Une grande ombre surgit d'un coup, arc en main, à l'entrée principale de cette tour si grisâtre.
Deux petits yeux, animés d'un vert plutôt terni, voire vitreux, balayent désormais le rez-de-chaussée avec une certaine méfiance.
Des morts éparpillés, des restes de nourriture fétides, du sang séché, des murs de pierre pourrissants, et des meubles bien trop fêlés: tout indiquait que la Déchéance s'était emparée de ces lieux ; tout indiquait qu'il n'y avait plus rien à tirer de cet endroit, plus rien à faire ou à espérer.
Et pourtant, quelques secondes plus tard, on entend des bruits de pas qui se veulent furtifs, qui frôlent les parois, à moitié étouffés par une moquette, mais qui raisonnent quand même dans l'endroit, lui redonnant discrètement un semblant de vie et d'animation.
Malgré la pénombre envahissante, malgré l'atmosphère pesante et morbide, on pouvait entrevoir une obscure silhouette, se faufilant tantôt dans un couloir glauque, tantôt dans une salle en ruine. Ses grands pas la faisaient passer rapidement d'une pièce à l'autre, tandis que ses mains fouillaient le mobilier poussiéreux, ou bien palpaient silencieusement les cadavres, à la recherche du moindre objet de valeur.
Mais rien n'atterrit entre ses doigts, étrangement, sinon quelques cendres et débris, aussitôt dispersés dans le vide.
Alors, au bout de quelques instants, ce fantôme encapuché se redirigea vers d'anciens escaliers, avant d'en monter les nombreuses marches, une par une, à pas de loup, vers le premier étage.
Deux dépouilles, déjà malmenées dans leur mort, virent leur repos perturbé par cette ombre, cette fouine à forme humaine, louvoyant entre une table fissurée, des bancs renversés et des reliques de vaisselle, pour enfin venir les toucher, et tâter leurs vêtements ; cependant, encore une fois, rien ne sort, rien ne tombe. Rien à signaler.
Ainsi, dans un silence de plus en plus frustrant, cette silhouette rôdeuse finit par se hisser au second étage, décidément, espérant trouver quelque chose, dans cette tour que la Ruine menaçait de plus en plus. Et, justement, elle tomba bien sur quelque chose.
À peine parvint-elle à ce palier qu'elle tressaillit, soudain, avant de se raidir complètement ; son regard est désormais fiévreux, fixé, happé par ce qu'il voit devant lui. Voilà que ses jambes et ses bras se mettent à trembler sans raison, ses mains pâles partent d'un coup s'agripper sur la rambarde ; l'ombre manque de tomber, ses pieds ne réagissent plus, ses genoux commencent à se plier ; sous son front perlant de sueur, sous ses yeux troubles et derrière son foulard noir, ses lèvres se déforment, se tordent dans une grimace inquiétante ; mais elles finissent par s'entrouvrir, formant alors un sourire.... dérangé, large, tellement large qu'il coupe en deux son visage émacié.
Au milieu d'un charnier de défunts, on entend un petit ricanement qui se met à raisonner. Un rire à moitié étouffé, plus que nerveux, atrocement forcé ; un rire qui n'en est pas vraiment un, animé par une voix que l'appréhension, écrasante, rend fébrile au dernier degré.
Des cadavres ;
encore des cadavres ;
toujours des cadavres ;
LA-MORT-PARTOUT-BORDEL!!
Toujours accroché à la balustrade de l'escalier, Johannes avait son cœur qui palpitait entre ses tempes.
Son ricanement s'était évanoui, laissant place à des halètements rapides et saccadés, sortant de ses lèvres à chaque seconde. Ses yeux, ses pensées et même son esprit continuaient d'être braqués sur les six charognes qui lui faisaient face, les observant comme si elles allaient se relever, d'un instant à l'autre, pour venir le dévorer....Sauf qu'il ne se passe rien, en fait....Ces gens sont morts. C'est tout. C'est normal.
Constatant cette conclusion logique et implacable, l'âme du hors-la-loi arrêta de se ruer sur les sentiers sinueux de la Peur-Panique ; peu à peu, elle revint dans le droit chemin, parfaitement rectiligne, d'une pensée rationnelle et raisonnée.
Son souffle devient plus long, son cœur retourne sagement dans sa poitrine, son sang se refroidit, ses bras ne tremblent plus et ses jambes lui répondent à nouveau.
"P'tain mais...mais merde...i's'sont pas loupés ces cons." finit-il par murmurer dans le vide.
En plus, ce n'était quand même pas la première fois que le bandit voyait un cadavre.
Il avait déjà vu des dépouilles d'animaux depuis son enfance ; il avait aussi vu des corps de nains et de gobelins dans les Frontalières ; il avait aperçu la carcasse d'un chevalier dans la forêt d'Arden, avant d'être confronté à d'autres morts - réanimés ceux-là - lors de ses premiers temps passés dans ce duché sordide ; sans parler du village de pégus qu'on avait complètement massacrés et...l'égorgé de l'écurie.
Pourquoi Johannes venait de paniquer comme ça?
Il n'eut pas vraiment le temps d'y répondre. Une quinte de toux s'empara brutalement de lui ; une toux, si intense et amplifiée par les miasmes, qu'elle le força même à retirer son masque, pendant quelques secondes, histoire de prendre un peu d'air, aussi vicié soit-il. Pas bon signe.
Mais il faut continuer, malgré tout. Johannes ne s'est pas traumatisé la gueule pour rien.
Finissant par se remettre de ses crachotements, le rôdeur posa pour de bon ses pieds au second étage, et s'approcha tout d'abord de ce petit charnier. En effet, on aurait dit que les macchabés lui faisaient de l'œil, peut-être parce que des armes se trouvaient prés d'eux...ou bien à cause du fait qu'ils aient du sang-bleu, avec leurs vêtements soyeux et aux coutures élaborées.
Lorsque le hors-la-loi, désormais devant ces cadavres, remarqua leur ancienne condition, les traits de son visage se tirèrent, légèrement, et son regard se noircit de plus en plus. Subitement, il ne put s'empêcher de donner quelques coups de pieds, assez mollement, dans la tête putréfiée de l'un d'entre eux. Un peu plus, et il leur aurait craché dessus.
Mérité.
La mort de ces salauds était méritée.
Ça leur apprendra à faire les snobinards, à vouloir rabaisser tout ce qui n'est pas aussi bien habillé ou maniéré qu'eux ; ça leur apprendra, à vouloir se gaver comme des gros porcs pendant que le village crève la dalle. Un bon
"chevalier", un bon aristo, c'est un aristo mort, ou qui ne va pas tarder à crever, ou bien qui s'en va tuer d'autres collègues. Ouaip, qu'ils se butent entre eux d'ailleurs ; tant que le sang-bleu coule au final, c'est bon pour Johannes.
Toutefois, la haine viscérale qu'éprouvait l'ombre pour les bien-nés de Bretonnie s'atténua peu à peu, retournant se tapir, presque malgré elle, dans les tréfonds de son esprit. Ses yeux et son pragmatisme lui faisaient maintenant voir les quelques lames et gros bâtons qui traînaient là, tranquillement, à côté de leurs dernières victimes.
Se penchant sur ces armes pendant quelques instants, le bandit encapuché les prit entre ses mains, une par une. Du pommeau à la pointe, en passant par le tranchant ou la masse, il les observa attentivement, remarquant ici une épée trop rouillée, constatant là une miséricorde trop émoussée, rejetant au sol un bâton trop craquelé....jusqu'à tomber sur un instrument particulier: un gourdin, pas si neuf, mais pas si abimé que ça non plus ; c'était sûrement le moins usé d'entre tous, et il pouvait encore faire du dégât.
Johannes finit donc par s'en emparer, faisant quelques petits moulinets avec, histoire d'essayer sa maniabilité. Il finit par le prendre avec lui, ayant l'idée de l'utiliser comme une seconde arme avec son couteau de chasse.
Une fois cette première prise faite, le rôdeur tourna sa tête vers une sorte de bureau qui se tenait encore là, fier et solitaire, au beau milieu de cette mer de morts et de sang de bœuf. C'était désormais à son tour d'obtenir les attentions indiscrètes de Johannes.
Cependant, avant de le fouiller le meuble, ce fut -encore- un cadavre qui réussit à dévier son regard terni.
Un mort à la tête particulièrement...intrigante.
C'est en tout cas ce que pensa le hors-la-loi, lorsqu'il prit cette charogne à la gorge, tout en observant silencieusement sa face difforme, ses yeux complètement déviants, mais aussi son menton osseux et tout pointu.
Oh oui, une belle gueule de petit mutant vicelard.
D'un coup, on peut voir le brigand qui relâche la dépouille, la laissant tomber sur le plancher, avant de la repositionner sur le ventre ; le voilà qui pose un genoux sur son dos, pour bien immobiliser le corps ; une de ses mains agrippe alors la tête morte par les cheveux, la ramenant en arrière, tandis qu'une dague sort lentement de son étui.
Ce qui commence comme un simple égorgement se termine par une décapitation complète. Le coutelas tranche patiemment la chair du cou et les artères, pour finir avec un
léger craquement d'os, qui termine d'arracher sèchement la caboche.
Johannes se relève, un mince sourire se dessine sous son foulard et ses yeux vitreux ; il tient maintenant cette fameuse face mutante entre ses doigts. Il l'attache ensuite sur lui, avec un peu de corde, au niveau de sa taille.
Un joli petit souvenir, et un trophée qui sera peut-être utile pour plus tard. Ça lui refait presque sa journée.
Il ne manque plus qu'à trouver quelque chose d'intéressant dans ce meuble. Et le problème, c'est qu'un tas de papiers et de pattes de mouche, ça ne l'est pas forcément, surtout quand on est un inculte illettré comme Johannes.
Mais voilà, Johannes à beau être le con d'un autre, il a beau être un personnage pétri de préjugés méprisants, racistes, voire haineux et paranoïaques, ça lui arrive -quelques fois dans le mois, de réfléchir sur ce qui l'entoure et sur ce qu'il tient dans ses mains.
Oui, en fait, dans ce cas-là, face à cette paperasse, le renégat est
surtout le con d'un autre, d'un autre qui pourrait lire ces écritures à sa place. Peut-être que ces feuilles contiennent des informations précieuses, qui n'attendent que d'être lues par un intellectuel instruit, sachant donner de bonnes indications au brigand pour la suite de ses actions. Après, ce genre de lettré ne doit sûrement pas courir les rues et les marais du coin.
Il faudrait prendre du temps pour en débusquer un: chose que le rôdeur pensait possible.
Ainsi, dans un grand mouvement de bras, le bandit pillard empile toutes les feuilles, les prend, et les met dans son grand sac. Il récupère même en passant deux couteaux stylisés qui traînaient à côté, et qui doivent aussi valoir leurs pesants en pistoles.
Les pas du hors-la-loi se font de plus en plus lourds, traînants ; sa silhouette s'incline un peu, sous le poids de la fatigue ; son attitude, au départ méfiante et précautionneuse, devient désormais moins vigilante, émoussée par l'épuisement. Tandis qu'il monte lentement vers le troisième étage, un sentiment s'insinue petit à petit dans son esprit: celui d'être en quelque sorte
"chez lui".
En effet, cette tour sinistre peut faire peur au novice, à l'aventurier trop scrupuleux, voire à Johannes, ou bien au paysan superstitieux. Seulement, une fois la frousse disparue, et tandis qu'il pénètre dans les pièces pourrissantes de ce palier saccagé, le bandit trouve cet endroit de plus en plus....reposant.
Alors oui, un cadavre de mioche ou de donzelle, c'est moche et ça pue ; mais au moins, tous ces morts restent sagement dans leur silence ; ils ferment bien leurs gueules, et ne lui posent pas des tas de questions plus futiles les unes que les autres, du genre:
"Oh là là mais c'est quoi ton nom? Et d'où tu viens? Et ils sont tous comme toi là-bas? Et il y a quoi sous ta capuche?"....Non.
D'ailleurs, le rôdeur, en passant devant eux, ne leur accorde qu'un simple regard, un coup d'œil où la curiosité côtoie la satisfaction, avant qu'une pointe de déception, froide, ne commence à luire au fond de ses yeux.
Encore une fois: Mérité. Mérité mais....Dommage. Ils n'ont rien sur eux.
Ah, si, en fait ; ils ont quelque chose, mais
à côté d'eux.
Johannes s'accroupit, passant ses mains sur le plancher poussiéreux, avant de récupérer un collier un peu teinté, et trois petites bagues. Malheureusement pour lui, les pierreries qui ornent ces bijoux sont soit fêlées, soit complètement pétées et répandues en mille morceaux sur le sol. Qui voudrait bien de toutes ces breloques? Les joailliers de Barak Varr peut-être? Bah, ils sont trop loin pour le coup.
Au milieu d'une chambre assombrie par la tombée du jour, l'ombre encapuchonnée finit par se relever, et balance d'un coup la chaîne patinée en l'air, puis fourre les chevalières dans les poches de ses braies. Peut-être qu'il pourra en tirer quelque chose.
Ses enjambées finissent par le mener dans la dernière chambre, celle du chef. Normalement, il devrait rester une ou deux choses intéressantes dans cette pièce-là. Après tout, jusque ici, les trouvailles ont été plutôt satisfaisantes pour lui. Il ne lui manquait plus qu'à...
Le hors-la-loi s'arrête net, brutalement. Il tourne sa tête, et ses yeux s'ouvrent en grand, devenant aussi ronds que ceux d'un hibou.
Il vient d'apercevoir l'armoire de la salle, ou, plus précisément,
le type qu'on avait crucifié à l'horizontale, sur cette fameuse armoire.
Sa main laisse tomber son grand sac verdâtre sur le plancher ; ses pieds le conduisent, lentement, vers cette charogne profanée ; son regard, où l'on perçoit désormais une étincelle inquiétante, ne cesse de la fixer ; il ne s'en détache pas, à aucun instant, même lorsque tous les stigmates morbides, qui parcourent et martyrisent encore cette carcasse, se dévoilent franchement.
Voilà que l'œil du bandit se rétrécit, puis se plisse, toujours rivé sur le corps. Sa tête commence à hocher, doucement, plusieurs fois et en silence.
Aucun doute, on sentait que les gonzes qui avaient aligné ce sang-bleu étaient....consciencieux. Oui,
consciencieux: c'était là le mot parfait pour définir ce qui s'était passé dans cette tour. Ces types ne transpiraient pas vraiment le professionnalisme, ils ne cherchaient pas à se faire une réputation ou à impressionner le milieu ; ces gens préféraient une simplicité toute basique, rudimentaire même, mais efficace.
Oui, quand on leur demandait de faire quelque chose, ils le faisaient, point ; ils allaient à l'essentiel, donc au chef, sans trop s'attarder dans les détails de l'affaire. Et du coup, inévitablement, le seul petit élément, la seule ombre qui assombrissait, à peine, ce massacre plus que correct, c'était....peut-être un manque d'imagination, plus ou moins volontaire de leur part.
Deoudo et sa bande. Ils avaient fait tout ça, Johannes en mettrait sa bite à couper. C'étaient eux, c'était sûr.
Par contre, pour ce qui concerne les symboles divins de cette crucifixion, les certitudes du rôdeur s'écroulèrent d'un coup, semblant malmenées par l'Oubli et l'Indifférence. Toutefois, tant bien que mal, entre les replis vaporeux de son esprit, sa mémoire finit par sortir quelque chose.
Deux syllabes.
Taal?
Mais où est le lien? Quel est le rapport entre le dieu de la nature sauvage -si c'est bien lui, et la torture à mort d'un noble?
Peut-être une tradition de l'équipe, probablement une coutume du "Sud", des "Monts", comme disait l'autre, hier.
Cependant, qu'est-ce qui ne disait pas qu'a
-aaaa-atcha!!
Ce brusque éternuement sortit Johannes de ses contemplations.
Il secoua légèrement sa tête, et s'essuya le nez avec son avant-bras. Au moins, cela lui fit prendre conscience d'une chose: il s'était un peu perdu dans des conjectures hypothétiques, invérifiables, et qui ne le concernaient pas vraiment. Non, à la place, il fallait se poser les vraies questions.
Qu'est-ce qu'il y a dans cette armoire?
Tandis que le bruit de la pluie se fait toujours entendre au dehors, le rôdeur s'approche désormais du meuble et du cadavre. Voilà que ses longs doigts s'enroulent tout autour des pointes de bois qui fixent cette dépouille. Calant son pied contre les battants pour se donner plus de force, il tente maintenant de retirer les bouts, tantôt avec des gestes secs, tantôt en essayant de les faire tourner pour créer du jeu et les déloger ensuite.
Mais ça ne marche pas.
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[MJ] Le Faussaire a écrit :
Test d'HAB pour décrocher doucement les pointes : 15, 13, ça veut pas.
Il prit alors du recul, plissa ses yeux, dérangeants, face à dépouille, et finit par dégainer son couteau.
Johannes
veut savoir. Ce n'est pas un mort, aussi crucifié qu'il soit, qui va l'empêcher d'ouvrir cette armoire.
Sa petite lame plongea dans la chair pourrissante, et commença à mutiler le cadavre. Elle découpa d'abord le corps, progressivement, au niveau des talons flétris, puis des poignets sanguinolents. Au bout d'un instant, la tête décrépite, les bras, le tronc, les jambes moisies: toutes ces putridités finirent par s'effondrer, lourdement, sur un plancher abîmé par le temps et l'usure.
Au moins, les battants sont maintenant dégagés. Le hors-la-loi touche quasiment au but ; sa curiosité est presque....satisfaite....
presque.
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[MJ] Le Faussaire a écrit :
Test pour découper le monsieur : 1, comme dans du beurre. Ça glisse tout seul.
Entre elle et ce que contient ce meuble, il n'y a plus qu'une serrure. Une toute petite serrure de merde, de rien du tout ; un verrou futile, qui ne lui résistera pas longtemps, le bandit en est persuadé. Il s'en retourne vers son grand sac, le fouille bruyamment, et finit par sortir ses outils de crochetage, qu'une étrange personne, toute barbue et vêtue de rouge, lui avait donnée lors d'un rude hiver.
Mais ce n'est pas important, l'essentiel est que le rôdeur revient au meuble et à son cadenas, puis commence à y introduire ses petits instruments, avec toute la minutie qu'on veut bien lui prêter. Une minute s'écoule, puis deux, puis trois ; puis quatre...
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[MJ] Le Faussaire a écrit :
Crochetage de l'armoire : 2, quelques minutes et ça s'ouvre !
Un long soupir de soulagement se fait entendre dans la chambre, et un verrou est enfin forcé.
Les volets de bois sont brusquement ouverts ; une paire d'yeux et de mains, animés par une indiscrétion dévorante, se précipitent à l'intérieur de l'armoire. Et ils ne sont pas déçus. Des choses utiles et intéressantes s'y trouvent, laissées là, sur des étagères recouvertes par une fine couche grisâtre: des bottes, un rasoir, un ciseau. Johannes prend rapidement ces objets, gardant la gouge et la fine lame sur lui, avant d'aller ranger la paire de chaussures dans son grand sac vert.
Toujours avoir des bottes de rechange, surtout dans le Moussillon. Ce serait dommage qu'il perde, à l'occasion, plusieurs minutes dans des marais lugubres, comme un certain druide malchanceux, à fouiller la fange et l'eau stagnante, pour tenter de récupérer une chaussure toute mouillée.
Revenant vers le placard, le hors-la-loi découvre encore un autre truc. Un instrument....assez étrange, avec plusieurs tubes, emboîtés les uns dans les autres et....avec des morceaux de verre, tout ronds. C'est maintenant un rôdeur intrigué qui tient, avec hésitation, une jumelle entre ses doigts.
Il la prend désormais par le gros côté, celui avec la grande lentille ; il la rapproche de son visage et y colle son œil pour essayer de voir à travers. Mais il ne discerne rien, tout est flou. Il recommence alors de l'autre côté, cette fois-ci avec la petite lentille.
Un gros globe oculaire surgit brutalement devant lui.
Le rôdeur trésaille, recule d'un pas, puis retire de suite la jumelle, stupéfait par ce qu'il vient d'apercevoir.
Il jette un regard médusé sur l'instrument, avant de se tourner vers le cadavre mutilé du sang-bleu, qui traîne encore à ses pieds ; là, d'un coup, il revoit le globe oculaire....sur ce même corps ; cependant, il est à sa taille réduite, "normale", en fait.
L'ombre masquée donne à nouveau un coup d'œil sur la lorgnette, l'utilise une nouvelle fois, et revoit ce même globe jaunâtre. Elle finit par rebaisser la chose. Ses deux yeux brillent dorénavant dans la pénombre. Johannes commence à comprendre...
Oh oui, cette petite jumelle lui sera
très utile pour la suite.
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[MJ] Le Faussaire a écrit :Test de fouille : 3 !
Toutefois, par acquis de conscience et malgré la fatigue qui monte en lui, le renégat se redirige vers l'armoire, histoire de bien terminer la fouille du meuble et de ne rien manquer.
Et c'est ainsi qu'au fond d'une étagère, il remarque un drôle d'objet, sculpté dans une pierre sombre, aussi noire que la nuit.
Cette sorte de présentoir, à l'apparence un peu lugubre, prenait la forme de deux mains, aux ongles sculptés, détaillés et très longs, qui tenaient quelque chose dans le creux de leurs paumes ; mais un problème se posait, et s'imposa aux yeux du bandit: ce fameux "quelque chose" avait disparu, il n'était plus là. En tout cas, la pierre qui constituait cet artéfact était noirâtre, lisse et propre, comme si l'on avait taillée finement, à partir d'un seul bloc.
Le rôdeur ne mit pas longtemps à se décider. Tout ce qui se trouve dans la chambre d'un aristo est rare, et tout ce qui est rare, en plus d'être glauque et étrange, a forcément une valeur. Il prend alors ces deux mains pierreuses, et part les déposer dans son sac, avec tout de même une certaine prudence. Pas besoin d'avoir la foi pour sentir que cette espèce de relique n'est -justement- pas très Taalite...
Les ténèbres s'étendent désormais sur le Duché Maudit.
De plus en plus malmené par l'épuisement et par un début de crève, le brigand se traîna péniblement jusqu'au large lit à baldaquin, qui trônait au centre de cette chambre décrépite. Déposant son arc et son carquois au pied de la couche, Johannes finit enfin par s'y vautrer dessus, à plat ventre ; pour sûr qu'il n'allait pas se gêner.
Depuis combien de temps il n'avait pas dormit dans un lit, d'ailleurs? Depuis Barak Varr, au moins, si sa mémoire ne le trompait pas.
Ah ça changeait de la dure, de la boue, et de la couverture de plus en plus miteuse qu'il utilisait d'habitude.
Là, c'était un véritable luxe pour lui de pouvoir passer une nuit comme ça, dans un
vrai plumard, avec un
vrai matelas moelleux à souhait, de
vrais coussins bourrés de plume, et de
vrais draps qui tiennent chaud.
Le. Rêve.
Enveloppé dans les ombres, bercé par le battement de la pluie à l'extérieur, Johannes, pour la première fois de la journée, finit vraiment par se détendre, et lâche prise sur tout ce qui l'entoure.
Comme quoi, on peut passer une bonne nuit dans ce pays sordide.
Mais malheureusement, toutes les bonnes choses ont une fin.
Surtout, surtout quand un énorme mongol déboule dans la tour en hurlant...
- "Ohé ! OHÉ ! Y'A QUELQU'UN ?!
Entre les rideaux du lit à baldaquin, une silhouette se soulève brusquement.
Si "Mongolito" se serait trouvé au troisième étage, il aurait peut-être entendu quelques sons, très brefs, se voulant furtifs: des petits bruits de sangle et de corde, que l'on maniait doucement avec soi.
C'était dommage, vraiment dommage que personne d'autre ne se trouve dans cette partie de l'édifice, d'ailleurs.
Les morts de l'endroit auraient, sans doute, entr'aperçu cette ombre défiante, se mouvant de manière irrégulière, sur la pointe des pieds, évitant tout mouvement brusque, passant aussi discrètement que possible à travers de tristes salles.
- "AH C'EST BEN MA VEINE DE TROUVER UN LIEU DANS S'MERDIER ! OHÉ ! OHÉ, DEBOUT LES MORTS ! OHÉÉÉÉÉÉÉ !"
Au dernier palier, une ambiance de plus en plus lourde commence à s'installer ; on jurerait que le temps avait ralentit, tout particulièrement au niveau des marches qui menaient vers le second étage.
Oui, une atmosphère pesante, plombée par....une sorte d'hésitation, une grande hésitation même....à moins que ce ne soit une tentation.
Finalement, les cadavres d'enfants peuvent entendre un soupir du nez, et le nœud d'une corde qui se serre.
Peu à peu, la silhouette ombrageuse disparaît lentement de l'endroit.
Ce château peut faire peur au premier regard ; mais au fond, quand on y réfléchit sérieusement, il n'est pas
si effrayant que ça.
On peut en arriver là?
Est-ce qu'on veut vraiment en arriver là?
...
Dans tous les cas, si "Mongolito" mettrait un peu de temps pour monter au second étage -en partant du principe qu'il le ferait, alors oui, il finirait par tomber sur Johannes. Le rôdeur encapuché l'attendrait, face aux escaliers, appuyé contre le bureau au centre de la pièce, au beau milieu de la demi-douzaine de cadavres qui l'entoureraient.
Une de ses mains resterait libre, prête à défourailler, tandis que l'autre tiendrait un lasso entre ses doigts.
Lorsque "Mongolito" parviendrait à la sortie du palier, le malandrin demeurerait de marbre, figé dans un silence de mort ; il observerait, avec une attention insistante, ce nouveau venu si tapageur.
Au moindre geste brusque, au moindre mouvement suspect, à la moindre étincelle de sorcellerie, le bandit déclencherait...
Cependant, si cette personne resterait calme, le regard du renégat changerait ainsi, légèrement.
Sa tête pencherait lentement sur le côté. Sous sa capuche noirâtre, derrière son foulard, deux sourcils se réhausseraient doucement, et deux petits yeux, à l'éclat terni par la crève, adresseraient une interrogation muette envers son vis-à-vis.
Alors alors, petite voix, qu'est-ce que tu viens foutre là?
Ah moins que "Mongolito" ne décide de parler en premier?
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Alors résumé des courses. Dans la fouille de la tour, je prends:
- Un gourdin pas trop abîmé.
- Une tête de sang-bleu à moitié mutant.
- Le tas de papiers du bureau.
- Deux couteaux stylisés pour écrire.
- L'artéfact aux deux mains en pierre noire.
Si tu veux plus d'indications pour la suite, n'hésites pas.