« Pas le temps de niaiser alors, hop hop. »
Elle fit un signe de tête à Kehem pour qu’il se mette en route. Et si elle commença un petit trot vers les tentes, elle se mit soudainement à sprinter à toute allure pour atteindre la forêt. Coucha des branchages en sautant au travers. Elle bondit habilement d’une ronce à l’autre, puis s’écrasa contre un tronc. Elle se retourna alors seulement pour tendre sa main, se saisir de Kehem, et tirer l’interprète pour qu’il puisse bien se cacher à côté d’elle – elle eut la politesse de laisser Akisha se trouver une couverture toute seule.
« On va attendre deux minutes », chuchota-t-elle, « puis on se bouge. »
De là où les Elfes se tenaient, ils n’apercevaient du camp qu’une simple tente à la toile légèrement balayée par la brise. Ils comprenaient ce qui se passait surtout par l’ouïe. Quelques sifflets, des aboiements enragés de molosses, un hennissement de cheval.
« Bien… On va voir si votre instinct était le bon, maîtresse. »
Elle se leva à nouveau, passa sous une branche, et enjoignit Kehem de la suivre. Elle lui chuchota quelque chose tout en posant une main sur sa nuque. Tout comme elle avait su guider Akisha pour dévaler à toute vitesse le terrain accidenté, elle s’occupait à présent de s’assurer que Kehem suive la cadence et parvienne à se déplacer au milieu des bois.
Il était difficile de s’arrêter pour observer si les Norses avaient mordu à l’hameçon. C’étaient juste les oreilles affûtées qui pouvaient leur servir. Des chiens aboyaient et geignaient à bonne distance.
Reprenant le campement à revers, Kehem, Rekhilve et Akisha purent donc apercevoir le centre du camp, camouflés par la légère frondaison de quelques arbres. Rekhilve demanda à ses camarades de se mettre ventre à terre, et, rampant jusqu’aux feuillages, les Elfes purent observer si leur stratagème avait fonctionné.
Plissant des yeux, Akisha découvrit des Norses en armure se saisir d’épées courtes. Sans un mot, sans un cri, l’un tira les cheveux blonds de la jeune thrall et lui planta la lame dans sa gorge, la tuant sur le coup, tandis qu’un collègue écrasa la tête de l’autre à terre avant de lui mettre l’épée dans le gras de son ventre.
Il n’y avait bien qu’Akisha qui avait pu croire que ces Norses-là formaient une « patrouille conventionnelle ». Parce qu’alors que les Maraudeurs terminaient leur assassinat, ils se figèrent et semblèrent se poster dans une parodie de garde-à-vous lorsque les pans d’une tente se levèrent. Et un homme gigantesque, sa peau recouverte de la tête aux pieds par des pièces d’armure niellées, noircies par un sulfure trop élaboré pour la technologie primitive de la Norsca, fit le tour du centre du camp.
« Eh bien ça, c’est un Guerrier du Chaos, maîtresse. »
Le-dit Guerrier parla. Sa voix semblait être étonnamment éthérée, résonnant dans le casque à cornes vissé à sa tête.
« Il raconte quoi ?
– Je sais pas. Il… Il parle pas Norse…
Je crois qu’il parle dans la Langue Noire. »
Rekhilve leva un sourcil vers Akisha, attendant ses ordres.