[Déchirure][Ori & Ætinis] La cour des Grands

[Ætinis Verteflèche]

Effectivement, Ætinis Verteflèche n’avait pas été convaincue par le prisonnier. Mais elle s’était montrée sincère, et avait écouté sans préjuger des paroles de l’archer, s’ouvrant réellement à lui. Trop, peut-être, puisqu’une chose qu’elle n’aurait pas pensée possible se produisit néanmoins. L’elfe attaché devant elle venait de semer le doute dans son esprit. Un doute affreux, un doute qui portait non pas sur son alignement et sur celui de son camp, car elle restait intimement persuadée de servir le bien, mais sur la personne du seigneur Nahël uniquement.

Car, sans le savoir, le prisonnier venait de lui donner certaines informations qui trouvèrent résonnance dans l’esprit peu érudit mais assez vif de l’elfe des bois. Cette dernière fit immédiatement certains liens, à tort ou à raison, elle ne le savait pas encore, mais le saurait bientôt, de manière certaine.

Partant du principe que le prisonnier ne mentait pas, elle avait pris pour argent comptant son histoire. Une cité attaquée en Ellyrion, une prise d’otages des princes, réduits en esclavage. Tout cela était plausible. Et c’est alors, avant même que le prisonnier eut terminé de parler, qu’Ætinis fit immédiatement le rapprochement avec un certain esclave.

Le seul qu’elle connaissait, à vrai dire. Il avait été propriété de Nahël, qu’il détestait plus que tout. Quand elle lui avait signifié son mépris, elle l’avait réprimandée avec l’aplomb et le comportement d’un véritable prince, lui rétorquant qu’il y avait des enjeux qui la dépassait de loin, des « jeux de pouvoirs », un terme qu’employaient exclusivement les puissants et qui ne trompait pas. Il était très jeune et venait d’Ellyrion.

Se pouvait-il qu’il s’agisse d’une seule et même personne ? Que le jeune prince soit retenu ici, forcé à accepter sa condition sous la contrainte de voir sa sœur torturée ou tuée, ou sa ville rasée ?

Il fallait en avoir le cœur net, et cela serait facile. Car il était strictement impossible que les deux aient pu entrer en contact l’un avec l’autre. En recoupant les informations, elle saurait donc ce qu’il en était. Et si son doute se confirmait, si c’était la vérité… Cela voudrait dire que Nahël serait un traître aux valeurs de son propre camp, il faudrait alors le dénoncer publiquement à son illustre grand-père ou au Roi Malékith, qui le châtierait à la mesure de son ignominie.

Car il ne saurait en être autrement. Malékith n’avait que faire de la puissance des gens, il les jugeait selon la vraie Justice. Il l’avait prouvé en dénonçant sa propre mère ! Quand son camp apprendrait l’infâme trahison de ses valeurs opérée par Nahël, il serait déchu de ses titres et enfermé en prison pendant des années voire des décennies pour les actes horribles qu’il avait commis, salissant par là-même une cause dont la noblesse et la pureté le dépassait de loin.

Mais d’abord faudrait-il en avoir le cœur net, il lui faudrait prouver ce qu’elle avançait. Et dans tous les cas, elle, une simple et petite archère, fille d’un bûcheron et d’une menuisière, ne pourrait pas accuser un noble. Non, elle n’en avait pas le droit, mais en revanche, son seigneur, Ori Aen Elle, lui, le pourrait…

Comme tous les elfes et encore plus les archers, le prisonnier était surement doté d’une très bonne vision. Il était certain qu’il avait vu les réactions successives qui s’étaient affichées sur le visage de son interlocutrice lors de son petit discours, car celles-ci étaient très fortes pour une elfe, à la hauteur de la puissance des émotions par lesquelles elle était passée en l’espace de quelques secondes.

L’étonnement d’abord, manifesté par un haussement de sourcil très net, puis un froncement de sourcil qui dénotait à la fois sa concentration extrême et l’importance qu’elle accordait aux paroles qu’elle entendant. Ses yeux verts fixés dans ceux non moins verts de son vis-à-vis, elle tentait de le jauger, de décrypter si elle devait lui faire confiance.

Elle resta ainsi, pensive et figée pendant quelques instants après que le prisonnier eut fini de parler, preuve de son intense réflexion et du doute qui l’habitait. Mais ce doute ne dura guère, car l’archère était de nature très confiante, voire naïve, même envers un ennemi. Elle se fiait encore beaucoup, sans doute bien trop selon certains, à ses émotions, et son cœur lui disait de croire les paroles de ce pauvre elfe.

C’est pourquoi, lorsqu’elle rouvrit la bouche, se fut pour concéder une demi-victoire à ce dernier, dans un murmure qu’elle rendit pourtant audible, faisant attention à modérer son accent :

-Incroyable. Et je ne parle pas de ta réponse à la question d’Arthorias, mais plutôt de ce que tu viens de me révéler.

Tu devrais plus te faire confiance, tu sais. Je suis sûrement extrêmement naïve, mais sache que j’aurais tendance à te croire.

Un certain nombre d’éléments que tu m’as donné me laissent à penser que tu dis vrai. Je suis toujours totalement persuadée de servir le bon camp, oui. Mais j’avoue que tu m’as fait douter très sérieusement du seigneur Nahël.

Toutefois, comprend bien que je ne peux pas agir sur de simples impressions. Tu me demandes de vérifier tes dires pour remplacer ce terrible doute par des certitudes. Par chance, je pourrais peut-être en avoir rapidement le cœur net.

Mais pour cela, je désirerai en savoir plus sur tes princes, les otages. Et surtout sur le garçon. Dis-moi, quel âge a-t-il environ ? Quelle est sa couleur de cheveux, ses yeux, sa corpulence ? Son nom ? Et sa sœur, quel est son nom ?

Je te jure sur mon honneur, sur mon nom et sur mon épée, celle que mon père m’a transmise, que si tu me donnes ces informations et que ta version se vérifie, je vous ferrai sortir de là, toi et tes dirigeants.

Malékith ferra jeter en prison Nahël pour ses crimes abjects et vous recevrez les plus plates excuses de notre camp pour le traitement que vous avez injustement subi. Vous serez autant que faire indemnisés pour les horreurs que vous avez endurés, même si je sais que ni l’or, ni les excuses, ni le pouvoir ne pourront jamais remplacer ce que vous avez perdu, ce qu’on vous a indûment pris.

Des larmes montèrent aux yeux de la native d’Ilmaltir tandis qu’elle repensait à ce qu’elle avait fait, regardant avec un air plus coupable que jamais la tête tranchée d’Ælynn. Et si elle avait causé la mort d’une innocente ? Une victime ? Pour protéger un monstre ? Cette fois-ci, devant l’horreur de ce qui s’imposait à son esprit, elle ne put retenir ses larmes. Au moins personne d’autre que le prisonnier ne les verrait-il couler.

-Par Isha ! Ælynn !… Je… Je suis désolée, désolée… Puisse Asuryan me pardonner ce que j’ai fait… Je pensais faire le bien, je voulais juste défendre mon seigneur, mes camarades... Encore une fois, si ce que tu dis est bien vrai comme je le crois, sache qu’en ce cas je suis plus désolée que quiconque. Sincèrement.

Puis elle reprit contenance en attendant la réponse du prisonnier sur sa question, qu’elle reposerait sinon avec insistance, à savoir décrire le prince otage et le nommer, ainsi que sa sœur.

Dès que ce fut fait, l’archère ne traîna pas dans la cellule. Elle sécha ses larmes d’un revers de sa manche, puis gratifia son homologue d’un grand sourire chaleureux pour le remercier de sa franchise et d’avoir parlé, sans quoi elle aurait été dans de très sales draps, forcée à agir contre sa conscience ou à subir les foudres d’Arthorias.

Ætinis sortit et s’adressa ensuite au garde d’une voix très assurée, en prenant soin de mentionner le nom d’Arthorias afin d’inspirer crainte et respect, mais également en ne se montrant pas condescendante envers son frère d’arme d’un rang égal au sien :

-Salut camarade. J’ai reçu du capitaine Arthorias tout pouvoir pour faire parler cet homme. Je te demande donc de me donner les clefs de ses menottes afin que je détache ses mains du mur, cela m’est nécessaire pour la réussite de ma mission. N’aie crainte, il restera quand même enfermé dans la cellule.

En outre, et que l’homme refuse ou pas, elle tint sa promesse et emmena avec elle la tête d’Ælynn qu’elle saisit délicatement et avec un grand respect.

Pour l’instant, la priorité n’était plus Arthorias ou Keltharion, ni même Nalthaël. Même la protection et la surveillance du seigneur Ori Aen Elle semblaient plus ou moins reléguée au second plan dans son esprit, même si elle avait hâte, si ses doutes venaient à se confirmer, de lui faire part de sa découverte afin qu’il prenne la décision qui s’imposerait alors au sujet de Nahël. Car elle avait confiance en Ori Aen Elle, son seigneur. Il était certes jeune et influençable, ce qui justifiait son rôle de surveillante et de gardienne, mais il était aussi et surtout bon et sage, elle l’avait constaté lors de l’attaque du carrosse et également par la suite. Il ferrait ce qui était Juste, elle n’en doutait pas un seul instant.

En attendant, dès qu’elle fut en possession des informations qu’elle avait demandée sur le prince et sa sœur, et qu’elle eut si possible libéré les mains du prisonnier, elle remonta le plus vite possible trouver Godion, où qu’il se trouve, demandant au besoin son chemin aux gardes, aux esclaves et aux serviteurs en leur indiquant qui elle cherchait avec précision. Elle portait sur elle la tête coupée, mais dès qu’elle le put, elle demanda un sac pour l’y glisser avec délicatesse, histoire de faire moins barbare qu’elle ne l’était dans ses habits frustres et guerriers, une tête tranchée et mutilée dans les mains... Il lui fallait trouver Godion et en avoir le cœur net, à tout prix...

Si elle parvenait à lui mettre la main dessus, elle l’emmènerait à l’écart et lui poserait quelques questions en privé…

[[MJ] Le Gob']

Test de CHAR : 9, réussite modérée.

Ainsi Ori avait-il décidé d’accepter l’invitation lancée par la sœur de Nahël. Sans doute sa propre curiosité de rencontrer le légendaire personnage était-elle trop pressante pour envisager de refuser une telle offre sans claire information sur les motivations d’Anima. Cyrielle fut quant à elle prompte à répondre, acceptant de se joindre à lui. Mais, encore une fois, peut-être se souciait-elle davantage de jouer jusqu’au bout la comédie qu’ils avaient mise en place : après tout, être présentés au maître des lieux les exposerait à de nombreux regards, et permettrait de répandre la rumeur de leur relation plus efficacement. Toujours est-il qu’elle acquiesça doucement, toujours accrochée au bras d’Ori, mais sans rien ajouter de plus.

Visiblement satisfaite, Anima entreprit de les guider à travers la foule, arborant toujours son mystérieux sourire en coin. Elle avait manifestement un plan à l’esprit, et devait probablement jubiler en ce moment même. Et le doute était permis quant à ses intentions : Ori avait douté d’elle dès le premier regard, après tout. Ils fendirent la foule de convives pendant quelques longues secondes, de nombreux regards tombant sur eux à leur passage, s’interrogeant peut-être quant à l’identité de ce couple, inconnu à cette cour.

Au fond de la salle de réception se trouvait un trône majestueux en bois d’orme, finement travaillé afin de ressembler à un tronc que l’on aurait taillé avec précision et minutie. Les moulures des accoudoirs et du dossier semblaient naturellement courbées pour former ce trône immaculé. Au-dessus, sur le mur d’albâtre, avait été suspendue un impressionnant étendard dépeignant un dragon et une épée, au milieu de glyphes elfiques scintillants, probablement imprégnés de magie. Le tout constituait une bannière splendide, particulièrement large et détaillée, un étendard d’exception. De ce qu’Ori savait de Valarion, il avait été le héraut d’Ænarion le Défenseur, et portait sa bannière au combat. Peut-être s’agissait-il ici de cette même bannière ? Si tel était le cas, il devait s’agir à coup sûr d’un artefact sans prix, au pouvoir considérable.

Sur le trône était assis un vieil elfe en armure d’or sombre. Son front était ceint d’un diadème en forme de phénix, et décoré d’un rubis rougeoyant. La pâleur de son visage ridé, et la blancheur de sa chevelure laissaient penser que l’elfe devait être d’un âge plus que vénérable. D’abord, parce que les elfes ne subissant pas les effets de l’âge aussi rapidement que les humains, un visage aux rides aussi marquées ne pouvait appartenir à un individu de moins de 1500 ans. Ensuite, en y repensant, si cet individu était Valarion et avait servi sous les ordres du Défenseur d’Ulthuan, le grand Ænarion, lors de la guerre contre le Chaos, alors on pouvait facilement estimer que l’âge de l’elfe était supérieur à deux millénaires.

Valarion Æthil,
Héraut d’Ænarion le Défenseur,
Seigneur de Tor Æthil

L’elfe était en pleine conversation avec un individu aux cheveux sombres et au visage impassible, mais s’interrompit en voyant le petit groupe arriver devant eux. Lorsque son regard tomba sur eux, Ori remarqua que l’œil droit du vieil elfe était vitreux, et traversé par une balafre blanchâtre : sans doute une cicatrice récoltée sur un champ de bataille pour la défense d’Ulthuan.

Anima s’avança, un léger sourire aux lèvres, et prit la parole après une rapide révérence à l’intention du monarque.

« Seigneur, permettez-moi de vous présenter le seigneur Ori Æn Elle, fils d’Azüro Æn Elle, ainsi que Cyrielle Nagaril, fille de votre allié Dranduil. Tous deux sont arrivés hier à votre cour, et n’ont pas eu l’occasion de vous être présentés. »

L’œil vif du seigneur Valarion passa rapidement de Cyrielle à Ori, et un sourire bienveillant passa sur son visage fatigué. Lorsqu’il parla, sa voix était grave mais sonore, et nettement perceptible, emprunte d’une autorité et d’une solennité comme venues d'un autre âge.

« Soyez les bienvenus en ma demeure, Ori Æn Elle, Cyrielle Nagaril. Les portes de Tor Æthil seront toujours ouvertes aux enfants de nos alliés. Puissiez-vous survivre aux troubles de notre époque, et contribuer à construire l’Ulthuan futur. »

***

Test de CHAR : 13, échec marqué.

« Le nom de ma cité d’origine est Ithyril, en Ellyrion. Je ne peux rien dire de plus. »

Malheureusement pour Ætinis, le prisonnier ne semblait plus désireux de révéler davantage d’informations. Peut-être s’en voulait-il déjà d’en avoir trop dit. Toujours est-il qu’Ætinis avait fait un rapprochement, hasardeux certes, mais plausible, entre ce qu’elle savait du nouveau serviteur d’Ori, et l’histoire qui venait de lui être contée. Suffisamment crédible en tous cas pour que l’archère envisage sérieusement d’aller vérifier les dires de l’elfe.

Le garde d’Arthorias, à la porte, se montra plutôt coopératif. Sans confier les clés à Ætinis, il alla toutefois détacher le prisonnier, sans poser de question. Lorsque l’archère eut quitté la cellule, le garde referma le cachot. Le bruit des gonds, puis du lourd verrou, résonna jusque dans le couloir, poursuivant l’archère qui s’éloignait déjà.

Elle n’eut aucune difficulté à retracer son itinéraire en sens inverse jusqu’à la chambre de domestique. Sur son chemin, les personnes interrogées ne furent pas en mesure de la renseigner quant à la localisation de Godion. Par défaut, l’archère finit donc par revenir aux appartements d’Ori. La chambre de domestique était déserte, mais elle trouva le serviteur dans la salle voisine, en train d’arranger certains vêtements, préparant probablement une tenue supplémentaire à disposition pour Ori.

Godion releva la tête lorsque l’archère entra en coup de vent dans la pièce, et son regard était dur. Il n’avait rien oublié de leur courte discussion de la veille. Lorsqu’il parla, c’était avec ce même air distant qui perturbait Ætinis depuis qu’il en faisait usage.

« Un problème, archère ? Ton seigneur n’est pas ici. »

[Ori Aen Elle]

Ainsi donc, ayant accepté l'invitation de Anima, il savait que la curiosité était ceux qui l'avait poussé à accepter cette invitation, en effet, Valarion était un personnage plus que légendaire pour le peuple des Asur, son âge étant tellement avancé, qu'il devait être une source de sagesse et de savoir incommensurable. L'idée de pouvoir parler quelques minutes à ce héros, était une chance inespérée pour lui. Le jeune Aen Elle se souvenait, durant son enfance, époque où sa mère était encore présent et que son père n'était pas encore devenu l'homme froid qu'il était maintenant, que celui ci lui racontait des histoires, sur la grande guerre du chaos, celle où Valarion avait servit au coté du grand Ænarion, pour défendre et faire prospérer Ulthuan...
Il afficha un sourire en coin en repensant à ces histoires, que enfant, le jeune homme buvait, les yeux plein d'étoiles à s'imaginer devenir une telle légende. Mais son esprit revint à la dure réalité, la jeune blonde à son bras, resta de nouveau silencieuse, depuis l'arrivée de la soeur de Nahël, il n'avait plus entendu le son envoûtant de sa voix, mais dans tous les cas, elle décida de rester avec lui, dans le but de rencontrer le maître de réception. Après tout, cela continuerai à servir le jeu qu'elle avait lancé avec Ori, quand à se montrer en spectacle avec ce jeune homme aux beaux yeux violets.

Le couple suivit donc la nièce de Valarion, celle ci arborant toujours son sourire plein de satisfaction et d'arrogance, Ori le savait, elle avait un plan en tête, mais il ne pouvait en deviner les rouages. Etait ce en lien avec Nahël ? Peut être. A moins que la jeune femme ai elle aussi ces propres projets... Parcourant la dense foule, les yeux de nombreuses personnes se posaient sur eux, au fur et à mesure qu'ils se dirigeaient vers le fond de la grande salle. Ori pouvait déjà entendre les interrogations sur qui était ce jeune et jolie couple. Ori les ignora pour le moment, ne détachant pas son regard de Anima, suivant ces pas, dans un silence morbide.

Ils arrivèrent face à un immense trône de bois d'orme, orné de motifs et de gravures en tout genre, un siège de dirigeant digne des plus grand, et qui avait du mériter de nombreux mois de travail pour le concevoir. Mais malgré la beauté de l'objet, les yeux du fils de Azurö ne purent se détacher l'espace de quelques instants, sur ce qui flottait au dessus du trône : un immense étendard avec dessiné dessus, un dragon et une épée. Il ne pouvait le confirmer, mais il était persuadé de voir devant lui, la fameuse bannière qu'arborait jadis Valarion, alors Héraut du défenseur lors des grandes guerres. Un objet aussi ancien que unique, aux pouvoirs considérables selon l'histoire.
Mais il détacha ses yeux pour les porter sur l'homme assit sur le trône, un elfe à la chevelure blanchissant, un teint pâle, et des rides se dessinant sur un visage marqué par le temps, devant lui, se tenait l'un de ces héros, et il fut tellement impressionné au premier abord, qu'il ne trouva les mots justes pour saluer l'illustre personnage.

Ne bougeant pas, comme étant tétanisé l'espace d'un instant, il en oublia même que Cyrielle était toujours à ses cotés. Ori remarqua que le visage du grand père de Anima avait été marqué par les combats, il arborait en effet un oeil vitreux, ainsi qu'une grand cicatrice, il pouvait lire dans son regard une expérience que le jeune Ori ne pourrait jamais acquérir, l'homme devant lui, était bien plus impressionnant pour lui que son propre père, où que le seigneur Dranduil qu'il avait rencontré plus tôt.
Anima les présenta, sûrement amusé par la situation, car on pouvait tout de suite voir que le jeune Ori avait soudainement perdu de la confiance dont il avait fait preuve plus tôt avec elle. Puis se fut à la fin des premiers mots de Valarion, qui leur souhaita la bienvenue à Tor Aethil, que le jeune homme se réveilla enfin, cessant de rester tétanisé, il se décida à saluer le maître de lieux de la façon la plus respectueuse qu'il put en exécutant une révérence marqué et soigné.

"C'est un honneur pour moi de me tenir face à vous seigneur Valarion..."

Il releva son regard dans sa direction, ses yeux trahissant une admiration certaine pour l'elfe.

"Pardonnez mon air idiot... Mais je n'aurais jamais pensé vous rencontrez un jour, vous n'étiez pour moi que le héros légendaire d'histoire que me racontait mon père dans mon enfance. Et vous voir ... En personne... "

Se trouvant ridicule à cet instant, il préféra se taire, refusant de continuer à montrer cette admiration plus que soutenu, car il le savait, Anima continuait à l'observer, analysant ces faits et gestes, cherchant la moindre petite faille sur le jeune homme qu'elle pourrait sûrement exploiter le moment venu. Aussi retrouva t'il un regain de confiance, et préféra rebondir sur les derniers mots de Valarion.

"Un Ulthuan futur... dont l'avenir est pour le moment plus que sombre j'en ai peur. Mais j'ai bon espoir de croire que notre peuple saura faire face, comme nous l'avons toujours fait jusqu'à présent. Tor Aethil est un endroit agréable, et je remercie votre petit fils, le seigneur Nahël, de m'avoir convié ici en temps que son invité."

[Ætinis Verteflèche]

Etrangement, alors même qu’il avait réussi à semer un doute très sérieux dans la tête de son interlocutrice, le prisonnier choisit de ne pas terminer son récit en lui révélant le nom de son prince. Voilà qui était stupide, pensa l’archère, car cela n’était pas une information de nature à lui nuire, puisque selon son propre aveu, ledit prince avait déjà été pris en esclavage par Nahël Æthil. Cette rétention d’information puérile était d’autant plus inutile qu’il venait de lui donner le nom de sa ville, et que donc elle n’aurait aucun mal à en identifier le chef. *Peu importe. J’ai déjà bien assez d’éléments pour me permettre de vérifier l’identité de cette personne, et, si mon hypothèse est la bonne, de prouver de manière irréfutable la vérité du récit du prisonnier. Il me suffira de recouper les versions.*

Par chance, et au grand bonheur de la fille de bûcheron qui le gratifia d’un grand sourire pour le remercier, le garde ne fit pas de résistance et rendit sa liberté de mouvement au prisonnier dans la cellule. Il ne s’opposa pas non plus à ce que la jeune fille enlève la tête d’Ælynn, l’être qu’avait aimé le prisonnier, et du meurtre de laquelle Verteflèche se sentait coupable, et encore plus depuis qu’elle avait entendu son histoire. A défaut de pouvoir la ressusciter, au moins lui offrirait-elle le droit à avoir sa cérémonie et sa tombe. Mais chaque chose en son temps, songea notre héroïne, bouleversée par tout ce qu’elle venait d’entendre et de vivre ce matin.

Preuve qu’elle commençait lentement à s’habituer aux lieux, ou du moins qu’elle avait été très attentive au trajet à l’aller, Ætinis n’eut pas trop de mal à retrouver son chemin dans le labyrinthique et immense château des seigneurs Æthil. Nul ne semblant savoir précisément où se trouvait Godion, l’archère essaya à l’endroit qui lui paraissait le plus évident : leur propre chambre.

En effet, les domestiques qu’elle avait croisé ignoraient où se trouvait se dernier, mais semblaient au moins unanimes sur le fait qu’il n’était pas avec le seigneur Ori Aen Elle, occupé apparemment à participer à une réception réservée à la noblesse, où ni les gardes personnels, ni les domestiques autres que ceux des maîtres des lieux n’auraient été tolérés. Et même si Godion avait été jusqu’à très récemment l’esclave du seigneur Nahël Æthil, il n’était pas certain qu’il bénéficie encore des « avantages » -si l’on pouvait dire- conférés par un tel statut, maintenant qu’il servait le seigneur Ori Aen Elle, tout comme elle.

Mais arrivée dans sa chambre, Ætinis eut la désagréable surprise, de la trouver vide. Non, c’était trop injuste, se disait-elle ! Et oui ! Pour une fois qu’elle avait envie d’y trouver Godion, celui-ci n’était pas là. Ne désespérant pas, l’archère forestière osa pousser la porte intérieure pour entrer dans la chambre mitoyenne de son seigneur. Ce fut le bon choix ! Elle avait vu juste, puisque le serviteur s’y trouvait bien, occupé à plier une chemise de leur maître commun.

Soulagée de le trouver ici, elle n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche pour parler que l’elfe l’interpela, le regard dur et le ton autoritaire. Une nouvelle fois, il s’adressa à elle comme s’il lui était de loin supérieur de par son rang, ce qui n’était pas concevable ici, mais était beaucoup plus compréhensible au regard des nouvelles informations que la fille de menuisière avait recueillies, si ses doutes se révélaient fondés, toutefois.

A ces mots violents, la première envie de la pauvre elfe du peuple fut de répondre en humiliant et en rabaissant son camarade, rien que pour en éprouver un plaisir malsain. Elle ne savait trop si Ori Aen Elle l’avait ou non affranchi, ni quel était son statut par rapport à elle, mais elle aurait aimé lui répondre d’un ton cinglant quelque chose comme « Je le vois bien esclave, c’est toi que je cherchais ! ». Mais elle se retint, sachant que d’une part, elle avait besoin de sa coopération, et d’autre part, parce qu’elle se sentait coupable d’avoir de telles pensées pleines de méchanceté gratuite, surtout après avoir entendu l’histoire du prisonnier et en tenant, enveloppée dans un sac qu’elle tenait de la main gauche, la tête d’Ælynn, tous deux des potentiels ex-sujets du prince que pouvait être Godion.

C’est pourquoi elle détourna les yeux une seconde, fixant le sol en tournant la tête, avant de la relever, et de s’approcher du serviteur en le regardant ave un air plus respectueux, presque désolé.

Ætinis ne faisait aucune confiance à Godion. A vrai dire elle le détestait toujours autant, car il était abject à ses yeux. Mais elle faisait confiance au prisonnier, guidée par son instinct, son intuition féminine. Comme les deux, à coup sûr, n’avaient pu entrer en contact, s’ils lui délivraient la même histoire, elle pourrait donc par conséquent, non pas avoir confiance, mais au moins respecter et traiter Godion comme un noble du rang qu’il méritait. Cela le remonterait beaucoup dans son estime, même si l’inimité resterait certainement, elle serait gommée, cachée par le protocole, Verteflèche étant une fervente partisane du respect strict de la hiérarchie d’où naît l’ordre indispensable au bon fonctionnement de la société et donc au bien commun.

C’était d’ailleurs pour ça que la guerre avait commencé, parce qu’on n’avait pas respecté la hiérarchie, et maintenant l’anarchie menaçait.

Sur ses gardes, très méfiante, car n’appréciant pas du tout le blond et ignorant de quoi il était capable, Ætinis prit la parole. Sa dextre était prête à se saisir de la poignée de son épée sous sa cape si elle était menacée d’une quelconque manière. Elle parla d’un ton respectueux et calme, qu’elle tenta de rendre facilement compréhensible en dépit de son accent :

-Ce n’est pas lui que je souhaitais voir, mais bien vous, Godion. J’ai absolument besoin que vous me contiez votre histoire, sans mensonge. Croyez-le ou non, mais je vous demande cela dans votre intérêt. Je ne devrais pas dire ça ici, mais je soupçonne une horrible trahison.

Si vous êtes qui je crois et que votre histoire est celle que je crois, je peux et je vais vous aider, je le jure par Isha !

Alors… Dites-moi sans plus attendre. Qui étiez-vous avant d’être réduit à ce simulacre de vie ? Comment et où avez-vous été capturé ? Avez-vous des nouvelles de votre sœur ? Est-ce pour elle que vous acceptez tout ça ? Ou pour plus encore, votre ville ?

Les dernières questions, très ciblées, étaient destinées à vérifier si elle avait vu juste. Il était possible que Godion ne la croie pas, alors elle devait lui donner des éléments pour l’inciter à parler en lui montrant qu’elle savait déjà et que donc il pouvait parler sans crainte. Sinon, elle ne le disait pas, mais elle l’obligerait à parler. Elle voulait ses réponses à tout prix, trop de choses en dépendaient pour qu’elle se permette de s’en passer, surtout alors qu’elle touchait au but.

[[MJ] Le Gob']

Le regard de Valarion était dense, intense, et fixé sur Ori, ce qui n’arrangeait en rien le malaise du jeune elfe. L’ancien héros semblait le jauger, ou du moins était-ce l’impression qu’Ori devait en avoir à ce moment précis. Toutefois, lorsque Ori mentionna le fait pour le peuple Asur de tenir bon, le seigneur Æthil parut s’abîmer dans une contemplation rêveuse des deux elfes qui lui faisaient face, le regard vif du vieil elfe se perdant dans le vague. Le silence s’installa l’espace d’un court instant, avant que ne résonne sa réponse :

« Espoir et détermination. Tels sont en effet les meilleurs atouts de notre peuple face à son destin. Nous sortirons grandis de cette épreuve, et l’Ulthuan conservera son intégrité. »

Un soupir ponctua sa phrase, puis Valarion replongea dans un silence méditatif pendant quelques secondes. Mais avant qu’Ori ou Cyrielle ne puisse répliquer, le seigneur choisit de clore l’entrevue, employant une formule générique de fin de conversation, d’un ton qui ne souffrait pas de contestation. En faisant cela, il signifiait clairement aux deux elfes leur congé. Ils avaient été présentés, mais le vieil elfe avait probablement d’autres affaires à traiter.

« Car nous sommes les Asur, et tant que la lumière sera, nous brillerons. »

Comme le maître des lieux semblait maintenant plongé dans ses pensées, l’elfe aux cheveux sombres qui s’entretenait initialement avec lui s’approcha d’Ori et Cyrielle. En dépit de sa mine sombre, il avait l’air désireux de s’entretenir avec eux. S’immobilisant à deux pas du couple, il les dévisagea l’un après l’autre en silence, avant de déclarer d’une voix sourde :

« Salutations, Ori Aen Elle, Cyrielle Nagaril. Je me nomme Narion Il'Ithar. Si je puis me permettre ce conseil, et pour parler sans détour, je vous suggère de vous méfier de la princesse Anima Æthil. »

Narion Il'Ithar

La mise en garde, quoique évidente aux yeux d’Ori, avait cependant de quoi surprendre par son audace, prononcée sous le nez de l’intéressée. Ou du moins était-ce ce qu’Ori pensait, car lorsqu’il jeta un œil de côté, cherchant à localiser Anima, il ne fut pas en mesure de la retrouver. Peut-être s’était-elle rendue invisible, comme elle l’avait fait quelques minutes plus tôt pour les espionner à sa guise… Si elle était vraiment magicienne, et qu’une ruse quelconque n’était pas à l’œuvre. Mais peut-être surveillait-elle leur conversation en ce moment même… Inquiétante perspective.

« Elle n’est plus dans les parages. Si elle l’était, je l’aurais repérée. Ses artifices n’ont aucune prise sur moi. Puis-je faire quelque chose pour vous ? »

***

Test de CHAR : 7, réussite.

Godion resta de marbre devant la déclaration d’Ætinis, et ne répondit pas de suite à ses questions. Il semblait partagé entre plusieurs réactions, et devait hésiter quant à la conduite à adopter. Toujours debout au centre de la pièce, dans une attitude qui aurait presque pu passer pour celle d’un maître des lieux, l’elfe réfléchissait, interloqué par la demande aussi subite qu’inattendue de l’archère. Enfin, il soupira.

« Je ne sais où tu as entendu parler de ma sœur, mais tu ne sembles pas d’humeur à me laisser en paix si je décidais de me taire. Soit, je vais te parler de moi, puisque tu y tiens. »

Son expression se durcit, et il reprit.

« J’ai en effet une jeune sœur, elle aussi native d’Ellyrion. Lorsque nous avons été faits prisonniers et amenés ici à Tor Æthil, on nous a séparés et je ne l’ai plus revue. Mais Nahël, ce serpent, ne s’est pas contenté de prendre notre liberté : ayant pris Sharra en otage, il en a abusé, exigeant ma soumission à cette mascarade de servitude. Après avoir subi le vandalisme des troupes de Nahël Æthil, la ville dans laquelle nous vivions a vu ses dirigeants éliminés, et le vil Æthil a usurpé le pouvoir, plaçant un pantin à la tête de la cité. »

Le visage fermé, Godion dévisageait toujours Ætinis, soutenant son regard sans broncher.

« Mais dis-moi, archère, où veux-tu en venir ? Il n’est pas en ton pouvoir, pas plus qu’il ne m’appartient, de changer cette infâmante situation. »

[Ori Aen Elle]

Ori se sentait bien petit face au regard imposant que portait sur lui le légendaire Valarion, l'espace d'un instant, il avait l'impression que le héros tentait de le jauger, voulant peut être voir ce qui se cachait au plus profond de l'âme du jeune homme. Puis soudain, son regard changea du tout au tout, on aurait pu avoir l'impression que plus personne autour de lui n'existait, et qu'il était resté perdu sur l'image du couple de Ori et Cyrielle, peut être y voyait il une image d'un avenir possible pour le peuple de Asur ?
Les paroles de Valarion étaient sages et justes, et il voyait dans la guerre qui déchirait le peuple des elfes, une épreuve qui ne pourrait que les rendre plus fort... Ori ne voulait pas le dire, mais il était au plus profond de lui persuadé que une fois ce conflit réglé, son peuple s'en ressortirai à jamais changé... En bien ou en mal.

Puis aussi vite que la conversation avait commencé, celle ci s'arrêta avec le maître de Tor Aethil, en effet, il semblait que des affaires plus urgentes l'appelaient désormais. Ori aurait aimé pouvoir apprendre plus de chose auprès de son héros d'enfance, mais le protocole lui interdisait d'insister, il fit une simple révérence respectueuse,et commença à faire quelques pas en arrière avec Cyrielle pour se retirer.
Mais, un nouveau protagoniste décida d'entrer en scène et de se présenter, en effet, l'homme au cheveux sombres qui plutôt discutait avec Valarion avait décidé d'approcher le jeune couple. Ori le jaugea rapidement, il ignorait totalement qui était cet homme à l'allure sombre. Il se tint face au couple et se présenta sous le nom de Narion Il'Ithar... Qui était il ? Un noble d'une famille mineur ? Il ne pouvait le dire. Puis, sans détour, ne se cachant de rien, il conseilla à Ori et Cyrielle de rester bien méfiant vis à vis de la princesse Anima...
Bien que ce conseil au fond, bien que donné gentiment, n'était pas nécessaire, car Ori avait bien cerné que la petite soeur de Nahël était une personne dont il fallait se méfier, et semblant doué dans l'art de la manipulation, il fut tout de même surpris de voir que l'homme devant lui, n'hésitait pas à critiquer la jeune femme... Qui plus est, quand celle ci ne se trouvait non loin, tout du moins le croyait il...
Car en effet, Ori ne l'avait pas remarqué, mais Anima avait tout simplement disparu, aussi étrangement que la façon dont elle était apparu au couple un peu plus tôt. Etait ce encore un de ces tours de magie que le jeune homme ne pouvait expliquer ? Et surtout... Avait elle vraiment quitté les lieux ? Peut être utilisait elle une sorte de camouflage magique dans le but d'écouter les secrets qu'elle désiraient connaître... Chose qu'elle semblait avoir fait lors de la discussion que le fils de Azurö avait eut avec la fille du seigneur Dranduil.
Ori se sentait bien démuni face à l'utilisation de ce genre d'artifice, et très vite, il lui faudrait s'entourer d'un adepte de la magie, dans le but de connaître les moyens de se protéger de cette pratique pouvant lui nuire dans l'avenir.
Mais, le dénommé Narion, en voyant le doute planer dans le regard du jeune homme quand il tenta de localiser Anima, tenta de le rassurer, en lui expliquant qu'elle n'était plus ici, il semblait en être certain, expliquant que les artifices dont la jeune femme usait ne pouvaient en aucun cas l'affecter. Puis il se proposa ces services où son aides au couple... Une étrange proposition d'ailleurs, dont Ori ne savait quoi répondre, après tout il ne savait rien de cet homme, mais tout portait à croire qu'il était magicien.

"Excusez moi... Mais... Quand vous dîtes que ces artifices ne fonctionnent pas sur vous ... Vous voulez dire que vous êtes magicien ?"

Il préférait confirmer la chose, car de nombreux elfes possédaient quelques compétences magiques, mais peu était des maîtres dans ce domaine, généralement, il était des magiciens aux services de grands seigneurs. Si telle était le cas avec l'homme face à lui, alors il serait bon de profiter même l'espace de quelques minutes du savoir de cet elfe.
Mais, il désirait questionner aussi l'elfe au sujet de Anima, désirant savoir précisément que voulait il dire par rapport à la mise en garde prononcer envers la jeune femme.

"Merci pour votre mise en garde, j'ai en effet cerné légèrement le personnage. Mais pourquoi une telle mise en garde ? car même si vous ne semblez pas le porter dans votre coeur, je ne pense pas que la soeur du seigneur Nahël ne désire me nuire à moi, où à Cyrielle."

[Ætinis Verteflèche]

Verteflèche trépignait d’impatience et n’aurait effectivement pas toléré un refus de la part du serviteur qu’elle interrogeait, tant elle avait envie d’obtenir des réponses à ses questions. Cela devait être visible, car Godion le comprit très vite et en soupirant, il choisit de répondre à son interrogatrice très curieuse pour cette raison. L’archère en fut à moitié courroucée –car elle s’était facilement faite percer à jour par l’esclave-, et à moitié satisfaite, car après tout elle allait avoir ce qu’elle voulait. Rapidement, elle n’y pensa plus, trop absorbée par ce que s’apprêtait à lui dire son interlocuteur pour prêter attention à ses propres sentiments.

Ætinis buvait ses paroles, accrochée à ses lèvres, écoutant son récit avec une concentration et une attention maximale, guettant la moindre incohérence ou le moindre indice dans ses paroles qui pourrait corroborer ou infirmer ses doutes et les révélations du prisonnier.

Plus elle écoutait, sans l’interrompre pour lui laisser le temps de déployer son récit librement, plus elle se sentit en proie à un double sentiment qui montait en elle, fruit de ses réflexions intérieures.
D’une part, la native d’Ilmaltir était persuadée que Godion ne lui mentait pas, du moins pas complètement, pas directement. Pour cela, une part d’entre elle exultait : une telle histoire collait parfaitement avec ce qu’avait avancé le prisonnier interrogé un peu plus tôt.
Mais d’une autre, et cela était extrêmement frustrant, elle sentait que celui-ci ne lui disait pas tout et faisait de la rétention d’information à dessein !

Entre l’euphorie procurée par la sensation très gratifiante de toucher au but dans une affaire de la plus haute importance qu’elle était sur le point de tirer au clair toute seule grâce à sa perspicacité, et la frustration liée au fait d’être à deux doigts du but sans le toucher parce que Godion faisait son mystérieux, Ætinis était partagée.

Mais elle savait très bien ce qu’elle devait faire : se fâcher et laisser éclater sa frustration pour faire plier par la force Godion était possible. Ce personnage avait déjà montré qu’il savait se soumettre si on appuyait là où ça lui faisait mal, puisqu’il avait été réduit en esclavage par le seigneur Nahël.
Toutefois, son cerveau lui disait que ce n’était pas la bonne solution, surtout si elle avait raison, et jusqu’ici tout la poussait à le croire, les révélations nouvelles n’ayant fait que confirmer ses soupçons.
Au contraire, il fallait à tout prix le ménager le plus possible et lui être le plus agréable, si Godion était bien avec sa sœur l’héritier d’un seigneur neutre assassiné comme elle le croyait, et qu’elle comptait sur son témoignage pour confondre les actions ignobles que Nahël aurait accomplies, et puisqu’elle espérait ensuite le libérer et lui rendre sa place afin qu’il rejoigne les partisans de Malékith de son plein gré après avoir été « sauvé » par la probité de ces derniers, et plus spécialement par son intervention et celle du seigneur Ori Aen Elle.

C’est pourquoi elle se retint de céder à l’excitation et à la colère, et se contenta de répondre d’un ton toujours aussi impatient, passant sur les explications assez rapidement car elle n’avait pas envie de s’étendre là-dessus pour le moment, alors qu’elle devait continuer à récolter des informations. Pour canaliser son trop plein d’énergie, elle se mit à faire les cents pas devant Godion, tournant comme une lionne en cage, fixant le sol devant elle :

-Oh, tu as raison, ni toi, ni moi, ne pouvons rien contre le seigneur Nahël directement. Mais nous servons tous deux un maître bon et fidèle aux idéaux de Malékith. Force, honneur, droiture. Le seigneur Ori nous aidera et ensemble, nous pourrons faire tomber ce monstre si c’en est bien un…

Verteflèche s’arrêta brusquement de tourner en rond et se plaça face à lui et le regarda droit dans les yeux en disant :

-Oui, je vous ferai libérer, vous autre innocents qui n’êtes que des victimes d’un elfe aux valeurs semblables à celle des plus féroces partisans de l’usurpateur Caledor. Vous, votre sœur, les hommes qui vous sont restés fidèles… Vous serez même dédommagés du mieux possible pour les souffrances et les humiliations que vous avez pu subir, même si je sais très bien que rien ne pourra jamais compenser ce que l’on vous a fait.

Mais pour cela j’ai besoin que vous coopériez.

Assez de mascarades, seigneur. Il est temps que vous me révéliez votre véritable identité, prince, ainsi que celle de votre sœur et le nom de votre ville. Ce sont les dernières choses dont j’ai absolument besoin pour vous croire.

En effet, moi aussi je vais arrêter de vous cacher des choses. Il se trouve que j’ai parlé avec un prisonnier. Un prisonnier fait très récemment qui m’a dit des choses sur le seigneur Nahël et m’a demandé de les vérifier si je ne le croyais pas. J’ai suivi mon instinct en me disant que vous pouviez être la personne dont il parlait, tant vous correspondiez exactement à sa description.

Et je n’ai pas été déçue par ce que vous m’avez dit. Je ne vais pas vous mentir : jusqu’ici, son histoire colle parfaitement avec la vôtre. Mais je ne peux prendre le risque de dénoncer le seigneur Nahël sur une coïncidence, même très improbable. Il me faut des certitudes et je les aurai, coûte que coûte. Il en va de l’honneur de mon camp, de la liberté d’au moins trois personne injustement emprisonnée ou asservies : vous, votre sœur et lui, et de ma parole d’honneur que j’ai donnée à ce prisonnier.

Lui croit encore en vous et en votre sœur, seigneur. Prouvez-lui et prouvez-moi que nous n’avons pas eu tort de vous faire confiance, nous les petites gens qui nous battons et mourrons pour vous les nobles. Faites-le au nom de ce que vous voudrez, la Justice, votre liberté, votre sœur, ou votre peuple, mais comportez-vous comme ce que vous êtes, pour une fois, prince. Répondez-moi !

Il n'y avait aucune raison que Godion se taise maintenant, et Ætinis brûlait d'avoir confirmation de ce qu'elle soupçonnait pour le raconter au plus vite à son seigneur. Lui saurait quoi faire de telles informations.

[[MJ] Le Gob']

Observé de plus près, le nouveau venu semblait plutôt richement vêtu, même si ses atours ne brillaient pas par leur caractère ostentatoire. L’absence d’expression sur son visage était probablement le plus perturbant des détails le concernant, car cette impassibilité pouvait le rendre à la fois mystérieux et intimidant, voire menaçant aux yeux d’autrui. Interrogé par Ori, le dénommé Narion entreprit de justifier ses assertions, ayant visiblement à cœur de le convaincre de son honnêteté.

« Je ne suis qu'un émissaire. Mon prince n’a pas pu se déplacer en personne, mais désirait néanmoins s’entretenir de diverses affaires avec le seigneur Æthil. Quant à ma méfiance à l’égard de la princesse Anima, je ne dispose pas de preuves tangibles qu’un non initié pourrait apprécier. Sachez seulement qu’il est difficile de ne pas paraître suspect aux yeux d’un mage, lorsque l’on s’entoure en permanence d’une telle myriade de subtils sortilèges. »

Le mage avait prononcé ces mots sur le ton du murmure, dans un souffle à peine audible par ses interlocuteurs. Il ne souhaitait probablement pas faire de leur conversation le centre de l’attention générale. Tendant la main vers Ori, l’elfe fit mine de lui tendre quelque chose. Il s’agissait d’un petit anneau d’argent, décoré d’un fil d’ithilmar qui courait le long de la bague.

« Je dois retourner à mes appartements, dans l’aile nord, où j’ai des affaires à régler. Veuillez accepter ce présent. Ce charme me permet de vous localiser lorsque vous le porterez. Passez-le à votre doigt si d’aventure vous souhaitez me contacter. »

Puis, saluant dignement chacun de ses deux interlocuteurs, le mage au regard impavide prit congé, disparaissant rapidement dans la foule de bruyants courtisans, non sans s’être immobilisé une dernière fois au côté d’Ori, lui soufflant du bout des lèvres, comme sur le ton de la confidence.

« Ce fut un plaisir, seigneur Ori. »

***

Godion était en proie à une terrible hésitation, cela se voyait à sa façon de se comporter. Lorsque Ætinis eut fini sa tirade, l’elfe aux cheveux blonds poussa un long soupir, puis leurs regards se croisèrent et ne se quittèrent plus alors que l’elfe prenait de nouveau la parole.

« Tu es un mystère à mes yeux, archère. Je ne sais si je devrais te croire sur parole, sans questionner la véracité de tes propos, ni la façon dont tu es parvenue à acquérir ces informations. Plus rien n’a d’importance, car ma situation ne saurait empirer. Ce qui suit est la stricte vérité. »

Une longue respiration ponctua sa déclaration, et installa un silence qui parut s’éterniser. Enfin, au bout de quelques secondes d’attente, Godion prit place sur un siège, et son regard se perdit dans le lointain paysage qui s’étirait au-delà de la fenêtre qui lui faisait face.

« Nahël n’a pas jugé bon de m’imposer un nouveau nom. Je suis Godion, prince hériter de la cité d’Ithyril en Ellyrion. Nahël nous contraint, ma sœur et moi, à demeurer à Tor Æthil, afin de nous garder sous surveillance, et en gage de bonne conduite des habitants d’Ithyril. Bien évidemment, pendant ce temps, notre ville est dirigée par l’un de ses laquais. »

[Ori Aen Elle]

Le dénommé Narion accepta de répondre aux questions du jeune noble, lui expliquant qu'il n'était ici quand temps que émissaire, son prince n'ayant pu venir de lui même se déplacer rencontrer le seigneur Valarion. L'homme à la sombre expression, ne précisa pas pour autant qui était donc son prince, aussi préféra t'il ne pas insister sur le sujet, Ori pensa qu'il gardait cette information pour diverses raisons.
Concernant la sœur de Nahël, l'explication qu'il pu fournir, fut des plus logique, quand on se protégeait avec des sortilèges de dissimulation, c'était qu'on avait quelque chose à cacher ou à se reprocher. La jeune femme était ce genre de personne qui semblait avoir compris que l'information était le nerf de la guerre, mais Ori se demandait si tout se qu'elle pouvait apprendre servait ces propres projets, ou bien rendait elle compte de chaque chose à son frère ?

Dans tout les cas, la conversation engagé avec celui qui se disait mage, ressemblait à s'y méprendre à une véritable conspiration, tant ils ne faisaient que échanger avec un volume sonore des plus bas, telle des gens se livrant des secrets compromettant. Puis dans un geste des plus discret, le mage tendit sa main au fils de Azurö, lui délivrant un petit présent, chose qui surpris au plus haut point Ori.
Il observa le petit objet dans sa main, qui était un anneau d'argent, décoré d'un fil d'ithilmar, une sensation étrange parcouru le corps du garçon aux yeux violets, signe que cet objet était lié à la magie sans aucun doute. Le mage expliqua que cet objet, une fois porté, lui permettrait de localiser Ori, si celui ci souhaitait dans l'avenir échanger avec lui. Ne sachant si il devait accepter ou refuser ce présent, la question fut vite réglé, car son interlocuteur décida de prendre congé, mettant fin à toute discussion. Il salua le jeune couple, et le noble lui rendit son salue, puis passant une dernière fois prêt de lui, il annonça que leur rencontre fut un plaisir.

"Un plaisir partagé..."

Ainsi donc, l'étrange personnage disparu dans la foule de courtisant, sous le regard de Ori, une nouvelle fois, il venait de faire la rencontre d'un bien curieux personnage, qui semblait entouré de bien des secrets. Le regard perdu dans la foule, son esprit fut à cette instant ailleurs. Puis, se fut le contacte de Cyrielle prêt de lui, qui le fit de nouveau émerger dans la réalité. Il afficha un sourire, prit la main de la jeune femme et y déposa un baiser, tout en s'inclinant.

"Pardonnez moi Cyrielle, voila que toutes ces rencontres, m'ont conduit à vous délaisser."

Il se redressa, réfléchissant à quoi faire par la suite, en effet, la jeune femme était resté plus que silencieuse, écoutant tout de même tous les échanges que Ori avait eut, cela au fond ne servait en aucun cas les projets du jeune garçon, car il était possible que la jeune blonde, ne raconte tout ce qu'elle avait entendu à son cher père. Il ne fallait pas oublier, que les deux comédiens "amants" ne se connaissaient que depuis peu, et Ori face à la jeune femme ne pensait pas avec sa tête mais plus avec son cœur, rien ne disait qu'il pouvait faire confiance à cette femme pour l'heure, mais un simple regard de cette belle créature, et voila que celui ci baissait sa garde et se laissait envouter.... De nouveau...

"Peut être serait il bon que je vous ramène auprès de votre père ? Après tout, je pense que votre absence n'est pas passée inaperçue."

Ainsi, les bras toujours liés, Ori guida la jeune femme à travers la foule.

[Ætinis Verteflèche]

Enfin Ætinis obtenait ses réponses. Non qu’elle ait dû les attendre très longtemps, ni même qu’elle ait consenti d’énormes efforts pour les obtenir, mais son impatience avait été telle devant l’importance des révélations qu’elle venait de découvrir et maintenant de confirmer, que sa réussite lui procura une sensation particulièrement agréable. Un grand sourire illumina son visage tandis qu’elle exultait intérieurement, elle en aurait sauté de joie si elle avait été seule.

Résoudre des énigmes avait toujours été pour elle un réel plaisir. Bien qu’issue d’un milieu très modeste, elle n’en était pas moins amatrice de ce genre de petits des défis intellectuels qui se posaient parfois. Elle adorait comprendre, démêler le vrai du faux, se poser des questions et encore mieux parvenir à y répondre. Contrairement à beaucoup, c’était d’ailleurs une des raisons qui l’avait poussée à s’engager dans l’armée de Malékith. Elle l’avait fait parce qu’elle était persuadée que c’était la meilleure chose à faire pour Ulthuan, et son devoir également.

Flattée dans son ego par les révélations de Godion et le fait qu’il la considère comme mystérieuse, la jeune elfe lui accorda quelques mots réconfortants :

-Je vous croie, seigneur, je sais que vous dites vrai, car je viens d’entendre la même histoire de la bouche d’un prisonnier que vous n’avez pu rencontrer. Courage, vous n’êtes pas seul : l’un de vos partisans est ici en prison. Ils continuent à se battre pour vous. Certains ont même donné leurs vies pour vous.

Elle n’oubliait pas qu’elle portait avec elle la tête tranchée d’une des habitantes de la cité assaillie, une elfe qui avait reçu la mort par sa faute parce qu’elle s’était battue pour une cause juste. Maintenant qu’elle connaissait son histoire plus que jamais, Ætinis s’en voulait de l’avoir blessée et de ce fait condamnée à mort. Oui, elle était bien une pacifiste, oui, elle voulait seulement délivrer son prince et sa princesse légitimes d’un esclavage révoltant et permettre à leur cité de redevenir libre. La petite elfe n’était pas fière de ce qu’elle avait fait, mais elle se rachèterait au moins un peu en réalisant ce qu’avait voulu Ælynn, en libérant sa ville, ses dirigeants et bien sûr celui qui était toujours amoureux d’elle. Comme pour s’excuser envers Godion et surtout sa propre conscience, elle reprit :

-Je ne suis qu’une soldate sans la moindre importance et sans grade, mais je défendrai ce qui est juste et bon pour notre peuple. Et nous autres roturiers devons être guidés par des seigneurs tels que vous et le seigneur Ori, sous la férule bienveillante du Roi Malékith. Ce qu’a fait le seigneur Nahël est indigne de son rang, indigne d’un partisan du vrai Roi.

Mais j’ai confiance en mon maître. Ensemble, nous rétablirons la vérité. Vous serez libérés, vous et votre sœur, et vous régnerez de nouveau sur vos gens. Ensuite, le moment venu, vous devrez choisir votre camp. Et si vous choisissez celui de l’usurpateur, alors peut-être devrais-je vous combattre, mais alors ce serait dans les règles de la guerre, avec l’honneur qui sied à notre peuple supérieur.
Car nous sommes les Asur et bien après la mort du dernier elfe, tant que le Soleil brillera, nous serons.

Pleine d’optimisme, la jeune Verteflèche se décida à aller retrouver son seigneur. Elle avait beaucoup de choses à lui dire et il était déjà largement l’heure du repas. Aussi ajoute-t-elle :

-Seigneur Godion, croyez-vous que le seigneur Ori Aen Elle va bientôt revenir pour manger, ou devrions-nous aller l’attendre devant la salle de réception ?

Si elle avait le temps, la fille de menuisière irait passer au temple d’Isha afin de confier aux prêtresses la tête de feu Ælynn pour qu’elle y reçoive les honneurs qui lui étaient dus. Ensuite, elle irait soit directement dans le réfectoire ou la pièce où Ori devait se restaurer, soit elle l’attendrait devant la salle de réception, guidée par le serviteur Godion.

En fonction de ce qui est possible selon sa réponse : Je me rends au temple pour y confier la tête d’Ælynn, puis, soit je rentre directement à la salle où Ori mange, soit, préférentiellement, je descends jusqu’à l’entrée de la salle de réception, après m’être vêtue de la livrée des Aen Elle pour ne pas faire tâche et lui faire plaisir.