Placer au centre, soulever, frapper, récupérer, replacer. Combien cela faisait-il de temps que je répétais inlassablement ce rituel, malgré la brume froide qui planait sur les terres Jutonnes aujourd'hui, mon corps suait à grosse goutte, mes paumes me brûlaient, mes épaules roulais à chaque nouvelle bûche fendue en deux, mais à chaque jour passé mon corps récupérait un peu plus.
Avec une telle quantité de malepierre ambiantes jamais je n’aurais dû survivre moi un simple mortel. Grimaçant un sourire entre deux coupes, je me dis que Danu m'avait vraiment à la bonne. Mais arrêtons de rêvasser pour le moment, j’avais du bois à couper…
Dans le froid, la vapeur s’échappait de mon corps, créant comme une sorte de halo éthéré, sentant une présence déjà depuis un moment qui m’observait, je me décidai à planter fermement la hache dans le gros tronc qui servait de support, en me passant une main sur le front pour dégager la sueur et mes cheveux collés Je pus apercevoir Roderick qui m'observait tranquillement assis en tailleurs.
- Alors Catuvolcos cela fait déjà un moment que tu coupes du bois, tu sais les réserves sont déjà bien remplies et en plus de ça ne te feras pas louper, la petite fête, tu sais très bien que tout le monde attend ta venue en bas gros malin. Fais-moi plaisir va te rincer, te peigner histoire d'arrêter de ressembler à un foutu Norse et rejoins-nous, allez je pars devant.
Le vieux sage avait raison, même si j’étais encore mal à l’aise de devoir redescendre là-dessous, tout le monde devait m’attendre, je me rappelais bien que par chez moi abuser de l’hospitalité de ses hôtes ne se terminait jamais bien. Il faut dire que de devoir passer une nuit dans les tourbières hors du village vous marquait à vie enfin ça c’était si vous réussissiez à passer la nuit.
Je me versa plusieurs seaux d’eau glacée sur le corps, me séchât rapidement, ajustant mon pagne que j’avais pu agrémenter de laine colorée pour le faire ressembler un peu au traditionnel kilt d’Albion. Je plaçai mon ceinturon sur le bassin il se trouvait accroché dessus ma bonne vieille hache d’arme Gaélique bien huilé et nettoyé de tout le sang du sorcier Skaven. Je pris ma pèlerine en peaux d’ours en l'enroulant autour de ma taille. Le dernier détail avant de partir n’était pas des moindre, je dus me démêler les cheveux puis tressés certaines mèches à la façon des hommes de ma tribu et enfin lisser ma barbe, me regardant dans une flaque d'eau croupie j’estimais être prêt à y aller, Roderick était déjà parti depuis un moment.
Arrivée aux lacs, la sensation qui s'infiltra en moi fut terriblement apaisante, je ne ressentais plus toutes cette gêne, ce mal tapis aux fonds des eaux. Le trajet fut facile il y avait une succession de torche qu’il fallait suivre, je fus étonné de croiser sur ma route des hommes et de femmes armées de lance et de bouclier portant un emblème représentant un rapace tenant dans ses serres la tête d’un prophète gris, Tous me saluèrent claquant leurs lances sur leurs boucliers durant ma descente. Quand j'arriva finalement dans ce qui fut l’antre des skavens j’en eus le souffle coupé cette fois non de dégoût mais d’admiration.
Que le ciel me tombe sur la tête, comment une telle végétation avait pu se développer pendant ma convalescence. Ce n'était pas tout il se trouvait dans cette grotte une multitude de personnes, bien plus en tout cas que la population du petit hameau Jutones qui m'accueillait.
- Hééé Catu ! Je vis aux loin Ignolf s’agiter, je vins à sa rencontre, il était salement amoché, la diversion contre les Skavens avait laissé des traces sur son corps. Voyant que je l'observais, il haussa les épaules et me dit laconiquement.
- T’en fais pas pour moi les cicatrices ça me donne du charme, enfin c’est ce que me dis ma femme haha !
- Ah oui elles sont partout pareilles. Lui fis-je avec un sourire.
Dis-moi en parlant de ta femme, Lahissa et Wilhard vont bien ?
- Pour sûr l’ami mais je t’avoue que quand l’on a vu tous les Skavens déboulées sur nous, je pensais ma dernière heure arrivée, je n'ai jamais couru aussi vite de notre vie mais ça suffisait pas. Et tu sais quoi quand nous pensions être cuits, nous avions entendu une sorte de grande explosion et un cri horrible, de rage et de souffrance, là toutes ces saloperies des rats mutants sont devenu carrément étranges ils se sont mis à couiner et à partir dans tous les sens nous ignorants complètement ils avaient l’air terrorisés.
- Ah pour ça j’ai ma petite idée frère, vous avez fait du bon boulot, jamais je n’aurais pu l’approcher ce mage perverti avec toute sa cohorte autour. Mais dis-moi qu’elles sont ces gens qui déambulent dans les chemins de la crypte avec ce motif d'oiseau de proie.
Ingolf lança un grand sourire et me prit par les épaules.
- Alors ça tu peux en être fière. Les répercussions de ton combat se sont ressentis des lieux à la ronde, c’est un paquet de communautés Jutones qui ressentirent le besoin de redécouvrir ce lieu profané et de le reconsacrer. C’est moi qui ai proposé l’idée d’une garde permanente dans ces cryptes, des hommes et des femmes tournant entre eux toutes les saisons pour bloquer et combattre une nouvelle apparition du mal. Tu m’avais dit que Catuvolcos voulait dire dans notre langue “le Faucon de Combat”, nous avons décidés de les nommer les veilleurs du Volcos en ton honneur, sur le bouclier le rapace tenant dans serres la tête du prophète-rats, nous rappelle ton combat qui permit d’éradiquer ce problème à la racine.
- Arrête tu n'es pas sérieux je vais rougir là, je n’ai fait que séparer une tête d’un corps et oui aussi exploser un sacré bloc de malepierre !
- Trêve de bavardage, tous les anciens des alentours t'attendent pour la consécration.
Traversant une ambiance joyeuse où les gens riaient, buvaient et débattaient de bonne humeur entre les arbres et les buissons. C’était comme si Danu contrainte depuis si longtemps à être repoussé avait repris ses droits mais de la manière la plus extraordinaire possible créant de la verdure dans un endroit qui ne devait pas être propice à cela.
Je me rapprochais à l’endroit exact ou se trouvais plus tot l'immense bloc de malpierre, tient coquasse je vis pendre à une branche un crâne blanc à l’allure de rongeur avec de longues cornes enroulées, la nature s'était occupée de l’ami sorcier.
Un conseil d’ancien Jutonnes m'attendait en cercle devant l’entrée d'une sorte de crypte, cette même crypte qui avait servi de chambre personnelle pour le chef des Hommes-Rats. Je vis Roderick qui se porta à ma rencontre.
- Nous t'attendons, il ne manquait que toi, viens suis-moi.
Pénétrant à l’intérieur de la crypte je pus constater que du ménage avait été entrepris le lieu n’étais pas très spacieux, il se trouvait maintenant en son centre un autel ou une femme à l’aspect bienveillant tenant son ventre porteur de vie, nous regardant avec bienveillance.
- Durant toute ta convalescence nous n’avons pas chômé, avec tous les Jutones des alentours nous avons travaillé dur pour restaurer un peu la gloire d’antan de ce temple, comme tu le vois nous avons même pu lever une sorte de garde du temple avec un nom en ton honneur, mais voilà, nous estimons que toi seul peut finaliser notre travail il n’y a pas de doute que c’est Rhya ou Danu si tu veux qui t’a envoyé à nous, bon je te laisse seul.
J’avais plein de questions à poser, beaucoup de choses à dire, mais je ne dis rien. M’asseyant par terre face à la statue sculptée dans du bois, je fermai mes yeux…
Toute la zone était imprégnée de puissance, une puissance déchaînée, victorieuse, je sentais l'énergie me traverser de part en part, il me fallut toute ma concentration pour essayer de la rassembler du moins partiellement en un point précis là devant moi dans la statue nouvellement crée.
Je sortis transpirant et marqué de l'autel, applaudi par tous les membres Jutones rassemblés devant moi, le rouge me monta aux joues je ne put pas m’empêcher de rire. L'interlude festive qui précéda mon départ fut une parenthèse bienvenue dans mon périple sur le continent.
Fin...