La belle arabienne brûlait d'impatience à l'idée de retrouver Hachim et maudissait ce vent qui, subitement, était tombé alors qu'ils approchaient de Copher. Une mer d'huile sans le moindre souffle d'air empêchait le bateau tiléen qu'elle avait emprunté de rejoindre la côte. La frustration était d'autant plus grande que le port était en vue, si proche et si loin à la fois.
Appuyée sur la bastingage bâbord, Sajia se languissait de ces palmiers qu'elle devinait, de cette terre ocre, de ces senteurs épicées, de cette langue gutturale et chantante qu'elle n'avait plus entendue depuis tant d'années. Lorsqu'un courant d'air bruissa dans ses cheveux, que les matelots alanguis sur le pont se dressèrent et que le capitaine hurla ses ordres, Sajia su que le vent marin était de retour et qu'elle rentrait enfin chez elle !
Quand elle débarqua, la jeune femme éprouva un vif soulagement. C'était une seconde naissance ; comme si elle revenait à la vie ou s'éveillait d'une nuit interminable. Une vague d'émotions trop longtemps refoulées submergea la belle qui eut besoin de plusieurs minutes au milieu de l'agitation et du tumulte sur le quai pour se ressaisir et négocier d'être emmenée par une caravane du désert vers le califat de son père.
Une fois les modalités et la somme de deux Riyals d'or réglées, elle obtint de voyager sur un chameau chargé de plusieurs paniers tressés.
La caravane quitta Copher moins d'une heure plus tard en fin d'après-midi. La chaleur, bien que plus forte que dans les contrées septentrionales que Sajia avait connues ces dernières années, était supportable grâce à la petite brise marine qui avait amené le navire tiléen à bon port.
Lorsque le soleil commença à décliner au-dessus des dunes, Copher était déjà loin et ne se distinguait plus à l'horizon que comme une mince bande sombre hérissée de petites pointes lumineuses.
La caravane ne tarda pas à s'arrêter près d'un puits creusé au milieu du désert ; source d'eau indispensable et bien connue de tous les marchands qui arpentaient ces étendues désertiques.
Abdulh, tel était le nom de l'homme qui menait la caravane, donna des instructions pour que les tentes soient rapidement montées.