Frédérick était brisé par tout ce qui lui était arrivé, brisé...Et déformé. Affublé de deux caboches supplémentaires et d'assez d'épines pour concurrencer un razordon, il courait maintenant dans les rues de Nuln comme un vulgaire fugitif.Il suffit d'une seule mauvaise journée pour réduire l'homme le plus sain d'esprit du monde à la folie...Juste une mauvaise journée.
Il fallait atteindre les Taudis, fuir la civilisation et les autorités impériales. C'était plus sûr oui plus sûr !
Heureusement les bonnes gens dormaient à cette heure tardive et sous ses pas effrénés les pavés cédaient la place à la boue et aux déchets piétinés.
Les habitués de ces quartiers prenaient un aspect tout aussi monstrueux que le sien à la lueur rougeoyante des torches et des lanternes aux vitres encrassées. Des allées menaient à des murs de brique et des portes de caves ramenaient sur d'autres rues encombrées de vagabonds.
Il pensa à son Père... Sa Mère...Que pouvait-elle faire face au monstre qu'était devenu son fils ? Il n'avait plus rien si ce n'est ce qu'il portait sur le dos et les habitués du Dédale se feraient une joie de lui en dépouiller. Les nulniens les plus déshérités virent passer un jeune homme totalement hagard et parait-il, tricéphale. Des catins vérolées et des soudards ivrognes poussèrent des cris en croisant à l'ombre d'une ruelle un mutant épineux.
Perdu et désespéré, il savait toutefois que les rues ne lui offriraient aucun abri et que dès potron-minet il finirait sur un bûcher.
Se cacher...Reprendre ses esprits...Se cacher , disparaître, se terrer. Se faire oublier !
Regardant autour de lui dans la pénombre, il l'aperçut sa porte de secours : Vermoulue et retapée plus souvent que la barque d'un pêcheur de Bretonnie.
Là il serait sûrement en sécurité.