[Anaëlle] Le murmure du pouvoir

Marienburg est le plus grand de tous les ports du Vieux Monde. Située à l’embouchure du fleuve, la ville est un énorme centre de commerce. Le Reik est ici un fleuve énorme, mesurant plus d’un kilomètre et demi d’une berge à l’autre. Marienburg est une cité indépendante (sans lien avec l’Empire), située au sein des Wastelands. c’est aussi le centre de l’activité religieuse du Culte de Manaan, le Dieu de la Mer.

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[MJ] Le Grand Duc
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Re: [Anaëlle] Le murmure du pouvoir

Message par [MJ] Le Grand Duc »

Le jeune femme fut tirée de son sommeil par quelqu'un qui frappait à la porte de sa chambre. Elle cru reconnaître la voix du conducteur de la diligence.

- "Ma Dame, nous repartons dans quelques instants."

Elle fit sa toilette rapidement, s'habilla et descendit dans la pièce principale. Quelques clients étaient déjà présents, pour la plupart des voyageurs qui s'apprêtaient eux aussi à prendre la route. Alexandre de Fontenie manquait à l'appel. Elle s'assit quelques instants, le temps de boire un bol de lait de chèvre chaud et de manger une tartine au beurre tandis que le conducteur et le garde de la voiture chargeaient ses malles. Quand enfin ils lui firent signe qu'ils étaient prêts, elle se leva et quitta l'auberge.

Le soleil se levait timidement sur Klessen et il faisait encore froid alors que la pâle lumière perçait à peine l'épaisse couche de nuage. Quelques personnes s'affairaient dans la rue principale où attendait la diligence. Le bretonnien n'était pas là pour lui éviter de marcher dans la boue, et Anaëlle fut bien obligée de crotter ses bottes en cuir pour monter dans la diligence.

- "Bien le bonjour, Dame von Schlegle. Permettez donc que je fasse route avec vous." lui lança une voix familière. Elle se retourna pour voir Alexandre juché sur son beau cheval gris, son luth attaché sur le côté de la selle. Il lui sourit. "Nous allons semble-t-il au même endroit, avec votre permission, je chevaucherai à vos côtés."
J'imagine que tu acceptes. Si tel est le cas, tu pourras lui répondre en une ligne dans ton prochain post, dans le cas échéant considère qu'il aura prit de l'avance sur vous.
Le cocher fit claquer son fouet dans l'air et harangua ses bêtes. Les chevaux piaffèrent et la diligence se mit lentement en marche, Alexandre de Fontenie avançant à ses côté. L'attelage prit un peu de vitesse alors que les chevaux se mettaient à trotter et ils passèrent le corps de garde de la muraille du bourg, s'engageant sur la route du Nord qui menait à Marienburg. En chemin, ils croisèrent quelques charrettes tirées par des boeufs, des caravanes de marchands bretonnien et autres voyageurs.

Après plus heures de voyage à travers champs, le paysage changea à mesure qu'ils se rapprochaient de la côte. Les cours d'eau, les étangs et les rivières se faisaient plus nombreux. La végétation devenait plus touffue et les arbres plus rares. Bientôt, les joncs et les herbes hautes succédèrent définitivement aux cultures et la lande repris son aspect morne et gris tandis qu'ils s'enfonçaient lentement dans le delta boueux du Reik, le marais Grootscher.

La diligence, flanquée d'Alexandre, progressait sur les dalles blanches et parfaitement polies de l'antique route de la côte, que l'on disait bâtie par les elfes de mers qui vivaient dans le delta il a plusieurs milliers d'années. Cette voie légèrement surélevée partait de Marienburg et longeait les falaises qui donnaient sur la mer des Griffes jusqu'à l'Anguille, en Bretonnie. Elle fendait en une ligne blanche les marécages fangeux qui entouraient la métropole cosmopolite. Mais depuis plusieurs siècles, cette route était bien moins fréquentée et voilà plusieurs heures que l'équipage n'avait croisé d'autres voyageurs.

Alors qu'ils gravissaient une petite colline qui surplombait le marais, Alexandre fît signe à Anaëlle à travers la fenêtre.


- "Voyez !" dit-il en pointant un doigt vers l'horizon. "On peut apercevoir Marienburg d'ici".

La jeune noble sorti un peu la tête de la cabine pour apercevoir, au loin, la masse sombre de la ville lovée dans la lagune que formait la Manaanspoort Zee, où les eaux froides de la Mer des Griffes s’engouffrait dans le Vieux Monde et rencontrait les multiples alluvions du Reik qui s'enfonçait dans la ville comme un long serpent argenté venant du Sud. Des fumées sombres montaient de cette myriade de toits et donnait à l'immense cité un aspect sinistre sous le ciel morne.

Autour d'eux, le paysage n'était plus qu'une successions de mares d'eau croupie, de lacs fétides, d'arbres dévorés par le lichen et de masures abandonnées au milieu des joncs et aux poutres moisies par l'humidité. Les cris des bécassines des marais ajoutaient au sinistre de la scène.
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Leur voyage à travers le Grootscher dura tout la journée. Par moment, Alexandre de Fontenie saisissait son luth et jouait quelques ballades depuis son cheval, tandis que le cocher et le garde des Quatre Saisons discutaient entre eux, juchés sur leur banc au devant de la voiture. Ils ne croisèrent qu'une autre diligence qui se dirigeait en sens inverse ainsi qu'une compagnie montée d'une trentaine de Patrouilleurs Ruraux. Enfin, alors que le soleil se couchait déjà au delà de la masse de nuages, ils arrivèrent en vue de Marienburg.

La ville était ceinte par les épaisses murailles du Vlœdmuur, un fortification de plusieurs mètres de haut qui, disait-on, était bâti sur le tracé de l'antique port des Elfes des Mers, Sith Rionnasc'namishathir. La Vieille Route de la Côte finissait au seuil de la Westenpoort, un important système de portes et de herses fortifiées qui perçait la muraille. Quelques bâtiments se dressaient devant la porte, pour la plupart en mauvais état. Il y avait aussi des tentes et des abris de fortunes en toile ou en bois, où quelques vagabonds se serraient les uns aux autres près du feu, coincés entre l'imposant Vlœdmuur et le Grootscher. L'air semblait vicié par les embruns du marais et la brise froide faisait frémir les corps.

La diligence traversa le faux-bourg miséreux, se dirigeant vers la Westenpoort avant de s'arrêter lorsqu'un garde lui barra la route sur le seuil de l'immense passage. Il portait un chapeau de feutre noir, un plastron en métal et une longue hallebarde. Il devait d'agir d'un membre des Coiffes Noires, la garde de Marienburg financée par les conseils municipaux et chargée de faire régner la loi dans les ruelles de la ville. La porte d'une petite cabine en bois bâtie à l'intérieur du passage du corps de garde s'ouvrit et un petit homme courbé en sorti avant de se diriger vers la voiture et Alexandre de Fontenie, escorté par deux Coiffes Noires. Il portait une chemise aux manches bouffantes et sales sous un pourpoint en cuir de mauvaise qualité. Il semblait âgé, son visage ridé et son nez crochu surmontés d'un calot de laine gris dans lequel était passé une plume. Il tenait un gros registre dans une main, une plume dans l'autre, et toqua à la fenêtre de la cabine.


- "Kristian Baert, collecteur d'impôts du Secrétariat à la concurrence." dit-il d'une voix désagréable sans même regarder la noble ou le barde dans les yeux, visiblement blasé. "Avez-vous un document justificatif dérogatoire aux taxes ? Dans le cas échéant ..." ,il marqua une pause, semblant mener un petit calcul dans sa tête, "... veillez régler céans la somme de sept Guilders pour vous acquitter des droits de péage." termina-t-il d'un air las.

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Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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Anaëlle
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Message par Anaëlle »

  • - "Ma Dame, nous repartons dans quelques instants."

    Les propos du cocher, s’il résonna à ses oreilles, ne put s’ancrer définitivement dans l’esprit de la jeune femme, apportant avec lui la signification évidente de l’aube qui se levait. Ce ne fut que quelques minutes plus tard que la réalité la rattrapa. Les minces rayons de l’aube perçaient à travers le verre crasseux de la fenêtre et Anaëlle ouvrit les yeux.
    Le craintif pépiement des oiseaux qui l’avait accompagnée lors de son entrée dans le village s’était mué en un tintamarre de sifflements et de gazouillis, tandis que les stridulations des insectes nocturnes avaient laissé place au remue-ménage des villageois qui partaient pour les champs. Les bruits de fond de raclement de ferrailles et de voix qui braillent les unes par-dessus les autres retentissaient comme un véritable vacarme pour la jeune femme. Etouffant un bâillement, Anaëlle se délivra des lourdes couvertures pour se relever. Retrouvant promptement ses esprits, elle s’étira quelque peu avant de porter son regard sur sa robe, qu'elle rangea dans sa malle pour en sortir une propre.
    Elle ne disposait pas de miroir assez grand pour juger de son apparence, mais un rapide coup d’œil en direction de son petit miroir lui prouva qu’elle était prête. Finalement elle décida de sortir de sa chambre et de s’engager dans les escaliers.

    En bas, seul demeuraient trois voyageurs qui finissaient de prendre leur repas, avant d’aller vaquer à d’autres occupations qui ne regardaient qu’eux. Elle venait à peine de poser un pied sur les dalles, faisant attention à ne pas le poser sur l’un de ces lambeaux qui ne manqueraient pas de la faire choir, que l’aubergiste se tourna vers elle. Anaëlle s’empara du bol et du pain que lui tendait le tenancier. Elle alla s’installer à une table, faisant la grimace en découvrant que la mince pellicule de graisse et de saleté couvrait toujours la table devenue poisseuse. En relevant son regard de son bol, ce dernier tomba sur un des hommes présents dans la salle principale. Simple paysan ou voyageur itinérant ? Anaëlle penchait plutôt vers la seconde conjecture au vu de son accoutrement, bien que le doute fût encore permis. Elle le gratifia d’un petit sourire avant de reporter son attention sur son repas, déjà presque terminé. Le garde de la compagnie lui fit signe qu’il était l’heure de partir et sans jeter un coup d’œil en arrière, Anaëlle sortit de l’auberge et tenta d’enjamber la boue pour regagner la diligence. Les chevaux trépignaient d’impatience et heurtaient de leurs lourds sabots le sol sec et poussiéreux.

    Alors que la jeune femme montait dans la voiture, celle-ci entendit une voix familière ; celle d’Alexandre. Le fringuant bretonnien apparut sur sa monture, une belle bête à la robe grise, et se mit à hauteur de la cabine.


    « Bien le bonjour, Herr Alexandre. Quelle joie de vous revoir en cette froide matinée. Bien évidemment que vous pouvez chevaucher à nos côtés. Vous pourrez ainsi nous étaler vos talents de musicien.. » s’exclama la jeune femme en désignant le luth accroché à la selle de la monture.

    Alors que le conducteur faisait claquer son fouet, un petit hennissement retentit, et bientôt, un petit cahot s’empara du véhicule en mouvement, résistant tant bien que mal aux assauts du sol irrégulier. Et ce fut parti pour une journée entière de voyage à regarder le paysage défiler devant des yeux impuissants qui ne tarderaient pas à devenir insensible et ennuyés face à la monotonie de la route.

    Le regard d’Anaëlle plana quelques minutes sur Alexandre qui venait de détacher son luth pour jouer un morceau. Neutre, elle se laissait absorber dans sa musique sans rien laisser transparaître de ce qu’elle éprouvait. Elle avait assez de recul sur soi-même pour ne pas succomber à tout ce que cette mélodie pourtant simple suggérait. Oui, ce qu'elle suggérait ; une vie paisible à l'abri d'un futur embrouillé, loin de la gloire mordante et de l'honneur qui ne se gagnait que sur l'autel de la violence. Et ce que jouait Alexandre de ses doigts encore habiles était une simple utopie. Elle l’approuvait en silence, laissant son instrument exprimer ce que les mots peinaient à décrire.
    Lorsque la dernière vibration finit par mourir, Anaëlle le dévisagea franchement, un rien reconnaissante dans le regard.

    Finalement la noble reporta son regard sur la route. Le paysage vallonné défilait devant ses yeux, tableau aux couleurs devenues embues par le déclin du soleil en cette belle fin d’après-midi dégagée. Le voyage se poursuivait paisiblement, sans soucis, dans un silence placide qui ne laissait entendre que le trot des chevaux et, de temps à autre, l’ébranlement d’une roue au contact d’un trou plus profond que la moyenne.
    Et effectivement, conformément aux dires d’Alexandre, une fois sommet de l’une de ces collines qui arrondissaient l’horizon, Marienburg fut en vue. Quoi qu’il en fût, le véhicule s’y dirigea tout droit. Ils arrivèrent rapidement à l’entrée de la ville, et en moins de temps qu’il en faut pour le dire, ils furent arrêtés par un collecteur d’impôts et deux Coiffes Noires. Décidée à ne pas perdre de temps avec ce petit homme courbé, Anaëlle se plia à la taxe sans même chercher à négocier le prix.
    Retenant avec bien des difficultés un long soupir lassé, la jeune femme récupéra de sa main les quelques sous qu’elle avait placés en-dehors de sa bourse de cuir, les comptant mentalement avant de les offrir à la vue du collecteur. Ce dernier s’en empara avec une avidité certaine, arrachant presque au passage de sa grosse patte la fine et fragile main de la douce créature.
Modifié en dernier par [MJ] Le Grand Duc le 11 nov. 2014, 19:54, modifié 2 fois.
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Anaëlle von Elaeran, Voie de la Cour
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[MJ] Le Grand Duc
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Re: [Anaëlle] Le murmure du pouvoir

Message par [MJ] Le Grand Duc »

L'ennuyeux bureaucrate saisit les quelques piécettes et fit signe aux Coiffes Noires. Ces derniers s'écartèrent du passage et la diligence s'engouffra dans le corps de garde de la Westenpoort. A mesure que l'attelage progressait à travers le complexe de fortifications et de casernes, les bruits de la ville parvenaient peu à peu aux oreilles de la jeune noble : le brouaha de la foule de passants dans les rues ponctué par moment de cris ou de rires, le tintement des cloches, les sabots des chevaux qui claquaient contre les pavés, l'aboiement d'un chien, quelque part. Les odeurs s'infiltraient dans la cabine, elles aussi, moins avenantes que les rumeurs de la ville.

En effet, l'une effluve putride monta à mesure que la voiture des Quatre Saisons quittait enfin le corps de garde pour s'enfoncer dans une premier rue encombrée, serrée entre les bâtiments à colombe de plusieurs étages. Cependant, les maisons avaient l'air de taudis et Anaëlle compris rapidement que la Westenpoort ne donnait pas sur le quartier le plus fortuné de la ville, bien au contraire. Comme pour confirmer ses dires, la diligence en vint à traverser un premier pont en pierre qui enjambait le Doodkanaal, un bras du Reik qui passait au sud de la ville. Ce chenal n'était autre qu'une voie d'eau presque stagnante où pourrissaient ordures et détritus. Ses abords étaient garnis de bidonvilles de fortune où se pressaient les miséreux, et l'air ambiant embaumait les miasmes malsains. La jeune noble fut forcée de couvrir son nez délicat pour ne pas se sentir importunée tandis qu'ils progressaient sur le pont en partie bâti. La diligence avançait lentement en raison de la foule qui se pressait partout, compressée entre les charrettes et les bâtiments qui penchaient dangereusement pour pratiquement former une arche qui masquait le soleil au dessus de la rue.

Ils passèrent enfin le pont pour entrer dans le Winkelmarkt, le quartier des artisans. Les artères et les rues latérales étaient encore plus bondées que dans le Doodkanaal et une masse grouillante de passants colorés se mouvait autour des voyageurs qui tentaient d'avancer. La cacophonie ambiante était impressionnante et les échoppes ne semblaient pas désemplir : bouchers, tanneurs, forgerons, outilleurs, serruriers, apothicaires ... Toutes les professions semblaient représentées dans cet immense tourbillon d'activité. Tout semblait se dérouler plus vite, comme si Anaëlle était sous l'effet de quelque drogue qui la rendait amorphe et vitreuse tandis qu'autour d'elle le monde s'affairait. On vendait des poulets, des planches ou des tissus, on marchandait, on jurait, on soudoyait. Tout se passait à la vitesse de l'éclair et se reproduisait à l'étal suivant dans un cycle qui semblait sans fin.

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Après avoir mis près de deux heures pour traverser les rues bondées du Winkelmarkt, la diligence se dirigea vers un autre pont en pierre gardé par une immense caserne fortifiée. A la plus grande surprise d'Anaëlle, le pont Draaienbrug -c'était son nom- semblait bâti sur une longue plateforme qui ... pivotait ! Cette prouesse technologique laissait le passage libre à intervalle régulier aux navires qui souhaitaient descendre le Reik pour venir s'amarrer aux quais sud du Suiddock. Alexandre de Fontenie frappa à la vitre de la cabine à cet instant.


- "Veillez m'excusez, ma Dame, mais nos chemins vont devoir se séparer ici. Je m'en vais rejoindre un ami dans le Remasweg. J'espère que la Dame nous donnera l'occasion de se retrouver à nouveau !" Il souleva son chapeau à la plume avec un sourire et talonna son cheval pour s'enfoncer dans la foule grouillante d'une petite ruelle, disparaissant rapidement au détour d'un bâtiment à colombage.

La diligence continua à suivre la rue principale et traversa le pont, atteignant enfin les îles du Suiddock. Sur le pont comme sur chaque centimètre carré de terre disponible, les Marienbourgeois avaient bâti. Il semblait qu'aucune parcelle n'avait été épargnée et que partout, à chaque endroit, se dressait un enchevêtrement de façades à colombes, de fenêtres à pignons, de toits inégaux et de gouttières anarchiques. Alors qu'ils traversaient le pont, Anaëlle avait pu constater que l'incroyable manège se prolongeait sur les eaux. D'immenses péniches croisaient des voiliers de tailles différentes et les navires s’amarraient aux quais pour que les équipes de débardeurs et de manœuvriers en vide les cales, aidés par de grandes roues en bois. Les quais eux-même fourmillaient d'activité : ouvriers, marchands, armateurs, membres d'équipages, employés des conseils municipaux, gardes et percepteurs de taxes. C'est en traversant le Suiddock que la jeune noble pu enfin ressentir la nature même de Marienburg : un cœur battant, un poumon commercial ingérant puis injectant dans le Vieux Monde toutes les marchandises possibles et imaginables. Tout ici semblait complètement désordonné et parfaitement millimétré en même temps. Chacun, dans cette immense toile sans cesse en mouvement, paraissait connaître sa place parfaitement. Tout se déroulait avec une efficacité mécanique. Une péniche était déchargée, les documents officiels étaient signé et de suite elle repartait pour qu'un chebec arabéen prenne sa place, et ainsi de suite. Les couleurs, les bruits, les cris, les odeurs, le mouvement saccadé et incessant : la tête de d'Anaëlle tournait, et pourtant elle se sentait enivrée par tant d'ordre chaotique, par ce capharnaüm organisé où tout avait sa place, mais où cette place semblait changer aussi vite qu'un clin d'oeil. Marienburg ne cessait de l'émerveiller et de la perdre, elle qui venait d'une petite bourgade où rien ne se passait vraiment.

Après avoir traversé le Suiddock et ses ruelles bondées de charrettes à bras chargées de marchandises et d'ouvriers suants, la voiture des Quatre Saisons traversa le Niederbrug, un large pont en pierre étrangement dégagé de toute construction mise à part un poste de garde, et agrémenté de statues en pierre. Ce pont donnait sur l'Île de Haute Tour, une bande de terre plantée au milieu de Reik qui coupait la ville en deux, et qui était le quartier général de l'Amirauté. Mais ce qui frappait la vue encore candide d'Anaëlle, c'était bien l'immense tour qui se dressait au bout de la courte et large rue qui traversait l'île. Cette immense colonne de pierre supportait une rampe extérieure assez large pour laisser passer deux charrettes de front ! Cependant la prouesse n'en restait pas là : depuis la tour se dressaient d'immenses arches de pierre qui reliaient l'Île de la Haute Tour avec le Paleisbuurt, le quartier des palais ! Ce pont démesuré semblait flotter au dessus du Reik qu'il traversait et se dressait assez haut pour pouvoir laisser les plus grands galions passer sans encombre. Un pont pivotant et maintenant un pont plus grand que le mât le plus haut d'un navire de haute mer ... Anaëlle n'en revenait pas. Tout dans cette ville lui paraissait démesuré et la partageait entre peur et enivrement. Ses rues bondées, ses canaux étroits et ses artères maritimes pleines de voiles blanches et de péniches, ses quais chargés à ras-bord de marchandises, ses bâtiments empilés les uns sur les autres dans un désordre ordonné ... Tout n'était qu'excès et pourtant tout s'enchaînait avec une logique et une constance implacable. La jeune noble se sentait comme aspirée par la force attractive que dégageait ce gigantesque pôle commercial.
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Sa diligence s'engagea donc sur la rampe de la Tour qu'elle gravit pour se retrouver sur le pont suspendu. Quelques personnes s'y promenaient et d'autres diligences le traversaient comme si de rien n'était. De là haut, pourtant, la vue était époustouflante. Face à Anaëlle se dressait les coupoles sculptées et les flèches du quartier des Palais et de la partie Nord de la ville, plus riche et aristocrate. A l'Est, le Reik s'engouffrait dans la ville à travers les immenses tours de la Strommpoort et était couvert de péniche et de petits bateaux. A l'Ouest, la Manaanspoort s'ouvrait et laissait s'entrer des myriades de navires de tous horizons qui contournaient l'île de Rijker et sa sombre citadelle. Et enfin, derrière eux, d'étendaient les quartiers populaires de Marienburg, d'où montaient milles fumées. Ils traversèrent le pont Hoogbrug, l'une des merveilles du Vieux Monde, et traversèrent rapidement les artères du Paleisbuurt pour s'engouffrer dans le Guilderveld.

Ce quartier tranchait avec le reste de la ville. Beaucoup plus calme, ses rues étaient larges et bien entretenues. Les boutiques ne tenaient pas leur étal sur le trottoir, et même les passants semblaient plus richement vêtu et surtout mieux nourris. Les bâtiments à colombe étaient élégamment ornés de fleurs et de vignes grimpantes et des lanternes éclairaient même la rue, tandis que quelques patrouilles de Coiffes Noires patrouillaient. La voiture des Quatre Saisons suivie un petit dédale de rues et de canaux jusqu'à arriver sur une place garnie d'une statue. Ici, le vacarme assourdissant de la ville et le tumulte de ses activités frénétiques n'était qu'un écho lointain qui arrivait aux oreilles de la noble comme un songe. L'endroit était tellement calme qu'on pouvait entendre les pigeons roucouler ou les personnes discuter entre elles dans les rues adjacentes.

La diligence s'immobilisa enfin au milieu de la cour pavée et le cocher descendit avant de frapper à la porte de la cabine et d'ouvrir.


- "Vous voilà arrivée, demoiselle. Laissez nous décharger vos malles, et nous repartirons de suite."
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Je te rajoute une carte juste pour le plaisir, et je te laisse frapper à la porte.
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Anaëlle
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Re: [Anaëlle] Le murmure du pouvoir

Message par Anaëlle »

  • La diligence déboucha de l’autre côté du corps de garde et passa entre deux imposants ateliers d’armement, leurs immenses cheminées crachaient une fumée noire qui masquait les étoiles. Elles ressemblaient à de sinistres sentinelles veillant sur l’entrée des quartiers qui s’étalaient au-delà, un lacis de ruelles boueuses et non pavées serpentant entre des constructions plus ou moins assurées, des tavernes miteuses, des tanneries puantes et des abattoirs.

    Les gens qui se hâtaient dans ces rues semblaient aussi misérables que leur environnement. Des fondeurs au visage noirci quittaient leurs ateliers ou des poissonnières aux joues creusées rapportaient dans leurs foyers le fruit de leur labeur quotidien, des enfants crasseux se tenaient accroupis sur le pas-de-porte tels des chatons apeurés, des proxénètes, des filles de joie et des coupeurs de bourses posaient sur les passants des regards intéressés. Pourtant, malgré des existences qui semblaient bien mornes, il y avait chez ces pauvres gens une indiscutable vitalité qu’Anaëlle trouva louable, une sorte d’obstination à survivre qui leur donnait cette énergie débordante et enivrante.

    Comme tous quartiers pauvres, Anaëlle pouvait y percevoir la peur. Cette hystérie relative au Chaos qui s’était emparé du quartier. Les vendeurs de colifichets et les crieurs de rue étaient toujours aussi nombreux, les uns déclamaient leurs nouvelles fraîches au sujet de la corruption et d’étranges disparitions, les autres garantissaient des protections contre ces mêmes dangers. A un coin de rue, une femme vendait des clochettes pendues au bout de lanières.


    - Mettez-les autour du cou de vos enfants ! criait-elle. Vous serez avertis lorsque les suppôts du Chaos voudront les emmener.

    A un autre coin, un gars portant un large chapeau et une mauvaise copie d’habit de répurgateur proposait de soumettre toutes les femmes qui passaient devant lui à d’étranges tests.

    - Une seule piqûre de mon poignard, mes bons messires, et vous pourrez dormir sur vos deux oreilles ! Testez votre femme ! Testez vos filles, vos servantes ou vos maitresses ! Et vous saurez si elles cachent une mutation ! Un sou seulement la piqûre !

    Anaëlle referma les persiennes de sa fenêtre, quelque peu déstabilisée par tant de pauvreté. C’était la première fois qu’elle était confrontée à ce type de situation et la jeune femme prit rapidement conscience de la chance qu’elle avait pu avoir dès sa naissance.
    La voiture de la compagnie des Quatre Saisons franchit le pont pour entrer dans le Winkelmarkt, le quartier des artisans. Anaëlle put contempler les forges et les fonderies qui s’étalaient le long de la berge. Elles ne s’arrêtaient jamais ! La nuit commençait à tomber et l’air résonnait toujours des coups de marteau et la lueur orangée de leurs feux se reflétait sur la surface des eaux comme autant d’yeux démoniaques.

    C’était dans ce quartier que se tenait la plus grande partie du commerce de Marienburg et les murs des hautes bâtisses de pierre à colonnades, devant lesquelles la diligence passait, arboraient les enseignes et les plaques de compagnies commerciales ou d’importation, ou bien d’associations de guildes et de notaires. Même à cette heure plutôt tardive, les rues étaient bondées et ça et là, la jeune femme pouvait apercevoir quelques patrouilles de Coiffes Noires qui effectuaient leur ronde et qui martelaient la gadoue de l’extrémité de leurs longs bâtons, des lanternes levées à bout de bras.
    La traversée de la Cité-Etat parut interminable, mais Anaëlle put découvrir toutes sortes de progrès technologiques et cela la rendait extrêmement impatiente de démarrer sa nouvelle vie. Après avoir traversé les quartiers du Suiddock et du Paleisbuurt, la diligence s’engouffra dans le Guilderveld.

    Cette nouvelle découverte apporta un parfum rafraîchissant de simplicité aux oreilles d’Anaëlle, en sus d’une étrange sensation de « chez-soi », quand bien même n’avait-elle jamais mis les pieds en ce lieu. Un curieux sentiment de fierté vint balayer le reste de tristesse qu’elle ressentait encore, la joie d’un nouveau départ, d’une nouvelle aubaine.
    Quelques rues plus loin, le carrosse s’arrêta. Dame Frida Janssens vivait dans une grande bâtisse à plusieurs étages du quartier Guilderveld. Anaëlle grimaçait d’excitation, elle se leva de la banquette et sortit de sa cabine, tout en examinant avec précaution la cour pavée. Elle était plutôt sombre et calme. Les bourgeois et leurs épouses étaient sûrement en train de dîner à cette heure. Elle descendit et se dirigea vers la demeure. Anaëlle frappa à la porte en savourant sa nouvelle liberté..
Modifié en dernier par [MJ] Le Grand Duc le 30 nov. 2014, 12:23, modifié 1 fois.
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Anaëlle von Elaeran, Voie de la Cour
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Re: [Anaëlle] Le murmure du pouvoir

Message par [MJ] Le Grand Duc »

Je vais faire une réponse courte pour deux raisons :
- la première, c'est simplement que ça se prête à la situation.
- la seconde, c'est que tu ne sembles pas avoir saisi ce que je t'expliquais sur la CB. Malgré le fait que tu ai visiblement fait un effort (sur le dernier paragraphe notamment), tu continues cependant sur la surenchère de descriptions. Comme je te le disais, l'environnement et les interactions sont posées par le MJ (en l’occurrence moi) et charge à toi d'interagir avec ces éléments. Non pas que tu ne puisses pas décrire certains objets, certaines actions de ton personnage, mais le problème est que ces descriptions d'environnement représentent la majeure partie de ton post !
Malgré le fait indéniable que tes descriptions soient de qualité et collent parfaitement avec l'atmosphère que j'essaie de donner moi même dans mon post, je voudrai vraiment que tu mettes ton style si agréable à lire au service des émotions de ton personnage, de sa pensée, de sa façon d'analyser ce qu'elle voit, de ressentir la situation, d'appréhender le passé/le présent/le futur.
Depuis le début de l'aventure, il est très difficile pour le lecteur -du moins moi- d'appréhender ton personnage, de le connaître plus profondément. Et pourtant il y a matière ! On commence sur le jour qui suit celui où elle a vu son père se faire pendre puis brûler devant la plèbe, suite à quoi elle a du quitter son petit village des marais pour se rendre, complètement seule, dans l'une des plus grandes et chaotique des capitales du Vieux Monde, sans même savoir ce qu'elle est sensée y faire ou y trouver !
Et pourtant, tes réponses sont (presque) vides de toute référence au passé de ton personnage, à son père, à toute cette histoire. On dirai qu'elle ne se pose aucune question, qu'elle se laisse seulement porter par les événements, et avec le sourire en plus !

Je ne prétends pas à t'apprendre le jeu de rôle, mais j'ai des exigences précises quant à ce que j'attends de mes PJ dans leurs réponses, et la plus importante à mes yeux et l'exploration de la personnalité de leur personnage, l'introspection dont ils sont capable, et l'illustration de leur pensées et de leurs réactions face aux situations et aux environnements que je mets en scène dans mes propres posts. Tu as tout à fait le potentiel pour y arriver, comme je te l'ai dit j'apprécie beaucoup ta plume et je suis certains que cet exercice ne va pas te demander trop d'efforts. Tu verras à quel point ce peut être gratifiant en tant que joueur de voir son personnage évoluer comme une personne réelle au fil de ses aventures.

A bon entendeur !
Le cocher et le garde de la diligence suivirent la jeune noble en portant ses malles, avant de les déposer à même les pavés et de la saluer. Ils regagnèrent la voiture et le fouet claqua. Les lourds percherons hennirent et firent battre leurs sabots sur l'allée, emmenant la voiture avec eux qui disparue de la vue d'Anaëlle au croisement d'une ruelle et d'un canal étroit.

La porte de l'hôtel particulier des Van Janssens était faite de chêne massif rehaussé par une armature en métal sculpté avec raffinement. Le pourtour du porche était cerclé par une couronne de lierre grimpant parfaitement taillée que surplombait les colombages et les immenses fenêtres du bâtiment. C'était visiblement une riche demeure.

Anaëlle se décida finalement à frapper à la porte. Elle entendit qu'on introduisait une clé dans la serrure depuis l'intérieur et la porte s'ouvrit lentement. Elle fût frappée de stupeur en voyant un homme à la peau noire se tenir dans l'encablure. Il portait un pourpoint bleu sur une chemise blanche, un pantalon en toile et des bottes en cuir classiques. Mais sa peau, son crâne chauve, son visage, étaient d'une couleur profonde, unie et incroyable pour Anaëlle qui n'avait jamais entendu parler d'un tel prodige. Les traits du visage de l'homme étaient pourtant bien humain, et il ne semblait souffrir ni d'une maladie, ni d'une mutation chaotique ...


Il la regarda avec intensité, le regard dur, avant de jeter un coup d'oeil vers les malles.

- "Salutations. Je suis Boba, le serviteur de Herr Van Janssees. Que puis-je pour vous ?" lui demanda-t-elle avec une voix profonde, en détachant nettement chaque mot tout en restant impassible.
Image
Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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