Plusieurs mois s’étaient écoulés depuis que les maraudeurs mercenaires auxquels les Kadinzk avaient eu recours avaient quitté le village, emportant avec eux deux esclaves, Zack Tokavaleskï et le cruel Boris. Ni l’un, ni l’autre n’avaient eu d’occasion de s’enfuir, tant le groupe d’une trentaine d’hommes étaient vigilants. Ils avaient surexploité leurs deux esclaves sur le chemin, leur délégant la totalité des tâches qu’ils jugeaient « inférieures », car féminines selon eux, ou tout simplement trop embêtantes, à savoir la cuisine, le lavage du linge, diverses réparations de matériel, et plus généralement tout ce qu’ils n’avaient pas envie de faire eux-mêmes. Le groupe n’ayant pas toujours de contrats, ils vagabondaient au hasard, pillant au passage ce dont ils avaient besoin pour vivre si personne ne les embauchait. En chemin, Zack avait eu tout le temps de parfaire sa connaissance du langage norse, en écoutant les mercenaires parler entre eux, ou lors de ses rares conversations avec Boris. Ce dernier, bien qu’ayant trahi ses camarades esclaves et étant directement responsable de leur situation actuelle, ruminait encore la trahison de monsieur Kadinzk et l’échec de son plan si parfait qui aurait dû le mener à la liberté et à la richesse. Tel avait été pris celui qui croyait prendre. Le Tokavaleskï put constater que la brute semblait dépourvue de toute compassion, car il ne regrettait absolument pas les nombreux morts innocents qu’il avait causés. Seul son échec personnel semblait lui être insupportable, d’autant plus que sa situation avec les mercenaires était beaucoup moins bonne que celle dont il jouissait auprès de la famille Grouchenko. On voyait néanmoins dans ses yeux que le norse n’avait pas renoncé à essayer de se libérer et qu’il n’attendait qu’une occasion pour s’enfuir.
Leurs pérégrinations les avaient conduits au Sud, jusqu’aux côtes de Norsca. C’est là, au sommet d’une petite colline surplombant la mer au Sud et un village fortifié à l’Ouest, que les mercenaires s’étaient arrêtés pour bivouaquer. Pendant que la majorité des maraudeurs et leurs deux esclaves montaient le camp, une petite délégation de mercenaires allait proposer leurs services dans le village en contrebas. Comme ils n’étaient guère plus d’une trentaine en tout, ils ne pouvaient pas espérer attaquer le village, dont la population était bien plus nombreuse et qui de plus disposait d’une solide clôture de bois l’entourant intégralement, doublée d’un fossé garni de pieux acérés.
Les soldats de fortune ne sauraient que le lendemain, au retour des hommes envoyés, si oui ou non ils seraient embauchés pour un nouveau contrat. Cependant, ils avaient bon espoir, car le petit port semblait rempli de drakkars norses prêts à faire voile pour un long voyage. Zack, qui plus petit avait été le troisième fils de sa famille de petits nobles kislévites, avait reçu une certaine éducation et disposait d’assez de culture générale pour ne pas ignorer que la saison était idéale pour les départs en mer, et que les pirates norses étaient très réputés pour leurs expéditions sur toutes les côtes du monde connu, tant celles de Kislev, que celles de l’Empire, de la Bretonnie ou même du lointain nouveau monde qu’ils étaient d’ailleurs les premiers à avoir colonisé. Il savait également –tout comme ses maîtres- que dans ce genre d’expéditions guerrières, quelques hommes de plus ne seraient pas de trop et qu’il était peu probable que les mercenaires soient refusés. Hélas, les dangers d’une expédition maritime étaient multiples : la noyade, l’attaque d’un monstre marin, mais également la rencontre avec les flottes des autres nations comme celles de l’Empire et des elfes…
Une fois les tentes montées et les mercenaires rassasiés, Zack et Boris se retrouvèrent comme d’habitude attachés à un arbre par des chaînes qui leur laissaient quelques mètres de liberté de mouvement. Ils n’avaient qu’une petite toile de tente pour les protéger du froid et des intempéries. Même en été, Norsca était relativement fraiche, mais ils avaient vécu bien pire.