Martin [MJ Assistant]
Ils arrivèrent de nulle part, sortant du fin fond de la nuit, le claquement des sabots de leurs montures sur le pavé de la route réveillant le milicien par cette froide nuit de printemps.
A la lueur de Mannslieb, les cinq cavaliers mirent pied à terre pour s'identifier au veilleur, tenant leurs chevaux par la bride. Peu de mots furent échangés avec ces austères personnages, dissimulant leurs visages sous de larges capuches, mais ils convainquirent le garde de les laisser entrer dans la bourgade malgré l'heure tardive.
Ceux-ci se contentèrent d'accorder quelques pièces de bronze au portier avant de se diriger vers l'une des auberges du lieu. Ils y étaient passés à l'aller, ils y passaient au retour. Ils marchaient au pas, pied à terre pour ménager les montures qu'ils avaient poussées à bout durant la journée. Trois hommes pour tenir les chevaux, deux légèrement en avant du groupe. Leurs longues capes empêchaient de voir leurs mains, mais on pouvait deviner un léger renflement, qui pouvait indiquer quelques fourreaux de lames ou du moins un long objet qui battait les cuisses de ces sinistres hommes. Bien entendu, Iblis savait déjà quel attirail ceux-ci avaient sur eux mais...
Il lui semblait avoir entendu quelque chose. En gigotant un peu, avec difficulté il faut bien le dire, il jeta un coup d’œil vers la croupe du cheval sur lequel il avait été installé pour guetter la pénombre des sombres ruelles tortueuses qui s'enfonçaient anse le cloaque qu'était le bas quartier. Un bref reflet lunaire, que seule sa vision elfique supérieure à celle de ses "compagnons" humains, pouvait avoir repéré. Reflet de lumière qui s'évanouit presque aussi vite qu'il ne le vit. Bref reflet, de la taille d'un miroir à main ou d'une lame de poissonnier.
Mais l'heure était-elle vraiment à l'observation de la faune locale alors qu'il était complètement trempé de sueur ? Il faut dire que passer la journée jeté comme un ballot sur un cheval, au galop, en étant bâillonné, est assez dur pour le corps et que, elfe ou non, tout individu dans cette situation suerait de tous ses pores. Et Iblis ne faisait pas exception. Puis il ne s'était pas soulagé depuis un moment également. Et il y avait les liens à ses jambes et pieds, et la fraîcheur nocturne qui glaçait la sueur qui s'était imprégnée dans ses vêtements...
Mais il fut heureusement tiré de ses réflexions par l'arrivée du groupe devant une bâtisse âgée, dont le chaume aurait dû être changé au plus vite et les tuiles recouvertes d'une mousse à moitié moisie par l'humidité ambiante.
Les autres cavaliers contournèrent le bâtiment pour mettre leurs montures dans une cour auxiliaire tandis que deux de leurs camarades toquaient violemment à la porte, à un rythme étrange, avant que celle-ci ne s'ouvre violemment et qu'ils ne s'engouffrent dans ce qui tiendrait lieu de gite au groupe.
Avant même de pouvoir se demander ce que pouvait bien signifier ce remue-ménage, Iblis fut tiré en arrière et violemment jeté au sol. Avant qu'il n'ait pu pousser le moindre grognement à travers son bâillon, un des membres de son "escorte", particulièrement mal léché, le souleva et lui lança un avertissement très clair :
Fais-moi pas chier, merdeux. Joue au malin et tu calanches dans la minute. Après que j'ai bien pris mon temps à te titiller le corps... dit-il en sortant une dague qui semblait bien trop aiguisée pour le propre bien d'Iblis. |
Les autres agents du suaire, eux, se contentaient d'enlever les selles de leurs montures, leur donner de l'avoine, enlever les cailloux sous les sabots des bêtes.... Mais nul ne faisait attention à Iblis et son nouvel "ami", qui lui rendit par ailleurs le grand service qu'était la libération de sa bouche du bâillon qui angoissait de plus en plus l'elfe. Finalement, son petit séjour à Carroburg n'allait peut être pas être si mal que ça.... Si ?