Une bête sauvage, haute comme une bâtisse, aux yeux énormes, et une gueule si grande que les feux des enfers en sortaient, s'en était récemment prise aux villageois. Habituellement, la créature ne descendait des montagnes que pour attaquer les troupeaux ou un malheureux pâtre , mais c'était la première fois, depuis ses dix ans de pillage, qu'elle s'attaquait directement aux hommes. Forte comme un géant, elle avait par sa force seule abattue un mur pour pénétrer dans l'enceinte sacrée du logis et commencée un sinistre ouvrage. Une famille entière avait été consommée sous le fil de ses griffes, quand aux quelques villageois assez courageux pour s'armer de torches et de fourches afin de descendre à l'orée de la forêt, là d'où provenaient les cris, en étaient revenus terrifiés. L'horreur, les ténèbres, les hurlements, tout cela avait poussé les miliciens improvisés à prendre leurs jambes à leur cou après avoir simplement aperçus la silhouette de la créature.
Celle ci, toute occupée à manger les restes de la maisonnée la plus en périphérie de la communauté, laissa donc à la foule désordonnée un temps de grâce durant lequel la plèbe sonna le tocsin. On réveilla pour de bon ceux au sommeil trop lourd pour leur bien, on s'en fut rapidement dans le temple des dieux, seul ouvrage de pierre dure de la communauté, assez solide, certainement, pour résister aux coups de ce monstre.
Là, tassés, les ruraux fébriles prièrent de toute leur âme leurs dieux pour que ceux ci leurs accordent leur miséricorde contre l'engeance des ténèbres qui les siégeait. Toute la nuit durant, la créature était entendue à gratter de ses pattes sur la lourde porte de chêne, puis les murs de l'établissement sacré, avant de se mettre à creuser. Elle cherchait à contourner les protections que constituaient les profondes fondations de briques du temple.
Dala, protectrice des faibles soit louée, leurs ancêtres avaient construit le bâtiment sur de profondes fondations et la bête se lassa. À l'aube, les grattements avaient cessés.
Néanmoins le bétail s'en était enfouit en panique et il fallut organiser une battue dans la vallée pour le reconduire aux étables. Or, qui était assez téméraire pour aller s'aventurer dans la plaine quand la bête pouvait encore errer dans les environs ?
C'est la que surgit Yan Xishan et ses compagnons, arrivés après l'horreur, en quête d'aide pour rebâtir leur communauté razziée par les esclavagistes.
Ils apportaient avec eux un cheval, qu'ils escomptaient troquer contre une quelconque assistance, mais on les convainc de le garder et l'en user pour réunir les bêtes. À cette condition là on accepterait de répondre à leur appel à l'aide.
Passant le reste de la journée à courser poules, vaches et moutons, le petit groupe de Yan Xishan s'acquitta diligemment de sa mission auprès des villageois, n'épargnant aucun effort pour courser les dernières bêtes traitresses, celles peu désireuses de retourner séjourner à l'étable.
Las, l'heure venue en soirée de compter les bêtes, on s'aperçut qu'il manquait à l'inspection deux vaches laitières. Un sacré pactole dont on ne pouvait se passer, raison pour laquelle on accepta d'envoyer quelques rations et paires de bras au village rasé qu'à la condition expresse que l'épopée des garçons vachers se poursuive pendant ce temps là.
Le crépuscule arrivant, le héros populaire en herbe accepta ce compromis, pourvu qu'il puisse passer la nuit sur place et ne se remettre en piste qu'à l'aurore, assisté de quelques guides locaux.
Il était hors de question de retourner dehors, en pleine nuit, quand nul dans son groupe ne connaissait avec précision les environs. C'eût été condamner à l'échec leur quête que de la poursuivre en pareille circonstances.
La nuit passant, aux premières lueurs, alors que les rayons de lumière les plus précoces s'échappaient de derrière les pics enneigés, contreforts des montagnes grises, l'expédition se mit en route.
Malgré au étrange pressentiment, le chef de file s'aventura dans les monts, quittant la vallée verte pour remonter les pentes arpentées, que celles de ces formations rocheuses immortelles qui constituaient des barrières naturelles protégeant les peuples des plaines à leur Ouest. Louée soit cette chaîne de montagnes où trônait le mont néo Hua.
Celle la même où ils se lançaient. Car le lever du jour avait révélé au loin les silhouettes des vaches sur la crête. Les créatures bovines avaient dû errer pendant un moment dans les bois plus haut avant d'aller s'aventurer au sommet pour brouter l'herbe en hauteur, plus grasse et fraîche qu'en contrebas.
Les aventuriers mirent, après plusieurs tours et détours à cause du relief, une demi journée avant de parvenir à monter jusqu'à la crête. A ce moment là les bovines s'en étaient allées en contrebas, pour s'abreuver dans un ruisseau, à une centaine de mètres d'altitude en dessous d'eux.
Le temps de les rejoindre, la pointe d'inquiétude qui s'était emparée de Yan Xishan refit surface. Si le ciel avait été dégagé durant leur montée, celui qui se pointait à l'horizon, en revanche, avait tout l'air d'une tempête qui se préparait : de gros nuages gris que le vent alpin semblait châtier dans leur direction. Que ce soit de la grêle, de la pluie ou de l'orage, le phénomène météorologique qui se dessinait au lointain allait rendre, avec certitude, la recherche et le rapatriement des bêtes au village, bien plus difficile. Il fallait donc mettre les bouchées doubles.
Avertissant ses camarades, pressant le pas, le groupe atteignit enfin les ruminantes. Ordonnant à ses compagnons de route de se saisir des bêtes, le gardien vacher improvisé, ce "cow boy", lui, inspectant du regard les environs avec suspicion.
Il était dit que par delà la crête s'étendait le territoire de chasse de la bête, mais aussi le domaine des tribus de mutants, ces êtres difformes, inférieurs, méprisés et corrompus.... Mais dont la pure extermination était proscrite. Les lois et traditions du Cathay dont se réclamaient les descendants des colons d'aujourd'hui proscrivaient l'extermination des sangs impurs. En effet, là où dans les terres barbares environnantes on persécutait avec vigueur, il était d'usage au Cathay de concentrer les... "impurs", dans des communautés reculées. On y envoyait ainsi les lépreux, les mutants nés et ceux découverts parmi les gens de bien. La corruption génique était ainsi contrôlée, et les indésirables avaient à mettre en valeur les plus mauvaises terres, celles peu fertiles et éloignées des routes commerciales. Isolées, elles ne risquaient pas de contaminer les gens de bien, et leur commerce était fermement maîtrisé au cours de rituels de purification, rarement plus d'une fois de l'an.
C'était une indignité que l'on dissimulait aux étrangers. Et à chaque progression du front de colonisation, les terres des mutants étaient soit appropriées par de nouveaux venus, soit laissées en périphérie des principaux axes de progression. Ainsi Yan Xishan savait que certaines communautés existaient dans l'arrière pays, bien qu'il n'ait jamais eu l'occasion d'entrer en contact avec elles. Il était en revanche bien plus familier avec les tribus de ce côté des montagnes, avec qui il avait fait du troc il y avait de cela cinq ans, pour obtenir des cristaux de sel en échange de statuettes d'animaux.
Les contacts entre les deux peuples étaient teintés de rituels, pour leurs protections à tous. Aussi, leur incursion de ce côté de la crête, était inhabituelle, sinon sacrilège. Il espérait que nul ne prendrait ombrage de leur venue impromptue. Ainsi était il particulièrement alerte, consacrant une majeure partie de son attention aux environs là où ses compagnons n'avaient d'yeux que pour les laitières.
Du regard, il cherchait le totem que les autochtones avaient pour habitude d'ériger à l'entrée de leur territoire. A défaut de se montrer polit pour leur souveraineté par des excuses correctes, il aurait à laisser un présent aux pieds de celui ci, pour apaiser les esprits.
C'est là que ce qui était un léger malaise vis à vis du climat présent se transforma en panique intérieure. Totem il y avait, mais celui ci avait été renversé, piétiné et désacralisé, puisque déraciné et jeté à bas dans le même ruisseau où les vaches s'abreuvaient. Shallya prenne en pitié ceux ayant commis ce sacrilège, car c'était la rage de tout le panthéon oriental qui allait s'abattre sur les fous ayant commis ce crime.
S'éloignant du groupe pour aller inspecter les dégâts, Yan Xishan fut prit d'une horreur dégoutante. Situés dans un angle mort depuis sa position précédente, il fit la découverte, non loin du totem, de monceaux de viande.
Des viandes, des tissus, des outils.... Et un petit tas de crânes près du ruisseau.
Choqué par tant de violence, malgré ce qu'il avait subit et fait subir au cours des jours passés, Yan Xishan recula vivement, dans un mouvement de terreur, avant de tomber sur le dos dans le ruisseau, le visage pâle. Entendant les pas du reste de la compagnie venir dans sa direction, il essaya de prévenir ceux ci de ne pas venir, de rester le plus loin possible de sa personne, mais aucun son ne sorti de sa bouche. Juste un mélange d'air et de repas qui fit le trajet de son estomac à sa gorge pour aller se déverser dans l'eau.
Un mélange rejoint bientôt par celui des autres villageois venus chercher les vaches.
Passée la terreur face aux morceaux de viande hachés dans tous les sens, deux fermiers mirent les bêtes à l'écart et s'apprêtèrent à repartir vers la crête pour conduire en sécurité les vaches, tandis que le reste du groupe restait sur place pour remettre en place le totem et élucider les meurtres qui avaient pris place.
Aux objections des plus intolérants et stupides du groupe, comme quoi il valait mieux ne pas toucher les choses de mutants et autres sales engeances barbares ensauvagées descendantes de dégénérés ; Yan Xishan leur fit remarquer que ces mêmes engeances vivaient non loin de leur communauté et pourraient accuser celle ci de ces saccages. Aussi convenait il de régler par eux même et à la source ces sacrilèges avant que ce ne soient des mutants dégénérés qui viennent le faire avec des torches et appendices douteux en pleine nuit.
Après plus ample inspection, il s'avéra que les morceaux de viande étaient en réalité des membres qui avaient été découpés, quand aux crânes, ceux ci étaient récents. La peau et les cheveux, de même que le sang et l'odeur de putréfaction s'en dégageaient encore. Les yeux n'avaient pas tous été mangés par les insectes. Et la plupart d'entre eux avaient un trou en lieu et place du front, de la taille de l'ongle d'un pouce.
Yan Xishan subodorait que les victimes avaient été abattues par une arquebuse. Il avait vu certains maraudeurs en faire usage sur du bétail, pour s'amuser aux dépends des éleveurs communaux.
Par ailleurs, certains membres avaient été mâchouillés, et des crânes tirés à l'écart pour être brisés en morceaux.
La suite ne fut guère difficile à deviner. Un groupe inconnu était venu dans le coin, tué des mutants, abattu le totem et usé des crânes comme d'offrandes à d'obscures divinités, à mois de juste essayer de laisser un message clair derrière soit. Puis le monstre qui avait massacré une famille entière de l'autre côté du col était arrivé dans le coin peu après, s'était nourri sur le buffet et, ayant prit goût à la viande humaine, est descendu de la montagne pour faire des ravages en contrebas.
Ces inconnus avaient donc tués, désacralisés un totem et fortement énervés les indigènes mutants, pour un but inconnu. Ils avaient fait couler le sang d'une famille entière. C'était là une grave affaire. Autant les vies des mutants ne pesaient guère, il y avait parmi ceux ci des parents à eux, des ancêtres. Ils accueillaient les lépreux. Ils pratiquaient le troc. Ils partageaient les coutumes des gens de bien. Ils leurs étaient inférieurs, mais, quelque part, similaires. S'en prendre aux humanoïde abâtardis par les dieux pouvait s'apparenter à lever le bras contre du bétail des villages contrebas. Et cela nécessitait une réponse appropriée.
Fort heureusement, on avait dans le groupe une personne capable de pister. Celle ci fut capable remonter la trace des inconnus. Une troupe d'une trentaine d'individus environ. Bien trop pour eux. Ceux ci s'étaient dirigés vers les bois en contrebas, de maigres arbustes, survivant sur la face ingrate des montagnes.
Plus loin on entrait dans une zone de tourbières, mais les explorateurs en herbe ne s'aventurèrent guère jusque là. Le climat local tourna rapidement à l'orage, comme de redouté, et l'on s'en fut rapidement à la recherche d'un abri avec qu'une pluie torrentielle ne vint les rincer jusqu'à l'os.
Fortuitement, la personne chargée de pister les meurtriers avait distinguée au loin un massif rocheux qui semblait accueillir des grottes. Le temps que l'on s'y rendre, les première gouttelettes avaient débutées à tremper leurs atours.
S'échinant à trouver de quoi faire du feu pour y voir plus clair, les aventuriers débutants furent complètement pris par surprise lorsqu'on leur sauta à la gorge. N'ayant même pas l'occasion de se défendre, il furent rapidement maîtrisés dans les ténèbres de la grotte. Le bruit infernal des chutes d'eau qui tombaient à l'extérieur avait complètement couvert l'approche du groupe les ayant assailli. De plus, leurs silhouettes se découpaient encore quelque peu à l'entré de la grotte, illuminées par l'extrêmement relative luminosité du jour ; là ou celles de l'ennemi étaient complètement masquées par les ténèbres de la grotte.
L'adversaire avait eu le temps d'adapter sa vision à l'obscurité. Pas eux. En conséquence de quoi, en l'espace de quelques battements de cœur, ils avaient été désarmés, maîtrisés et incapacités.
Qui.... Qui est là !? Vous êtes qui !? demanda tout fort et paniqué un Yan Xishan qui n'en menait pas large du tout.
Quelqu'un offrit soudainement une source de lumière, à l'aide d'une bougie ou d'une lampe.
Las, c'était une bien pauvre décision que celle ci puisque le spectacle qui s'offrit alors au colon immobilisé avait tout pour le terroriser.
Un être fait d'os et de plumes, aux dents longues et tranchantes, doté d'un regard de sang, ne demandant qu'à voir celui ci couler, et tenant dans une main une lame rougeoyante du liquide carmin, s'approchait de lui. Son torse était recouvert de stries vertes et rouges, certainement là un travail impie pour solliciter les faveurs de quelques démons.
Et cet être terrifiant n'était pas seuls. Ses comparses, véritables démons invoqués du fin fond des enfers, étaient également recouverts de sang sur leurs corps. Leurs yeux avaient laissés place à des puits ténébreux desquels de malveillantes lumières les raillaient. Leurs bras étaient le fruit d'assemblages issus de l'esprit dérangé d'un alchimiste fou, puisque ça et là ceux ci avaient prit des teintes venant brutalement rompre la continuité de la teinture de leur peau. Pire encore, leur cuir était par endroit frappé de runes dont l'altérité échappait à l'esprit affaiblit de Yan Xishan. Et si la majorité d'entre eux étaient dépourvus de cheveux, sacrilège ultime pour les dignes descendants des dragons de Cathay, le pire restait à venir !
Ces monstruosités avaient invoquées un démon, un vrai et réel démon, donc le corps astral avait été par quelque maléfice rattaché au matériel. Celui ci, la chevelure enflammée, comme il sied à un prince des sept mondes inférieurs, dégageait par sa simple présence une aura maladive et toxique, qui venait assombrir sa personne, rendant la simple observation de son visage tâche impossible à cause des ténèbres mortelles qui happaient littéralement la lumière environnante.
Avant qu'aucune de ces horreurs ne puisse s'approcher de lui pour lui faire subir les dieux seuls savaient quoi, le prisonnier tenta de toute ses forces de ses débattre pour échapper à l'emprise qui était exercée sur sa personne.... En vain. Ce n'est qu'alors qu'il paya attention à celle ci.
Ce n'étaient guère des liens qui le retenaient.... Mais autre chose. Des tentacules.
Retenu contre son gré par pareille altérité, les nerfs de Yan Xishan lâchèrent pour de bon.
AAAAAAAAAAAAAH !!!!!!! A L'AIDE !!! A L'AIDE !!! A L'AIDE !!! A L'AIDE !!! AU SECOURS !!!! AHHHHHHH !!!!! AHHHHHHHGLLLLLlll....
Les cris que pu pousser le fier fils du dragon, celui là même qui avait lutté contre le destin pour se tirer de sa maisonnée en cendres, vainqueur des esclavagistes, terreur des barbares de l'Est, sauveur de l'Ouest ; cet homme là, la bouche bloquée, se mis à gémir comme un enfant et à faire sous lui. La terreur était telle qu'il s'évanouit sous le choc, la bave aux lèvres.
Une réaction tout à fait partagée par ses autres compagnons, bien qu'à des degrés divers. Untel par exemple était prostré au sol, en position fœtale. Un autre vomit tout simplement. Mais nul n'était épargné par l'horreur de l'altérité présentée.
Ce n'est qu'un moment plus tard que le meneur sorti de son coma. Le regard nauséeux. La première chose qu'il vit fut la lumière d'un feu. Il sentit l'odeur de nourriture que l'on préparait. Puis sa vision s'éclaira.
Les courageuses âmes qui l'avaient accompagné étaient là. Libres. Et il y avait des nouveaux venus. Des gens qu'il ne connaissait pas. Quelqu'un lui tendit un bol chaud qu'il accepta par réflexe et dont il prit une gorgée.
D'étranges personnes que celles qui étaient présentes. Il semblait y avoir une discussion bon enfant, les deux groupes ayant aisément été mélangés.
Avec un instant passé à cogiter en sirotant la soupe, Yan Xishan réalisa que quelque chose dans ce tableau ne collait pas. Une petite minute et ça y est, son esprit avait mit le doigt dessus.
Certains occupants des lieux étaient des mutants. Un bras de trop. Ou un œil. Ou carrément une constitution tout à fait étrangère au genre humain. Comme un squelette externe, simplement dissimulé par un plaid.
L'ambiance était au calme.
Les armes étaient au fourreau.
Tout ceci n'avait été qu'un terrible malentendu.
Les mutants les avaient pris pour une troupe de tueurs psychopathes qui était venue les razzier de cela il y avait quelques jours. Dans le temps où ils avaient été inconscients, l'un de leurs membres avait reconnu un villageois parmi eux, et convaincu le reste des mutants de ne pas les passer par les armes sur l'instant.
Yan Xishan engagea une discussion avec leur chef. Celui ci dispersa immédiatement les craintes les plus terribles de Yan Xishan. Non ils n'étaient pas des invocateurs de démons ou quoique ce soit d'autre. Ils s'étaient juste colorés les corps de peintures de guerre pour effrayer l'ennemi. Ils s'étaient vêtus de masques pour donner un aspect d'autant plus terrifiant à l'adversaire. Et s'étaient coupés les cheveux pour montrer leur détermination à lutter contre les intrus.
La pluie étant toujours aussi forte dehors, on décida de partager la grotte pour la nuit, et les deux groupes iraient porter le fer contre les intrus le lendemain. Ils s'étaient mystérieusement terrés dans de vieilles ruines souterraines depuis plusieurs jours de cela.
En signe de bonne coopération pour les combats à venir, les chefs des deux groupes se partagèrent une inhalation de vapeur, tandis que le shaman mutant concocta une décoction de prédiction qu'il fit boire à chacun, afin de pouvoir deviner ce que les dieux montreraient des combats à chacun.
La viande de serpent qui accompagnait le bouillon avait été très appréciée.
Le lendemain, tôt, tous se levèrent. On se peignit pour avoir des tatouages guerriers sur le cuir et se protéger des projectiles des lâches et hérétiques. Yan Xishan et son groupe lui même acceptèrent de recevoir les peintures de guerres et de faire brûler une partie de leurs cheveux, en présent aux dieux pour espérer recevoir leur grâce et la victoire.
En vue des ruines troglodytes, une légère tension s'empara du groupe, mais nul adversaire à percer des sagaies d'os des mutants. Les pilleurs ne mettaient guère de sentinelles en faction en surface.
Ils pénétrèrent dans les tombeaux de pierre et de terre souterrains, en file indienne, main droite sur l'épaule de l'homme de tête, une main sur leur épaule à eux, et ainsi de suite, ceux étant le plus en avant ayant "don" de la nyctalopie, ils ouvraient la marche en sécurité, sans nécessiter l'allumage d'une lampe à huile dont la lumière trahirait leur présence.
En silence, ils progressèrent jusqu'à un autel, où des crânes de mutants avaient été entreposés. Les guides furent perturbés un moment, hésitant à ôter ceux ci de cet autel sacrilège pour montrer un respect correct à leurs morts, mais ils en furent dissuadés, lorsqu'ils s’aperçurent que c'était un piège, des fils et d'étranges boules de métal étant fixées à des cheveux.
Personne n'avait d'idée sur les mécanismes nécessaires pour désamorcer le piège, aussi fut il laissé en place.
Il y eu d'autres saloperies placées sur leur chemin. Des fils tendus, reliés à d'autres boules de métal.
Puis à un moment, la colonne stoppa, les mutants de tête ayant aperçus au loin des lumières pourpres et rubis. Nul doute que l'on approchait de l'ennemi. On en entendait même sa voix.
Envoyant le chasseur du groupe plus en avant pour voir de quoi il s'agissait, Yan Xishan apprit qu'une sorte de cercle ou d'arène voyait se dérouler une étrange cérémonie.
Il y avait des hommes en jupettes rouges et vertes, pas d'arquebuses, uniquement des matraques en bois et métal, des cadavres, un dessin géométrique au centre de la pièce et une statuettes en or au centre du dessin. Et pas d'arquebuses. Chose étrange, les pilleurs chantaient. Un chant d'une altérité totale et sinistre.
D'un signe de tête, Yan Xishan fit comprendre au chef des mutants qu'il était prêt à y aller. Tous adressèrent une dernière prière silencieuse aux dieux, le shaman alluma les mèches placées dans ses cheveux, on porta aux visages les masques guerriers puis, armes à la main, on procéda.
Silencieusement, le groupe entra dans la salle puis, lorsque l'un des pilleurs sembla détecter leur approche, les mutants et fils du dragon abandonnèrent toute discrétion et chargèrent comme des déments sur les étrangers, armes à la mains et beuglant comme des possédés.
AHHHHHHH MORT !!!!! TITH-ONAKA !!!!
Ce à quoi, dans un élan similaire, les étrangers répondirent par un étrange PER GLORIOUS GAESAR !!!! IMMUNDO MORTEM DISSOLUTI !!!!
La suite fut, simplement, une affaire de violence. Des sagaies furent lancées sur les hommes aux jupettes, tandis que ceux ci firent usage d'une étrange magie où, de leurs mains, des explosions et de la fumée apparurent, sans pour autant stopper la charge furieuse des indigènes.
Yan Xishan chargea furieusement sur le premier ennemi qu'il rencontra. Il lui enfonça furieusement sa lance dans le ventre, tandis que son adversaire, percé, essaya de lui saisir les cheveux, en vain. La lance bloquée dans la chaire de son ennemi, le combattant bloqua d'un geste vif la dague que le pilleur essaya de lui planter dans le cou. Les deux luttèrent férocement, mais, affaiblit par le coup de lance, l'adrénaline ne permettant pas de compenser le coup prit, son adversaire fini par lâcher prise.
Prit d'une violence soudaine, Yan Xishan s'empara de la dague de son adversaire à moitié mort pour finir le travail et plus encore, allant jusqu'à lui ouvrir la cage thoracique pour en arracher le cœur. Dans son esprit noyé par la violence, le désire de nuire à autrui, le descendant du dragon aurait certainement mangé le morceau de viande chaude et battante s'il n'avait pas été bousculé par le corps d'un mutant percé de trous.
Se relevant, Yan Xishan retourna se jeter dans la mêlée.
Lorsque les brumes de violence évacuèrent enfin son cerveau, il constata que nul ennemi ne restait debout sur place. D'ailleurs, de nombreux de ses alliés ne tenaient plus debout. Certains se trainaient au sol, les entrailles ouvertes. D'autres récoltaient les scalp des ennemis morts, avant de leur couper maladroitement la tête, en vengeance pour le manque de respect qui avait été adressé aux corps de leurs coreligionnaires.
Il fallu achever les mourants, sauver les blessés qui pouvaient encore avoir une chance de survie, désacraliser les corps de leurs ennemis, enterrer ceux des alliés.... Puis on pilla bien proprement le camp des barbares qui étaient venus commettre moult violence sur ces terres.
Les mutants prirent des vivres, pièces d'armures et outils, tandis que Yan Xishan et ses compagnons emportèrent avec eux les étranges matraques de fer et de bois de ces hommes à jupettes, et l'étrange statuette qui trônait au centre du dessin géométrique. C'était celle d'un monstre humanoïde avec des cornes sur un trône rouge, assis. Très certainement une statuette de Tith-Onaka, le héros-dieu guerrier, que les pilleurs avaient dérobés quelque part. Un objet incontestablement sacré qui méritait d'être entreposé dans un lieu saint, à n'en pas douter.
Il fut emporté dans les sacoches de Yan Xishan et les siens, pour être entreposé dans le nouveau temple de son village, une fois celui ci reconstruit. Car après tout, il avait très certainement sa place aux côtés du sceptique, l'énigmatique esprit qui avait si bien sût conseiller leurs ancêtres dans leur migration vers l'Ouest et les persécutions sur les suivants de Tsien-Tsien.....