[Raël Khem] La croisade du soldat scythien

[[MJ] Le Gob']

Les premières lueurs de l'aube effleurèrent doucement la carapace du scorpion, les doux rayons du soleil créant quelques reflets sur le miroir de la chitine noire. L'animal, resté immobile sous le sable toute la nuit durant, à l'instar d'une petite statuette, figée hors du temps, s'anima soudain en cliquetant. Dispersant par son mouvement la mince couche de sable le recouvrant, le scorpion se retourna l'espace de quelques instants vers l'astre solaire, jaugeant brièvement cette boule d'une aveuglante clarté, qui rayonnait à présent depuis le ciel des contrées de l'Est. Puis, se désintéressant de l'observation de ce phénomène quotidien de l'aurore sur son domaine, le scorpion se mit en route, progressant rapidement, ses pattes noires crissant légèrement sur le sable, sa queue marquant d'un battement régulier le rythme de son avancée. Ces étendues infinies qu'il parcourait en ce moment même, c'était son territoire, son lieu de chasse, aussi, et était tout autant synonyme de mort que de vie. Pour lui, chaque ombre pouvait aussi bien dissimuler une source de danger que lui permettre de s'en protéger : c'était dans la nature du désert, d'être un lieu où vie et mort s'entremêlent en un étrange amalgame. Plus loin, au Nord, les forces naturelles étaient troublées par des phénomènes déséquilibrants, contre nature. Cela faisait longtemps, que la créature chitineuse sentait émaner comme des miasmes de noirceur dans le vent des éléments : ce grand désert n'était pas parcouru que par des êtres vivants... Parfois, des choses mortes foulaient le sable ; et si lui, le scorpion, n'en était pas inquiété, il s'éloignait généralement de la source de ce déséquilibre de l'ordre des choses.

Le scorpion fut soudain enseveli par la dune qu'il était en train de longer, lorsque un immense pied dérangea le sable autour de lui, provoquant de multiples chutes de sable le long de la dune. Manœuvrant habilement, le petit animal s'avança, s'éloignant de cette source d'agitation. Il fit à peine deux mètres, s'éloignant du tumulte, lorsque une ombre le recouvrit, et qu'il fut soulevé du sol, saisi par la queue. Il gesticula un moment, tandis que l'humain le posait sur sa main, paume ouverte. Raël leva sa main à hauteur de son visage, scrutant la carapace sombre du scorpion, défiant peut-être du regard l'animal à la piqûre meurtrière de tenter de le blesser. Le scorpion, indécis, dérouté par ce sol inhabituel sur lequel il prenait appui, se déplaça de quelques minuscules pas à gauche et à droite, avant de s'immobiliser, frémissant, s'immobilisant dans une posture prudente, sa queue déployée, prête frapper un ennemi qui ne viendrait peut-être pas.

Raël cessa finalement de contempler le corps segmenté de la créature, et leva le nez vers l'Ouest. Du haut de sa haute dune, il put distinguer, toute proche, la ville portuaire d'Al-Haik, destination de la caravane qu'il avait accompagnée depuis Numas en tant qu'escorteur. La traversée du désert s'était passée sans anicroche majeure ni autre indicent d'aucune sorte, Raël connaissant le désert comme tout-un-chacun connait sa contrée natale. Après quelques secondes passées à rêvasser, un scorpion dans la main, Raël entendit ladite caravane le rejoindre, entamant l'ascension de la dune, quelques mètres derrière lui. A présent qu'il était arrivé à Al-Haik, la première étape de son voyage était passée.

Et l'aventure pouvait commencer.

[Raël Khem]

La brise marine soufflait doucement sur la cité côtière, rafraichissant et humidifiant l'air de la ville, rendant la chaleur du désert supportable. Raël inspira un grand coup, se remplissant les poumons des odeurs marinières se dégageant des eaux scintillantes qui s'étendaient. Il apprécia l'ironie de la situation: il était cerné par deux infinis, aussi porteurs l'un que l'autre de vie et de mort, de promesses et de déceptions, la mer et le désert s'unifiant pour permettre aux hommes de s'épanouir.

Le voyage avait duré un mois et demi. quarante-cinq jours pendant lesquels Raël n'avait rien pu faire à part observer les dunes et les lézards, à espérer une attaque de brigand pour pouvoir se divertir. Finalement il ne s'était rien passé et il avait trouvé le temps long. Mais enfin une trace de civilisation s'élevait tel un hommage à l'obstination qu'avait les hommes à vouloir survivre dans n'importe quel milieu.
Al-Haik, la cité des voleurs, était le port principale de l'Arabie, reliant la Bretonnie, l'Empire, la Tilée et bien d'autres aux pays du Sud. C'était içi que la quête de Raël Khem commençait, içi que sa légende allait naître, sans doute. Le jeune soldat leva les yeux vers le Dieu-Soleil Ptra, la divinité brillait intensément, c'était assurément un bon présage.

La caravane s'arrêta peut après avoir franchi les portes de la ville, notre Scythien remercia les marchands pour le voyage et pris rapidement congé, l'esprit occupé par d'autres affaires. Tenant sa bourse prêt de lui -les pickpockets étant nombreux-, Raël entra sur la place du marché, dans l'espoir d'y trouver une personne à qui demander son chemin pour la capitainerie, par chance un petit groupe d'hommes habillés de noirs patrouillait de l'autre côté. Résistant à l'envie de s'arrêter pour manger un fruit ou sentir quelques épices le soldat se précipita vers les Serviteurs des Morts pour leur demander son chemin.

Raël se retrouva très vite sur les pontons, au milieu de marins et de négociants. Il s'amusait des regards mi-inquiets mi-effrayés que lui jetait les habitants et les étrangers. Il se savait respecté et craint par son allure et par la force qu'il représentait.
Il était enfin arrivé à destination!

[[MJ] Le Gob']

Le jeune homme fut bientôt abordé par un habitué du port, une espèce de vieux loup de mer à l'odeur rance et à l'aspect peu reluisant, qui demanda, dans un parler assez fruste quoique respectueux, s'il cherchait quelque chose ou quelqu'un en particulier. Raël lui demanda où trouver un responsable qui pourrait lui octroyer une place sur un bateau à destination de l'Empire, au Nord. Il fut immédiatement conduit et présenté à un autre homme, du même acabit que le précédent : ce "maître de quai", comme on l'avait nommé, portait une sorte de couvre-chef usé, informe, qui avait dû ressembler à quelque chose du temps de sa grandeur. Le maître de quai lui-même avait dû connaître des jours meilleurs : le visage constellé de marques résiduelles de vérole, le corps rachitique, il n'était probablement pas à son avantage auprès des dames. La mine sévère, l'oeil vif, l'air méfiant, il écouta impassiblement Raël, qui expliqua à nouveau qu'il avait besoin de trouver une place sur un navire à destination des contrées du Nord. Le maître de quai finit alors par acquiescer, arborant un sourire entendu :

"Oui, je vois. Trouver une place sur un navire n'est pas chose facile, ces temps-ci. Je pense néanmoins pouvoir vous en dégotter une, au prix de quinze couronnes."

Raël en resta abasourdi : une telle somme ne pouvait être rassemblée, le coût était prohibitif et complètement impensable. Il lui fallait marchander, négocier, revoir à la baisse cette escroquerie ! Sa croisade ne pouvait pas s'arrêter ici, avant même d'avoir commencé, sur les rives du Grand Océan. Mais lorsqu'il commença à vouloir marchander, le maître de quai lui expliqua que ce n'était pas lui qui fixait les prix, mais son supérieur, et que toute négociation du tarif du voyage devrait passer par lui. Raël, comprenant qu'il ne servait à rien d'insister, se fit expliquer le lieu où il pouvait trouver ce supérieur dont on lui parlait : on lui répondit qu'il se trouvait actuellement au marché, à discuter avec le marchand de poissons des prix e la cargaison, comme d'ordinaire à cette heure-ci. Renseigné, Raël remercia, et s'en retourna, se dirigeant vers les rues bondées de monde du milieu de la ville. Il devait négocier cette place, c'était vital.

***

La foule était innombrable, malgré l'heure très matinale : tous se trouvaient serrés comme des sardines dans l'espace réduit des rues accueillant le marché. Ce souk était tumultueux au possible, désordonné à souhait, et Raël était forcé de jouer des coudes pour progresser, car aucune attention n'était ici prêtée à son habit et au statut induit. Lorsqu'il parvint enfin devant le lieu indiqué par le maître de quai, il ne trouva ni marchand de poissons, ni interlocuteur de celui-ci à interpeller. Perplexe, le jeune guerrier jeta des regards inquisiteurs autour de lui, tentant de voir, par dessus la foule, si le commerce en question n'était pas positionné ailleurs. Autour de lui, les gens continuaient de se croiser dans le chaos le plus total, et le brouhaha était encore omniprésent.

Test d'INT : Le dé donne 7 : réussite de justesse.

Soudain, Raël sentit qu'il lui manquait quelque chose à la ceinture : on venait, dans le désordre ambiant, de le délester d'un poids... Sa main chercha, tâtonnant le long de sa ceinture, jusqu'à ce que... Sa bourse ! On venait de la lui dérober, quasiment à son insu. Du coin de l'oeil, le jeune homme entrevit la silhouette fugitive d'un petit malandrin, un garçon en haillons, qui disparaissait au sein de la foule...

[Raël Khem]

Il marchait les bras ballants, totalement effaré par ce qu'il venait d'apprendre: quinze couronnes pour la traversée en bateau... A ce prix il avait autant acheter lui même une embarcation, ce serait plus rapide et sans doute beaucoup moins cher, même en comptant un équipage à payer! Ses pas le conduisirent au fameux marché où se trouvait une foule plus compacte qu'une dune de sable, Raël soupira, il ne devait pas s'énerver, pas ici. Le Scythien avanca jusqu'à constater l'absence de "l'arnaqueur". Heureusement son attente s'arrêta vite! Effectivement, un sale gamin venait de lui piquer toutes ses économies. A cet instant une pensée s'imposa dans son esprit : cette histoire était un piège, depuis le début. Mais il n'avait pas de temps pour réfléchir à ça, aussi s'élanca-t-il à la poursuite du garçon.

L'enfant avait fui dans une ruelle adjacente au souk; rapide, Raël se précipita dans l'artère en courant aussi vite qu'il pouvait, il aperçut le voleur qui était déjà arrivé au milieu du coupe-gorge. Le temps que le soldat atteigne sa position le tire-laine était déjà sorti et avait tourné à gauche. Comprenant bien que sans or sa croisade s'arrêterait là, le Serviteur n'eut pas d'autres choix que de continuer à poursuivre le gosse. Après plusieurs minutes de course-poursuite, entre escalades de maisonnettes et cache-cache dans les pots remplis de linges, le guerrier s'arrêta un moment pour souffler, perdant peu à peu espoir de retrouver sa bourse.
C'est à ce moment qu'il vit le garçon quitter la place où Raël se trouvait, ce dernier retrouva quasi-instantanément sa colère et se jura de rattraper son voleur. Il partit à sa poursuite dans des ruelles inconnues...

[[MJ] Le Gob']

Test d'HAB pour la poursuite dans la foule : Échec sur le fil (9).

Dieux, que le gamin courait vite, évitant lestement chaque nouveau passant ! Dans tout son orgueil, il s'était cru capable de rattraper ce malandrin en quelques enjambées, mais celui-ci s'avérait bien plus à l'aise que lui au milieu de la foule, et le distança malgré tous ses efforts, et c'est à peine si le jeune homme put le conserver dans son champ de vision. Le vacarme ambiant était des plus déconcertants, et le caractère chaotique des erratiques déplacements de la populace ne lui facilitait pas la tâche ! Bousculé de tous côtés, Raël tenta néanmoins de poursuivre le voleur sans s'arrêter, et c'est avec difficulté qu'il parvint à suivre le parcours de ce dernier. Ce périple l'emmena d'abord dans deux ou trois rues mal famées, qu'il parcourut à vive allure, évitant du mieux qu'il pût passants et mendiants, qui encombraient le chemin.
La poursuite le poussa à gravir une échelle menant à une terrasse, et il fut mené par le bout du nez jusque sur les toits de la ville : là, le gamin se mit à bondir de passerelles en passerelles, frôlant la mort à chaque instant, manquant de chuter, en équilibre précaire, lancé en pleine course, visiblement trop effrayé d'être poursuivi pour songer à la prudence. C'est certainement dans cet état d'esprit qu'il franchit lestement, et d'extrême justesse, le vide de plusieurs mètres formé par une ruelle entre deux toits plats. Raël le talonnait maintenant d'une dizaine de mètres, mais prendrait-il le risque de se rompre le cou ?

[Raël Khem]

-Mais comment ce sale gosse fait pour courir aussi vite?!

C'est ce que s'écria Raël alors que le garçon fendait la foule, échappant à sa vue. Le pauvre guerrier fût obligé de foncer dans les citoyens qui s'affairaient paisiblement pour pouvoir s'offrir un passage. Il eut de la chance : aucun ne l'attrapa au passage pour lui dire le fond de sa pensée; il est à parier que son statut l'avait aidé encore une fois. Finalement l'enfant et l'adulte parvinrent à sortir de la foule pour retourner dans les ruelles, le début des problèmes.
Autant les mendiants et les brigands à deux sous se fichaient éperdument du gamin, autant voir arriver pour eux un Serviteur fatigué et à botu de nerf était une véritable aubaine. Ce fut bientôt la foire d'empoigne pour savoir qui irait lui mendier de l'or en premier. Heureusement Khem passa l'attroupement... En force, gratifiant au passage un des badauds d'un splendide coup de poing dans le nez. Une fois les gueux passés le Scythien repris sa poursuite, l'enfant était maintenant en train de monter sur une échelle pour rejoindre les toits, sans hésitation le soldat grimpa à son tour. Ce qu'il vit le consterna : le sale môme sautait de toit en toit, de passerelles en passerelles avec une vélocité et une adresse presque irréelle (du moins du point de vue de Raël). Le guerrier ne s'arrêta même pas pour prendre conscience du danger : si il ne récupérait pas son or il ne partirait jamais de l'Arabie et ça quête se terminerai auss vite qu'elle avait commencée.
Tout en tassant des pans de tissus sur sa nuque pour la protéger en cas de chute, il continua sa course

Je sens que ca va être épique! ^^

[[MJ] Le Gob']

Test d'HAB avec bonus de +4 au vu de l'élan que tu conserves : Échec critique (20). Épique, en effet ! Tu ne croyais pas si bien dire...

Test d'HAB avec un bonus de +4, au cas où tu réussirais à t'agripper au rebord opposé grâce à l'élan : Échec (16). Tu te rétames donc complètement...

Bon, test d'HAB simple pour juger de la qualité de ta réception, quelques quatre ou cinq mètres plus bas : Échec sur le fil (9).

Allons bon. Je suis tellement désolé pour toi que je vais faire un effort. Mode "MJ miséricordieux" activé.

Fort d'un élan d'une dizaine de mètres parcourus à toute allure, Raël aurait dû franchir cet obstacle sans plus de problèmes que n'en avait eu le gamin, quelques instants plus tôt. Malheureusement pour lui, le garçon avait lâché, dans sa chute, un fruit fort pulpeux, propice au déclenchement d'une mauvaise chute. Un rebord insignifiant, oui, mais visiblement suffisant pour tromper Raël, bien peu familier de ces ruelles. Notre héros, emporté par son élan, ne vit donc pas le juteux fruit exotique, écrasé au sol, lâché juste avant la fin de la terrasse. Le saut soigneusement calculé que l'impétueux jeune homme avait envisagé s'en trouva bien évidemment fort affecté : glissant sur la gluante substance végétale, Raël perdit l'équilibre, et chuta, sans pouvoir rectifier sa trajectoire. Les toits n'étaient pas haut, dans cette partie de la ville, à peine quatre ou cinq mètres, mais la façon dont chuta le soldat laissait présager un atterrissage potentiellement mortel.

Dégâts occasionnés (1D20, un résultat de 19 ou 20 conduisant à un jet supplémentaire, d'1D10 ou 1D20) : Le dé donne 11, pas de démultiplication des dommages. Tu perds seulement 11 PV dans l'accident. Remercie ton MJ ^^

Le choc fut rude. Raël parvint à atterrir dans un semblant peu convaincant de roulade contrôlée, limitant les dégâts autant qu'il lui était possible, au vu de la situation. Si sa nuque ne fut pas brisée, le guerrier finit néanmoins sa course étendu au sol, sonné, les yeux levés vers le ciel. Le dos avait encaissé la quasi-intégralité du choc, et il devait s'estimer heureux de s'en tirer à si bon compte, et il était peut-être temps de remercier Djaf d'avoir étendu sa main sur lui...

Bon, comme je suis un gentil MJ, je ne t'impose qu'une seule contrainte : tu n'agis pas pendant ton prochain post, tu peux faire ce que tu veux, mais tu restes allongé sur le dos dans la ruelle. Tu viens de chuter de cinq mètres, nom de nom !

[Raël Khem]

Simplement, pourquoi? Pourquoi est-ce que le destin était si cruel? Le pauvre Scythien souffrait doublement : déjà de voir tout son or perdu, dans les poches d'un gosse des rues qui ne comprenait même pas l'importance de sa quête, ensuite de se rendre compte que la vie était profondément injuste. Il n'y avait pas de justice, seulement un cruel jeu de hasard organisé par des Dieux blasés.
En attendant, si il était encore vivant c'était que les Dieux en question ne l'avait pas encore totalement laissé tombr! Une chose le chagrina néanmoins, dans la geste héroique qui conterait ses exploits de guerriers, le premier couplet serait dédié à sa chute pitoyable pendant qu'il poursuivait un enfant. Triste.
Après quelques minutes où il tentait tant bien que mal de retrouver ses esprits, il se dit que se lever pour... Faire quelque chose... Ne serait pas une mauvaise idée.

Un épique FAIL dans ce cas là!

[[MJ] Le Gob']

Raël resta étendu là pendant ce qui lui parut être une éternité, les yeux rivés sur l'astre divin qui continuait sa course dans le ciel, se lamentant intérieurement quant à sa malchance chronique, accusant presque la Providence de lui refuser ses faveurs, à lui dont le but était si noble. Et il y avait un peu de vrai dans ces sombres pensées, car bien que la somme renfermée par sa bourse soit insuffisante pour lui permettre un voyage par bateau, se voir dérober cette même somme n'allait pas arranger ses affaires, et lui rendait désormais la tâche bien plus difficile, voire impossible. En effet, il se trouvait à présent sans le moindre sou, incapable d'agir dans cette bourgade où même le prestige de sa fonction n'empêchait pas de pareils désagréments, aussi dérangeants que communs, de survenir régulièrement. Que lui réservait donc le destin, pour le mettre d'emblée sur un si pénible chemin ?

"Seigneur ? Tu n'as rien de cassé ?"

Il fut soudainement tiré de sa rêverie lorsqu'une ombre se pencha sur lui, et qu'on se renseigna sur son état de santé. Il voulut d'abord émettre un grognement bougon, encore tout occupé à ruminer ses sombres pensées, mais il changea immédiatement d'attitude en apercevant le visage de l'obligeante personne. La mine soucieuse qui obstrua brusquement son champ de vision était celle du garnement ! Le chapardeur ne tenait plus de bourse entre ses mains sales, et son visage fatigué n'exprimait qu'inquiétude : il craignait certainement d'avoir manqué de tuer Raël, alors que tel ne devait pas être son but initial, et le considérait visiblement comme une personne de la noblesse, au vu du titre qu'il lui servait. Un bref coup d'oeil investigateur, et notre héros put constater que le garçon ne devait pas avoir mangé grand-chose depuis plusieurs jours, et les cernes sous ses yeux témoignaient d'un manque de sommeil conséquent. Les guenilles dont le chenapan était vêtu ne faisaient qu'ajouter à la crédibilité de cette analyse, et il semblait maintenant évident aux yeux de Raël qu'il avait affaire à un voleur fort désespéré. Mais il fut interrompu dans ce bref examen lorsque le "gosse des rues" prit de nouveau la parole, devenu pressant, jetant des regards inquiets sur les environs.

"Non, Seigneur, ne meurs pas ! Je ne voulais pas te blesser, juste t'empêcher de me rattraper... Je n'avais pas pensé qu'il pouvait t'arriver ça..."

[Raël Khem]

Les secondes devenaient des minutes, les minutes devenaient des heures, mais le soldat restait là, par terre, tel un cadavre au milieu d'un champ de bataille. En vérité, il méditait, sur sa malchance, sur la cruauté du monde, sur sa propre existence qui commençait à devenir lassante... Puis soudain, quand tout espoir avait disparu, une ombre s'abattit sur lui, une ombre qui lui parla d'une voix qui semblait sortir du néant:

"Seigneur ? Tu n'as rien de cassé ?"

Le sale gosse! Raël eu un sourire qui en disait long sur ses intentions: ce garçon allait devenir le défouloir sur qui il allait déverser sa rage et sa haine, d'autant que c'était à cause de lui que tout était arrivé! Après un instant de flottement où il se rendit compte que son dos le faisait beaucoup moins souffrir il pencha sa main droite vers le cimeterre se trouvant à son flanc gauche... Mais il se ravisa vite: il ne voyait pas sa bourse dans les mains du gamin, si ça se trouvait, il l'avait caché quelque part et si il mourrait, l'or resterait perdu. Khem retint une larme en pensant à cette punition qu'il ne mettrait jamais...

"Non, Seigneur, ne meurt pas ! Je ne voulais pas te blesser, juste t'empêcher de me rattraper... Je n'avais pas pensé qu'il pouvait t'arriver ça..."

Le Scythien aurait souhaité lui hurler que si il ne voulait pas lui faire de mal alors il n'aurait pas dû mettre un fruit glissant près d'un rebord. Mais sachant que l'enfant était son seul espoir de poursuivre son voyage, il lui fit un sourire tout en se relevant avec difficulté:

"Ne t'en fais pas mon garçon, je sais très bien que la vie est dure pour les habitants de cette ville et que tu ne me voulais pas de mal en me prenant mon or. Mais je suis désolé de devoir te dire que cet or est vital pour une mission qu'on m'a confié et qu'il faut absolument que je le récupère."

Le voleur fixait ses pieds, il était visible qu'il hésitait à rendre l'or, même si il était indispensable pour un Serviteur des Morts. Raël se sentit tout à coup vraiment désolé pour lui, la vie n'était facile pour tout le monde, surtout ici. Finalement, sentant qu'il fallait enfoncer le clou, il continua en s'abaissant à hauteur du garçon:

"Je sais que tu en as besoin pour vivre, mais laisse-moi te faire une proposition, mon petit, si tu me rends mon or alors tu pourras m'accompagner dans mon voyage! Et si tu refuses, tu recevras quand même une petite récompense, quand penses-tu?"

Il posa ensuite sa main sur la tête de l'enfant tout en le regardant dans les yeux, impatient de connaitre la réponse.