[Sarah Lénor] Fuite et poursuite

[Sarah Lénor]

La nuit était plus agitée pour Sarah que ce qu'elle-même craignait, quand elle y repensait elle se demandait si elle avait bien fait de se montrer aussi téméraire, elle aurait peut-être mieux fait de montrer directement le papier et de demander l'acquittement au lieu de vouloir jouer avec le feu... En son for intérieur elle se demandait si elle pourrait toujours prouver son innocence après le verdict, dans le cas où celui-ci ne tournerait pas en sa faveur. Elle verrait bien, dans le pire des cas elle mourrait; cela dit elle ne voulait pas y penser.
Le simple cadre du procès était encore plus effrayant et restrictif que les conseils de discipline du Temple Sigmarite où elle avait grandit, pour un peuple qui se voulait libre ils donnaient bien de l'importance à la forme! Devant elle des gens qu'elle ne connaissait que de vue la dévisageait, l'accusant avec même qu'elle ait pu parler, de plus en plus son idée lui paraissait mauvaise et Sarah n'avait qu'une envie: se lever et prouver son innocence, quitte à se compromettre. Sa conscience luttait et la jeune fille espérait que Sigmar serait de son côté.

Un homme du jury se leva, Tango Libre d'après ce qu'on lui avait dit, il entama un plaidoyer violent, de sa voix aigre-douce, visiblement il était entièrement convaincu de la culpabilité de l'exorciste et ses arguments étaient des plus frappants. Sarah faillit se mettre à pleurer quand il commença à parler de son dieu qui serait selon lui un démon! Idem pour les grands banquets organisés par les prêtres, si ils existaient vraiment nul doute qu'on l'y aurait convié, ne serait-ce que pour "l'utiliser", cet homme ne racontait que des mensonges!
A la fin l'adolescente en eut assez, elle failli se lever pour mettre son poing dans le visage de cet impie quand le frère Tucco se leva pour lui donner la parole, alors elle comprit: tout cela était un test de Sigmar pour voir jusqu'où pouvait mener le pouvoir de son verbe et si elle était à même de défaire un adversaire tel que celui-là. Elle resta assise quelques secondes de plus, avant de se mettre en piste pour entamer sa défense.

-"Il y a du vrai dans ce que vous avez dit mais il y a aussi imprécisions et faux jugements! Oui, je suis sortie cette nuit pour aller prier, peut-être vers l'Est je ne sais pas, pour une raison simple: la prière! Je ne suis pas l'adoratrice d'un de ces démons que je combats, je ne veux pas le mal du peuple, j'ai juste foi en Sigmar, celui qui m'a aidé par ses enseignements à devenir la personne que je suis aujourd'hui, une personne décidée à purger l'Empire du Mal qui le ronge! Et où pouvais-je prier? Dans la tente? Certainement pas, j'aurais dérangé Ingrid, près du feu de camp? Les sentinelles se seraient moquées de moi et j'aurais tout autant dérangé les autres dormeurs! Je me suis aventurée légèrement autour du cercle pour offrir une prière à Sigmar avant de dormir pour de bon, ne parvenant pas à trouver le sommeil.

On m'accuse d'être à l'origine de la détonation, mais je vous le demande: avec quoi? Quand vous nous avez trouvé j'ai été fouillée, Ingrid aussi et aucune poudre d'aucune sorte n'a été trouvée sur nous. Ca signifierait que pour être coupable de ce que dont vous m'accusez j'aurais dû savoir où s'entrepose la poudre, pourtant entourée, la voler en quantité suffisante pour provoquer une détonation, la poser, préparer la charge, trouver le moyen de faire patienter des heures la charge dans le bois humide tout en mettant un dispositif de retardement... Mais je ne savais même pas que ça existait! Et encore une fois après ça j'aurais dû m'enfuir pour trouver une hypothétique cité dans une région que je ne connais pas et où je suis recherchée pour hérésie? Même en vous vendant j'aurais été au bûcher alors où est mon intérêt dans votre chute? Je perdrais mes protecteurs, mes seuls alliés en ce monde, pour un peu probable emprisonnement à vie au lieu de la mort? C'est ridicule.

Je ne compte même pas revenir sur vos préjugés à l'encontre du Culte du Béni Sigmar! Venir me dire, à moi: une nonne, que les prêtres ne se plaisent que dans l'or et la chair alors que pendant les quinze années que j'ai passé au Temple mes Frères de culte, mes supérieurs directs et moi vivions dans des loges voir dans des cellules à se consacrer à la prière, à l'aide aux pauvres et à la lutte contre les forces qui veulent nous asservir c'est..."

Sarah tremblait de rage, elle se mordit la lèvre inférieure pendant que ses poings se serraient comme des étaux. N'y tenant plus elle s'approcha de celui qui se faisait appeler Tango Libre et lui décocha une monumentale gifle dans la figure. Des larmes de colères avaient déjà commencées à perler sur ses joues.

-"C'est des foutaises! Des mensonges d'un vieux fou qui n'a jamais vu la réalité et qui gobé sans sourciller tout ce que des gens aussi tarés que lui ont racontés! Je sais que le peuple souffre, c'est sans doute de notre faute, mais mentir de pareille manière est une honte!"

[[MJ] Kriegsherr]

Test de CHA (y compris modificateurs) : Résultat caché.

La défense de Sarah Lénor fut au moins aussi virulente que le réquisitoire de Tango Libre. Une partie de la foule semblait d’accord avec elle, mais elle restait encore minoritaire. Toutefois, son plaidoyer avait eu pour effet de semer le doute chez la majorité, qui restait maintenant indécise. A part Tango Libre et quelques uns qui étaient tout à fait d’accord avec lui, bien peu étaient maintenant prêt à jurer de sa culpabilité. Mais la violence physique dont elle avait fait preuve à l’égard de Tango lui avait attiré la méfiance et la colère de beaucoup : coupable ou innocente, elle n’avait pas à agir ainsi, et elle pourrait bien avoir à payer pour son geste.
Néanmoins, il subsistait encore de grosses zones d’ombres, que le tribunal du peuple avait à éclaircir. Le frère Tucco reprit la parole pour calmer les esprits et faire avancer le déroulement du procès :

-Calmez-vous, sœur Lénor. Dois-je vous rappeler que c’est vous qui êtes accusée dans ce procès : il est donc inutile et nuisible à vos intérêts d’attaquer par votre parole ou vos actions Tango Libre, qui n’a fait qu’émettre les griefs de l’accusation. Il n’a pas parlé en son nom propre, mais au nom de la communauté que vous avez peut-être trahie. L’exercice de votre droit de défense n’inclue en aucun cas l’usage de la violence contre lui, et certainement pas physique. Quand vous avez frappé Tango, c’est toute l’assemblée que vous avez giflé. Vous pourriez être punie pour cela.
Quoi qu’il en soit, vos explications sur le me paraissent logiques : il me semble peu probable que vous soyez à l’origine de la détonation et du feu. Mais il reste une zone d’ombre que vous n’avez pas traitée, pourtant primordiale : qu’en est-il du vol de chevaux ?
Nous vous écoutons, mais cette fois, tâchez de vous contrôler, s’il vous plaît.

Une fois encore, la parole était à Sarah. La religieuse avait intérêt à garder son calme, cette fois. L’assemblée ne tolèrerait pas un nouvel accès de violence.

[Sarah Lénor]

Se rendant compte de son geste des plus déplacés, Sarah porta une main à sa bouche et rougit de honte. Troublée, elle bredouilla un "désolée" pitoyable avant de retourner s'asseoir à sa place. L'intervention du moine n'avait pas arrangé les choses, comme une enfant prise en faute, l'exorciste était tremblante, elle avait peut-être écraser ses dernières chances de salut... Mais peut-être pas. La question des chevaux était de loin la plus troublante, la jeune fille y avait réfléchit durant la nuit mais aucune idée décisive ne lui était venu, en définitive elle s'était retournée sur la seule excuse à peu près valable: la peur.

-"J'ai honte de mon geste, mais j'ai depuis notre départ de Klepsdorf je suis terrifiée à l'idée que la population ne nous retrouve et ne décide de faire justice elle-même. Cette nuit quand j'ai entendu le coup de feu j'ai pris peur, je pensais que c'était un citoyen venu se venger! Je me suis levée et j'ai couru vers les chevaux pour m'enfuir, quitte à revenir plus tard récupérer mes affaires. Dans ma lâcheté j'ai même abandonné Ingrid, j'ai honte de moi, je suis désolée de mon instinct stupide..."

Ce n'était guère solide mais c'était la seule chose qu'elle avait pu imaginer. Le problème se posait maintenant quant à l'identité du tireur, Sarah n'avait pas oser la mettre sur le tapis pour ne pas se compromettre dans son rôle de traîtresse, cela dit elle comptait faire la lumière sur cette affaire. Il ne lui restait donc plus qu'à prier Sigmar de lui accorder la chance d'être épargnée par la foule.

[[MJ] Kriegsherr]

Test de charisme : 9. Réussite.

Les explications de Sarah semblèrent cette fois plus convaincantes. Dans l’assemblée, on hocha la tête. Mais Tango n’avait pas encore dit son dernier mot. Il se leva et lança d’une voix forte :

-Allons donc, camarades, qui parmi vous pourrait croire aux inepties que raconte cette femme ? Je vous le dit : n’en croyez rien, car tout cela n’est que mensonge destiné à sauver sa peau. Pour ma part, je continue à réclamer la même sentence.

Certains acquiescèrent, mais ils étaient maintenant minoritaires. Puis le frère Tucco donna la parole à Gustavo qui la demandait :

-Ma pour ma part, yé doit dire qué yé été convaincou par cé qu’elle a dit. Elle a ou peur et s’est enfouie, ma yé né voit pas pourquoi elle nous aurait trahi avec tout les risques qué cela comportait. C’est sourement une coïncidence. Pour ma part, yé pense qu’oune pounition d’intérêt général serait plous adaptée.

L’influent et charismatique meneur de la « révoloution » fut quand à lui soutenu par la majorité de la foule. Ingrid prit alors la parole, abondant dans son sens :

-Vous avez entendu les sages paroles du Che. Je pense qu’il a raison. Je ne pense pas qu’elle ait eu ce qu’il fallait dans le froc pour nous trahir, ni ce qu’il faut dans la tête pour monter un plan aussi complexe, et croyez-moi, je la connais depuis longtemps. Pour ce qui est des discours et des débats, elle est forte, mais pour ce qui est de faire un acte dangereux, là, en revanche, plus personne.

Cette intervention n’eut pas beaucoup d’effet, si ce n’est qu’elle conforta certains dans l’idée que Sarah était bien innocente. Le frère Tucco prit maintenant la parole en tant que juré et non que directeur de l’audience :

-Pour ce que je connais de Sarah, je la vois mal nous livrer tous à la mort, même si je n’ai aucune certitude. Ma conviction est qu’elle semble innocente de la trahison, mais qu’elle a bien commis une faute en volant les chevaux et en frappant Tango. Au pire, même si elle était coupable, en nous montrant cléments et en épargnant sa vie, nous lui démontrons que nous savons pardonner, et que nous ne sommes pas aussi cruels et injustes que la justice officielle. La punition proposée par le camarade Ernesta me semble appropriée, elle a donc mon soutien.

Enfin, pour une fois, à l’étonnement de tous, y compris de Gustavo et de Tucco, Walter Judendach ouvrit la bouche et parla d’une voix grave et froide :

-Elle est innocente.

Ces trois mots étaient certainement les premiers qu’ils prononçaient dans le groupe depuis des mois. En fait, certains républicains parmi les plus récemment arrivés s’étaient même demandé s’il n’était pas muet. En tout cas, son intervention eut un grand effet sur le jury, et déclencha une multitude de conversations murmurées entre les révolutionnaires. Enfin, le frère Tucci procéda à la mise aux voix :

-Qui est pour l’acquittement pur et simple ?

Personne ne leva la main. Le frère continua :

-Qui est pour la sentence proposée par Tango Libre ?

Des mains se levèrent ici et là dans la foule, y compris celle de Tango Libre au premier rang. Ce n’était pas la majorité, à peine un petit cinquième du groupe, mais un petit cinquième tout de même.

-Qui est pour les travaux d’intérêts généraux proposés par Gustavo Che Ernesta ?

Beaucoup de mains se levèrent. Plus de la moitié. Elle était sauvée : la majorité des révolutionnaires avaient suivi l’avis d’Ingrid, de frère Tucco et de Gustavo. Walter avait aussi levé la main pour cette proposition. Environ un quart de la foule s’était abstenue. Les jurés se dispersèrent ensuite, tandis que Sarah était convoquée dans la tente de Gustavo, soit disant pour qu’il lui donne un travail à effectuer. En réalité, une fois qu’elle fut entrée la tente, elle se retrouva nez-à-nez avec le chef du groupe qui lui chuchota :

-Bien, tout s’est déroulé comme prévou. Mainténant, yé vais vous affecter à oune travail qui donnera envie au traître dé vous recontacter. Yé peux vous envoyer en éclaireur dans lé prochain village, pour qué vous repériez s’il y a des vivres. Dans le plan dou traitre qui a fonctionné, nous sommes obligés d’aller chercher des vivres, et nous n’avons pas d’autre choix qué le prochain village. S’il y a posté des troupes, c’est là qu’elles nous attendent. Si on envoyait oune autre éclaireur, le traître saurait néanmoins qué nous sommes prêts au combat, et nous livrerions oune baroud d’honneur avant dé mourir.
Ma si yé vu jouste sour les plans dou traitre et que yé vous envoie vous, le traître vous contactera sourement pour qué vous nous mentiez en nous disant qu’il n’y a pas d’ennemis et qu’on peut y aller tranquille, afin de nous massacrer dans oune embuscade sans qué nous pouissions opposer dé résistance. Ma il ignore qué vous êtes oune agent double, et qué vous reviendrez nous voir pour nous dire qui il est et nous permettre d’attaquer par sourprise les troupes postées au village et de nous échapper dé son piège.
En somme, s’il nous a tendou un piège, vous êtes notre dernière chance dé nous en tirer en vie. Vous sentez-vous prête à accepter oune telle mission ?

Assurément, ce que venait de dire Gustavo était très grave : si le traître supposé avait été aussi intelligent que Gustavo l’avait supposé, le groupe était en effet condamné si elle ne l’aidait pas...

[Sarah Lénor]

Ses explications avaient été plus convaincantes qu'elle ne l'avait jamais espérée! L'un après l'autres ses alliés se levaient et parlaient en sa faveur, même Ingrid dit quelques mots pour elle! Bien entendu, les révolutionnaires se joignirent en masse pour la condamner à quelques travaux plutôt qu'à une peine corporelle, intérieurement Sarah soupira d'aise, elle était sauvée! La jeune fille perdit quelque peu son sourire quand elle s'aperçut qu'une partie du groupe voulait tout de même sa mort, heureusement ils n'étaient pas majoritaires!

La suite se passa très rapidement, la foule se dispersa pendant que certains l'invectivaient ou la félicitait, mais elle n'y porta pas attention et partit directement vers la tente du Che qui lui exposa son plan. De joyeux à l'idée d'être libre, l'air de Sarah s'assombrit quand elle comprit la charge qui reposait sur ses épaules. L'initiée avait promis d'aider les révolutionnaires à créer un monde plus juste où le chaos serait davantage en retrait et voilà qu'après avoir risqué l'exécution elle devait devenir la sauveuse de l'ensemble de ces gens. Mais ce risque, elle l'acceptait sans hésiter.

-"Oui j'ai compris Che, je ferais de mon mieux, mais dans le doute tentez de préparer quelque chose au cas où j'échouerais..."

[[MJ] Kriegsherr]

Le Che remercia la religieuse et lui répondit que leur petit groupe ne pourrait pas tenter grand-chose en cas d'échec. Le fait était qu'ils n'avaient plus de nourriture du tout, et que leur seule option était de se ravitailler au village le plus proche. Si des soldats les attendaient là-bas et que Sarah ne réussissait pas, ils n'auraient pas d'autre choix que de se jeter dans la gueule du loup et de livrer un vaillant baroud d'honneur avant de mourir.
Une lourde, très lourde responsabilité pesait sur les épaules de la jeune femme : si elle échouait, beaucoup de vies seraient sacrifiées.

***

Rapidement, il fut annoncé que Gustavo allait envoyer des éclaireurs jusqu'au prochain village afin de voir s'il n'y avait personne et si les paysans étaient prêts à coopérer avec le groupe et à leur vendre ou leur offrir des vivres, étant donné que toutes les réserves avaient été détruites par l'incendie de la nuit. Cette mission était périlleuse, et c'est pourquoi le tiléen désigna d'office Sarah Lénor comme volontaire, expliquant que cela payerai sa dette. Tous approuvèrent, car personne n'avait envie d'accomplir cette mission réputée dangereuse (les paysans impériaux lynchaient parfois les révolutionnaires, et en outre, il pouvait y avoir des soldats impériaux). Evidemment, Gustavo cacha le véritable but de la tâche qu'il avait confiée à Sarah Lénor, à savoir : partir en exploration, recevoir un message du traître, rencontrer les éventuels soldats postés dans le village et les tromper pour que le groupe des révolutionnaires ait une chance de les prendre par surprise et de les chasser, et enfin, revenir au campement des révolutionnaires, leur expliquer la situation et démasquer le traître.

Avant de partir, Che Ernesta chuchota discrètement à l'oreille de la sigmarite, qu'il avait pris à part :

-Voici cé qu'il faudra dire aux soldats, si vous en rencontrez au village (n'oubliez pas dé vous faire passer pour oune espionne à leur solde quand vous vous adresserez à eux). Vous leur direz qué : tous nos vivres n'ont pas été détruits et qué nous sommes sur le point dé partir dans l'autre direction, car nous aurions flairé oune piège. Vous leur direz qué nous sommes lents et peu sour nos gardes, et qu'il serait facile et joudicieux dé nous attaquer en marche. En fait, il faut qué vous les incitiez à venir à notre rencontre, car nous les attendrons en leur tendant oune embuscade sur lé chemin. Si vous faites en sorte dé leur faire croire qué l'idée vient de leur capitaine, ils devraient sé jeter dans le piège, car ils sont très orgueilleux, en général.

Pouis, oune fois qu'il vous aurons dit qu'ils iront nous attaquer, vous leur direz qué vous repartez dans lé groupe pour nous espionner et faire en sorte qué nous ne nous doutions dé rien. Evidemment, oune fois rentrée parmi nous, on débousquera le traître et on attendra de pied ferme ces soldats.
Bonne chance, Sarah, vous êtes notre dernier espoir.

Alors qu'elle commençait à marcher vers le village prochain, après qu'elle ait déjà parcouru les quelques centaines de mètres de bois qui les séparaient de la route principale, et qu'elle soit largement sortie du champ de vision des révoloutionnaires, une flèche surgit en sifflant des bois bordant la route, passa juste devant la Lénor et alla se ficher dans un arbre de l'autre côté de la route.

Test de perception (INI) : 16. Raté.

Malgré tout ses efforts pour voir d'où provenait le trait, la religieuse ne put rien voir d'autre que les sous-bois. Prudemment, après quelques dizaines de secondes d'attente, elle se releva (car elle s'était jetée à terre pour éviter toute nouvelle flèche) et elle s'approcha de la flèche enfoncée peu profondément dans l'écorce d'un pin. Autour de sa hampe était enroulé soigneusement un papier. Elle le déroula, et put lire :

Sœur Lénor, bien que votre première tentative ait été infructueuse, vous m’avez aidé indirectement en créant une diversion. De plus, vous avez joué le jeu en essayant d’accomplir ce que je vous avais demandé, et vous ne m’avez pas trahi, même devant la perspective d’une exécution précédée de tortures et de viols.
Sachez qu’il sera tenu compte de votre dévouement, à l’heure de la récompense, qui approche. Oui, ne vous en faites pas, ce calvaire sera bientôt terminé, et bientôt tous ces porcs qui ont osé défier l’Empire finiront sur le saint bûcher, tandis que vous serez récompensée comme il se doit.

Voici vos nouvelles instructions :
En arrivant au village, vous verrez une compagnie d’arbalétriers et d’hallebardiers dirigée par le capitaine Reikhard. Dirigez-vous vers eux sans vous cacher, en levant les mains et en montrant que vous n’avez pas d’arme. Puis transmettez au capitaine cette missive pour preuve de votre bonne foi. La dernière partie de la lettre le concerne d’ailleurs exclusivement.
Ensuite, vous détruirez cette lettre, rentrerez au campement, et vous direz à Gustavo qu’il n’y a aucun problème, qu’aucun soldat ne les attend là-bas et que les paysans sont acquis à sa cause et prêts à lui offrir des vivres. Je vous contacterai ensuite en personne, afin que nous quittions discrètement le groupe pour que nous ne soyons pas confondus avec cette racaille.

Une fois que cela sera fait, vous recevrez une amnistie totale pour vos crimes antérieurs, et serez ordonnée prêtre avec en plus une prime de remerciement substantielle pour vos services.

Un ami.

PS pour le capitaine Reikhard :
RcImOg SnMuCxQhMqDv AoCpQj PtFyVz EmZmBuNrXdHyWwLwJnTfRvKwXq AdPtFyNeGaFnJcBt SuCqNzKwXb BqLcXbWrMg, Ny PtAnFsLpKwDl BbVkOdNeDrIkHoFj GkOh NaEi KcJn VyDrYsAtPt FiMq QhLtImKx, WlCtPtApGgHyLpMl Sd VzDpMnVpTlYaAaXaVz. NpXbAtFyWa MrGkPbAmGk, DvFfDuDd LwSwPcHvKb, JnNfXq SmViCg CcKxHpHl, SiFzMu PcAoOiLd KcSwRiEx Ad NnCiPtIvRk TwPdOiAbAlJn. XiCg HtEeKsCvKbXb, QhNbWiUuJsBo Lo OoAlPqXlCp, LdAaUoWnOo AsMq SkPdCwVqBfSfQyHy AdKo JePdSlOfWa MrAiNqXbVgNvAtOs UyRk OjZnMgWo PgOsGiHvDpVkImAnWoXbAr MpQu KfKyJcLcQu HzOsIzFaPxAcPt.

OzWqMwVvHz NwXfVzCfPtAnXcWaItRyMqAr

Qu’allait faire la Lénor ?

Pour le code, j’ai fait relativement simple par rapport à ce que j’aurais pu faire (mais cependant déjà long à coder, ça m’a pris des heures). Si tu cherches à le décoder à la main, ça devrait être possible. Il est important de différencier entre les « i » majuscule et les « L » minuscule [si tu as un doute c’est très simple à savoir : -soit tu copies-colles et tu changes la police jusqu’à en trouver une qui différencie
-soit tout simplement, tu regardes la lettre précédente ou suivante, car le code alterne MAJ/min/MAJ/min/MAJ/min etc…, sans aucune exception.

PS : Si tu n’arrives pas à le décrypter, ce n’est pas grave, ce sera juste que Sarah n’y sera pas arrivée, mais il se peut que le message codé influence ton aventure, ou pas, d’ailleurs…

[Sarah Lénor]

La partie qui la concernait indiquait que son jeu avait clairement fonctionné, le traître ne se méfiait pas, il lui faisait encore confiance et son double jeu n'était pas découvert. La partie codée en revanche gênait davantage la nonne, elle n'avait ni le temps ni la patience de décrypter tout ça, cependant laisser le capitaine s'en emparer pouvait se révéler dangereux! D'un commun accord avec elle-même la jeune fille se décida à agir autrement: lentement elle déchira la partie codée, soigneusement, délicatement pour qu'on ne puisse pas s'apercevoir qu'il y avait eu déchirure. Quand elle termina, nul n'aurait pu dire qu'un second message avait été écrit sous le premier!
Le message codé fût caché dans un creux de tronc d'arbre proche, Sarah se promit de revenir le rechercher après pour le décrypter au calme, pour le moment le garder sur elle n'était qu'un risque supplémentaire à cause des fouilles probables!

En chemin quelque chose la gêna, comme si elle avait oublié un truc important. Anxieuse elle ressortit la missive qu'elle relut, puis ce qui n'allait pas la frappa, il y avait une phase qui allait la trahir: "La dernière partie de la lettre le concerne d’ailleurs exclusivement". Heureuse d'avoir remarqué ça elle s'humecta longuement les doigts avec de la salive pour effacer ensuite l'encre ayant servit à écrire la phrase, après de longues minutes, quand les mots furent illisibles, elle replaça la lettre dans sa poche et repartit d'un bon pied vers sa destination.

Trouver le capitaine et sa milice ne fût pas très difficile, levant les bras en tenant le parchemin dans une main quand elle sortit des buissons, l'exorciste en devenir se dirigea vers les soldats en proclamant:

-"Ne tirez pas, je ne suis pas une menace, je vous apporte des nouvelles!"

La jeune fille avait la désagréable impression que tout ne serait pas aussi facile que prévu, mais elle devait aller jusqu'au bout.

[[MJ] Kriegsherr]

Comme elle n’était pas maladroite et qu’elle avait tout le temps pour bien faire le travail, Sarah Lénor parvint sans trop de mal à découper proprement la lettre, puis à effacer la phrase qui l’aurait sinon trahie. Puis elle reprit sa marche, et arriva quelques heures plus tard au village. Là, elle tomba nez-à-nez avec une troupe de cinquante soldats réguliers armés d’épées et d’arcs, et protégés par des armures de cuir et des boucliers. En fait, à vrai dire, elle fut « interceptée » par un milicien ou un mercenaire armé d’une arbalète qui se tenait en embuscade à la périphérie du village.
Il emmena la religieuse jusqu’au capitaine qui était en pleine discussion avec ce qui devait être le chef des miliciens ou mercenaires. Le militaire était un homme qui devait avoir la cinquantaine, cheveux et barbe courts et négligés, blond, fort et beau, avec en lui la dureté d’un combattant. Il portait un uniforme sale et usé. L’homme d’une trentaine d’années en face de lui était vêtu d’une longue veste de cuir, et avait deux poignards à sa ceinture. Son visage très laid, voire hideux, était couturé de cicatrices et on devinait sans peine la brute et le pervers retord en lui, de plus, il était borgne et chauve. La Lénor surprit leurs derniers échanges :

-D’après notre informateur, ils ne seraient guère plus d’une cinquantaine, y compris les femmes et les enfants. La plupart ont leurs têtes mises à prix, nous vous laisseront donc leurs cadavres et vous vous payerez avec en les apportant à la garnison la plus proche. Bien entendu, vous et vos hommes pourrez avant cela vous payer en nature sur leurs corps et vous amuser avec les prisonniers et les prisonnières avant de vous amuser, si le cœur vous en dit. J'ai entendu dire que vous et votre bande n'hésitiez pas à prendre votre dû sur les femmes et les enfants qui ont la malchance de tomber entre vos mains.

-Oh oui, et ne vous en faites pas, on s'amuse aussi sur les hommes. C'est donc OK, ça me va, marché conclu, vous pouvez compter sur la coopération pleine et entière de mes dix gars. Tiens, d’ailleurs vl’à notre première prise de guerre que ramène Grip, semblerait-il. Mignonne, la petite…

Puis le dénommé Grip, celui qui avait « escorté » Sarah jusqu’au capitaine, répondit :

-J’lai trouvée sur la route, chef. Elle venait sûrement nous espionner, mais elle a dit qu’elle avait un message. Certainement une ruse pour nous tromper. Moi, je commencerai bien à me payer sur elle tout de suite, et en plus, ça la ferra parler sur ses petits copains, pas vrai chef ?

Le chef des mercenaires hocha la tête en dévorant la messagère du regard, mais le capitaine Reikhard intervint :

-Une minute, messieurs. Voyons déjà si elle dit vrai. Ecoute petite, tu as intérêt à nous dire toute la vérité, sinon, je te livre à ces mercenaires sans foi ni loi, puis à mes hommes, s’ils ne sont pas trop dégoûtés par ce qu’il restera de toi. Tu disais avoir un message pour moi ? Quel est-il ? Explique-toi.

Gustavo ne l’avait pas caché, et il ne s’était pas trompé : la situation était terriblement dangereuse pour la sigmarite. Les risques qu’elle avait accepté de prendre étaient réels, elle risquait de subir de terribles sévices avant de mourir dans d’atroces souffrances si elle n’était pas crue. Heureusement, au pire, elle avait un atout dans la manche. Il était encore temps pour elle de retourner sa veste et trahir les révolutionnaires, ça lui éviterait peut-être de subir le sort peu enviable que les hommes réservaient aux prisonnières, tel qu’elle l’avait entendu de la bouche même des chefs…

[Sarah Lénor]

"Un jour il faudra que je pense à rester sur mes gardes, ça m'évitera pas mal de soucis". Pensait Sarah en voyant les deux mercenaires la mettre en joue la jeune nonne ne pu rien faire d'autre que suivre sans protester. Que pouvait-elle faire de toute façon? Elle était venue pour ça et avait bien prévenue qu'elle venait en amie...

Le cirque auquel elle eût droit ensuite lui rappela d'amère souvenir, encore une fois des troupes d'hommes parlaient de massacres à la chaîne sans même se soucier des vies qu'ils prenaient. Comment le culte Sigmarite pouvait laisser ce genre de choses continuer sans intervenir? La jeune fille se fit une raison en pensant que même l'église ne pouvait pas être partout. Mais ce qui la révoltait par-dessus tout c'était le fait que ces gens veuillent "s'amuser" avec les femmes et les enfants, tuer ne suffisait donc pas? Il fallait encore torturer d'après eux.

L'exorciste en devenir ne fût d'ailleurs pas surprise quand ces pervers proposèrent de commencer par elle. Finalement la situation ne changeait pas de d'habitude, où qu'elle allait des hommes voulaient la violer, c'était une sorte de comique de répétition. Des fois elle aurait préféré être née laide, ça lui aurait évité bien des désagréments! Pour l'heure il fallait tout de même se sortir de ce pétrin, heureusement pour elle son atout dans la poche faisait basculer le poids en sa faveur, cela dit elle voulait éviter de le sortir pour rien. Au pire le montrerait-elle si on ne la croyait pas.

-"C'est quand même une drôle façon de tuer votre informatrice vous ne croyez pas? Je m'arrange pour me faire passer pour leur amie, pour m'occuper de cette mission et tout ce qu'on trouve pour me remercier c'est de me menacer de mort? Très gentil merci."

Se dégageant de l'étreinte de ses bourreaux, Sarah essaya de remettre ses habits en bon ordre pour se donner de la prestance.

-"J'étais venu vous dire que les rebelles ne se doutent de rien, qu'ils sont désespérés après un accident survenu hier soir et qu'ils m'écouteront si je leur dis de pas se méfier. Dans le même esprit j'étais venue voir avec vous le lieu et l'heure de l'embuscade, pour être sûre que tout se passerait correctement et sans pertes de notre côté. Mais si vous préférez y aller à l'aveugle..."

[[MJ] Kriegsherr]

Sarah n’avait pas cédé à la panique, au contraire, elle était restée calme et avait tenté de jouer son rôle d’agent double au mieux possible, feignant même l’indignation. Mais cela allait-il suffire ? Etait-il possible que le capitaine ou ses acolytes aient plus d’informations qu’elle ne le pensait, ou voient clair dans son jeu ?

Test de CHA : 15. Raté.

En tout cas, le capitaine Reikhard ne se laissa pas tromper par ces affirmations de la jeune femme. Il répondit du tac au tac :

-Cesse ton baratin, petite. Il se trouve qu’effectivement j’ai un informateur dans cette bande de dégénérés, mais il se trouve que c’est un homme, un sacré bon espion du nom de Lukas Wiedenfelher. Rien ne me dit que tu es avec lui : tu serais une de ces révolutionnaires envoyée en reconnaissance et qu’on aurait capturée, et tu serais un peu intelligente, tu nous servirais le même discours pour t’en tirer et retourner prévenir tes petits potes.
De plus, normalement, si le plan se passe réellement comme prévu, on est pas censés bouger d’ici, mais leur tendre une embuscade dans le village…
Alors maintenant, prouve tes dires, ou tu sais ce qui t’arriveras. Et si tu as menti, il est encore temps de passer à table, et je te jure que tu souffriras beaucoup moins…

Le militaire venait de donner des informations sur le traître et ses projets à Sarah Lénor. Visiblement, il semblerait que Gustavo ait vu juste et que le plan des soldats ait été d'attendre leurs proies dans le village où ils étaient maintenant obligés de ravitailler. Au sein de la troupe de révolutionnaires, il n’y avait aucun Lukas Wiedenfelher, ce qui signifiait certainement que l’homme s’était infiltré sous un faux nom. Sarah était dans de sales draps. Si elle voulait s’en tirer, elle n’avait pas trente-six solutions, elle allait devoir la jouer très fine, ou se résigner à trahir ses camarades, dans le pire des cas, parce qu’en face, le capitaine et les mercenaires ne rigolaient pas du tout... Démasquer le félon était secondaire pour la religieuse : il convenait avant tout de survivre.