Viola put enfin quitter la rue du Commerce pour s'engager dans une discrète ruelle perpendiculaire. Il était bientôt midi, et à cette heure de la matinée la circulation était à son comble. Chariots, Marchands, Animaux formaient une véritable marée vivante dont le flux s'écoulait sans discontinuer le long de l'artère principale de la Neuestadt. A plusieurs reprises, la jeune femme s'était sentie monter quelques envies de meurtres tant la progression à travers la foule était pénible. Mais son hachoir était sagement resté attaché à sa ceinture, et elle avait préféré jouer des coudes, plutôt qu'avec le dangereux instrument de boucher. Fille de Nuln, elle était habituée depuis longtemps à l'agitation marchante qui envahissait la ville tout au long de la journée. Après tout, elle habitait dans l'ancienne capitale de l'Empire, et bien qu'ayant perdu de sa superbe, la cité pouvait encore s'enorgueillir de rivaliser avec la merveilleuse Marienburg. Aujourd'hui encore, des voyageurs venus de toutes les régions, même aussi lointaines que l'Ostermark, arrivaient pour acheter les divers produits, en particulier technologiques, qui transitaient par les quartiers marchands.Avant de commencer à lire l'aventure, veuillez noter que celle-ci comprend des scènes qui peuvent s'avérer choquantes pour un public non averti. Je conseille donc aux plus jeunes de quitter cette page. Vous avez été prévenus .
Au loin, Viola aperçut la colline du palais où la comtesse résidait. Des rumeurs colportaient qu'elle organisait en ce jour-même, un congrès extraordinaire avec tous les nobles principaux de la région. Même les représentants de l'ex-Solland y auraient été invités. L’événement était historique. Pourtant, Viola se sentait bien étrangère à toutes ces préoccupations mondaines du haut-quartier de l'Altestadt. Pour elle, ce n'était qu'un ramassis de riches prétentieux et ignorants des réalités du monde.
Elle préférait se concentrer sur sa mission du jour. Son patron lui avait ordonné de livrer ces pièces de viande au capitaine de "La Belle Bleue", sur les docks du port. D'après ce qu'elle avait compris, le marin et son équipage revenaient d'une sortie de plusieurs mois à sillonner les mers du monde, et souhaitaient célébrer leur retour dignement. Le lourd paquet qu'elle portait sur son dos en était la preuve. Elle n'avait pas pu voir exactement quel été son contenant, mais les quelques gouttes de sang clair qui transperçaient le tissu de chanvre jaunit qui entourait la marchandise semblait prouver que la viande était fraîche et de bonne qualité.
Elle réajusta le colis sur son épaule, et accéléra le pas.
Enfin, elle atteint les quais. Après quelques minutes de recherche, elle arriva devant une modeste frégate de bois sombre. A une époque, le bateau avait dû être entièrement peint en bleu mais il semblait avoir bien vécu et la peinture s'écaillait à de nombreux endroits. Sur la coque, d’innombrables coquillages et autres algues avaient élu domicile, formant ainsi une mosaïque complexe aux couleurs marines. Il n'y avait personne sur le pont aussi Viola éleva la voix pour faire connaître sa présence.
"Qui va là ?!"
Un vieil homme à l'air décrépi lui avait répondu. Avant qu'elle n'ait pu lui répondre, il entreprit de descendre sur les quais grâce à une échelle de corde à la solidité douteuse.
"Le capitaine et l'équipage sont partis pour le moment. Vous venez livrer le colis ?" asséna-t-il d'un ton sec et désagréable tout en regardant furtivement le bagage de la livreuse.
C'était étrange. Le patron de Viola lui avait pourtant assuré de livrer la viande à 12 heures précises au capitaine. Il lui avait d'ailleurs prodigué un sermon dont il avait le secret, aussi ennuyeux qu'inutile, sur la confiance dans les relations commerciales, ainsi que sur la ponctualité. Elle se demandait aussi pourquoi le petit vieux avait pris la peine de descendre juste pour lui annoncer cela. Quoiqu'il en soit, elle était bien embêtée.
Tu as sur toi un paquet de 10kgs de viande environ, d'une valeur d'une couronne d'or plus ou moins.