[Sarah Lénor] Le lion vêtu de la peau de l'âne

[[MJ] Kriegsherr]

Le religieux tourna la tête vers son élève, un air sévère sur la figure. Depuis qu'il était entré, ses deux mains étaient croisées derrière son dos. Il semblait déçu de l'attitude de l'initiée. D'un ton sec et qui n'attendait pas de réponse, il tonna :

-J'aurais au moins pensé que ma parole vaut plus que les dires de cette folle. Si tu veux mon avis, il n'y a pas de doute, elle essaye de nous monter l'un contre l'autre. C'est une agente du chaos, ou alors elle a eu l'esprit perturbé. Quoi qu'il en soit, il n'y a pas d'autre choix que de l'éliminer, et tout de suite ! Fais-le ! Ou je considèrerais que tu as protégé un hérétique et j'agirai en conséquence, et tu brûleras sur le bûcher. C'est là ta dernière chance, Sarah, ne la laisse pas passer, tu n'as pas d'autre choix ! FAIS-LE !

Cette brutalité soudaine, ces menaces non voilées et ces idées extrémistes ne correspondaient pas du tout à l'image qu'avait jusqu'ici donné de lui Johan Wolfenberg. En tous les cas, il avait coincé Sarah, et il n'y avait plus pour elle que deux possibilités valables : la fuite n'en était pas une. Soit elle exécutait la jeune mère qu'elle venait d'exorciser, soit elle refusait et devrait assumer toutes les conséquences de son geste, et Sigmar savait qu'elles pouvaient être importantes... Verser le sang semblait inévitable, quelle que fusse l'option qu'elle choisisse.

[Sarah Lénor]

Devant la voix ferme et coléreuse de son mentor, Sarah avait reculé de quelques pas. Ce n'était pas tant le discours en lui-même que les menaces implicites qui dérangeaient la jeune fille. Mais comment quelqu'un pouvait-il souhaiter la mort d'une ancienne possédée venant d'échapper au démon... Surtout qu'il s'agissait ici d'un sigmarite comme elle! Mais cette personne, elle en avait effleuré le coeur, nulle trace de corruption ni restait.

-"Maître, j'ai touché l'âme de cette femme, j'ai détruit le démon qui se cachait en elle. J'y ai bannie toute trace de corruption chaotique, comment croire après cela qu'elle est un danger?"

Tenant fermement son marteau dans une main, elle utilisa l'autre bras pour désigner la prostituée qui restait, prostrée et terrifiée, dans un coin de la pièce.

-"Abattre une innocente avérée parce que vous la pensez coupable; c'est contraire aux enseignements de Sigmar, souvenez-vous en! Non, définitivement je pense qu'il vaut mieux l'emmener dans l'auberge que nous avons bénie. A cet endroit le Dieu seul sera juge."

Elle avait adopté le ton ferme et dur de la personne déterminée. Non, ce n'était pas Johan Wolfenberg qui la forcerait à assassiner de sang-froid une innocente. Hors-de-question! Seulement il faudrait désormais faire face aux conséquences, mais elle les attendait de pied ferme.

[[MJ] Kriegsherr]

Les arguments de la jeune exorciste semblèrent encore plus énerver le frère Johan. Il devint rouge de colère, et, ivre de sang, réitéra son ordre : "Tue-la ou meurs avec elle !". Mais, comme on pouvait s'y attendre, son élève n'obéit pas, et se plaça même entre le maître et l'ex-possédée pour protéger celle-ci, qui était pétrifiée de terreur. Sarah Lénor avait préparé son marteau et était maintenant visiblement sur ses gardes, l'air déterminée et prête à se battre. L'affrontement semblait inévitable, mais pourtant, contre toute attente, le frère, constatant la désobéissance de son apprentie, et le fait qu'elle ne tuerait pas la jeune mère, quoi qu'il arrive, se calma en l'espace de quelques secondes. C'en était presque troublant : il était passé d'un état de haine sans nom à un visage souriant et satisfait. Son sourire était malgré tout dérangeant. C'était un sourire sadique, le sourire du prédateur qui se délecte de l'impuissance de sa proie, le même qu'aurait une araignée en s'approchant de la mouche prise dans sa toile. Le nouveau frère Wolfenberg était même beaucoup plus effrayant ainsi que lorsqu'il était en colère. Car s'il avait attaqué frontalement, ça n'aurait été qu'un adversaire comme un autre, mais là, il semblait avoir tout prévu, posséder au moins un atout dans sa manche.
Il se délectait de la situation, sûr de sa supériorité, et, après avoir vérifié que personne n'était à portée de voix, il susurra d'une voix mielleuse :

-La none protégeant la pute, que c'est beau ! Ah, Sarah, Sarah, Sarah... Quelle idiote tu as fait. Mais il faut reconnaître, à ta décharge, que je suis un excellent comédien. Après être passé de nuit une première fois par ce petit village, sans être vu de personne, et avoir appelé le démon sur cette femme en profitant de son métier de sale putain, j'ai continué ma route de corrutpion. Et quand j'ai croisé un vieil exorciste isolé sur le chemin, il m'a été facile de tuer le vrai père Wolfenberg, et, beaucoup mieux, de me faire passer pour lui. C'est ainsi que j'opère pour la gloire des dieux : dans l'anonymat, en biais, par la ruse, l'intelligence. Jusqu'à présent, nul n'a jamais percé mon secret, et c'est pure malchance si cette petite sote qui me servait de larbinne, de protectrice, de couverture et d'alibi, a été trop zélée et l'a exorcisée. Je n'avais pas remarqué que cette femme avait une enfant, ce fut ma seule erreur, mais heureusement pour moi, j'ai joué le jeu jusqu'au bout pour me retrouver dans cette position très confortable de maître du jeu. J'ai tous les atouts en main, vous ne pouvez plus rien pour m'arrêter, désolé.
Je ne suis pas magicien, ni bon combattant, certes, mais cela dit, je suis curieux de savoir quel seront vos réactions à vous deux, mesdames qui avez été l'une et l'autre assez stupides pour marcher aveuglément dans ma supercherie jusqu'au bout...

Et, d'un geste théatral, le faux-religieux fit sortir de derrière son dos la fillette et la plaça contre lui, un couteau sur la gorge, face à sa mère et à la Lénor. Elle était baîllonnée, et ses mains étaient attachées derrière son dos, mais des larmes coulaient sur son visage. Sarah l'avait envoyée droit dans la gueule du loup en lui demandant d'aller chercher le frère Wolfenberg. Toujours souriant d'un air heureux, comme s'il se délectait de se qui se passait, il carressa la joue et les cheveux de Sophie qui semblait terrifiée. Sa mère hurla de désespoir à la vue de sa fille aux mains du chaotique, et fondit en larmes, en le suppliant de ne pas lui faire du mal, qu'elle était prête à tout pour sa fille. Content de son petit effet, le faux Johan Wolfenberg reprit :

-Je crois que vous saisissez toute la gravité de votre situation, n'est-ce pas ? Alors écoutez-moi, les filles, vos options sont très limitées et je ne discuterai pas avec vous. Si mes ordres ne sont pas exécutés à la lettre, vous aurez sa vie sur la conscience.
Voilà mon premier ordre : il y a une femelle de trop dans cette pièce. Vous avez une minute, et, si à la fin de cette minute, aucune d'entre vous deux n'est morte dans cette pièce, je tue la fille. Par ailleurs, je vous déconseille de ne pas me prendre au sérieux, ou de tenter quoi que ce soit : vous ne pouvez rien, absoluement rien, contre moi. Une minute.

Et, vicieusement, se délectant du spectacle qui allait se jouer sous ses yeux, le chaotique observa la jeune mère se précipiter sur un couteau de cuisine qui traînait et tenter d'embrocher Sarah Lénor. Elle avait un visage plus que jamais déterminé, elle était prête à tout faire pour sa fille, le combat était inévitable. Mais Sarah allait-elle se prêter pour autant aux jeux cruels de son ex-maître ? Il semblait en tous cas pour l'instant réellement détenir toutes les cartes en main.

[Sarah Lénor]

Cet air sombre mais moqueur, cette impression de ténèbres qui s'accumulaient autour de lui, le frère Wolfenberg commençait à avoir quelque chose de terrifiant, comme un ciel que les nuages recouvraient avant une tempête. Pire, il semblait s'être calmé alors que l'instant d'avant sa fureur était à son comble! Décidément, ce n'était pas très rassurant pour la suite...
Et effectivement, son visage sembla se transformer quand il commença une tirade interminable sur des histoires de jeu, de maître et autres; était-il accro aux jeux comme certains miséreux? Non, ça n'avait aucun rapport en fait, et puis d'où est-ce-qu'il se permettait de la traiter d'idiote? Elle avait vaincue un démon en combat mental singulier! Ce n'était pas rien quand même, elle aurait dûe avoir un minimum de prestige après ça!.

Ce n'est qu'à la suite du monologue qu'elle comprit. Depuis le départ elle s'était fait rouler dans la farine! Tout ce temps... C'était un faux frère qui l'avait aidée guidée sur la route vers la mort. Elle s'en voulu énormément de ne pas l'avoir remarqué plus tôt, en plus ça expliquait pourquoi il s'était évanouit dans la taverne: Sigmar l'avait rejeté! Le déshonneur montait en elle, tout compte fait elle n'avait été que ça: une idiote.
Les Dieux Sombres semblaient bien décidés à lui faire payer chèrement cette erreur, non seulement le maître barrait le seul passage possible, mais en plus il avait pris en otage l'enfant! Un monstre, comme tout ceux de son engeance! Au moins on pouvait dire que le piège avait été préparé. Quelle opprobre sur elle d'avoir laissé ça se faire... Mais il fallait assumer, et réparer la faute!

Semblant avoir compris son intention, le séide du mal ordonna aux deux jeunes femmes de se battre en duel pour la vie de la gamine. Aux yeux d'une initié il s'agissait de la leçon final qu'on vous enseignait quand on vous remettait les armes des prêtres, avant de partir sur les routes: on ne pouvait pas sauver tout le monde, et parfois le sacrifice d'innocents étaient nécessaires.
Echappant de peu à l'assaut de la prostituée, l'exorciste se retrouva devant un choix crucial. Tuer la mère? Ce serait se livrer au Chaos. Tuer Johan? Elle n'en réchapperait peut-être pas et si elle réussissait la petite serait exécutée.
La décision finit tout de même par venir. Sur son dos elle avait toutes ses affaires, dans ses mains elle avait son marteau, en elle il y avait la foi et la jeunesse, oui, elle réussirait.
Rassemblant son courage elle tenta le passage en force sur le faux-prêtre lui-même. Son but n'était évidemment pas de rester pour combattre, non. Sarah comptait sur la charge pour le pousser, histoire de lui laisser le temps de s'enfuir. Et si une fois à terre la mère s'en prenait à lui, c'était encore mieux! Pour le moment il fallait passer, puis rejoindre l'auberge... Mais surtout fuir cet endroit maudit!

[[MJ] Kriegsherr]

Heureusement pour elle, l'initiée était préparée au combat, et fut bien plus rapide que la mère à réagir. Elle parvint assez facilement à charger sur le faux-prêtre et son otage, avant que la mère n'ai eu le temps d'attraper son couteau de cuisine. Mais une telle réaction de la part d'une sigmarite était très prévisible, et il allait sans dire que l'intelligent trompeur et serviteur du chaos l'avait anticipée bien avant de se révéler. Il n'avait pas été assez idiot pour laisser sa vie, c'est-à-dire ce qui avait le plus de valeur à ses yeux, entre les mains de son élève avec comme seule garantie une simple otage. Non, la petite n'était à ses yeux qu'un jouet, un instrument destiné à l'amuser, et à torturer ses véritables proies avant de leur porter le coup de grâce. Evidemment, il trouva quand même dommage que Sarah réagisse si classiquement, il aurait espéré que sa nature profondément bonne la pousse à se prêter à son jeu, à se plier à ses quatre volontés dans l'espoir de sauver l'innocente fillette. Cela n’avait toutefois pas été le cas, ce qu’il avait d’ailleurs supputé et ne le surprit guère.
Il s’était préparé à une tentative de ce genre, et c’est pourquoi il s’était tenu constamment sur ses gardes et avait prévu une parade sans risques à une telle réaction de la jeune religieuse. Elle avait commis une faute à ses yeux en refusant de lui obéir, et cette faute appelait une sanction, sanction qui serait lourde et inéluctable. Avant même que Sarah Lénor ne soit arrivée à un mètres de lui, il avait déjà tranché le cou de la petite Sophie, sans hésiter une seule seconde, puis il avait jeté le petit corps en avant, entre lui et son assaillante, s’était retourné, et était sorti du bâtiment, talonné par son ex-élève. Et une fois dehors, il mit à exécution la seconde phase de son plan diabolique.

Visiblement, il avait déjà réuni la foule des villageois autour de la maison, puisqu’ils attendaient tous à la sortie du bâtiment, en demi-cercle, coupant toute échappatoire, des armes de fortune à la main. Le faux religieux se retourna une fois arrivé parmi eux, et leur dit :

-VOYEZ ! Voyez, j’avais raison, elle nous a trahi ! Elle a fait en sorte que vous épargnez le démon pendant un temps, et que vous vous battiez entre vous, pour profiter de ce temps pour la libérer. D’ailleurs, elles ont même sacrifié la brave petite Sophie, qui était venue me chercher pour les dénoncer, au nom de sa foi en l’Empire et en Sigmar, vous en avez étés témoins !

A cet instant précis, un cri déchirant fusa de derrière Sarah qui s’était arrêtée à la porte de la cabane. L’initiée se retrouvait maintenant face à un double problème qu’il serait extrêmement difficile, voire presque impossible, de résoudre. D’une part, elle devait se retourner pour faire face à la mère, qui pouvait se révéler dangereuse dans son dos, et voir si elle ne pouvait pas faire quelque chose pour essayer de sauver Sophie si c’était encore possible, et d’autre part, elle allait se retrouver, elle, dans la position officielle d’une traîtresse hérétique de la pire espèce, le genre qu’on traquait et qu’on brûlait impitoyablement. Même si elle choisissait d’essayer de contrer par ses explications les dires du faux frère Johan Wolfenberg, il était extrêmement peu probable qu’on l’écoute, et encore beaucoup moins probable qu’on la croit. Elle-même avait présenté le frère comme son supérieur, et ne se doutait pas de sa duplicité, quelques minutes plus tôt, sans compter qu’il avait fourni à la foule de nombreuses fausses preuves qui rendaient sa version infiniment plus crédible que ne le serait la simple parole de la jeune religieuse, par ailleurs théoriquement moins élevée hiérarchiquement. Le fait, par exemple, que la jeune fillette soit venue le chercher pour lui demander de venir, par exemple, et les propres paroles et actes de Sarah venaient aussi renforcer sa version : elle avait libéré à l’insu de tous la possédée, et s’était précipité à la poursuite du frère, l’arme à la main, quand lui ne lui avait rien fait (du moins du point de vue du peuple). Il fallait ajouter l’accusation de meurtre contre laquelle elle ne pourrait rien arguer, le frère ayant laissé son arme dans la cabane. Et de toute façon, si elle essayait de parlementer avec la foule, elle risquait fort de se retrouver avec une lame entre les omoplates, la mère étant derrière elle, et elle la considérait sûrement comme responsable de ce qui s’était produit, ce qui n’était d’ailleurs pas tout à fait faux. Quant à la fuite, mis à part se barricader dans la masure, n’était pas une option possible.

S’il fallait reconnaître une chose, c’était que ce chaotique était réellement très doué pour manipuler les gens, puisqu’il avait même réussi à inverser les rôles : aux yeux de tous, c’était elle, la chaotique criminelle, maintenant, et cela ne présageait rien de bon, tant sur le très court terme que sur le moyen et long terme. Mais encore faudrait-il survivre aux minutes qui allaient suivre, et trouver une échappatoire rapidement, car la foule allait certainement la lyncher sous très peu, sinon.

-Hardi, frères, à l’assaut avec Sigmar, brûlons ces démons !

Et les villageois prirent un air menaçant, et véritablement effrayant. Maintenant seulement, Sarah Lénor pouvait ressentir ce que ressentaient tous ceux qui se savaient traqués, haïs et qu'on voulait à tout prix exterminer comme une maladie. D'ici au plus quelques secondes, si elle ne faisait rien, les villageois chargeraient et seraient sur elle.

[Sarah Lénor]

Comme prévu le chaotique égorgea la pauvre enfant, comme prévu il s'écarta pour laisser Sarah continuer sa charge, comme pas prévu il y avait derrière la porte la foule de paysans prête à la brûler comme sorcière. Elle nota pour elle même que la prochaine fois il faudrait viser directement le prêtre au lieu de passer au travers, au moins pour détruire la mal avant qu'il ne sévisse de nouveau.
Mais la voilà, désormais, au milieu d'hystériques ruraux déterminés à la mettre en pièce, le regard orgueilleux de son ex-maître l'écoeurait presque autant que le cadavre de la fille devant elle. Au fond de la cabane derrière elle, une pauvre femme tentait fébrilement d'attraper un couteau, c'était si triste...

Personne n'avait jamais prévenu Sarah que ce genre d'entourloupe existait, probablement que ceux qui en avaient été victimes n'étaient jamais revenus en parler. Le destin d'une initiée était-il d'aider le mal en mourant dans les flammes? Probablement. Mais elle ne l'accepterait pas aussi facilement. Devant tant de gens, que faire? La fuite vers l'arrière? Impossible. La fuite vers l'avant? Impossible. Les raisonner avec un discours? Les chances étaient trop minces, ces gens voulaient des actes pas des paroles. Et l'exorciste en devenir allait leur en donner pour leur argent.

Les villageois étaient encore loin et n'avançaient que prudemment. Doucement la jeune fille se retourna et ferma la porte de la cabane, empêchant la pauvre femme de voir la suite, il aurait sans doute beaucoup à dire avec la prostituée... Toujours lentement, mais avec un peu plus d'empressement tout de même, Sarah posa son sac à terre, y accrocha son marteau et en sortit diverses amulettes sigmarites. Le tout remis sur son dos, l’initiée se tourna vers le cadavre de la pauvre Sophie. Religieusement elle plaça sur sa poitrine les mains de l'enfant, logeant à l'intérieur une comète à double queues, sa plus belle. Les paysans étaient proches, le mouvement final arrivait.

Sarah prit dans ses bras le corps tiède de la petite, se tournant vers le chef du patelin, elle s'approcha de quelques pas, pour arriver à tout juste un mètre de lui. Un peu tremblante elle lui tendit Sophie, qui commençait à se faire lourde pour ses bras frêles. Ce n'était pas le moment, il ne fallait pas flancher maintenant! Et de sa voix la plus émue, elle déclara.

-"Le démon est banni maintenant, vous n'aurez plus à le craindre désormais. Mais il aura fait une victime avant de disparaître."

Elle se sentit un peu défaillir et un larme coula sur sa joue, autant pour le sort de l'enfant et de la prostituée que pour le sien si elle ne parvenait pas à instiller le doute dans l'âme de ces personnes.

-"Cette enfant est en paix, auprès du Père Fondateur désormais, honorez sa mémoire comme vous le feriez avec n'importe qui d'autre. Et rappelez-vous, tous, même dans l'heure la plus sombre, quand le destin semble le plus cruel... Sigmar veille toujours sur nous!"

Sa voix ayant monté dans sa dernière phrase, Sarah ferma les yeux et entonna à voix haute un dernier chant sacré, n'osant regarder si les citoyens allaient se tenir avec elle ou la brûler pour de bon.

-"Vous nous protégez tous, nous Vos enfants.
Ceux que Vous avez chargé d'apporter Votre Grâce.
Sigmar qui êtes le père unique,
Que tout les impériaux respectent et prient.

En ce jour nous demandons Votre clémence,
Pour la pauvre âme qui Vous rejoins.
Et puisse son sacrifice dans nos esprits,
Rester la marque invincible de notre mépris,
Pour les forces du Mal et leurs serviteurs.

Qu'elle puisse nous donner, force, foi et ardeur..."

Pas facile d'inventer une prière...

[[MJ] Kriegsherr]

Alors pour ce post, je signale que je n'en suis pas du tout content (ça m'arrive parfois, toujours pour la même raison, d'ailleurs). Je trouve qu'il est tout simplement mauvais. Pourquoi pense-je cela : 2 raisons :
-1: parce qu'il l'est peut-être objectivement.
-2: parce que j'avais commencé une rédaction de ce post ce matin, que je trouvais 100X mieux, et que j'ai perdue, du coup j'ai dû tout réécrire dans "l'à peu près", et ça donne (à mes yeux), un résultat bâclé et médiocre.
Toutefois je poste quand même pour ne pas faire trop attendre.

La réaction de la jeune initiée était pour le moins étrange, imprévisible. Dans sa situation, c'est-à-dire face à une foule de personnes qui étaient sur le point de l'étriper, presque n'importe qui aurait agi, soit en se barricadant dans la cabane avec la jeune mère, ou encore en prenant son arme au poing et en défendant sa vie, dans le seul espoir de mourir en vendant le plus chèrement sa peau. Toutefois, il était vrai que les paysans, s'ils étaient un peu extrémistes et peu cultivés, n'étaient pas des chaotiques, et donc qu'un tel comportement agressif, bien que fier dans la mort, n'aurait apporté que quelques victimes innocentes supplémentaires, et aurait donc indirectement servi le jeu fourbe, cruel et mortel du chaos. Décidément, il se révélait vraiment très difficile de lutter contre les plans machiavéliques de l'imposteur : quoi qu'on fasse, cela semblait lui être avantageux. Cet homme était véritablement machiavélique, mais aussi, il fallait le reconnaître, diaboliquement intelligent.
C'est alors que la jeune religieuse, constatant son impuissante, se refusa visiblement à faire d'autres victimes innocentes, quitte, pour cela, à mourir comme une hérétique qu'elle n'avait jamais été, haïe par tous, sous les yeux réjouis de son ennemi triomphant. En fait, cela ferrait d'elle une martyre de Sigmar, mais l'ironie du sort, c'est que justement personne ne la considérerait comme telle, mais seulement comme une traitresse ignoble et infernale.
Avec beaucoup de chance, cependant, rien de tout cela n'arriverait, mais cela tiendrait alors du pur miracle.
En tous cas, une chose était sûre, personne ou presque n'aurait eu l'idée de prendre la jeune Sophie et de tenter ce que tentait justement là notre héroïne...

Déjà, on commence par le positif : +5 xps pour l'idée originale, et + 4 PdCs en Sigmar pour la prière.
Test de CHA (malus de -4 [je suis généreux, je voulais mettre -8 au début]) : 11. Echec, même sans malus. Me voilà bien embetté.

Le miracle n'eut pas lieu. Comme on pouvait s'y attendre, les villageois, un instant étonnés, se jetèrent tous sur la jeune religieuse, et se saisirent d'elle. Rapidement, malgré ses éventuelles protestations et ses mouvements pour essayer de se débattre, elle se retrouva ligotée et bâillonnée, emportée par un cercle d'excités. Il était clair que les intentions des hommes allaient être de les brûler vives, elle et la mère. Mais le moment n'était pas encore venu. Le chaotique, repoussant les autres derrière lui, s'approcha de la Lénor, un sourire vainqueur sur le visage. Il se repaissait de la détresse (et des larmes si elle avait pleuré ou pleurait) de son ex-apprentie. A l'oreille, il lui chuchota, en lui caressant la joue et les cheveux, profitant de son impuissance :

-Dommage, toi et moi, on aurait pu faire tellement plus.

Et, sur ces mots, l'homme passa discrètement sa langue sur l'oreille et le haut de la joue de Sarah, puis il s'écarta, et parla à un petit garçon de six ans au plus, de manière à ce que tous entendent.

-Tu vois petit, cette femelle ? Ce n'est pas une humaine, c'est pire qu'un animal, pire qu'une vermine, pire qu'une maladie ou qu'un tas d'excréments. Elle est une sorcière, une démone. Prends cette torche, petit, et montre lui ce qu'on fait aux monstres de son espèce ici.

Aux yeux de Sarah Lénor, la cruauté de son ex-maître était sans aucune limite. Elle pouvait encore comprendre qu'il veuille la faire souffrir avant de mourir, mais là, il allait utiliser un enfant pour le faire. Dans un cas, l'enfant pourrait être traumatisé à vie, dans l'autre cas, il pourrait prendre goût à la violence et devenir lui-même un monstre insensible, capable de tuer sans rien ressentir, sauf du plaisir. Dans tous les cas, être obligé de tuer quelqu'un sans défenses, aussi tôt dans sa vie laisserait forcément des marques indélébiles. D'autant que, bien qu'il ne le sache pas, il s'apprêtait à tuer une innocente, et son âme serait donc souillée. Et Sarah ne pouvait rien faire d'autre que de pousser des gémissements à travers son bâillon et se débattre vainement contre ses liens. Elle fut jetée à l'intérieur de la masure, à la merci totale de la mère. Pendant ce temps, la porte se referma et on entendit clairement des bruits de marteau qui signifiaient que la porte été clouée, condamnée. Elles étaient faites comme de rats, prises au piège. Tout le monde s'écarta, le petit enfant restant seul avec sa torche devant la maison. Et il y mit le feu.
La mère, son couteau à la main, resta un moment inactive, comme hésitante sur le sort à réserver à Sarah, saucissonnée à ses pieds. Puis elle se pencha et sa tête coupa tout le champs de vision de la religieuse. La femme lui parla d'une voix étonnament calme, elle se fichait clairement que les flammes dévorent sa maison. Son visage reflétait une haine et une souffrance pure, sans nom, à la mesure des épreuves terribles qu'elle avait dû surmonter. Elle dit :

-Ecoute moi bien, religieuse. Tu m'as prise tout ce que j'avais de plus cher au monde, plus cher que ma vie, que mon âme. Oh, je sais que tu ne te considères pas comme coupable ni même peut-être responsable de la mo...rt de ... de ... de mon petit ange.

A l'évocation de sa fille, la mère se remit à pleurer. Pour Sarah, l'urgence était pourtant ailleurs, car les murs et le toit commençaient sérieusement à prendre feu, et si elle ne se dépêchait pas, elles allaient être asphixiées dans les minutes à venir. Dans ses conditions, mourir la gorge tranchée par le couteau de la mère serait moins douloureux... Elle se reprit néanmoins et continua :

-Je.. Je me fiche de ce que tu penses de moi ou de ce que tu penses avoir bien agi. Il n'y a dans cet univers qu'une seule chose que je haïsse plus que toi, et c'est celui qui... A tenu le couteau. Si tu promets de m'obéir et de m'aider à le trouver, alors je te sauverais, et je ne te tuerais qu'après lui avoir pris la vie à lui. Sinon, je te laisse crever ici, et je te maudis pour que ton âme aille rejoindre les dieux de notre ennemi et ne trouve jamais le repos. Tu es avec moi ? Fais "oui" ou "non" de la tête ! Et dépêche toi, tu n'as plus beaucoup de temps !

Sarah avait-elle vraiment le choix ?

[Sarah Lénor]

En son for intérieure, Sarah tentait de refluer les larmes qui lui montaient aux yeux. Tant de cruauté, de colère, de vilenie, c'était plus que ce qu'elle pouvait supporter. Qu'on ne s'y méprenne pas, elle ne croyait pas un seul instant que Sigmar l'avait abandonné, elle avait peut-être juste trop abusé de sa patience et il lui faisait payer, avant de la récupérer dans l'autre-monde où elle reposerait à jamais.

Pour l'heure, la pauvre fille était terrifié à l'idée des horreurs qu'on allait lui faire subir, elle se voyait déjà torturée, battue à mort, brûlée à petit feu au milieu des cris haineux de la foule...
Mais au lieu de ça les villageois l'avaient ficelée comme un gigot d'agneau et balancée dans la cabane avec la prostituée. La situation était bien meilleure que prévue, même si la maison sentait le roussi! Ils avaient même eu la décence de lui laisser arme, armure et affaires! Voilà qui était de bonne augure si elle parvenait à briser ses liens!

Sans signe avant-coureur, la femme se pencha sur l'initiée, lui parlant d'une voix qui sortait d'outre-tombe. L'obéissance contre la vie... Pas de choix possible! Et si cette mère déchue se montrait dangereuse, il serait toujours temps d'aviser.
Avec vigueur Sarah hocha la tête de haut en bas pour signifier son approbation. Elle espérait juste qu'un plan d'action avait déjà été prévu!

[[MJ] Kriegsherr]

La mère planta ses yeux dans ceux de la religieuse, puis, sans dire un mot, elle avança son couteau vers elle et sectionna les cordes qui la maintenaient prisonnière. Après quoi elle laissa l'initiée se remettre debout, ôter son bâillon et se saisir rapidement de ses possessions. La mère voulut vérifier immédiatement si Sarah était à priori digne de confiance, et lui ordonna d'une voix froide, qui n'admettait aucune discution :


-A genoux devant moi, et lèche mes bottes. Ne discute pas, obéis.

L'ordre était absurde, inutile et dégradant, certes, mais la mère ne semblait pas du plaisanter, même si elle n'était pourtant pas menaçante. Il s'agissait sûrement uniquement d'un test destinné à évaluer jusqu'où la religieuse était prête à la suivre pour honorer son serment. Par ailleurs, presque bizarrement, la jeune femme ne semblait pas du tout effrayée par les flammes qui dévoraient voracement sa masure faite de bois, de paille et de terre. Elles n'avaient plus beaucoup de temps devant elles avant d'être asphixiées par la fumée, c'était certain. A moins, bien sûr qu'elle n'ait un plan, ou que la perte de sa fille l'ai rendue complètement folle, au point de se ficher de la mort, ce qui était possible. Mais une chose était certaine : Sarah, elle voulait vivre, et son temps lui était compté : elle devait se décider et choisir les actions qu'elle voulait accomplir dans le temps imparti. Fallait-il se plier aux lubies de la mère, refuser simplement, et voir sa réaction, ou tenter autre chose encore ? Tout était possible, mais le temps leur manquait cruellement.

[Sarah Lénor]

Être libre de ses mains, de sa bouche et de ses jambes, quel plaisir c'était! On avait trop tendance à oublier les petits plaisirs simples de la vie quand tout allait bien... A cet instant Sarah aurait vendu son marteau pour se payer une belle chambre d'auberge avec une assiette fumante... Moins fumante que la pièce en tout cas! Sans tarder l'exorciste se saisit de son lourd sac à dos et prit son marteau dans sa main. Toujours aussi lourd à porter, l'initiée aurait besoin de ses deux bras pour combattre avec, même si elle pouvait le transporter d'une seule main.

C'est alors que la demande de la prostituée fusa dans la pièce. Pendant cinq secondes, Sarah resta interdite, ne sachant pas si elle devait prendre cela comme une blague ou un ordre particulièrement bizarre. Quand elle se rendit compte que la dame était tout ce qu'il y avait de plus sérieuse, la jeune fille se raidit. C'était dégradant, c'était humiliant et c'était indigne d'une Soeur de Sigmar!
Elle allait refuser, et probablement lancer un coup de marteau à la tête de l'insolente, quand ses yeux la ramenèrent à la réalité, en effet un morceau de bois enflammé venait de tomber prêt d'elle.

Heureusement pour elle, la prêtresse n'avait jamais eu un caractère colérique ou bourgeois. Ravalant sa colère, elle se baissa, se mit à genoux en s'appuyant sur son marteau et lécha les bottes sales de la femme. Intérieurement elle se jura qu'une telle humiliation ne serait pas oubliée, pas plus que les menaces de morts. Même si c'était un test pour connaitre son degré de fidélité. Et si c'était les restes de la possession démoniaque? Possible après tout!
Une fois fait, la langue parcourue par un goût immonde, elle commença à se relever en demandant.

-"Après ça, j'espère au moins que vous avez un plan. Si oui, quel est-il?"