La bouche déformée par une expression farouche et le regard sombre du maître-chien sous ses sourcils broussailleux montraient au jeune homme toute la rancœur qu'il nourrissait à son égard.
- T'nous as abandonnés dans c'te sal'té d'maudit forêt et c'est tout ! T'peux dire c'que tu veux à m'sieur l'Duc mais moi j'connais la vérité…
Quand l'homme s'éloigna, laissant l'apprenti chasseur sans voix, Jurgen se rapprocha et posa une main amicale sur son épaule.
- L'a eu la trouille mais veut pô l'dire… T'es pour rien, Martin.
Visiblement, le garçon était plus enclin à lui apporter les réponses qu'il attendait ce qui le soulagea un peu.
- Début, j'ai pô compris : j'm'ai réveillé au p'tit matin sur la rout' en bas du bourg ; celle qui passe entr'les parcelles de Stefan et du vieux Hogentaller. J'croyais qu'j'avais rêvé mais, après, j'm'ai rappelé d'la clairière et du monstre. Par Sigmar, j'ai bien cru qu'j'allais crever là-bas alors j'me suis mis à courir comm'qu'si qu'mes jambes bougeaint tout'seules ! Faisait noir et j'voyais rien mais j'courrais. Et pi... le jeune garçon jeta des coups d'oeil de droite à gauche, hésita un instant, dégultit avant de continuer à mi-voix :
- Et pi… que'que chose m'a parlé… C'était comm'si qu'la voix était dans… Jurgen se tapota le front du bout des doigts et Martin comprit avant même qu'il ne prononçât la suite ...dans ma caboche. Les yeux de Jurgen semblaient hésiter entre l'effroi et l'incompréhension. M'a dit d'partir, alors j'ai parti si vite et si loin qu'mes guibolles pouvaient l'faire ! Et pi… plus rien. Fini. Tout noir. J'ai ouvert les yeux… j'tais sur la route...
Les mains caleuses du jeune homme tremblaient si forts qu'on aurait pu croire qu'il était transi de froid. Finalement, il informa Martin de ce qu'il savait des événements qu'avait vécu Ottmar :
- Ottmar, j'sais pas… Il dit qu'l'a vu une sorcière qu'a tué les gars d'la clairière et qu'voulait l'tuer aussi. L'a dit à m'sieur l'Duc qu'fallait la tuer avant qu'elle vienne ici.
Fort de ces informations supplémentaires, Martin avait rejoint le Duc et la petite troupe qu'il avait mise sur pieds pour l'expédition qui se préparait : sept miliciens, cinq hallebardiers normalement en poste au château, Lyam et Arutha, les fils du Duc, et le Duc lui-même, tous les trois montés sur leurs chevaux, le tout accompagné par un concert d'aboiements de la part des limiers qui entouraient Ottmar toujours renfrogné. Jurgen qui n'avait pas été convié et n'avait nullement manifesté l'envie d'accompagner cette équipée, avait regardé tout ce remue-ménage s'éloigner vers l'ouest depuis la porte des cuisines.Après que Martin se soit restauré, The Puppet Master a écrit :Ajout « rations » à l'inventaire → fiche mise à jour.
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Suivre la piste qu'ils avaient laissé la veille en traquant les sangliers n'avait pas été difficile comme l'avait imaginé Martin. En effet, les traces de pas étaient encore fraîches jusqu'au ruisseau et le jeune apprenti chasseur s'était remémoré aisément tout leur parcours jusque là.
Le soleil était maintenant haut dans le ciel et ses rayons transperçaient les frondaisons venant réchauffer tout le sous-bois. Le jeune homme était accroupi à examiner une de ses propres empreintes afin de déterminer la direction à suivre quand quelque chose claqua dans son esprit et un avertissement retentit clairement :
- Maaaaaaaaaartin… Ne t'approche pas de nous ! Tu as voulu rentrer et nous t'avons exaucé, Maaaaaaaaaartin. Laisse-nous maintenant...