Certains profitaient du voyage de retour à moindre frais. D'autres avaient perdu leur équipage dans les innombrables conflits qui secouaient Port-des-Pillards, voir même dans la jungle. Le sentiment d'appartenance c'était important. Surtout dans un endroit où l'on n'aurait aucune peine à enjamber le cadavre encore chaud d'un malheureux afin d'aller se saouler.
Dans l'après-midi, alors que le soleil lui battait le front et les joues, Giovanni revint, portant une barrique. Suivaient des hommes d'équipage avec d'autres tonneaux, des livres de viande salée, du jambon, des caisses de rhum. Le plein avant le départ.
Le soir, tout ce beau monde se retrouva à une taverne. L'alcool dégoulinait des commissures des lèvres, l'air s'emplissait de la fumée de tabac. Qui savait le temps qu'il faudrait avant de retrouver un lieu de débauche et de perdition en mer ? Alors en attendant, les survivants de l'expédition savoureraient chaque gorgée.
Réveil difficile, encore une journée à entretenir et préparer la Sirène. Globalement, les figures connues semblaient se porter un peu mieux. La jungle ne serait bientôt qu'un mauvais souvenir. Un souvenir persistant dans les chairs et les esprits, mais un souvenir. Et pour citer Ivanka : "Un souvenir ça se rince avec de la gnôle et du cirage de pont."
Deux jours plus tard ils rembarquaient. Tout l'équipage à son poste, des gabiers au cuistot. Les voiles se gonflèrent au vent, le pavillon noir claqua. Des pirates s'exclamèrent, sabres en l'air, saluant la retrouvaille avec l'océan si craint et si aimé.

Les cales du navire alourdies par l'or que les boucaniers n'avaient pas encore dépensé, de nouvelles faces au sein de l'équipage. Ils retournaient à l'océan pour les semaines à venir. Vers quelle destination ? Il l'ignorait. Bien loin des Amazones dans tous les cas.