passe sa vie à courir après un adversaire qui nous a depuis longtemps oublié, tout ça pour l'abattre et se sentir vide tout objectif. J'espère... J'espère que tu sauras dépasser tout ça. C'est difficile mon fils, terriblement difficile."

Entretemps, sans un bruit, la mercenaire les avait rattrapés, toujours sans un bruit. Tête baissée, silencieuse, Greta semblait même regretter de se trouver ici. Qu'avait-elle à dire à cet homme âgé qu'elle ne connaissait pas? Pour notre héros cette rencontre était un aboutissement, une fin, peut-être le début de quelque chose. Mais pour elle? Que cela signifiait-il? A sa mine basse et ses yeux mi-clos, pas grand-chose.
L'entrée dans le campement se fit encore une fois sans heurts. Qu'avaient-il à craindre de toute façon, accompagnés par un représentant de la soldatesque? De même, demander une audience au Commandeur ne fût pas des plus difficiles, même si cela se fit d'une étrange façon, comme par un langage des signes. En effet: aucun bruit ne régnait dans le campement, à part ceux des pas et du bois touchant le métal. Pas un éclat de voix, pas un cri, pas une injure, une plaisanterie ou une remarque, juste un silence complet. Friedrich lui-même avait adopté un mutisme de mort alors qu'il passait la limite entre le domaine des Serviteurs et le monde profane.

Le temple qui constituait le quartier général des combattants zélés avait sans doute connu des jours meilleurs. Dans un autre temps il avait dû être le domaine des sigmarites, c'était visible aux nombreuses gravures représentant des faits d'armes du roi-dieu et les statues à moitié détruites montrant l'empereur en majesté. Le lieu avait été lourdement renforcé: des plaques de bois et de métal très solides couvraient les trous dans les murs et le toit, sur les fenêtres et vers l'extérieur. En interne c'était comme un village en resserré, un assemblage de cabanes ordonnées mais rudimentaires d'où dépassaient des gousses d'ail, de l'aubépine, du Bois-Tue-Loup et des symboles religieux en vrac. Trois sentinelles engoncées dans les fameuses armures noires, lourdement armés de lames à deux mains dentelées, montaient la garde. Encore une fois Friedrich ne dit rien, salua, fit quelques gestes qui reçurent l'approbation des surveillants, et pénétra dans la salle suivante, accompagné de ses invités. Greta voulut dire quelque chose mais il lui fit immédiatement signe de se taire.

La pièce devait servir de salles des doléances. Très sobrement meublée: une table à tréteaux et six chaises, un petit meuble sur lequel reposait une carafe de vin et quelques verres, rien de plus. Chacun s'assit et se releva, imitant en cela le père qui le fit en premier, à l'entrée du Frère-Commandant Hidrago. L'homme paraissait la quintessence du dirigeant d'un ordre morrite: le crâne chauve (ou rasé?), l'air aussi austère qu'un juge impérial, une expression fermée et pincée, des yeux qui passaient à tous les protagonistes dans l'ordre, les analysant de haut en bas. Une voix mal assurée jaillit de la gorge du frère-soldat:


-"Permission de briser le vœu de silence, commandant?"

Une expression indéfinissable passa sur le visage du chef.

-"Accordée."

-"Je vous présente Ludwig, mon fils… Et… Son amie… Ils m'ont rejoins ici par peur pour ma situation et souhaiteraient se joindre à nous. Mon fils voudrait se venger de qui-vous-savez et…"

Avec une vivacité incroyable Hidrago tourna la tête, plongeant ses yeux noirs dans le regard de Ludwig. Il sembla à notre héros qu'il s'affaiblissait et Sigmurd, comme paralysé, n'osa même pas piailler.

-"Parce que tu penses pouvoir survivre aux Collines Hantées, fils du frère Friedrich? Et quelle garantie avons-nous que tu n'es pas du côté de l'ennemi?"
Image
Enfermé dans une lampe pendant des siècles, cloisonné dans une pièce de métal par une malédiction... Puis un jour un naïf est venu, me libérant dans sa sottise... Tant pis pour lui... Et pour tous les autres.

Avatar du membre
Ludwig Von Hoffenbach
Warfo Award 2018 du Dévot
Warfo Award 2018 du Dévot
Messages : 120

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par Ludwig Von Hoffenbach »

- Il s’appelle Sigmurd, c’est une buse des voûtes. Il m’a été offert par un fauconnier d’Averheim lors de mon voyage vers Leicheberg. Je dois avouer que sa compagnie m’est très agréable, bien qu’il soit particulièrement grognon, dit Ludwig d’un sourire moqueur.

Rapidement, la légèreté qu’avait prise la discussion dérida les deux hommes et la tension s’envola. Friedrich sourit à son fils et tous deux eurent un petit rire nerveux. La relation entre les deux hommes était encore un peu crispé, mais là rien de bien étonnant. N’ayant vraiment jamais existé, la relation père-fils était encore à construire et cela prendrait du temps. Heureusement, c’est une des seules choses que Ludwig possédait en abondance.

-"M'accompagner? Mais voyons Ludwig, c'est très dangereux! Nous serons face à des morts et des sans doute bien pire! Tu ne peux pas sérieusement penser que..."

Visiblement, son père n’était pas très à l’aise avec le fait de l’emmener devant son commandant. Après tout c’était logique. Friedrich venait de retrouver son fils depuis à peine vingt minutes et voilà que celui-ci avait déjà la volonté de partir dans une aventure qui pourrait signer son arrêt de mort. De plus, la Garde Noire étant un ordre militaire et religieux qui semblait très strict, Friedrich devait hésiter à impliquer, son fils, un civil.

Après quelques minutes d’hésitation, mitraillé par le regard fanatique de Ludwig, Friedrich finit par accepter. Après tout ce qui s’était passé dans la vie du jeune homme, son père ne pouvait pas lui refuser cette dernière volonté. Il devait mettre un terme définitif à cette histoire délirante, et il ne pourrait pas le faire s’il était mis à l’écart. Maintenant il ne lui restait plus qu’une chose à faire, et pas des moindre, convaincre le Frère-Commandant Hidrago.

Attrapé par l’épaule, Ludwig suivit Friedrich dans le camp de la Garde Noire de Morr. Là encore, le silence rendait la progression pesante. Seul le bruit des pas et de la forge résonnait dans le campement. Tous les soldats présents, même ceux qu’ils croisaient, se cantonnaient à leur mutisme en répondant par un étrange langage des signes. Retrouvant Greta sur le chemin où ils l’avait laissé, Friedrich fit un signe à cette dernière de les suivre. Là encore, tout se fit en silence. La jeune femme se contenta de les suivre, la tête baissée. Ludwig se surpris à avoir quelques remords pour elle. Dans quel bourbier il l’avait emmenée. Greta avait perdu son père et avec lui de nombreuses raisons de vivre et voilà maintenant qu’il l’entrainait dans une mission dans laquelle elle n’avait rien à voir. Peut-être avait-elle envie de quitter définitivement cette région de malheur ? Lorsqu’ils en avaient parlé dans les montagnes au-dessus de Schwartzhafen, elle était restée évasive et n’avait pas fait part de ses volontés. Peut-être cela avait changé depuis. Il faudrait qu’il lui en touche deux mots. Mais là encore, il n’osait pas rompre ce silence qui semblait être la règle parmi les morriens. Tant pis. Ils auraient tout le temps d’en discuter par la suite. Pour l’instant la priorité était qu’il convainque le Commandant Hidrago. Greta, elle, n’avait rien à prouver aux morriens, elle ne faisait que suivre le père et le fils Von Hoffenbach.

Après quelques instants à marcher dans le campement silencieux de Morr, Ludwig arriva devant un vieux temple sigmarite qui semblait avoir été transformé en centre de commandement pour la Garde Noire. L’édifice était vraiment ancien. Les murs étaient lézardés à plusieurs endroits et les ornementations confessionnelles étaient pour la plupart en mauvais état. Certaines avaient souffert du temps, d’autres paraissaient avoir été violenté par des combats ou par des dégradations iconoclastes. En effet, comme l’avait dit Maître Rémy, Sigmar n’était pas véritablement le bienvenu ici. Du moins plus depuis longtemps.

Progressant dans ce temple réhabilité par les adeptes d’un autre dieu impérial, Ludwig vit que le bâtiment avait perdu ses fonctions religieuses pour des fonctions bien plus utilitaires. A bien des endroits il avait été renforcé avec de solides plaques de bois et de métal et la nef du temple était parsemée de tentes à usage militaire. Le quartier général du détachement morrien était ici. Tous les ordres émanaient de ces tentes. Les officiers y fourmillaient. L’endroit était si stratégique que des sentinelles en armure lourde étaient postées à endroits réguliers et toisaient de leur visière sombre les soldats qui déambulaient. Bien que lourdement protégés, les adeptes de Morr craignaient vraisemblablement eux aussi la réputation de la Sylvanie et des horreurs qu’on y trouvait. Des gousses d’ail, d’autres plantes diverses et variées dont Ludwig ne connaissait pas le nom, ainsi que divers symboles religieux avaient été apposés sur les murs de la nef sigmarite, comme pour repousser les monstres qui hantaient ces terres. Ludwig plein d’inconscience et d’ignorance ne savait pas trop quoi penser de cela, mais toujours est-il qu’il se sentit rassuré par la sécurité qu’il l’entourait. Au fur et à mesure que les horreurs qu’il avait vécues dans le Wissenland s’éloignaient, son inconscience s’amenuisait. Il prenait progressivement conscience de la folie de certains de ces actes et à quel point ces derniers auraient pu le mener à sa perte. Imperceptiblement il avançait vers la fin du tunnel. Il n’aurait bientôt plus besoin de se cacher derrière le fanatisme pour vivre. Du moins c’est ce que son âme espérait. Les paroles de son père sur la vengeance quelques minutes auparavant n’avaient fait que pousser son cerveau à ressasser cette vérité. Cette folie devait cesser.

Ludwig, son père et Greta arrivèrent dans une petite pièce qui jouxtait la partie droite du transept. Celle-ci avait dû être il y a de cela des années, une salle de condoléances. Des dizaines de fidèles avaient dû se presser ici pour témoigner de leurs péchés au prêtre du temple, afin que ce dernier puisse les absoudre. Désormais cette salle était nue du moindre signe et de la moindre fonction religieuse. Elle devait servir de bureau au Frère-Commandant Hidrago lorsque ce dernier devait s’entretenir en privé avec quelqu’un. Pour l’instant la salle était vide et seule la présence d’une carafe, de verres de vin à moitié vides et de quelques documents sur le bureau, témoignaient de l’utilisation récente de cette pièce.

A peine eurent-ils le temps de s’asseoir pour attendre le Frère Hidrago, que ce dernier fit son apparition. Imitant son père, Ludwig se releva brusquement. Greta fit de même. Il semblait être la coutume de se lever lors de l’arrivée d’un officier. Le Frère-Commandantg Hidrago avait la tête de l’emploi. L’homme avait toutes les caractéristiques physiques de ce que Ludwig imaginait être un Frère-guerrier au service de Morr. Il était chauve, il avait le visage taillé à la serpe, les traits austères et ses expressions étaient pincées et méfiantes. Son regard était aussi en accord avec son statut. Ses yeux toisaient Ludwig et Greta d’un regard inquisiteur et on aurait cru qu’il pouvait juger le taux de corruption d’un être d’un seul coup d’œil. Le personnage était particulièrement impressionnant et pour une fois Ludwig n’en menait pas large. Maître Rémy était dans son genre impressionnant, mais le dégoût qu’il inspirait incitait à lui adresser la parole de manière sarcastique. Pour Hidrago c’était tout à fait différent. Son aura inspirait le respect.


-"Permission de briser le vœu de silence, commandant?"

Pour la première fois, le silence fut brisé. Ludwig en sursauta presque tant il en fut étonné. Mais à réfléchir cela était tout à fait logique, ils n’allaient pas discuter ensemble par signe ! De toute façon, Ludwig ne connaissait pas ce langage.

-"Accordée."

-"Je vous présente Ludwig, mon fils… Et… Son amie… Ils m'ont rejoint ici par peur pour ma situation et souhaiteraient se joindre à nous. Mon fils voudrait se venger de qui-vous-savez et…"

-"Parce que tu penses pouvoir survivre aux Collines Hantées, fils du frère Friedrich? Et quelle garantie avons-nous que tu n'es pas du côté de l'ennemi?"

Ludwig sursauta légèrement surpris par la vitesse à laquelle le commandant morrien avait tourné la tête. Ce dernier le regardait désormais droit dans les yeux à la recherche du moindre mensonge, de la moindre peur. Un peu perturbé par l’aura d’Hidrago et par la façon dont il l’avait apostrophé, Ludwig lui répondit avec quelques difficultés.

- Euh… eh bien… oui. J’ai parcouru des centaines de kilomètres depuis Nuln, pour retrouver mon père et connaître le fond de vérité. Maintenant que je suis ici, je ne compte pas fuir les responsabilités. En cours de route, j’ai affronté un culte des puissances de la Ruine, comme en témoigne ma blessure à la joue, des goules et même des créatures mortes animés par je ne sais quelle abominable magie. J’espère donc être à la hauteur et à la mesure de ces collines hantées.

Ayant repris un peu d’assurance, Ludwig enchaîna.

- Pour mon allégeance, je ne peux que vous offrir la bonté de mon père, ma parole et cette atroce blessure à la joue. On a défiguré mon corps, mais en aucun cas on a souillé mon âme ou ma volonté. Maintenant, je ne peux que me soumettre à votre jugement. Il vous sera peut être difficile de me faire confiance ou d’accepter un civil dans vos rangs, mais je vous prie de croire en ma sincérité.

- Peut-être aimeriez-vous limiter mon action à un cadre précis ? Peut-être même pourriez-vous me donner une mission singulière que je pourrais remplir ? Mon seul et unique but, je vous le répète, c’est de découvrir la vérité pour ensuite l’enterrer dignement et ainsi faire mon deuil de cette tragédie. Rien de plus. Qu’en pensez-vous ?

Pour montrer qu’il n’avait pas peur, Ludwig avança d’un pas et tenta de soutenir le regard d’acier du Frère-Commandant Hidrago. A vrai dire, son regard était difficilement soutenable. Alors, dans l’espoir d’attirer l’attention du morrien, l’Elu d’Arianka tenta de se démarquer.

- Avant mon arrivée à Leicheberg, j’ai été retenu prisonnier par celui qui gouverne d’une main de fer, le village de Schwartzhafen. Il se faisait nommer « Maître Rémy ». Je n’ai jamais vu une ordure pareille. Il ne gouverne que par la violence, la cruauté et la fourberie. Avez-vous déjà entendu parler de lui ? Je ne sais encore peu de choses de cette affaire dans les collines hantées, mais je crois que ce personnage abject doit en savoir pas mal sur ce qui se trame dans la région. Et s’il ne sait rien, son maître le Comte Von Carstein, doit savoir des choses. Il m’a à plusieurs reprises parlé de cette personne. Mais hormis la sombre réputation de ce nom de famille, je ne sais rien sur ce noble, ni où il réside. Chercher dans cette direction, serait peut-être une bonne initiative.

Ludwig avait tenté. Peut-être qu’il serait sèchement rabroué, peut-être que les exactions de Rémy n’avait rien à voir avec la présente affaire, mais quoi qu’il en soit il avait finement mis le maître de Schwartzhafen sur la liste rouge de la Garde Noire. Ludwig avait dit qu’il paierait et si cette ordure était en plus liée au vol de cadavre de Nuln, c’était tout bénéfice pour lui. Là encore, et ce malgré les avertissements de son père, l’Elu d’Arianka laissait la vengeance dicter sa conduite.
► Afficher le texte
Ludwig Von Hoffenbach. Voie de l'Inquisition. Répurgateur.

Profil: For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 11 | Par 11 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Profil (avec bonus): For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 10 | Par 10 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Médaillon de Morr: +1 PAR contre les morts-vivants.

Lien Fiche personnage: http://warforum-jdr.com/wiki-v2/doku.ph ... hoffenbach

"Mieux vaut un corps brisé, qu'un esprit corrompu!"

Avatar du membre
[MJ] Le Djinn
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Warfo Award 2021 du meilleur MJ - RP
Messages : 1199
Profil : FOR / END / HAB / CHAR / INT / INI / ATT / PAR / TIR / NA / PV (bonus inclus)
Localisation : Dans ma lampe...

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par [MJ] Le Djinn »

Ludwig va passer 2 test de CHA. Il convaincra Hidrago s'il en réussit au moins un.

Lancer 1: 11, échec.
Lancer 2: 18, échec.
La petite explication de Ludwig, fort éloquente au demeurant, ne sembla pas faire mouche. Le visage du Frère-Commandant s'était fermé et il fixait désormais notre héros non plus avec une impatience mêlée d'appréhension mais avec une franche hostilité tempérée par la patience. Sec et franc, le religieux ne tarda pas à mettre son avis en paroles:

-"Je vois, c'est bien pire que je ne le croyais! Vous n'êtes peut-être pas un traître, mais vous êtes un sot! Avancer dans un terrain aussi hostile et découvrir sur le tas ses habitants et ses maîtres, voilà bien un comportement que nous voulons éviter! Rentrez chez vous, où que votre foyer se trouve: votre place n'est définitivement pas en Sylvanie. Votre père vous raccompagnera à la porte du campement, vous saurez retrouver le chemin de l'Empire.

Et faites moi plaisir: n'invoquez plus jamais le nom de Von Carstein devant un morrien."


Il conclut d'un geste théatral: un balayage du bras vers le côté, comme s'il chassait la présence de Ludwig, de Friedrich et de Greta, laquelle assistait, impuissante, à la débâcle. Sans plus de cérémonie, Frère Hidrago se retourna pour retourner dans ses appartements, concluant sans pommade:

-"Le voeu de silence reprendra quand vous aurez accompagné votre fils, frère."

C'est estomaqué que le trio sortit de l'église fortifiée pour rejoindre les bas du campement qui profitait de la fin de journée. Greta était peut-être la moins fâchée des trois, pourtant, à la moue mi-figue, mi-raisin qu'elle offrait. Elle osa avancer:

-"C'est peut-être une bonne nouvelle... Nous avons tellement perdu... J'aimerais... J'aimerais un peu de calme, pour penser à tout ça..."

L'oeil compatissant du père s'attarda sur elle. Oui, Friedrich avait sans doute vécu de nombreuses horreurs lui aussi, ainsi il comprenait cette position. Le choix d'Hidrago était celui de la sécurité: seul le temps pourrait dire s'il avait fait le bon. Avant que le vœu de silence ne fasse effet, le paternel posa une main forte sur l'épaule de son enfant et déclara, pour tout adieu:

-"Ma vie est à Morr désormais. Ludwig... Prends soin de toi. Tu mérites mieux qu'une vie de vengeance et de combat, tu mérites d'être heureux, enfin. Trouve toi un travail honnête, fonde une famille et oublie moi, oublie nous tous. Prie les dieux, également: ils sauront te guider vers la paix."

Après quoi, il laissa Ludwig devant l'entrée où deux gardes épais en lourdes armures qui fixaient les collines à l'horizon. Il ne restait plus à notre héros qu'à s'éloigner et se morfondre, car sa quête semblait s'arrêter là.

Il était peut-être temps pour lui de se poser et de réfléchir. Après tout son objectif de vie était atteint: son père était retrouvé, innocenté et le mystère de sa famille ne serait jamais élucidé. Peut-être Friedrich avait-il raison: et si le temps était venu de poser les armes, de se poser quelque part et de vivre heureuse?

Tant de possibilités. Le choix d'un destin.
Enfermé dans une lampe pendant des siècles, cloisonné dans une pièce de métal par une malédiction... Puis un jour un naïf est venu, me libérant dans sa sottise... Tant pis pour lui... Et pour tous les autres.

Avatar du membre
Ludwig Von Hoffenbach
Warfo Award 2018 du Dévot
Warfo Award 2018 du Dévot
Messages : 120

Re: [Ludwig] Celui qui a vu l'abime

Message par Ludwig Von Hoffenbach »

L’espoir qui luisait dans les yeux de Ludwig fut de courte durée. La réponse du Frère-Commandant Hidrago à ses supplications fut aussi violente que prompte à venir. Le fidèle de Morr ne voulait pas de lui pour sa mission dans les collines hantées. Selon ses propres mots, l’homme ne voulait pas s’encombrer d’un « sot ». Pendant quelques secondes, Ludwig le regarda hébété. Ce dernier s’attendait logiquement à un possible refus, mais pas qu’il puisse être aussi cinglant. Il eu beau lui rétorquer qu’il n’avait plus de foyer et que son unique but était cette mission, cela ne changea rien. Le morrien avait pris sa décision. Par ailleurs, la prononciation du nom « Von Carstein » semblait l’avoir particulièrement courroucé. Quels secrets se cachaient derrière ce sombre nom de famille ?

Ejecté manu-militari du camp des gardes noirs, Ludwig se retrouva rapidement devant la porte de celui-ci, devant faire des adieux probablement définitifs à son père. Jamais, quelques heures auparavant il se serait attendu à ce que les événements tournent d’une pareille façon. Comme il l’avait fait depuis ces derniers mois, il aurait pu se rebeller, se battre, mais en cet instant précis il se sentait vide. Sa motivation de fer cédait par pans entiers.

- -"Ma vie est à Morr désormais. Ludwig... Prends soin de toi. Tu mérites mieux qu'une vie de vengeance et de combat, tu mérites d'être heureux, enfin. Trouve toi un travail honnête, fonde une famille et oublie moi, oublie nous tous. Prie les dieux, également: ils sauront te guider vers la paix."

- Père.... Prenez aussi soin de vous ... Promettez moi une chose. Une fois cette affaire terminée, abandonnez aussi cette vie de vengeance et de combat. Arretez de vous malmener pour ces dettes qui nous ont amenés nous tous à cet abîme. Ce cercle vicieux doit cesser... Quoiqu’il en soit, je ne pourrais vous oublier... Ni mère, ni Johanna, ni Kurt, ni vous. Ces souvenirs seront gravés en moi à jamais, mais grâce au dieux, je vivrai avec. Peut-être même qu’un jour je retrouverai le bonheur qu’on m’a volé...

- Je vous embrasse Père. Et par tout les dieux, occupez vous de votre jardin, ou sinon la Sylvanie aura tôt fait de vous confier la rose noire.

Après un sourire long et tendre en direction de son père, Ludwig se retourna définitivement. Jamais il ne le reverrait. C’était la dernière fois. Pris par l’émotion, Ludwig ressentit soudainement une douleur vive à l’oeil droit. Il la reconnut instantanément. Cela faisait toutefois plusieurs mois qu’il avait pas ressenti ce qu’il appelait, les larmes de sang de Wissenburg ; les larmes rubis qui avaient coulés après sa défaite contre Red Karla. S’enfonçant un peu plus dans les tenèbres de son chaperon, Ludwig avança à vive allure en direction de Leicheberg alors que des larmes de sang roulaient sa joue droite. Pour le jeune homme ces larmes étaient symbole de honte et il ne voulait en aucun cas que Greta puisse voir ce spectacle. Après ce fiasco chez les gardes noirs, Ludwig apprêtait à écrire une nouvelle page de sa vie et ce rappel de ces échecs passés le mettait mal à l’aise.

***
De retour dans le centre de Leicheberg après avoir descendu la colline ou était postée la Garde Noire, Ludwig passa le reste de l’après-midi à errer dans le village sylvanien. Le patelin, comme ses habitants, était bien plus accueillant que Schwartzhafen. Les quelques artisans, commerçants, passants, et gardes étaient bien plus jovials que leurs voisins plus au sud. A croire que la noirceur d’âme de Maître Rémy avait contaminé son village et sa population. Afin d’occuper son après-midi et de se réequiper en prévision d’un futur périple, le jeune homme fit quelques emplettes. L’Elu d’Arianka n’avait pas encore décidé de quoi demain sera fait, mais il était une évidence qu’il ne resterait pas s’encroûter ici. Bien que plus agréable que Schwartzhafen, ce patelin était bien un village sylvanien avec tout ce que cela comprenait. La pauvreté était visible et plusieurs choses paraissaient louches ou arriérées au yeux d’un impérial. A fortiori lorsqu’on venait d’une grande cité comme Nuln. Quoiqu’il en soit et ce malgré le temps maussade, Ludwig passa une après-midi calme et sans accroc. Un luxe dans la région.

Au fur et à mesure que les heures filaient, le ciel s’assombrit et la nuit tomba. Bien qu’en sécurité dans ce village, Ludwig préféra ne pas errer tardivement dans ces rues boueuses et sans le moindre pavé. D’ailleurs, les gens d’ici rentraient progressivement chez eux. Personne n’osait tester les créatures de la nuit qu’on disait rôder sur ces terres une fois le soleil couché. C’est ainsi que le jeune nulner et sa comparse mercenaire trouvèrent une auberge capable de les héberger pour la nuit. Le bâtiment, à l’image de la ville était dans un état douteux , les murs étaient lézardés à plusieurs endroits et les poutres semblaient rongées par l’humidité. Toutefois, contrairement à d’autres auberges de la ville celle-ci ne ressemblait pas à une porcherie. La clientèle était bien humaine et non porcine. Certes quelques habitués attablés dans la salle principale avaient une allure bien louche. Mais c’était la mode locale dirons nous.

Ludwig et Greta commandèrent chacun une chambre à l’étage de l’auberge. Cela faisait des semaines que les deux compères n’avaient pas dormis dans une chambre confortable avec un lit paisible alors il fallait en profiter. A peine sa chambre fut payée, la jeune femme pris congé de Ludwig et les yeux cernés elle partit se coucher. Le jeune homme encore secoué des événements de la journée préféra passer un peu de temps dans la grand salle en compagnie d’une charmante bière blanche du Stirland. Les clients étaient peu nombreux et très calme. Rapidement Ludwig remarque que ces derniers n’appréciaient pas vraiment sa présence. Non, la sensation n’était pas la même qu’a Schwartzhafen, ce n’était pas de la haine, simplement de la méfiance. C’est la raison pour laquelle Ludwig ne chercha pas à les embarrasser en leur adressant la parole. Le jeune homme se contenta alors d’observer le liquide qui attendait d’être ingurgité au fond de sa choppe. Gorgée après gorgées, il se mit à ressasser les événements de la journée, tout songeant à une question désormais capitale. Quoi faire ?

La quête qui l’avait poussé à aller de l’avant ces derniers mois était désormais finie, ou du moins sévèrement mise à mal. Le Frère-Commandant Hidrago avait mit son veto et Ludwig n’avait pas la volonté de passer outre la décision de ce dernier. A de nombreuses reprises il était passé outre des lois en croyant faire le bien. A cet instant précis, il ne croyait pas que le faire une nouvelle fois aiderait quiconque. Les gardes noires feraient leur travail parfaitement et Kurt serait définitivement vengé. Il fallait qu’il se rende à l’évidence, il avait enfin obtenu ce qu’il était venu chercher à l’origine. Non pas la vengeance, mais la vérité. Elle avait été parfois difficile à entendre, mais désormais il connaissait quasiment l’entièreté de l’histoire. Certes l’identité des associés de ce Isidore Karlung restait encore inconnue mais cela ne changeait en rien l’histoire. Les frères Von Hoffenbach avaient tout simplement été bernés par des escrocs. Il n’y avait nul complot la dessous. Seule la suite avait été délirante.

Désormais, Ludwig se retrouvait donc sans but apparent. Sa famille n’était plus que l’ombre d’elle même, et des paroles même de son père il valait mieux qu’il reconstruise sa vie tout seul, comme il l’avait fait enfant dans les rues de Nuln. Il n’avait aucun lien avec les membres éloignés de sa famille et seul Sigmar savait ou ces derniers se trouvaient. Probablement éparpillés entre Margritta et Bechafen... Ainsi il était donc seul.

- Piaaaaaaaarrrrrr

Ludwig sourit en entendant le cri aigu du jeune Sigmurd. Non, il n’était pas seul s’amusa le jeune homme en pensant à son fidèle camarade à plumes. Quoi qu’il fasse la buse des voûtes l’accompagnerait, et ça, Ludwig l’appréciait. Après tout pourquoi l’oiseau ne serait pas triste d’avoir perdu Aivon, Flèche, Carreau, Maara et tant d’autres ?

Quand à Greta, le jeune homme lui avait parlé pendant l’après-midi, lorsqu’ils erraient dans les rues. Pour une fois la jeune femme semblait avoir décidé quoi faire de sa vie. Elle voulait suivre les traces de son père et ainsi continuer dans la voie du mercenariat. Selon ses propos, elle comptaient attendre quelques jours avant de partir en direction de l’Ostermark. Une rude région, mais un lieu tout à fait logique pour un mercenaire. A ce que l’on racontait, les ennemis à abattre pullulaient là-bas. Bien entendu la jeune femme avait proposé qu’ils fassent le chemin ensemble et que pourquoi pas qu’ils se lancent dans cette aventure ensemble. Néanmoins Ludwig avait refusé poliment. Ce dernier n’appréciait pas forcément le mercenariat. Les mercenaires avaient pour réputation de ne chercher que le profit et non la justesse de la cause et cela il le condamnait. Comment pourrait-il se regarder dans une glace après avoir combattu dans une cause injuste et criminelle ? Ludwig ne préférait même pas l’imaginer.

Toutefois, il fallait bien qu’il trouve une nouvelle raison de vivre. Il était hors de question de rester dans ce village et il était devenu indésirable dans une bonne partie du Wissenland. Que faire ? Partir traquer Red Karla ? Une horrible route vers la folie. Il devait rester à l’écart comme son père lui avait conseillé. S’engager dans l’armée régulière ? Irréalisable avec ses délits. Se lancer dans le commerce comme son père autrefois ? Impossible. Il n’avait pas un rond et avec son visage en piteux état la clientèle ne sera pas au rendez-vous ! Fonder une famille et vivre de labeurs ? Il n’avait personne dans sa vie et il devait avouer qu’il rêvait d’une vie un peu plus palpitante. Se vouer entièrement aux dieux de l’Ordre ?

Ludwig renifla nerveusement et but une grosse gorgée de bière. Il est vrai que lors de sa quête personnelle pour retrouver son père il avait à plusieurs reprises délaissé cette voie. Pire, il avait du courtiser l’illégalité à de nombreuses reprises. Pour autant il ne ressentait ni culpabilité, ni envie de rachat auprès de sa déesse. Ce qu’il avait fait, il avait toujours cru dur comme fer que c’était la seule chose à faire. Mais désormais, sa quête s’étant envolée, Ludwig était un peu perdu. Toutefois, son envie d’aider et de protéger l’humanité était toujours intacte. Il voulait continuer sur cette voie. Sans ses obligations personnelles pour assombrir son jugement il comptait continuer à servir Arianka avec zèle. Rien ne l’empêchait maintenant. Les citoyens de l’Empire méritaient un monde meilleur privé des pires criminels et monstres et Ludwig s’engagerait dans cette voie sans aucune tristesse. Il était même heureux de sacrifier sa vie et sa liberté pour celle de ses concitoyens. Un peu à la manière des soldats de l’armée régulière songea Ludwig. Désormais, il serait véritablement un soldat d’Arianka. Fini les faux-semblants. Sa colère s’étant progressivement dissipé ces dernières semaines, Ludwig avait une foi renouvelée en son jugement et celui de sa déesse. Il ne cederait plus à la fureur, à la panique ou à la peur. Pour autant, Ludwig suspectait une chose. Il savait que jamais il ne pourrait résister aux démons qui se cachaient derrière les qualités humaines. Il avait déja été vaincu une fois à Wissenburg, et il savait que cela pourrait recommencer. L’amour, la gentillesse, la générosité, la fraternité, pouvaient cacher tellement d’horreurs... Et pourtant Ludwig n’y voyait que du feu. De la naïveté en quelque sorte. Qu’Arianka bénisse son jugement...

Ludwig renifla à nouveau, pourtant il ne faisait pas froid. C’était purement nerveux. Il était bien joli d’avoir la volonté de se lancer dans cette voie, mais peut-être fallait-il s’en donner les moyens. Par ou commencer ? Ludwig n’eut pas à réfléchir plus de quelques secondes pour qu’une idée lui vienne à l’esprit. Elle ne lui faisait visiblement pas plaisir, vu la violence à laquelle il posa la choppe de bière sur le bar. Son visage était fermé et crispé. Cet enfoiré de Maître Rémy. Voilà le parangon de l’injustice et de la crasse qui infestait ces terres. Ironiquement c’était une chance qu’il se trouve dans cette région. Presque aucune région de l’Empire n’avait autant de corruption et de problèmes louches. Et commencer par enquêter sur Maître Rémy était une bonne idée. L’homme, plein de cruauté, martyrisait sa population et se livrait à de multiples exactions. Malheureusement son curriculum vitae ne s’arrêtait pas là. Ce dernier avait aussi honteusement emprisonné et abusé d’honnêtes citoyens de l’Empire. Et à ce qu’il savait, seul Greta et lui avait été relâchés. Aussi il était clair que sa relation avec cette famille Von Carstein était particulièrement louche. Son entrevue à Hidrago lui avait au moins confirmé cela. Pour conclure, enquêter en vue de destituer Maître Rémy était une louable vocation. Pour autant, un soucis était toujours d’actualité. Ludwig était seul et ne faisait clairement pas le poids contre Rémy et ses sbires. Il avait besoin d’alliés. Mais où les trouver ? Les gardes noirs avaient semblé sourds à ce sujet et ils ne lui seraient d’aucune utilité. Trouver des alliés ici ? Peu probable et d’ailleurs comment s’assurer de leur loyauté ? Les gens d’ici étaient méfiants envers les étrangers et qui sait quels pouvaient être leur sentiments envers Maître Rémy et ce comte Von Carstein. Pour autant, retourner dans le Stirland et en Averland était difficile et long. Par la voie fluviale il devrait repasser par Schwartzhafen, l’option était donc exclue. Et par voie terrestre cela serait trop difficile, surtout s’il était seul. Il allait donc devoir trouver des alliés, ici, à Leicheberg....

Mais pour l’instant, il devait surtout aller se coucher. La journée avait été longue et il était exténué. Demain il irait à la pêche aux informations. Il avait besoin d’alliés fiables capable de l’aider dans sa mission. A voir si les autorités de ce village étaient plus bienveillantes que celles de leur voisine Schwartzhafen. Dans le cas contraire, il prendrait la deuxième option qui le répugnait, il irait directement à Wurtbad plaider sa cause. Là-bas, même si ils se heurtait à des déconvenues, il finirait bien par trouver une solution....

Ludwig avait fait de Maître Rémy sa cible ; sa quête au nom d’Arianka venait de commencer...

► Afficher le texte
Ludwig Von Hoffenbach. Voie de l'Inquisition. Répurgateur.

Profil: For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 11 | Par 11 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Profil (avec bonus): For 9 | End 10 | Hab 9 | Cha 10 | Int 11 | Ini 10 | Att 10 | Par 10 | Tir 9 | NA 2 | PV 70/70

Médaillon de Morr: +1 PAR contre les morts-vivants.

Lien Fiche personnage: http://warforum-jdr.com/wiki-v2/doku.ph ... hoffenbach

"Mieux vaut un corps brisé, qu'un esprit corrompu!"

Répondre

Retourner vers « Sylvanie »