Lorsque, après quelques heures de descente dans la neige et le froid, le petit groupe parvint enfin à Bolgen, il faisait nuit noire. Mais le village n'était pas endormi pour autant. Des événements trop terribles étaient survenus dans la journée, les notables en discutaient encore près d'un grand feu dans la case du chef.
Si Lars et son compère chasseur ne demandaient qu'à regagner leurs foyers pour trouver du repos, ce ne fut pas le cas de Margan. Il proposa à Borüss de le suivre au "conseil"...
Là, chez le chef, dans une pièce couverte de fourrures et pourvue d'un généreux feu de cheminée, il y avait bien sûr Ibor, mais aussi Yvan, le prêtre d'Ursun.
Margan leur fit un rapide compte rendu, qui plomba l'ambiance, pourtant déjà pas très joyeuse.
Tandis que le vieil Yvan, la mine sombre sous sa peau d'ours, garda le silence, le chef Ibor se massa le front de sa grosse - petite - main. Il grimaça:
-Des mercenaires du Sud... Par la barbe d'Ursun - hem, pardon Yvan - y nous manquait plus que ça!... Salopard de Ruric. Va falloir se préparer à les accueillir comme il faut.
Un regard d'espoir vers Borüss:
-Heureusement qu'on a un og' avec nous. Parce que tu vas 'core nous aider hein?
Margan acquiesça à la place de l'ogre, posant une main amicale sur son énorme bras:
-Sûr, on peut compter sur lui. C'est Taal qui l'a envoyé à nous, je commence à vraiment le croire.
Le prêtre se racla la gorge, sceptique, mais Margan n'y prêta pas attention:
-Vous avez interrogé la femme de Ruric? Où se trouve t-elle, là?
-Bral garde Olga au chaud dans la maison de ce bâtard. Il y a une semaine, Ruric lui a dit qu'il partait à la ville acheter du matériel. Mais il est parti juste avec un cheval, sans carriole. Elle sait rien de plus, à part qu'elle a trouvé son putier de mari bien préoccupé depuis l'histoire de l'ogre mutant - scuse Borüss. Je sais que t'es guéri maint'nant.
Ibor avait beau dire cela, notre grand héros vit bien que le méfiant prêtre d'Ursun n'en était lui pas encore totalement convaincu.
Margan reprit:
-Borüss a proposé de se servir d'Olga comme otage, pour protéger le village. Mais il faudra aussi défendre la mine non? Mais c'est dur, parce que ça va nous obliger à séparer nos forces.
-Et si on abandonnait complètement la mine, pour l'instant? Proposa Ibor.
Protéger le bourg, c'est plus important. C'est là qu'y a nos femmes et nos gosses. D'toute façon, si on y laisse aucun mineur à la mine, ce chien de Ruric va bien avoir du mal à faire déblayer c'que not' grand copain a écroulé aujourd'hui.
Un clin d'oeil respectueux à l'ogre, puis une question emplie d'espoir:
-Tes loups nous aideront encore?
Silence. Place fut laissée aux paroles de leur gigantesque héros. Son avis importait beaucoup pour eux, du moins pour Ibor et Margan...