C'est avec soulagement que le chasseur la vu reculer dans les arbres, lentement suivie de ses compagnes, laissant alors seuls, livrés à eux même, les dragonniers.
Et il était temps. Si le combat avait été bref, il n'en avait pas moins été violent et anxiogène. Des murs de papattes noires et poilues partout où l'on regardait, encerclés de toutes parts par des crocs, la présence oppressante de la masse d'apparence inarrêtable…. Et ils avaient tenus. Ils avaient tenus ! Sigmar soit loué….
A genoux dans la boue mêlée du sang des insectoïdes, Martin se tenait la tête entre les mains, prenant difficilement conscience qu'il n'était pas mort. Qu'ils n'étaient pas morts. Ils avaient survécus. Oui certes, l'ennemi cette fois ci n'était pas un démon tout droit venu des enfers pour apporter la mort et la destruction sur son foyer, mais une légion d'araignées géantes. Et non, il ne pouvait faire exploser tout un acre de forêt. Mais il compensait sa faible capacité de destruction par une présence, un ascendant psychologique conséquent face à des piétons légers comme ceux de sont groupe. Eussent-ils été une dizaine d'hallebardiers, ils eussent pu combattre dans un calme parfait. Or, n'avaient ils que des haches, des couteaux et un arc. Ce n'était pas vraiment ce que l'on pouvait appeler quelque chose de "lourd".
Ils s'en étaient même sortis malgré cette grande gueule de rouquin… D'ailleurs il était où ce….
"Oh merde…."
Eh ! Dwaidu ! Reste montre voir ton bras ! T'as l'air de….. Eh ? Dwaidu ?
Rangeant son arc, le chasseur se remit debout pour s'approcher du nabot qui, pour quelques raisons, refusait se retourner et subir les premiers soins. Car cela Martin en était certain, le courtaud avait perdu la main. Au propre comme au figuré. Ce n'est que lorsque Thralgran couru pour récupérer Dwaidu avant qu'il ne tombe que le nordlander eu un déclic.
S'approchant du blessé, il vint lui tenir l'épaule pour le fixer dans les yeux.
Allez. Restes avec nous cogneur. T'es pas qu'une grande gueule. Alors tu vas rester avec nous. Pas question pour toi de dormir.... Restes éveillé putain !!! Comment tu veux qu'on chante tes exploits si tu claques maintenant !
Il fallu que Thralgran le prenne par l'épaule lui même et ferme les yeux de Dwaidu pour de bon pour que Martin accepte ce qui s'était passé. Le rouquin était mort.
Se réfugiant dans son mutisme, Martin tourna dos au mort avant de se passer la main sur le visage. Il pleuvait. Oui. Il pleuvait beaucoup en cet instant.
Tandis que les nains formaient un cercle autour du tueur parti rejoindre ses ancêtres, Martin, armé de sa dague, parti inspecter les corps des bêtes, récupérant les flèches récupérables, puis inspectant divers corps d'araignées, cherchant à déceler des points faibles dans leur morphologie, à chercher si elles avaient des glandes où serait stocké du poison, à quel point le squelette externe au niveau des pattes était solide.... Dwaidu était mort. C'était incontestable. Mais il préférait tourner son esprit vers le travail. Au moins un peu. Pour essayer d'oublier. Oublier la peur, la frayeur qu'il avait ressenti. L'angoisse du moment. Et la mort de Dwaidu.
Lorsqu'il fallu partir, il prit soin d'emmener avec lui une araignée encore intacte - relativement - et les crocs, les glandes, poils, yeux et une patte d'une des araignées qu'il avait tué. Ça ferait quelque chose de convenable pour Taal. Après tout, il avait promit de lui offrir une proie. Et même si les rôles avaient été inversés, ça ferait tout de même l'affaire. Et il ramassa également la main de Dwaidu, sectionnée par l'araignée, pour la ramener avec le corps.
Le retour au camp fut aussi long que silencieux. Il fallait croire que le poids sur la conscience de la mort de Dwaidu, plus ou moins partagé collectivement, suffisait pour couper court à toute discussion entre les dragonniers. Puis sa blessure lui lançait la jambe également, rendant tout effort plus couteux. Une fois arrivés, le chasseur ne comptait pas rester longtemps le centre de l'attention. Passer le corps de la bestiole au premier nain compétent pour ce qui était le dépiautage de cadavre, afin d'en apprendre plus encore sur les forces et faiblesses des bestioles, quitte à l'assister au passage et lui révéler le peu qu'il avait apprit dans la forêt.
Une fois fait, il passerait voir l'ingénieur, lui toucher un mot de l'expédition plus ou moins ratée qu'avait été lancée, pour s'enquérir de ses connaissances, s'il avait en tête une idée ou moyen de faire face à ce genre de situation.
Enfin, quand tout cela serait bouclé, il prendrait une petite demi-heure pour aller en dehors du camp et offrir à Taal son "butin". Siegfried lui avait apprit comment faire, il y avait longtemps. Se mettre à genoux, face à l'offrande, de préférence placée sur une souche morte ou un petit promontoire, la déposer lentement et remercier Taal pour le fruit de sa chasse. Puis brûler le tout si possible, ou bien le laisser en place si l'on avait rien pour le faire. Une fois de retour au camp, ça serait la sieste jusqu'au lendemain.