Le Dogue haussa les épaules, tout en replaçant sa capote pour bien se protéger des rafales de vent qui les balayaient. Son regard, bien peu assuré, porta tout autour d’eux, le long des montagnes et du Pic de l’Ardent qui se dressait pile devant eux.
« Je suis pas un lâche, Isolde. Mais là, ça… ça pue, quoi. J’aime pas ces coins des Montagnes Grises.
Rien terrifie un Nain. Absolument rien. Sinon… Sinon, tu devines quoi. »
Il n’explicita pas son propos. À la place, il siffla à l’attention de son chien et continua tout droit, d’un pas toujours aussi vif, à grandes enjambées le long du chemin caillouteux du sommet de l’Ardent.
Plus ils avançaient, plus le temps se détériorait.
Cela devait faire maintenant faire presque une heure qu’ils avaient quitté le petit campement de Byrrnoth, et plus ils s’en étaient éloignés, plus la météo s’était détériorée. Ça avait beau être normal en montagne, les changements de température et de conditions climatiques : L’atmosphère elle-même s’était chargée de quelque chose d’étrangement lourd. Dans le ciel, on pouvait entendre de gros grondements. Et maintenant, les petites gouttelettes de pluie s’étaient changées en une averse qui coulait à toute vitesse.
Les deux comparses marchaient pile à flanc de falaise. À leur gauche, l’Ardent. À leur droite, le vide. Le Dogue glissa sur quelques cailloux mouillés, aussi, il se figea vite et tourna sa tête en arrière pour parler à la chevaleresse.
« C’est grave dangereux !
J’vais installer un piolet et on va s’attacher avec une corde : Je préfère prévenir une chute ! »
Il sorti une petite tige métallique. Il la bloqua contre une paroi de l’Ardent, et se mit à frapper dedans avec un fin marteau pour l’encastrer dans la roche. Isolde, pendant ce temps, put profiter du magnifique spectacle de l’immense vide sous elle, et détailler avec vertige comment les Montagnes Grises étaient une sédimentation magnifique de reliefs escarpés.
Le Dogue s’attacha, puis fit signe à Isolde de s’approcher.
Le Dogue vit tout venir. Uniquement à moitié attaché, il se jeta à toute vitesse en avant, et tendit sa main pour attraper celle de la chevaleresse. Il parvint à lui saisir le poignet tandis qu’elle s’écroulait dans le vide. Le yeoman s’effondra et se blessa sur le chemin, et, pendant une fraction de secondes, seule sa poigne maintenait Isolde entre le Pic et le vide.
Il serrait les crocs. Il tenta de la soulever. Mais il céda, subitement, sûrement endolori par le poids de la chevaleresse. Elle glissa contre la roche, rebondit sur un petit coteau, et se mit à dévaler à toute vitesse la montagne en se cognant lourdement le dos, les membres et le poitrail contre tous les bouts de reliefs escarpés dans tous les sens.
« ISOOOOOLDE ! »
Et elle disparut dans le vide, avant de s’éclater un bout du crâne qui l’envoya directement dans l’inconscience.
Elle ne sentait plus son bras gauche. Elle était incapable de le bouger. En se déplaçant légèrement, elle sentit un engourdissement et des fourmis qui remontaient dans son épaule et descendait jusqu’à ses doigts. Son membre semblait être capable de se tourner dans un sens où les bras ne sont pas censés tourner.
La pluie lui mouillait le dos. Et pourtant, elle ne sentait plus le vent glacial contre elle. Au-dessus de sa tête, elle voyait une voûte de pierre, avec un trou à l’intérieur.
Pas de bruits. Pas de murmures. Juste le vent qui souffle en haut. Et des bourdonnements dans les oreilles.
Que faire maintenant ?