L'autre monde...

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Grissnack

L'autre monde...

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“Tout village ou hameau ne contenant aucuns signes de la bienveillance du seigneur, ou de la présence de ses ouailles sera brulé entièrement, avec ou sans ses habitants, afin d'éradiquer de façon complète l'influence grandissante du mal”. Charte de l'ordre divin, chapitre 5, ligne 2, 1243.
“Tout homme ou femme surpris à éradiquer les manifestations du mal sans appartenir au sain ordre des chasseurs sera considérer comme hérétique et subira la sentence adaptée à de tels apôtre du malin”. Charte de l'ordre divin, chapitre 4, ligne 4, 1243.
“Tout individu vivant sous la sainte protection de l'église devra contribuer à sa propre sécurité par l'intermédiaire de la coopération à la quête.” Charte de l'ordre divin, chapitre 1, ligne 16, 1243.
Dehors, la pluie tombait drue, et c'est sous les réguliers coups de tonnerre qui contribuait à l'éclairement des pages de l'imposant ouvrage ouvert sur la table au centre de l'armurerie, qu'Erika souriait au fur et à mesure qu'avançait sa lecture improvisée. Voilà deux heures qu'elle était prète à partir, mais le reste de sa compagnie ne semblait pas aussi pressés que leurs jeune soeur d'armes, ils s'attardaient à l'auberge, dégustant peut-être un dernier repas, ou profitant d'une charmante compagnie qui deviendrait une épouse improvisée à qui faire ses adieux avant de partir au purgatoire. Tout cela n'était qu'une mise en scène, Erika le savait, il n'y avait aucuns lieu de s'affoler, les hérétiques ne craignaient pas la mort. Mais ses compagnons se plaisaient à se considèrer comme de sains serviteurs de leur cause, forcés de mourir avec douleur pour elle, et c'est avec une certaine ironie qu'ils jouaient le rôle du vaillant soldat préparé à mourir mais s'attardant quelques secondes de plus avant le glorieux trépas.


Mais qu'importe, la jeune femme se plaisait à lire la chartre, posée ici afin que tout hérétique se rende compte de la bétise de leurs adversaires et des risques que celle-ci pouvait engendrer. Et c'est encore une fois, à cause de l'ignorance de cette dernière qu'un village de plus avait sombré, eux qui pensaient pouvoir venir à bout d'un tel danger avec un morceau de bois habillé de latin, il ne s'était pas révelé plus utile que le vin ayant censé servir à sa traque...La religion se plaisait à lutter contre ce qu'ils appelaient le mal à coup de ce qui pouvait entrer dans le champ lexical de la sainte bible.


Refermant le livre, serrant les sangles de son armure, Erika observa encore une fois le contenu de son sac à dos et en ressortit une fiole de sang qu'elle observa avec intéret...il était opaque, de couleur sombre et semblait déjà coagulé, c'est ce que la procédure exigeait d'utiliser en cas d'attaque de spectres. Cela devrait faire l'affaire. Pour ce qu'en avait décrit les éclaireur en tout cas, il ne s'agissait guère plus que d'une âme tourmentée laissée là et énervée par les discours enflamés des chevaliers de Dieu. Quelques minutes plus tard, les chants de l'auberge cessèrent, l'expédition était prète. Les hommes entreprirent d'enfiler leurs équipement au milieu de rires et de blagues de mauvais gout sur la bétise terrienne.


Bientôt, il fit totalement noir, l'orage était partit exprimer sa fureur plus au sud, et c'est dans une bonne ambiance qu'Erika quitta le hameau ne portant ni croix ni clocher. Marchant sur une petite route sinueuse, la compagnie progressait dans un cliquetit désordonné, certains chargaient leurs arbalètes, d'autres entreprenaient de mettre de la poudre dans leurs mousquets, d'autres d'enduire leurs lames du même liquide noire que tenait la belle jeune femme quelques instants plus tôt. Dans les ténèbres, certains savaient où regarder, d'autres se fiaient aux derniers et se contenter de marcher sur leurs pas.


Le brouhaha général fut de courtes durée, bientôt, un cri perça les ténèbres, un homme se mourrait, dans sa voix tremblante se lisait très nettement la peur, la douleur, et l'horreur engendré par une vision macabre de son propre corps. Et c'est quelques secondes après que le cri eut atteint toute son intensité qu'un craquement sec se fit entendre, et un autre, un dernier, enfin. Le coeur d'Erika s'arreta de battre, à côté d'elle, un de ses frères d'armes lui pris la main, qu'elle serra avec force...l'ambiance qui animait la compagnie semblait avoir fondu au rythme du cri qui perça l'obscurité. Plus personne n'avançait, plus personne n'osait toucher à son arme, tout le monde avait peur de la vérité. L'homme qui tenait la douce main de sa soeur poussa un long soupir et entreprit de passer devant la file, le suivant du regard, la belle jeune femme lui emboîta le pas, la compagnie suivit.

-Allumez des torches, quel que soit la chose qui a fait cela, elle sait que nous sommes ici, inutile de vouloir passer inaperçut.
L'ordre provenait de ce qui semblait être le plus vieux de l'expédition. Il ne portait pas d'armure, seulement un vieux livre dans une main, tandis que l'autre se promenait en demi-cercle sur les alentours.


On suivit ses conseils, le compagnon d'Erika alluma la sienne, lui révelant le visage de sa soeur d'arme. C'était une femme aux yeux verts et aux cheveux noirs comme un ciel étoilé. Son nez fin et sa petite bouche semblaient avoir été sculpté par les anges, et elle promenait un regard inquiet sur les alentours, avant que celui-ci aille se poser sur son frère d'arme qui la regardait en souriant, elle lui sourit en retour, puis sortit une énorme arbalète de son sac.
Les lueurs que projettait la compagnie s'heurtaient aux arbres, créants d'inquiétantes ombres au fond des bois, mais bientôt, une odeur de chair pourrie se fit sentir, puis un bourdonnement de plus en plus distinct, avant que celui ne devienne qu'une insupportable mélodie redondante, telle une ode à l'horreur diffusée par un cadavre déchiqueté accroché à un arbre précédant les ruines d'un village portant croix et clocher.


Erika baissa la tête, serrant son arbalète contre elle, elle ferma les yeux et prononça des paroles dans une langue connue uniquement de son frère d'arme qui fit exactement de même. Ce qui pendait à cet arbre n'était qu'un torse, privé du reste qui était disposé en cercle au pied de l'arbre. La tête, qui gardait un regard fixe sur les nouveaux venus était figée dans une dernière expression intense de peur et de panique.

-Fouillez le reste du village, je veux connaître le responsable de ce charnier! Ordonna l'ancètre d'un ton autoritaire qui traduisait une terreur enfouie.
Le troupeau se dispersa dans les quelques maisons composants le hameau, torches et épées fermements tenues dans la main. Après avoir posé un regard méprisant sur Erika qui tremblait encore, le vieillard entra dans les ruines, la paume tendue droit devant lui...

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