[Surcouf] Wreccum

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Les Zones Maritimes représentent l'ensemble des mers et océans du globe. Les mers peuvent être calmes et propices à milles découvertes, ou être traîtresses...

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[MJ] La Fée Enchanteresse
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[Surcouf] Wreccum

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Journal de bord de la Dame Blanche

Pour les yeux seuls du capitaine, de son second, et de toutes les personnes concernées.

Secrétaire :
Hylke Geest

Manann garde-nous à jamais de la soif du Kraken.


Wellentag 14. Sommerzeit 2532

Précipitations : Sans
Température : Chaude
Visibilité : Claire
Vent : Léger souffle prévalent

Nous quittons le port de Marienburg en battant le pavillon de la grande République des Jutones, et remettons le destin de notre navire entre les mains de Manann.
Le capitaine Dan Surcouf nous fait suivre le courant par le nord-est, en suivant les voies maritimes prévues par les autorités fluviales.

Le manque de vent complique notre avancée, et la chaleur si intense que le second doit relayer le capitaine dans l’après-midi. Nous n’avançons que lentement.

Nous terminons la journée après avoir navigué une trentaine de miles au-delà du Rijk.


Aubentag 15. Sommerzeit 2532

Précipitations : Sans
Température : Inhabituellement étouffante
Visibilité : Claire
Vents : Marasme

Nous continuons de descendre le Rijk. La chaleur est pire encore qu’hier, et les vents si absents que nous sommes forcés de ne naviguer qu’à la vitesse du courant, ce qui complique nos manœuvres. La circulation est également très importante.

Le capitaine parvient à maintenir l’avancée toute la journée mais doit être relayé par son second dans l'après midi.

Nous terminons la journée après avoir navigué une trentaine de miles au-delà du Rijk.


Marktag 16. Sommerzeit 2532

Précipitations : Légères
Température : Confortable
Visibilité : Brumeuse
Vent : Grand vent prévalent

Le vent soufflant d’ouest rend plus difficile la manœuvre du navire. L’adresse du capitaine permet de maintenir le cap. Nous accélérons.
Circulation toujours très congestionnée.

Nous quittons le Rijk et découvrons le phare de Fort-Solace, annonçant notre entrée définitive dans la mer des Griffes.



Surcouf lâchait enfin la barre ; ces huit dernières heures, il avait été fort vigilant au gouvernail, essayant de lutter contre le fort vent qui s’était mis à rugir de tout son souffle plein ouest, menaçant de faire s’échouer la Dame Blanche contre la côte escarpée du pays des Jutones. Après deux jours complets d’un calme plat pour à s’endormir au volant, on était soudain rappelé à la plus importante des vigilances.
L’été venait de naître dans le Vieux Monde, et si les deux journées passées avaient fait tourner de l’œil à Surcouf à chaque fois, obligeant Darri à venir reprendre son poste plus tôt que prévu, aujourd’hui la situation était bien autre : on grelottait de froid sous les imperméables, et une fine ondée crachotant humidifiait tous les vêtements pour mieux frigorifier les corps.
La sécurité du fleuve s’éloignait, à mesure que la rade se grossissait, pour laisser sa place à la haute mer. Le Rijk se jetait dans la Mer des Griffes, et les matelots avec.


Le second Norse grimpa les marches qui menaient au gouvernail ; Darri échangea une franche poignée de main et quelques mots avec Surcouf, avant de se dépêcher de reprendre son poste. Alors qu’il faisait trois pas, un des deux petits mousses, le petit Rupert, hurla de toutes ses forces avec sa voix fluette :

« Capitaine sur le pont ! »

Et là-dessus, le bosco, Ingvar, reprit dans un écho foudroyant, si fort qu’on l’entendait au-delà du sifflement du vent qui remuait les bâches et les voiles au-dessus des têtes :

« CAAAAAPITAINE SUR LE POOOONT ! »

Le gros Norse claqua des bottes et mit sa main contre sa tempe dans un salut Mannanite au passage de Surcouf, avant de baisser sa main et de hurler son rapport — c’est qu’il fallait crier pour se faire entendre avec ce temps.

« L’équipage est opérationnel, capitaine ! Pas de grogne !
Vous voulez qu’on récompense leurs efforts avec une ration de grog ?! »


En plus de l’eau douce et de la bouffe, il y avait toujours un beau tonnelet d’alcool plus-ou-moins frelaté de disponible pour réchauffer les matelots. Évidemment, sa distribution dépendait uniquement du capitaine, qui devait bien gérer le stock et contrôler l’ivresse à bord — personne ne voulait d’un équipage d’ivrogne. Sauf pour les sujets d’Albéric de Bordeleaux, chez qui c’était absolument naturel que de naviguer avec deux-trois verres derrière la cravate ; selon les stéréotypes, du moins.
D’un autre côté, c’était la toute première épreuve de la Dame Blanche. Après un début de voyage bien fait pour bailler, voilà que l’équipage devait se relayer et toujours rester vif. Surcouf avait au final fait le bon choix en s’arrangeant pour partir avec un équipage complet : il y avait tout le temps des personnes qui pouvaient dormir pendant que d’autres prenaient la suite de l’entretien du navire. Si la Dame Blanche était flambant neuve, et un magnifique navire qui allait bien vite, elle paraissait bien frêle lorsqu’ainsi soumise aux éléments…



Tout au bout du navire, Surcouf trouva son navigateur-sorcier. Adriaen Pourbus, qui possédait le salaire le plus élevé de tout le bâtiment (Il coûtait autant que trois marins et un mousse mis ensemble). Il semblait vouloir mériter sa paye, parce que malgré le vent, il était débout contre la rambarde, un œil dans son sextant, à apparemment vouloir mesurer quelque chose à travers la brume.
Au loin, derrière ce voile, on observait une grande lueur qui découpait le ciel — Fort-Solace. Surcouf connaissait bien ce phare ; c’était celui qui balisait la Manannsport Zee, un immense ouvrage militaire fortifié, qui était la première ligne de défense de Marienburg, et un port de secours en cas d’avarie. Sa lumière servait de guide salvateur aux navires ; la mer des Griffes était trop changeante, et comme aujourd’hui, on pouvait passer d’une visibilité parfaite à une brume épaisse en quelques heures à peine, aussi, la République avait intelligemment fait construire cet édifice public pour sauver son commerce.

C’est que c’était la course, sur cette mer. Tellement de navires comme celui de Surcouf se détachaient et s’élançaient à pleine vitesse dans tous les sens, pour partir au nord, à l’ouest et à l’est. Des navires de commerce et des bicoques de pêcheurs, à destination de la Norsca, de la Bretonnie et d’Erengrad. La collision devenait soudain un risque, car les pilotes excédés d’avoir passé des jours à coller à la poupe d’autrui pendant des jours s’enthousiasmaient aussi soudainement qu’ils découvraient un peu d’espace pour tourner les voiles.



Pourbus remarqua la présence de Surcouf. Il fit lui aussi un salut Maananite, et un grand sourire se dessinait sur son visage.

« Temps de chien, hein ?!
Ça va se dégager dans la soirée, croyez-moi ! On pourra naviguer de nuit — c’est bientôt la pleine lune !
Vous croyez qu’on devrait allumer des torches ?! »


Pour ne pas se faire rentrer dedans par un chauffard, il devait vouloir dire. Mais allumer des torches c’était également risquer l’incendie, et forcer un matelot à devoir constamment les rallumer et les surveiller. Heureusement que Surcouf avait engagé beaucoup de main d’œuvre — ça n’allait pas être dur de trouver un préposé à ce travail parmi les matelots.

« Ah, au fait — y a des navires de la patrouille fluviale qui rodent dans le coin ! Ils font des contrôles au hasard pour vérifier les manifestes et les marchandises !
Y a peu de chance que ça tombe sur nous, par ce temps ils vont probablement rester tranquilles à Fort-Solace — mais si on en voit un, par hasard, vous avez des instructions particulières ?! »
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Dan Surcouf
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par Dan Surcouf »

Après avoir laissé la barre à Darri, le capitaine Surcouf descendit dans ses quartiers, non sans croiser Ingvar, qui se mis soudainement à beugler. Au début, ce petit manège avait fortement surpris Dan, qui n'était pas spécialement habitué à toutes ces simagrées protocolaires. Le Rouge-Gorge était un trop petit navire pour réellement avoir besoin de ça et les navires de pêche sur lesquels il avait autrefois servi ne s'embarrassaient pas d'autant de discipline.

Toutefois, il comprenait l'intérêt. Il était le capitaine, le commandant de cet équipage et du navire, le premier maître à bord après Manaan. Plus un équipage était grand et plus il fallait le rappeler. On ne pouvait diriger un brick-goélette comme on dirigeait un sloop. Aussi rendit-il le salut d'Ingvar, salut qui n'était pas sans lui rappeler la chevalerie de son pays natale et qu'il n'eut aucun soucis à singer au troisième jour.

Ingvar, bien dans ses habitudes, proposa une distribution de grog. Avec le froid qui se levait, ce n'était sans doute pas un mal. Un grog n'était pas qu'une simple dose d'alcool. C'était essentiellement de l'eau chaude avec une goutte d'alcool. Une façon de distribuer de l'eau potable et de limiter les effets du croupissement. Par ailleurs, en y rajoutant une pointe de citron, cela devenait un excellent moyen de prévenir le scorbut. Ce n'était pas une boisson avec laquelle on pouvait vraiment s'enivrer.

-Maître Tysland, faites préparer et distribuer une ration de grog par tête. Nous arrivons sur la rotation, c'est le moment.
La logique voulait que les hommes en repos soient d'abord servis, pour aller relever leurs camarades, qui eux viendraient à l'issue chercher leur part.

Il gratifia Ingvar d'un signe de tête avant de le saluer et de poursuivre son chemin. Il tomba alors sur le navigateur, qui le gratifia également d'un salut qui fut rendu.

-Maître Pourbus, si vous me dites que la nuit sera claire, alors pas besoin de torches. Surtout par cette bruine, ça va être pénible de les maintenir, donc faisons confiance à la vigie. En ce qui concerne les patrouilles, pour le moment, jouons le jeu si ils demandent à nous contrôler.
Les manifestes étaient à jours et le cognac n'était pas encore à bord. D'un point de vue extérieur, ils étaient des commerçants légitimes et licites. Ils n'avaient donc pas besoin d'épuiser l'équipage dans une course poursuite inutile.
Dan Surcouf, Contrebandier
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[MJ] La Fée Enchanteresse
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Les ordres distribués, la Dame-Blanche continuait gaiement son avancée au milieu d’une mer des Griffes agitée par le vent. Les vagues se soulevaient pour s’écraser contre la proue, les matelots s’agitaient dans tous les sens pour maintenir les voiles et surveiller la charpente, et une espèce d’anxiété semblait avoir gagné tout le monde à bord.
Mais Dan Surcouf lui en avait vu bien d’autres, et il gardait un calme alcyonien au milieu des éléments. En fait, le capitaine pouvait même être ravi qu’une telle épreuve ait lieu si tôt après leur départ à Marienburg : ça permettait de pratiquer une grande répétition pour souder les liens, et si quelqu’un devait vraiment merder à bord, il valait mieux qu’il merde alors qu’on était tout près de Marienburg et à deux lieues nautiques de Fort-Solace, plutôt que perdu dans la contrée de Stromfels et des Norses plus loin dans leur voyage. Les matelots apprirent donc rapidement à se jauger et travailler ensemble, et si l’avarie pouvait continuer encore sur cette lancée, sans devenir plus difficile, peut-être que ça en serait positif.

Le sablier du pont écoula son dernier grain de sable, et alors, Ingvar se mit à hurler comme un porc pour qu’on aille échanger les rôles : les matelots frigorifiés et tremblants tant de froid que de fatigue regagnèrent la cale, tandis qu’ils étaient remplacés par de nouveaux bras plus frais. Le Norse guida tout le troupeau comme un berger jusqu’au tonneau de grog, où il allait assurer la distribution du remontant bien mérité, afin de tranquilliser leurs nerfs.

Au fond, ça allait donc être une journée de routine, comme les autres. Surcouf profita de quelques instants momentanés de quartier libre, rien qu’à lui, tandis que ça s’activait autour. Alors qu’il regardait l’horizon, essayant de deviner à travers la brume les mâts d’autres bateaux qui comme le sien s’élançaient vers l’Empire, il fut dérangé par quelqu’un qui arriva sans le saluer, ou lui donner le protocole que les marins réservaient à leur capitaine — Hylke Geest, la borgne lettrée, était bien une fille de Rhya avant de Manaan, histoire de bien empirer les superstitions des marins à l’encontre du beau sexe.
Un peu tremblante sous un gros plaid en peau de rêne, la secrétaire était pourtant tout sourire. Elle paraissait pourtant un peu ridicule, depuis que le Reik s’agrandissait pour passer du fleuve à la mer : peu habituée à la houle, elle n’arrêtait pas de tanguer de gauche à droite, tandis qu’elle était encore plus pâle que d’ordinaire, visiblement nauséeuse : elle était la seule de tout l’équipage à ne pas être du tout acclimatée à la vie maritime, ce qui pouvait probablement rappeler ses jeunes années à Surcouf…

« Aux aguets, m’n kapitein ? Je me demande comment tu fais pour tromper l’ennui dans les voyages comme ça ! »

Difficile de savoir si Hylke était taquine ou pas très maline — Surcouf n’avait jamais le temps de s’ennuyer, vu qu’il devait tout le temps alterner entre piloter et commander le navire. Il n’y avait bien que les commodores de la Marine Royale qui avaient le temps de s’ennuyer à bord d’un vaisseau, et qui pouvaient passer leur temps à dessiner les mouettes ou étudier le ciel étoilé. Peut-être était-ce comme ça que la jeune femme s’imaginait que les capitaines passaient leurs journées en pleine mer…

« Tiens, je… Je voulais te l’offrir avant, mais, bah, je… J’ai jamais trouvé le bon moment !
C’est… Un cadeau ! »


La borgne regardait un peu ses pieds alors qu’elle continuait de sourire. Un cadeau — c’était rare qu’on offre des cadeaux à Surcouf. Et voilà qu’elle tendit un petit paquetage rectangulaire, recouvert de papier crépon tout froissé. Les gouttes de la bruine commencèrent à maculer l’emballage, que Surcouf déchira avec le bout de ses ongles.

Non seulement on offrait peu de cadeaux à Surcouf, mais on ne lui avait encore jamais offert ça : Un livre. Un petit volume, qui devait tenir dans un sac, avec une grosse couverture rigide, avec pour tout habillage l’auteur (Un certain Nigel Francisco), le titre (Les grandes merveilles), et une lithographie représentant un bateau arrivant sur une île, où en noir et blanc, on voyait de grotesques personnages, des sortes de grands lions anthropomorphiques, et des d’horribles gorilles avec des défenses en ivoire sur leurs visages.
Bizarrement, le nom dit quelque chose à Surcouf. Francisco était le fils au sang-mêlé d’une noble Bretonnienne (D’où son prénom si particulier, Nigel) et d’un important patricien de Remas. Il devait être un vieillard aujourd’hui, s’il était encore en vie, mais dans sa jeunesse, avec quatre navires, il avait fait la circumnavigation de la Terre (Même si à son grand désarroi, certainement, il avait été battu par un Estalien un peu avant). Il avait ramené au Vieux Monde le giroflier, la vanille, d’étranges pièces en ivoire, et des récits incroyables de terres magnifiques qu’il avait explorées : le lointain Cathay, le traditionnel Nippon, et surtout, surtout, les terres d’Inja qu’il avait été le premier blanc à fouler. Petit, Surcouf avait entendu des matelots-charlatants de Bordeleaux raconter qu’ils avaient servi sur son navire — mais au moins un des poivrots de la ville d’Albéric devait dire la vérité, et ainsi, Surcouf avait pu apprendre comment Francisco avait été un excellent diplomate, et un bretteur hors-pair, un aventurier sans limites triomphant par l’audace et le culot. Sauf qu’il était rentré avec un seul navire, et, depuis son retour dans le Vieux Monde et l’écriture de ses mémoires, on n’avait plus jamais entendu parler de lui et son soleil avait cessé de briller. Au point où on ne savait même plus vraiment s’il respirait encore ou si Mórr l’avait rappelé.

Il n’empêche, Surcouf n’avait jamais mis la main sur son bouquin. En fait, illettré durant la majorité de sa vie, il n’avait jamais pensé imaginer détenir un livre. Pourquoi Hylke lui faisait un tel présent ?

« Je me suis dit que… Bah, que ça t’intéresserais ! Puis y aura peut-être de bonnes astuces pour toi dedans ! »

Pas certain, ça. Mais il paraît qu’on pouvait lire des livres pour le plaisir. En tout cas, Hylke continua de regarder ses pieds après avoir fait son présent.

Jet de perception de Dan : 16, rien d’intéressant en vue par la brume

Jet d’endurance de Dan Surcouf : 4, le froid ne te fais strictement rien

Jet de connaissances : 1, réussite critique
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Dan Surcouf
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par Dan Surcouf »

Surcouf devait reconnaître que c'était assez rafraichissant d'avoir quelqu'un sur le navire qui ne s'embarrassait pas des questions protocolaires. Au fond, il restait Dan Surcouf, l'enfant d'une putain de Bordeleau. Il n'était pas le chevalier de Mavignon. L'espace d'un instant, Surcouf se demanda ce qu'il était advenu de ses anciens compagnons d'aventure. Marienbourg était une grande ville, mais pas à ce point. Même si ils étaient tous revenus en vie de leur aventure, il avait parfois l'impression d'en être le seul survivant.

Il chassa cette pensée aussi vite qu'elle était venue, se concentrant sur Hylke. Si il appréciait sa familiarité, d'une certaine façon, il craignait que cela ne fasse hausser quelques sourcils dans l'équipage. Il faudrait qu'il en parle avec elle, lorsque le moment serait plus opportun. Il sourit au commentaire sur l'ennui. Hylke, en tant que secrétaire, devait, d'une certaine façon, trouver le temps long. Elle était sans l'une des personne dont la charge de travail était la moins pénible sur ce navire. Peut-être serait-ce une conversation pour plus tard, avec la question du protocole.

-L'ennui est notre allié. C'est lorsque les choses deviennent intéressantes qu'il faut se méfier.
Il en savait un rayon sur le sujet. Mieux valait se tourner un peu les pouces que de commencer à risquer de les perdre. Les choses étaient beaucoup plus simples et profitables quand le plan se déroulait sans accroc. Si ils pouvaient récupérer ce fichu cognac, le refourguer à leur contact et mettre les voiles pour réinvestir sa part à la bourse ou dans de nouvelles opportunités financières, il n'en serait que plus heureux. Il y avait aussi la question de la mission que Cousteau lui avait confié. Il allait devenir urgent qu'il en parle avec Darri et Hylke.

Il s'apprêtait à en parler à Hylke, lorsque celle-ci lui présenta le paquet. Il fallut quelques secondes au capitaine pour comprendre, malgré les mots de la jeune femme, qu'il s'agissait d'un cadeau. Surcouf n'arrivait pas à se souvenir de la dernière fois que quelqu'un lui avait fait un cadeau... en dehors peut-être de quelques verres offerts ici et là. Il vivait dans un monde où il fallait constamment se battre et où rien n'était offert sans que quelque chose ne soit espéré en retour. Elle était faite du même bois: c'était une femme qui avait traversé autant d'épreuve que lui et bataillé pour tout ce qu'elle avait. Ce genre de sentimentalité était quelque peu éloigné de la Hylke qu'il connaissait. L'espace d'un instant, son esprit de malfrat se demanda quel angle elle pouvait bien espérer travailler, avant de se rappeler qu'elle n'était ni Cousteau, Foucon, Favière ou le mulot. Avec Darri, elle était sans doute une des rares personnes qu'il pouvait considérer comme une amie. Il n'y avait pas d'angle.

-Euh... merci.
Il ne savait pas trop quoi dire d'autre. Les aventures de Nigel Francisco. Il en avait entendu parler. Peut-être trouverait-il dans ce livre quelques sagesses secrètes d'un des plus grands marins de l'histoire bretonnienne, même si lire pour le plaisir était quelque chose de complètement étranger pour lui. Savoir lire et écrire était une nécessité pour progresser dans ce monde, autant que savoir marcher ou respirer. Mais en faire un loisir était une dimension toute nouvelle.

Il se posa alors la question de savoir si il avait réellement des loisirs. Quand il était petit, il aimait bien pêcher, mais même ça, c'était devenu un acte basique pour sa survie, pour économiser quelques sous sur son repas. Au cour des dernières années, sa vie ne s'était résumée qu'à ça: enchainer les contrats, parler affaire et économiser chaque piécette, pour la réinvestir sur son chemin vers la fortune et la gloire. Même ces derniers jours, tout n'avait été qu'affaires, négociations, préparations et manœuvres en tout genre, dans le seul but de s'enrichir. Cela ne lui déplaisait pas, mais à quoi bon mourir sur un tas d'or, si sa vie ne s'était résumée qu'à ça?

-Merci beaucoup.
D'une certaine façon, peut-être que ce livre serait un premier pas vers une vie plus sereine, plus équilibrée. Hylke lui avait peut-être rendu un grand service.

Puis la mémoire de la mission de Cousteau et les chevaux lui revint en mémoire.

-J'y pense, mais il va falloir qu'on ait une discussion, tout les trois, avec Darri, en privé, par rapport au Saint. Tu pourrais nous organiser ça? Sans doute pour la prochaine escale. Il va aussi falloir annoncer à l'équipage certains paramètres de la mission. Autant être honnête avec eux et ne laisser aucune ambiguïté.
Ils n'avaient pas pris le temps, afin d'éviter les fuites d'information. Certains pourraient être froissés, mais Surcouf savait que c'était un risque nécessaire et calculé.
Dan Surcouf, Contrebandier
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[MJ] La Fée Enchanteresse
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Le remerciement de Surcouf était sobre — mais en règle générale, Dan Surcouf était un homme sobre, calme, alcyonien, diraient ceux plus poètes. Pourtant, son simple merci beaucoup un peu rauque sembla grandement satisfaire Hylke Geest, qui sourit de plus belle, d’un beau sourire honnête, alors qu’elle continuait de regarder ses pieds. Timidement, elle s’assit sur un bout de caisse pour écouter le changement de sujet de son capitaine.

« Si tu souhaites parler à l’équipage, je pense qu’il faut attendre demain — le temps sera plus clément et on aura plus à courir dans tous les sens ! Et puis, on aura dépassé Fort Solace, on sera symboliquement hors des limites juridictionnelles de la République — si on a des bleusailles pas certaines à bord, ils se sentiront plus libres de parler !
Mais t’es sûr et certain que tu veux dire ce qu’on va faire à notre équipe ?! On ne les connaît pas tous personnellement, comment faire si l’un d’eux est prêt à faire de la délation au moment venu ?! »


L’inquiétude de Geest était légitime, mais pas véritablement crédible. Dénoncer quoi, à qui ? Jamais un Marienbourgeois ne dénoncerait les siens à l’Empire, et même les Impériaux à bord du navire n’auraient pas beaucoup de raisons de trahir leur capitaine — pourquoi perdre leur emploi, et leur réputation dans la ville qui les emploie ? En plus, ce n’est même pas comme si ce qu’ils allaient faire était un trafic de la plus haute importance. Certes, on pouvait être marqué au fer rouge pour des actes de contrebande, être jeté en prison, payer une forte amende… Mais enfin, presque tous les matelots du monde transportaient un peu de marchandise pas terrible sur le côté, et on parlait juste de cognac non-taxé, pas d’objets volés ou sensibles. Au contraire, un matelot qui apprenait qu’on se faisait du fric sur son dos sans qu’il en voit la couleur pourrait justement être motivé à trahir, contrairement au marin avec qui on a été honnête dès le premier jour.
Et pourtant, c’était une inquiétude légitime. Parce que Surcouf ne connaissait pas encore trop les marins à bord.

« Attendons un peu que la houle se calme, et on ira parler à Darri pour notre autre affaire ! »




La brume ne s’était toujours pas levée, et la Dame-Blanche devait toujours naviguer dans du gris épais, qui empêchait de voir quoi que ce soit à plus de quarante mètres. Pourbus avait promis que ça se dégagerait dans la soirée, mais pour l’heure, on avait l’impression d’être coincé dans une pipe à tabac. Fort-Solace mérita donc bien son standing : l’immense tour à feu Marienbourgeoise permettait de deviner la côte et les récifs, et donc de rester bien en sécurité sur sa ligne.

Le vent, en revanche, se calma. Il cessa de souffler si fort, et donna un peu de répit à l’équipage — tout en faisant avancer le bateau en plein dans la Mer des Griffes, ce qui était fort agréable. Darri à sa place de pilote n’aurait donc pas à être autant nerveux et concentré, et donc, Hylke pensa le moment comme correct pour aller le déranger. Ironiquement, le Norse et le Bordelais ne s’étaient quasiment pas croisé ses derniers jours — quand l’un dormait, l’autre était éveillé, et lorsque l’un pilotait, l’autre faisait le tour de l’équipage, ce qui rendait difficile les instants de concertation où ils pouvaient parler ensemble. Heureusement qu’ils étaient bons partenaires et tous les deux compétents, autrement la situation serait bien gênante.

Juste devant la barre, Darri était seul, dressé sur son château de poupe couvert, à observer l’horizon en faisant confiance aux cris de la vigie. Le grand Norse sirotait un peu entre deux une tasse en métal pleine de café bouillant, pour se réchauffer autant que se maintenir éveillé. C’est là qu’il vit les deux comparses venir le voir.

« Je suis encore en forme pour piloter, Dan — à moins que ce soit pour autre chose ? »
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Dan Surcouf
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par Dan Surcouf »

Dan hocha la tête. Il s'assura qu'aucune oreille ne traîne, avant de prendre Darri et Hylke à part. La mer était une excellente alliée pour couvrir les petites cachoteries. En dehors d'une mer d'huile, il y avait toujours un filet de vent sifflant dans les oreilles des marins, toujours une vague venant s'écraser contre la proue, toujours un bosco qui jouait du sifflet pour guider les gabiers, toujours un mousse qui grattait vigoureusement le pont.
-Deux choses. En premier lieu, comme je l'expliquai tout à l'heure à Hylke, je compte révéler l'opération de contrebande au reste de l'équipage. Ils découvriront bien assez vite ce que nous faisons et ce serait les insulter que d''imaginer qu'ils n'y verraient rien, sans compter qu'ils méritent leur part du butin.
Tout travail mérite salaire et si Surcouf était dur en affaire, ne pas récompenser ses hommes pour participer à cette entreprise risquée était inconcevable.
-En second lieu, avant le départ, Hylke et moi sommes allés voir du côté du sac à vin, pour rechercher quelques futures opportunités. Tu n'es sans doute pas sans savoir que nous avons trouvé une offre pour des cheveux de bretonnie.
Il coula un regard à Hylke.
-Si l'un des objectifs secondaire de notre voyage est de trouver de la demande, nous pouvons en avoir un autre.
Il poussa un long soupir.
-Il semblerait que le sac à vin et plus spécifiquement, l'organisation du Saint, ait été infiltré par les services secrets bretonniens. Et disons le clairement: ils ont beaucoup d'influence, assez pour assurer le succès ou l'échec de cette histoire de chevaux et au delà. Ce qu'ils veulent, c'est que nous surveillons les côtes impériales pendant nos voyages et leurs rapportions ce que nous trouvons. Nous deviendrions, en clair, des éclaireurs de la marine royale.
Il croisa les bras.
-Je pense que c'est une proposition que nous devrions accepter. Toutefois, étant tout les deux mes amis et plus proches collaborateurs, au vu les risques, si vous ne vouliez pas le tenter, je le comprendrais totalement et l'accepterai. Néanmoins, dans le cas où vous seriez d'accord, ceci doit rester impérativement entre nous. Personne d'autre dans l'équipage ne doit savoir. La contrebande est une chose, l'espionnage en est une autre.
Dan Surcouf, Contrebandier
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Pour le premier lieu, Darri se contenta de pianoter sur le volant du navire, avec un petit ricanement de rire.

« Je t’avoue que j’aurais préféré qu’on en leur dise rien afin qu’ils nous réclament pas du pognon en plus — surtout qu’une dizaine de gars qu’on connaît pas qu’on met dans la confidence d’un crime, ça va forcément être chiant. Mais hé, y a l’art et la manière de dire ! Dis-leur juste qu’on va transporter une marchandise où ils doivent se la fermer, et qu’ils auront une prime pour ça, je préférerais qu’on entre pas dans les détails sur le Mulot et tout ça… »

Néanmoins, comme il pouvait s’en douter, le second point ne fut pas reçu aussi simplement. Mal serait exagéré, mais quand même, voilà que Darri se mit à retrousser un peu ses lèvres, et à regarder au loin dans la brume.

« En gros, ils demandent à ce qu’on leur serve d’espions, c’est bien ça ?
– Exagérons pas tant, répondit Hylke sur un ton rassurant. On va pas s’amuser à faire des messages codés, ou voler des documents secrets ou que sais-je encore. Ils veulent juste qu’on leur fasse un état des lieux du Nordland et de ce qu’on va pouvoir voir.
– Ouais, donc je répète : de l’espionnage.
– C’est pas de l’espionnage de juste dire ce que deux marchands regardent de leurs propres yeux. On va rapporter des rumeurs, le nombre de vaisseaux qu’on croise, la situation morale des villes dans lesquelles on passe…
– Ouais, ça commence toujours comme ça, mais on met le petit doigt dans quelque chose là : comment on fait si les éclairés derrière le Saint ils saisissent notre bras et ils nous demandent plus ? Parce que la carotte qu’ils nous agitent au bout du nez elle est bien grosse, y a de quoi se faire prendre ! »

Il serra des dents, et hocha la tête de gauche à droite.

« Écoute Dan, j’aime le pognon, et je te fais confiance : t’es réglo et t’as les deux pieds sur Terre, c’est pas ton genre de te faire escroquer. Mais on passe dans une autre catégorie de crime, quand même : faire de l’espionnage pour le compte d’une puissance étrangère, ça peut nous faire envoyer à Rijker.
Comme tout ce qu’on fait, tu me diras, mais je veux juste que tu me rassures sur un point, et t’as intérêt à être très honnête avec moi : »


Il toussota pour se dégager la gorge, et cette fois-ci, regarda intensément Surcouf dans les yeux.

« Tu roules pas pour les services de Louen parce que t’es Bretonnien ?
Non parce que… Le patriotisme de ta terre natale ne compte plus, tu t’en rends compte ? Tu dois plus rien à cette nation. Si l’Empire nous propose la même chose, le même arrangement, on le prendrait aussi ? Y a vraiment aucun, zéro atome crochu avec les buveurs de vin qui font que t’as accepté ? »
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Dan Surcouf
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par Dan Surcouf »

Surcouf hocha la tête aux propos de Darri.
-Bien entendu. Les détails de l'affaires ne seront pas partagés.
Admettre faire de la contrebande était une chose. Y rattacher le nom de quelqu'un comme Kuypers et exposer tout le réseau en était une autre. La contrebande n'était pas un milieu où un exécutant pouvait avoir une vue d'ensemble. Quand à tout cacher, auraient-ils été sur un navire de plus grand tonnage, le cloisonnement aurait été plus aisé. Mais sur une goélette, il était impossible de réellement cacher une cargaison de cognac de contrebande à l'équipage.

Concernant le second point, Surcouf grimaça. Il mentirait si il disait qu'à travail égal, paye égale et risque égaux, il ne balancerait pas pour la bretonnie par défaut. C'était en partie pour ça qu'il était allé au sac à vin, à la base.
-J'ai toujours une certaine affection pour mon pays d'origine. Oui. Néanmoins, si j'était à ce point patriote, je ferais dans la course en battant le pavillon bretonnien.
Et c'était une entreprise des plus lucratives. Un officier de la marine royale, ou même un corsaire de sa majesté Louen, pouvait tirer de prodigieux butins de la capture de navires ennemis. Bordeleaux s'était en grande partie bâtie sur ce genre de capitaine.
-Si j'ai choisi ce milieu et si je me plais à Marienburg, ce n'est pas que pour l'argent, c'est précisément parce que j'apprécie d'être indépendant.
Du moins, autant que pouvait l'être un homme endetté auprès de quelqu'un comme Kuypers.
-Par ailleurs, si j'étais à ce point patriote, ou même avare, je ne vous en aurais pas parlé et je ne vous aurais pas donné le choix.
Surcouf était quelqu'un qui attachait bien plus d'importance à ses amis et ses principes, qu'à un drapeau ou de l'argent. L'argent était quelque chose avec lequel il avait fait sans pendant une bonne partie de sa vie et un drapeau n'était qu'un bout de tissu qui changeait d'orientation et de couleur au fil des saisons. Les principes étaient ce qui vous définissait, en tant qu'homme, en tant que personne. Les amis étaient ceux sur qui l'ont pouvait compter, les gens qui éprouvaient assez de sympathie à votre égard pour vous aider sans rien demander en retour, les gens qui n'avaient pas peur de vous dire quand vous faisiez fausse route et de vous rappeler à vos principes. Des gens comme Darri et Hylke. Et ils avaient assez bourlingué avec Dan Surcouf pour savoir où se situait sa loyauté.
-Nous sommes face à un choix et je ne t'ai pas entendu rejeter l'offre. Maintenant, si nous l'acceptons, nous mettrons effectivement le doigt dans un engrenage que nous seront peut-être impuissant à stopper. Donc ce sera tout les trois ou rien.
Il croisa les bras.
-Si un seul refuse, j'oublie cette histoire.
Ils étaient une équipe et ce n'était pas le genre d'aventure qu'ils pouvaient entreprendre sans être tous sur la même longueur d'onde.
Dan Surcouf, Contrebandier
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[MJ] La Fée Enchanteresse
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par [MJ] La Fée Enchanteresse »

Les mots qu’avait trouvé Surcouf semblaient avoir bien touché Darri, car si jusqu’ici, le Norse fronçait des sourcils et préférait regarder la mer que son camarade, son expression changea du tout au tout : il se mettait maintenant à sourire à pleines dents, en tapotant le volant du bateau avec enthousiasme.

« Le monde dépend des marins ! Sans nous, rien ne tournerait rond sur cette planète ! C’est nous qui transportons les biens et les personnes, c’est nous qui faisons se rencontrer les nations et les peuples, d’Albion jusqu’au Nippon ! On nourrit les villes, on approvisionne les usines ; ni les princes, ni les gangsters ne peuvent se passer de tout !
Alors ouais, Surcouf, si on peut vendre nos yeux et nos oreilles en plus, si Louen et Karl-Franz se taisent et ouvrent leurs tympans pour ce qu’on a à dire, c’est avec plaisir que je me remplirai les poches ! »


La poésie du lieutenant fit marrer Hylke. Elle regarda Surcouf droit dans les yeux pour lui assurer également sa confiance :

« Marienburg est pleine de chiens-fous et d’avides. Mais t’as plus à prouver à personne que t’as la tête sur les épaules et que tu sais taire ce qui ne doit pas être dit. Je suis avec toi, Dan. »

Et ainsi, le trio put se taper dans la main pour officialiser ce tacite serment.




Pourbus coûtait peut-être très cher, mais le magicien n’était pas un charlatan — ou alors il était terriblement chanceux. Exactement comme il avait prévu, avec la nuit, la brume se dégagea, et Mannslieb haut dans le ciel brilla si fort qu’on avait même pas besoin d’allumer des torches pour se repérer, comme Surcouf l’avait ordonné. C’est ainsi dans l’obscurité que la Dame-Blanche rejoignait la Mer des Griffes, portée par un vent plein sud qui soufflait dans les voiles.

Fort-Solace brillait encore au loin, mais on l’avait dépassé. Le dernier ouvrage militaire marquant la puissance du port de Marienburg, avec ses imposants murs crénelés de canons et ses tours truffées d’emplacement pour arquebusiers, devenait progressivement un simple roc dans la terre. On longerait encore pour quelques jours la terre de la République (Car Marienburg n’était pas qu’une cité, c’était toute une nation), mais maintenant, les officiers et la maréchaussée du pays laisseraient leur place aux contrebandiers et leurs caches planquées dans tout le plat-pays et ses polders agricoles. Marienburg s’arrangeait bien avec ses criminels.

Puisque la vie sur le navire devenait moins difficile, Surcouf put en fait ordonner plus tôt la réunion de tout l’équipage — Darri excepté, parce qu’il serait suicidaire de ne pas toujours laisser des yeux vigilants sur un bateau. Il devait être sur les deux heures du matin, l'heure pour l'équipage de nuit de prendre la relève, tandis que les autres allaient se coucher. Entre les deux rotations, c'était le bon moment pour piailler.
Willi, dit « la Courante » (Il n’avait jamais expliqué le surnom, il préférait laisser les autres théoriser…) était le cuisinier à bord. Il avait préparé pour tout le monde une bonne bouillie étrangement bien nourrissante et suffisamment assaisonnée qui faisait plaisir après une dure journée de travail dans le froid et sous la pluie, ce qui remonta le moral de tout le monde, même si personne ne souhaita poser de questions sur la provenance de la viande. Engager un cuisinier était une dépense que pas mal de capitaines s’épargnaient pour de courts voyages, mais il y avait peu de choses qui remettait plus baume au cœur que de la bouffe tolérable.


Alors qu’on donnait son assiette à Surcouf pour qu’il puisse grignoter lui aussi son mélange fèves-morceau tendres de barbaque, il avait devant lui son équipage, assis là sur des bancs, des hamacs, ou directement par terre. Ingvar, le bosco, tapa du pied et cria ferme avec sa grosse voix, d’autant plus audible qu’on était là dans un milieu clos.

« Le capitaine est là ! Repos, mais ouvrez grand vos oreilles ! »

Le gros bosco, une choppe (De café) à la main, fit un signe de tête à Dan. Le capitaine avait demandé à réunir sa troupe, car il avait à leur parler de ce qu’il prévoyait de faire dans le Nordland.
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Dan Surcouf
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Re: [Surcouf] Wreccum

Message par Dan Surcouf »

Surcouf s'était hissé sur l'un des cordage afin que tout le monde puisse le voir et l'entendre. Il lança un regard à l'ensemble de ses marins. Il poussa une brève expiration. C'était le moment de vérité.
-Bien. J'ai une nouvelle importante à vous annoncer. Il s'agit d'une information capitale, sur laquelle vous devrez faire un choix.
Beaucoup de capitaines n'auraient pas laissé ce choix. La cathaynisation était une pratique tristement célèbre, où des malheureux étaient embauchés malgré eux sur des navires qui partaient à l'autre bout du monde. Traditionnellement, les marin cathaynisés étaient des ivrognes récupérés dans les bars par des boscos peu scrupuleux, mais le terme pouvait quelque peut s'appliquer à des marins professionnels qu'on trompait et qu'on forçait à faire un voyage bien différent de celui annoncé au départ.
-Comme vous le savez, la Bretonnie et l'Empire sont en guerre. De cette guerre a découlé un ban de certains biens et produit des étals de ces pays. Toute personne se livrant au commerce ou au transport de ces marchandises se rendra coupable de contrebande. J'ai l'intention de me rendre coupable de tels faits.
Il laissa planer un cour silence avant de reprendre.
-En tant que capitaine, j'estime que la première vertu d'un équipage est la confiance et l'honnêteté. En tant que capitaine, je me doit de montrer l'exemple et, j'estime qu'en tant qu'hommes et femmes libres, il est de votre droit de choisir si vous voulez devenir ou non mes complices.
Il dévisagea chacun de ses marins, un part un.
-Pour ceux qui le désirent, nous vous déposerons au prochain port. Vous serez payés pour votre prestation et aurez droit à un voyage retour gratuit, si vous désirez attendre notre retour.
Il marqua une pause pour bien laisser cette information s'imprégner dans les esprits.
-Pour ceux qui veulent poursuivre l'aventure, je ne vous mentirais pas: les sanctions, si nous sommes pris, seront lourdes. Mais si nous réussissons, je vous promet un bonus substantiel: l'équipage se partagera au moins trente pourcent du bénéfice final. Retenez toutefois bien que le succès de cette entreprise reposera sur la vitesse et la discrétion. La confiance marche dans les deux sens, faites donc attention à ce que vous pouvez dire lors de nos escales.
Il posa un regard sur les deux mousse, au loin.
-Pour ceux qui auraient une quelconque turpitude morale quand à la contrebande, sachez que je vous entends, mais que je ne partagerais pas votre opinion. Je comprend que l'on puisse bannir des étals et des marchés certaines substances ou marchandises parce qu'elles sont dangereuses pour les honnêtes gens. Je n'ai pas la même compréhension lorsque ces bans ne sont dictés que par l'égo d'individu ayant une trop haute opinion d'eux même, lorsque ces individus ont décidés de se battre pour une motte de terre à peine plus grosse que le talon de ma botte et, enfin, lorsque ces individus s'engagent dans une pente glissante qui menace l'idée même du libre commerce.
Il grimpa de quelques nœuds.
-Après tout, si demain le commerce de bière est bannis dans l'Empire, combien de temps avant que le commerce du grain permettant sa fabrication ne soit concerné? Sachant que pratiquement n'importe quelle grain peut être utilisé pour fabriquer de l'alcool, combien de temps avant que cela n'impacte dramatiquement le commerce de la farine et du pain? Combien de village se retrouveront privés de nourritures alors que des fermiers peinerons à écouler leurs stocks? Combien de marins et de caravaniers se retrouverons dans la misère parce qu'une grande personne a décidé de tuer le commerce? Face à cette absurdité, la contrebande s'impose comme la seule logique.
Il se laissa pendre, en équilibre sur le cordage, se retenant seulement par une main et un pied.
-Je vous laisse tous jusqu'à la prochaine rotation pour réfléchir. Vous manifesterez votre choix auprès de maître Ingvar. Si vous avez des questions, je suis prêt à les entendre.
Dan Surcouf, Contrebandier
Profil: For 9 | End 9 | Hab 11 | Cha 11 | Int 12 | Ini 9 | Att 9 | Par 9 | Tir 9 | Foi | Mag | NA 1 | PV 70/70
Lien Fiche personnage: wiki-v2/doku.php?id=wiki:fiche_dan_surcouf

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