[Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

La Sylvanie inspire la peur dans le reste du Stirland. Depuis la sombre ville de Tempelhof, qui n'a pas eu de prêtre de Morr attitré depuis 800 ans, jusqu'aux contreforts des Montagnes du Bord du Monde, entre le bief de l'Aver et le Stir, la plus grande région du Stirland est un lieu de terreur et d'obscurité. On dit que les fantômes y évoluent en toute impunité à la nuit tombée parmi les collines Hantées et que l'épais brouillard des bois sylvaniens emprisonne parfois les âmes, les obligeant à y errer à jamais. La portion orientale de la province est la plus désolée, là où d'anciens châteaux noirs sont juchés sur leurs pics escarpés comme des vautours scrutant les villes en contrebas.

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[MJ] Scipio
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[Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par [MJ] Scipio »

La vie en Sylvanie (et en Stirland en général) n'avait jamais été très réjouissante. Etait-ce dû au climat, alternant entre orages de fin du monde et ciel gris ? La nature, essentiellement composée d'immenses forêts obscures où le loup n'est que le moindre des prédateurs ?
A moins que ce ne soit le fait que les rares havres de paix soient des châteaux tenus par des nobliaux rendus fous par des générations de liens morganatiques ? Allez savoir.
C'est cependant dans l'un de ces domaines situé au Nord de cette riante région riche en histoires sur des créatures de la nuit, et plus précisément sur les terres héréditaires des Barenholf que débute cette histoire.

Sis comme il se devait en haut d'une butte, le castel était un solide édifice quadrangulaire dont le mur d'enceinte était composé uniquement de gros blocs de maçonnerie gris surmontés en chacun de ses coins par des tours de guet massives. On pouvait accéder à la cour par une ouverture assez grande pour laisser passer une charrette et close par une grille en fer forgé. Cette cour était pourvue d'un puits, de grandes étables ainsi que d'un tout-à-l'égout permettant de déverser les eaux usées bien à l'écart des murs.
Bien que surtout bâtit de façon à pouvoir résister à l'assaut d'une meute de trolls, le château proprement dit était divisé en trois ailes disposées en fer à cheval : celle de l'Ouest pour les enfants du seigneur, celle du centre pour les réceptions et les invités, celle de l'Est pour le maître des lieux. Les domestiques n'avaient pas à proprement parler de quartiers, puisqu'ils venaient tous du village en contrebas qui faisait partie du domaine des Barenholf depuis toujours... et que les gardes vivaient rarement assez longtemps pour avoir à bénéficier d'un logement.

Cela faisait presque deux ans que Ludwig Von Carstein avait apposé son empreinte sur la famille Barenholf, sans que quiconque devine la raison d'un acte aussi insensé. Deux années de folie douce pour les six nobles qui avaient un jour été humains, qui comme tout appelé par la nuit qui se respectent avaient exploré la grisante limite de leurs pouvoirs, mais également de leurs faiblesses. Alors même que leur souffle avait perdu la chaleur de la vie, ils avaient néanmoins dû apprendre rapidement à tempérer leurs excès, et surtout à composer avec la perte de deux des leurs : Jarod, l'un des deux jumeaux, avait succombé lors de la transformation par le baiser de sang, et avait passé une journée à se vider de son fluide vital sans personne pour assister à son trépas. Il avait laissé derrière lui son frère, qui avait comblé la perte de sa moitié en sombrant dans un sadisme sans fond.
Boris quant à lui ne pouvait être considéré cliniquement mort, mais sa transformation avait fait ressortir ce qu'il y avait de plus bestial en lui, si violemment qu'il en avait perdu la raison. A présent incapable d'articuler le moindre mot, il ne vivait plus que pour sauter à la gorge du prochain être qui passerait la porte de la geôle où il était enfermé, qu'il soit humain ou mort-vivant. Ses hurlements résonnaient à toute heure dans les souterrains du château, mais le seigneur son père ne pouvait encore se résoudre à le mettre à mort de ses mains.

Cela n'empêchait pas la vie de se dérouler à la nuit la nuit, et Aemilia était d'ailleurs en train de lire dans ses quartiers à la lumière d'un feu de cheminée, lorsque Wilbur leur indéfectible chambellan plein de morgue était venu frapper à sa porte. Avec un savoir-vivre qui ne s'apprenait pas davantage en une année qu'en une décennie, il lui avait appris oralement que son père désirait la voir dans les plus brefs délais dans le petit salon de l'aile principale, puis l'avait attendu devant sa porte jusqu'à ce qu'elle se déclare prête.
Impassible dans sa jaquette noire assortie d'une chemise blanche qui ne pouvait que mettre en valeur sa peau translucide de serviteur blanchi sous le harnais, il l'avait alors conduite sans un mot à travers le château avant de s'arrêter devant une porte et de s'effacer après s'être brièvement incliné.
La pièce était indubitablement de dimensions réduites mais chaleureuse : une cheminée allumée, des étagères pleines de livres traitant probablement de la généalogie des grandes familles impériales, ainsi qu'un demi-cercle de quatre fauteuils en cuir brun faisant face à l'âtre.
Dans l'un d'eux était assis Harold Barenholf, qui paraissait plongé dans ses pensées. D'une stature moyenne, le poil mi-long et noir, les traits amaigris par son état de mort-vivant au point de paraître presque ascétique, la peau plus grise que pâle et la moustache en bataille, il paraissait soucieux. Son visage s'éclaira néanmoins lorsque sa fille passa la porte de la pièce, et il l'invita d'un geste à prendre place à son côté. Il était vêtu de cuir noir, des bottes à son gilet entrouvert sur une chemise de flanelle blanche en passant par ses braies. Ses yeux etaient deux puits jaunes presque luminescents à la chaleur des flammes.


- Aemilia, mon enfant... j'ignore comment cela se peut, mais chaque nuit t'embellit davantage. Tu es ma seule fille, et ce que j'ai à te demander me coûte.

Le seigneur joignit l’extrémité de ses doigts, hésitant. Il n'avait jamais été très prompt dans ses décisions, mais il était visible que même si il avait mûrement réfléchit celle-ci, il hésitait à en faire part.

- Je ne sais si tu t'en doutes, mais notre... changement d'état s'est accompagné de quelques complications. Ne me demande pas comment je l'ai appris, mais à ce qu'il semble le fait que sire Ludwig m'ait offert le don du baiser de sang en même temps qu'à toi et tes frères n'a pas été pour plaire à certains. Et quand je parle de certains, je ne veux dire rien de moins que la branche régnante de la large famille des Von Carstein, laquelle est d'ordinaire très pointilleuse quant à l'introduction de nouveaux membres.
J'ai également entendu dire que cette branche n'avait pas pour habitude de s'encombrer de fruits indésirables. Ce qui est advenu à Jarod et Boris a pu être interprété diversement de leur part, mais ce qui est certain c'est que nous devons prouver que nous partageons leurs valeurs. Comprends-tu ?


Le seigneur décroisa ses doigts griffus et les posa sur les accoudoirs de son fauteuil. Il n'avait pas lâché sa fille des yeux.

- Pour prouver notre valeur, il nous faut démontrer que nous sommes capables d'avoir une influence, d'être leur pair. Pour cela, je vais avoir besoin que tu accomplisses une tâche chez l'un de nos voisins. T'en sens-tu capable, pour notre survie à tous ?
Voilà, première passe d'arme pour la demoiselle. Si il y a quelque chose que tu ne comprends pas ou qui te paraisse douteux, n'hésite surtout pas à m'en faire part par message ou dans mon Colisée.
Morituri me salutant... enfin il paraît.

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Æmilia von Carstein
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par Æmilia von Carstein »

Mes yeux d'or pâle parcouraient les lignes à l'écriture ampoulée de l'ouvrage. La lecture était l'un de mes passe-temps depuis toujours, et depuis ma transformation, j'appréciais tout particulièrement les textes traitant du monde extérieur. Récits d'exploration, témoignages plus ou moins fiables, manuel d'étude sur des peuplades lointaines... Un auteur parmi tant d'autres retenait souvent mon attention et je déduisais à la prolifération de ses œuvres qu'il était non seulement érudit, mais peut-être bien de ma race, car un mortel aurait-il pu vraiment en apprendre tant dans sa courte existence ? Son nom était Christer, mais il ne s'agissait certainement que d'un pseudonyme. Et c'était sagesse : certaines choses qu'il avait écrites auraient été difficilement justifiables devant un templier de Sigmar.
J'eus un rire pétillant en refermant la couverture, posant le livre sur une table-basse à proximité. On frappait à la porte.


- Wilfbur, le jour où tu te départiras de ton insupportable politesse ampoulée, je daignerai répondre à tes propos. D'ici là, je ne bouge pas d'ici, et tu expliqueras à mon père la raison de mon retard.

J'adorais taquiner les domestiques du château, avec un humour noir ou acide comme celui-ci. Parfois, lorsque je n'étais pas d'une humeur très sociable, mes plaisanteries pouvaient prendre un tour sanglant.
Je ne m'attardais toutefois pas outre mesure, car si mon père était à ce point bienveillant, il ne valait mieux pas le provoquer trop souvent et il me semblait bien avoir rempli mon quota pour ce mois-ci. Je me contentais de passer un châle sur mes épaules, geste futile si l'on considérait que je ne ressentais plus le froid depuis deux ans déjà. Deux ans à découvrir un monde de ténèbres, un monde où le vivant était devenu une friandise, un met un peu complexe à préparer... J'étais un peu plus fine du palais que le reste de ma fratrie, hormis peut-être Tybald ; et comme si penser à l'un de mes frères en avait réveillé un autre, j'entendis l'écho lointain et étouffé de Boris. Enchaîné dans les profondeurs du château, il ne cessait de hurler sa rage et sa faim contre les murs de sa prison. J'avais ressenti de la peine à le voir ainsi, mais aussi un peu de mépris. Il avait succombé à sa bestialité, et cela, c'était uniquement de sa faute.
J'aurai pu pleurer froidement en le mettant à mort. J'étais ce genre de soeur.

Si on considérait, bien sûr, que j'en aurais été physiquement capable. Et ça, c'était loin d'être gagné d'avance.


- Cesse de lambiner, fis-je d'un ton faussement impatient en sortant de mon étude et en dépassant Wilfbur à prestes enjambées. Tu vas nous mettre en retard.

C'était une pique puérile, mais j'en raffolais.

Je trouvais mon père dans son propre boudoir, sa salle du trône à lui. Le feu qui ronflait dans la cheminée était suffisant pour réchauffer toute une famille de paysans, mais il ne parvenait à instiller sa chaleur ni dans mes os ni dans les siens. Il était habillé avec cette espèce de prestance décontractée qui lui allait si bien, carré au fond d'un des fauteuils faisant face à l'âtre. Un pli inquiet barrait son front et je ne pensais pas me tromper en disant que seul un problème concernant sa famille pouvait le troubler à ce point. Ce n'était jamais très bon signe.


- Aemilia, mon enfant... j'ignore comment cela se peut, mais chaque nuit t'embellit davantage. Tu es ma seule fille, et ce que j'ai à te demander me coûte.

Harrold Barenholf n'était pas vampire à tourner autour du pot et il entrait d'office dans le vif du sujet, ce qui m'amenait à songer que ses soucis n'allaient pas tarder à être les miens. Je souris néanmoins à sa remarque, lui dédiant une révérence légèrement moqueuse.

- Tout ce qu'il vous plaira, père. Si Richard a encore décidé de faire un carnage pour commémorer la mémoire de Jarod, j'irai lui frotter les oreilles avec grand plaisir.
- Je ne sais si tu t'en doutes, mais notre... changement d'état s'est accompagné de quelques complications. Ne me demande pas comment je l'ai appris, mais à ce qu'il semble le fait que sire Ludwig m'ait offert le don du baiser de sang en même temps qu'à toi et tes frères n'a pas été pour plaire à certains. Et quand je parle de certains, je ne veux dire rien de moins que la branche régnante de la large famille des Von Carstein, laquelle est d'ordinaire très pointilleuse quant à l'introduction de nouveaux membres.
J'ai également entendu dire que cette branche n'avait pas pour habitude de s'encombrer de fruits indésirables. Ce qui est advenu à Jarod et Boris a pu être interprété diversement de leur part, mais ce qui est certain c'est que nous devons prouver que nous partageons leurs valeurs. Comprends-tu ?


Je m'assombris à ces paroles comme seule une von Carstein peut s'assombrir. J'étais si jeune, un nourrisson en rapport des souverains auxquels mon paternel faisait référence... mais je n'en étais pas moins une véritable vampire de cette lignée ! C'était un droit d'appartenance que je tenais par le sang, et certains voudraient me le refuser ? Les ténèbres coulant dans mes veines étaient miennes tout autant que celles du fondateur de notre famille, et la nuit ne m'avait pas moins qu'eux adoptée.
Le vampire est un loup pour le vampire.


- Oui père, je comprends répondis-je sur un ton glacé.
- Pour prouver notre valeur, il nous faut démontrer que nous sommes capables d'avoir une influence, d'être leur pair. Pour cela, je vais avoir besoin que tu accomplisses une tâche chez l'un de nos voisins. T'en sens-tu capable, pour notre survie à tous ?

Les tisons ardents lui servant de yeux ne m'avaient nullement quittée, à aucun instant. Donner de ma personne pour l'influence de notre famille ne m'était pas une corvée, bien au contraire : j'en étais impatiente, pas tant par piété filiale que par ambition personnelle. Toutefois, je répugnais à le faire dans de telles circonstances, car j'avais l'impression d'agir plus pour notre survie que pour notre élévation. Ce qui n'était pas qu'une impression, en fait.
J'allais m'asseoir à sa droite, plongeant mon regard d'ambre clair dans la danse du feu livré à sa seule fantaisie.


- Il est curieux comme vous requérez mon accord de principe pour une mission dont vous ne m'expliquez pas encore la teneur.

Je fixais rêveusement l'âtre, plongée dans une contemplation dont j'étais la seule capable. Avec le baiser de sang, j'avais reçu mes pouvoirs vampiriques mais également la faculté de voir des... vérités... dans les flammes. Lorsque je n'y prêtais pas attention, j'avais l'impression de basculer et de m'absorber en elles... jusqu'à...
Je battais des paupières, m'arrachant à l'attrait hypnotique du brasier et prenant la main de mon père dans les miennes.


- Pardonnez-moi, souris-je insolemment. Vous savez que vous pouvez tout me demander, alors ne tardez pas davantage. La tâche qui m'incombe semble vous coûter et je vous en sais gré, mais s'il faut en passer par là... Dites-moi, de quel voisin parlez-vous et qu'attend-t-il de moi ?
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[MJ] Scipio
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par [MJ] Scipio »

Malgré la situation, Aemilia parvint à arracher un sourire à son père. Bien qu'il se soit souvent montré distant envers ses enfants lors de son vivant pour leur forger le caractère, il avait toujours eut une préférence pour Tybald et son unique fille, qu'il lui arrivait encore de considérer comme une enfant malgré tout ce qu'elle avait traversé.
Evidemment, il savait qu'elle ne refuserait jamais un ordre direct, d'autant plus que c'était grâce à elle que Richard était encore un tant soit peu sous contrôle... mais ce qu'il allait lui demander de réaliser comportait des risques ineffables, et pas seulement parce qu'elle pouvait aussi bien que lui se changer en feu de joie au soleil.


- D'après moi, la grande force de nos aînés immortels de Sylvanie est qu'ils sont parvenus à demeurer discrets tout en vassalisant leurs voisins. Je pense que c'est ce vers quoi nous devons tendre en cherchant un équilibre : trop faibles, nous serons des proies, trop forts, une menace.
Aussi ai-je cherché un nobliau que nous pourrions assujettir d'une façon ou d'une autre sans nous montrer irrespectueux envers plus puissants que nous... et je pense avoir trouvé.


Harold Von Carstein se leva souplement dans un froissement de cuir et se dirigea vers le fond de la pièce où se trouvait un bureau de bois sombre aussi colossal que rustique où étaient disposés plusieurs papiers éclairés par le contenu de deux bougeoirs.
Il commença par lui désigner une carte de Sylvanie, et plus précisément un territoire situé à une bonne journée de cheval au Nord-Ouest de leur domaine. Un château stylisé y était figuré près de la frontière avec les territoires plus "civilisés" du Stirland, portant le doux nom de Ravenberg.


- C'est ici que vit le frère d'un ami d'enfance, que j'ai contacté voici un mois. Il loge dans une forteresse qui a été un avant-poste il y a des siècles lorsqu'une armée de peaux-vertes est parvenue à une occasion à tromper la vigilance des nains. On dit qu'il tient l'endroit d'une main de fer, dur mais juste. Son nom est Julius, et je gage que tu l'adoreras.

Tendant la main, le seigneur prit délicatement entre ses doigts griffus un médaillon de bois où était peint avec beaucoup de raffinement le portrait en buste d'un bel enfant blond aux grands yeux d'un bleu si clair que l'on aurait juré deux lacs de montagne.

- En jouant sur notre ancienne amitié, et ce bien que nous ne nous soyons pas vus depuis plus d'une décennie, je suis parvenu à faire en sorte que tu deviennes la préceptrice de son plus jeune neveu, Ulric. Il semblerait que son père ait été capable de commencer à lui apprendre le maniement des armes mais pas la façon de se tenir à table ou de tourner un compliment.

Harold Von Carstein laissa échapper un petit rire de sa moustache, comme si il trouvait du dernier drôle le manque d'éducation du petit qui allait servir de marche pour son plan.

- Ton but, ma chère enfant, sera de trouver quelque chose qui puisse changer ce parangon de vertu de Julius en chien de manchon kislevite : trouve la faille dans son armure. Si il a un secret inavouable, tu dois le trouver, sinon le provoquer par quelque moyen que tu juges utile.
Tu auras pour toi l'atout de la jeunesse, et celui d'être la seule femme de haute naissance des lieux. Le seigneur de Ravenberg a en effet perdu son épouse de la même façon que dame ta mère il y a de cela sept ans, et il a un second fils qui a dépassé ses seize printemps.
Si tu te souviens de la façon dont se conduisaient Boris et les jumeaux à cet âge-là, je pense que cela pourrait t'ouvrir quelques perspectives.


Reposant le médaillon dont le vernis brillait à la lueur des bougies, le seigneur ramassa enfin une lettre enroulée et cachetée de cire rouge sang aux armoiries de leur famille. Il parut la soupeser un instant, puis la tendit à sa fille.

- Voici la lettre que tu présenteras pour témoigner de mes respects et de ma gratitude envers ton hôte. Il y est fait également mention de quelques détails te concernant, comme le fait que tu sois d'une complexion si fragile qu'une trop longue exposition au soleil te donne le vertige, et que ton estomac ne puisse guère s'agréer d'une nourriture trop riche.
Je te laisse seule juge des mensonges à lui servir pour expliquer tes... désagréments.


Les mains désormais libres, le noble vampire avait croisé les bras sur sa poitrine, continuant de fixer sa fille avec tout l'amour capable d'être exprimé par un père, même si son cœur ne battait plus. Le jaune de ses yeux avait à présent les reflet de l'or pâle.

- Je sais que tu ne me décevras pas, car tu es de loin la plus intelligente de mes enfant. Mon seul regret est de t'envoyer seule accomplir cette dangereuse nécessité, car tu comprends bien que je ne peux te faire accompagner par Richard... et que je préfère garder Tybald à mes côtés par précaution. Y'a-t-il autre chose que tu souhaites savoir, un objet que tu jugerais utile d'emporter ?
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Æmilia von Carstein
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par Æmilia von Carstein »

Cette intrigue me met tellement l'eau à la bouche *.* J'adore ! Du coup, gros pavé, c'est bien fait pour toi !
Je suivis mon paternel à pas lents, allant observer le vélin posé sur son bureau d'ébène massif. Ravenberg, situé à distance relative de notre domaine, était une citadelle où je n'avais encore jamais mis les pieds. Il était temps d'y remédier.

- Ainsi je vais l'adorer ? relevai-je, amusée par la supposition de mon père. Il me connaissait bien et je lui faisais confiance sur ce point, même s'il ne m'avait guère donnée de détails quant aux raisons de cette affection.

Je lui pris délicatement le médaillon le temps de l'étudier. Un tout jeune garçon aux traits angéliques m'observait, avec toute la convenance qu'il seyait à l'héritier d'un seigneur. L'artiste avait peut-être un peu brodé cette pose, si j'en jugeais à ce qu'on me laissait entendre quant aux manières du modèle. Mon sourire s'élargit lorsque je pris connaissance de la manière dont j'étais introduite dans la famille de Julius, à savoir en tant que préceptrice de son neveu. Ce rôle m'irait à merveille, j'en avais la certitude. J'étais prête à parier que s'il en avait eu vent (et peut-être était-ce le cas), Tybald m'aurait envié cette tâche jusqu'à en verdir de jalousie ! Lui qui appréciait tant de jouer le jeu au milieu des humains... C'était plaisant, c'est vrai : j'accueillais cette mission avec joie. Quitter le domaine pour un temps ne serait pas une bien grande peine, si j'arrivais à oublier l'épée de Damoclès qui paraissait planer au-dessus de notre nom.

- Le seigneur de Ravenberg a en effet perdu son épouse de la même façon que dame ta mère il y a de cela sept ans, et il a un second fils qui a dépassé ses seize printemps. Si tu te souviens de la façon dont se conduisaient Boris et les jumeaux à cet âge-là, je pense que cela pourrait t'ouvrir quelques perspectives.

Je me fendis d'un rire cristallin suite à cette remarque. Oui en effet, certains âges sont difficiles et particulièrement pour les garçons, semblait-il. Non pas que j'étais particulièrement innocente moi non plus, mais du moins faisais-je preuve d'obéissance et de bonne volonté quant aux désirs de notre père. Les vestiges de mon sourire demeurèrent sur mes lèvres tandis que je prenais la lettre scellée dans mes mains, appréciant les précautions prises par mon paternel ainsi que la marge de manœuvre qu'il me laissait. Cette escapade allait nécessiter une énorme dose de mensonges et je préférais que ce fusse moi qui les inventât, afin de m'éviter de m'embrouiller.

- Je sais que tu ne me décevras pas, car tu es de loin la plus intelligente de mes enfant. Mon seul regret est de t'envoyer seule accomplir cette dangereuse nécessité, car tu comprends bien que je ne peux te faire accompagner par Richard... et que je préfère garder Tybald à mes côtés par précaution. Y'a-t-il autre chose que tu souhaites savoir, un objet que tu jugerais utile d'emporter ?

Je savourais le compliment comme un enfant savoure les caresses de sa mère. Il me plaisait d'être vue ainsi, et ce n'était pas que de la flatterie : j'étais, de fait, subtile et ingénieuse. J'étais aussi arrogante, et recevoir de telles fleurs me procurait un plaisir que la répétition ne saurait ternir.
Au lieu de répondre à sa question, je remis les choses dans l'ordre à haute voix, ce qui m'aidait à me concentrer.


- Gagner Ravenberg et me poser en préceptrice d'Ulric, le neveu de Julius. Tel un serpent dans le nid, je rôderai dans la citadelle jusqu'à trouver ce que je cherche : la chaîne à nouer autour du cou du maître des lieux, et le plier à notre obédience. S'il est si vertueux qu'il n'existe déjà une telle entrave, je la fabriquerai moi-même en faisant de lui notre obligé.

Je me levais à mon tour, venant effleurer la reliure des livres de la bibliothèque en observant le silence quelques instants.

- Il peut bien avoir la noblesse d'un héraut de Bretonnie si ça lui chante, père. Votre Julius se soumettra à notre volonté, et si la chance me sourit, il n'en aura pas même conscience. Ceci étant...

Je pris une expression songeuse, revenant à ses côtés.


- J'espère que vous mettrez à profit le temps que je mettrais à y parvenir pour mettre la main sur un peu de bétail. Ca fait tellement longtemps que je n'ai pas fait d'excès... minaudai-je éhontément. Je n'étais pas du genre à être très démonstrative lorsque je me nourrissais mais une petite orgie de temps à autres faisait partie de mes péchés mignons, bien qu'ici je plaisantais à moitié. Plus sérieusement, j'aimerais prendre Noxeris avec moi pour faire le trajet. Vous savez, mon hongre. Ne me dites pas que vous l'avez oublié, j'ai tellement pleurniché pour l'avoir...

Nouveau rire insolent.

- Bien. Je vais aller me nourrir et puis je prendrai la route, après avoir fait mes quelques bagages. Vous direz au revoir à mes frères pour moi ? Ce n'est pas que l'idée de les voir s'étouffer de jalousie me répugne, bien au contraire, mais je ne sais pas ce que vous souhaitez leur dire à ce sujet, alors... Je ne vous décevrai pas, père.

Je sortis en refermant doucement la porte, dépassant un Wilbur impassible. En réalité, j'aurais aimé poser quelques questions supplémentaires à mon paternel mais c'eut été trahir certaines inquiétudes : quelles relations notre famille nouait-elle avec celle de Julius ? Où faire étape si le trajet devait durer plus que la nuit ? Ravenberg était-il un endroit pieux ? Je ressentais la foi comme une force oppressante qu'il valait mieux éviter de croiser, et je savais que cette aversion relevait du domaine très privé et intime des faiblesses de notre race, diverses et variées selon les vampires. Le sujet était tabou pour moi, refusant tout net de parler des miennes et même d'y faire ne serait-ce qu'allusion, même (voire surtout) au sein de ma famille.
Une fois dans mes appartements, je pris le soin de m'habiller chaudement comme n'importe quelle demoiselle aisée le ferait pour voyager : une longue robe d'un velours vert si sombre qu'il en prenait la teinte de l'herbe des forêts lors des nuits estivales, à laquelle j'ajoutais un chaperon d'un tissu presque semblable mais cette fois plus clair. D'un naturel pratique, je troquais mes brodequins de satin pour des bottes d'équitation en cuir souple. Heureusement pour mon égo, je n'étais pas frappée du mal qui ôtait à certains vampires le plaisir (ou déplaisir pour d'autres) de pouvoir s'admirer devant la glace, et ce que j'y vis flatta mon orgueil : mes atours me seyaient comme un écrin de jade peut seoir à une perle marine. Malgré tout, ma joliesse était encore celle d'une mortelle et n'avait rien de comparable avec la majesté de Ludwig, par exemple. Ceci, m'avait-on assuré, viendrait avec le temps... Après tout, je pouvais être patiente. C'est juste que je n'aimais pas le faire.

J'attrapais ma flûte que je glissais dans son étui rigide, et que je passais en bandoulière par-dessus mon épaule. Je m'y adonnais, de temps à autres, dans l'espoir de finir un jour par acquérir assez d'habileté pour ravir les oreilles de mon auditoire. Lorsque cela sera fait, je passerai à la harpe. Une longue-vue défraîchie y passa également, et bien que je me servais rarement de ce jouet, j'aimais beaucoup l'exhiber devant autrui. Un pistolet à poudre vint compléter la liste de ce que j'emportais : l'ayant trouvé lourd par le passé, je le trouvais désormais d'un poids négligeable en tant qu'immortelle. D'un beau métal blanchi peut-être à la chaux, il était d'une rare élégance et je m'en félicitais, tout en étant très fonctionnel. Il était plus raisonnable, au besoin, de démontrer que je savais me défendre à l'aide d'une arme à feu plutôt qu'en laissant un cadavre mutilé derrière moi. Et puis c'était plus propre ainsi.

Une fois prête, je ne pris pas la peine d'appeler un domestique pour préparer Noxeris : c'était une belle bête, et je me moquais bien de son pedigree quelconque. Je le trouvais dans les écuries, ignorant s'il s'était réveillé à mon approche ou bien s'il n'avait pas encore dormi. La nuit régnait à cette heure-ci mais ne pouvait faire obstacle à l'acuité de mes yeux fauve.


- Bonne nuit, toi. Je ne t'ai pas manqué ?

Il n'avait guère eu le temps de me connaître de mon vivant car je ne le montais que depuis trois ans, et paraissait habitué à ma nature de vampire. Je n'aimais guère qu'on l'approche, bien que n'étant pas lui-même si hostile, et m'occupais personnellement de le seller (le desseller et l'étriller, en revanche, incombait aux palefreniers). Une fois fait, je le guidais jusqu'au-dehors avant de l'enfourcher. Ses sabots frappèrent le sol grossièrement pierré menant à la herse.

- Allez, messires dormeurs, ouvrez-moi ça ! lançai-je sarcastiquement à l'adresse des gardes qui avaient bien vite saisi notre prédilection pour le rythme de vie nocturne. La grille se releva dans un grincement qui me fit froncer des sourcils : il faudrait qu'ils huilent un peu le mécanisme, ou je-ne-sais-quoi, mais il y avait quelque chose à faire pour nous épargner ce son désagréable.

Mais qu'importait ! Ce soir je quittais le château pour aller me plonger dans le monde des humains, songeais-je en éperonnant Noxeris. Nous franchîmes le seuil du domaine à un train d'enfer, que je ne tarderais de toute manière pas à réduire : ma monture n'était pas infatigable, elle, et le trajet prendrait probablement plus d'heures qu'il n'en restait à la nuit. Je n'étais pas particulièrement vulnérable au soleil mais il restait un désagrément s'en allant croissant avec la durée d'exposition, aussi comptais-je bien faire halte quelque part. D'après mes estimations, je risquais donc de n'arriver que le lendemain à destination.
Qui sait ce qu'il pourrait advenir d'ici là...
Aemilia von Carstein, Page éternelle
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[MJ] Scipio
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par [MJ] Scipio »

Comme à son habitude, Aemilia avait filé avec la fougue d'un pur-sang dès qu'elle avait eu fini de placer une ultime pique à l'intention de ses frères, prouvant par là même que malgré ce qu'elle considérait comme une chance de partir à l'aventure, ses pensées demeuraient néanmoins tournées vers sa famille. C'était en de telles occasions qu'Harold se demandait d'où pouvait provenir cette fougue commune à toute la fratrie, alors que lui-même se considérait comme un individu réfléchis... avant de se rappeler que lui-même avait répondu plus souvent qu'à son tour agis de façon romanesque autant pour faire enrager son propre père que pour imiter les récits d'aventure des compagnons de Sigmar qu'il avait bu en même temps que le lait maternel.
Étouffant un petit rire, le seigneur croisa les bras dans son dos et sortit à son tour du salon pour donner des instructions pour veiller à parer à l'empressement de sa fille.

C'est ainsi que, lorsque la jeune descendante von Carstein eut ralenti après être sortie à un train d'enfer du château familial et qu'elle arrivait en vue du village en contrebas, elle put entendre un double bruit de galopade effrénée sur ses talons. Deux cavaliers portant les armoiries de sa maison ne tardèrent alors pas à se porter à sa hauteur.
Celui qui se trouvait à sa droite était un homme d'arme de grande taille, dont le poil écarlate s'harmonisait parfaitement avec son teint rougeaud et dont la cotte de maille avait clairement des difficultés à contenir son imposante bedaine. Outre la lance qu'il serrait dans son poing droit, un écu de bois lui barrait le dos et une épée battait à son flanc.
Son compagnon, qui avait rattrapé la jeune femme par le flanc gauche, était son exact opposé : d'une constitution beaucoup plus sèche, il avait une complexion de peau et des cheveux noirs qui pouvaient indiquer une ascendance tiléenne. Il aurait pu être beau si son nez n'avait pas été si crochu et ses incisives si avancées. Lui aussi protégé par une cotte de maille, mais il arborait de plus un cimier à nasal, sans compter que sa lance et son bouclier avaient été remplacés par un arc dont le carquois remplis était accroché à la fonte de sa selle.
Le plus imposant des deux hommes ouvrit aussitôt les civilités, d'une voix enrouée par l'abus fréquent d'alcool.


- Gustaf et Conrad pour vous servir, milady. Votre père nous a ordonné de vous servir d'escorte, car vous savez que les routes ne sont pas sûres la nuit, surtout pour les jeunes dames comme vous, sauf votre respect.
Il y a une auberge sur la route vers Ravenberg où nous pourrons nous reposer lorsque vous le désirerez. Une fois arrivés à votre nouveau domicile, ce sera à vous de nous dire si vous pensez que notre présence sera... comme qui dirait indésirable. Vous savez, si on risque d'offenser messire Julius, quelque chose dans ce goût-là.
J'oublie quelque chose, Conrad ?


-Tu oublies juste un détail d'importance, outre à vinasse, rétorqua l'autre d'une voix nasillarde. Milady, il semblerait que vous ayez pris votre tâche d'éduquer le fils cadet de messire Ravenweinen tellement à cœur que vous ayez oublié vos bagages au château. Je n'y connais pas grand-chose, mais je crois que l'éducation d'un jeune sire vous demandera probablement quelques années... le seigneur votre père a également dû y songer, et il vous fait dire qu'il aura besoin de faire savoir ce dont vous avez le plus besoin par la première lettre que vous lui enverrez, à moins que vous ne préféreriez que je lui fasse parvenir moi-même le message.
"Il ne serait pas céans qu'elle paraisse autrement qu'à son plus bel avantage", tels sont ses mots, et...


- Tu parles trop, Conrad, et j'ai connu des orcs en chaleur qui avaient une voix plus aguichante que la tienne. Sauf votre respect, milady.

Le maigrichon renâcla, sembla préparer une remarque piquante, mais se contint en considérant la présence d'une dame à ses côtés. Les deux se le tinrent pour dit et n'échangèrent pas un mot entre eux alors qu'ils traversaient le village aux volets fermés et qu'ils s'enfonçaient dans une route à travers la forêt. Avançant au trot pour ménager leurs montures, il était clair qu'au moins deux des trois membres du trio n'étaient pas spécialement rassurés, et plus d'une fois leurs paumes s'étaient aventurées vers la garde de leurs armes respectives alors qu'un glapissement éclatait dans les buissons.

La lune était encore haute dans le ciel lorsqu'ils parvinrent à ce qui ressemblait fort à un barrage : trois arbres coupés à la hache avaient en effet été tirés en travers de la route et leurs branches enchevêtrés suffisamment pour qu'un cavalier ne puisse que difficilement sauter par-dessus. Les buissons bas sur le bord du chemin semblaient praticables, mais qui sait si ils ne dissimulaient pas quelque trappe ou fossé ?
Un homme jusqu'ici dissimulé près du bord droit de la piste émergea des ombres. Vêtu d'une vilaine armure de cuir rapiécée, il portait négligemment à sa ceinture un sabre court. Levant le visage, les cavaliers purent s'apercevoir à la lumière lunaire que son visage ingrat encadré de cheveux noirs longs et crasseux était mangé de petite vérole.
Les bras croisés, l'air goguenard, il toisa le groupe avec aplomb et débita quelques paroles rodées par l'habitude.


- Héhé, on dirait que j'ai de la chance, ce soir...
Ma mignonne, je vais te la faire courte : tes casseroles se tiennent tranquilles, tu nous donnes tout ce que tu as de précieux, et on te laisse passer sans faire d'histoire. Résiste, et tu pourras t'estimer heureuse si tu vois le le jour se lever. Tu choisis quoi ?
Morituri me salutant... enfin il paraît.

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Æmilia von Carstein
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par Æmilia von Carstein »

Gustaf et Conrad, à peine leur annonce achevée, me firent penser à un couple de perroquets, oiseau dont j'avais pu prendre connaissance au travers de mes lectures sur de lointains continents. Ils avaient leur fantaisie et leur allure, contrastant si fortement l'un avec l'autre et pourtant liés à mon seul service. Je me tapotais la lèvre inférieure, me faisant la remarque qu'il était peut-être erroné de prêter une uniformité excessive aux mortels. Ils ne se ressemblaient pas tous, comme j'avais l'habitude de le croire. Et s'ils étaient uniques, chacun à leur façon ? J'essayais de me rappeler de moi-même à l'époque où mon coeur battait encore mais la chose n'était pas aisée. C'était comme tenter de retrouver ses traces dans le brouillard... Je me souvenais avoir marché et parfois trébuché, mais guère ni par où, ni combien de temps.

- Tu parles trop, Conrad, et j'ai connu des orcs en chaleur qui avaient une voix plus aguichante que la tienne. Sauf votre respect, milady.
- En ce cas je vous plains, Gustaf, fis-je narquoise avant de talonner ma monture.

Tandis que mes suivants s'acharnaient à scruter les buissons avec des yeux méfiants, je me prenais à réfléchir aux fournitures dont j'allais effectivement avoir besoin pour remplir la tâche, superficielle mais nécessaire, consistant à pallier à l'éducation du jeune Ulric. Non pas de matériel d'écriture, ou outils de quelque autre domaine de la bienséance dans lequel il aura à s'exercer, mais plutôt des manuels qu'il pourrait compulser lorsque je ne serais pas à ses côtés. S'il ne sait se tenir en bonne compagnie, il faudra le réprimer sur ses actes puis lui en expliquer la raison ; si l'origine de sa mauvaise tenue provient de la langueur qu'il éprouverait à assister son oncle en société, alors il faudra, en plus de l'éduquer, l'instruire. Ainsi il prendra goût à partager ses connaissances, à bâtir son image devant les autres nobliaux au travers de la discussion... Sa vanité l'emporterait sur son ennui.

Ce fut le ralentissement de Gustaf et Conrad qui me tira hors de mes pensées et je vis alors ce que mes distractions intérieures m'avaient empêché de remarquer plus tôt : des arbres abattus en travers de la route, leurs cimes se mariant de manière à rendre bien audacieux leur franchissement par un cavalier. Au-devant de l'obstacle, sur le côté dextre, se tenait un vilain d'apparence bien fier de lui.


- Héhé, on dirait que j'ai de la chance, ce soir... Ma mignonne, je vais te la faire courte : tes casseroles se tiennent tranquilles, tu nous donnes tout ce que tu as de précieux, et on te laisse passer sans faire d'histoire. Résiste, et tu pourras t'estimer heureuse si tu vois le le jour se lever. Tu choisis quoi ?

Il exigeait bien peu qui m'importât, en réalité. Sinon ma susceptibilité, et elle était chatouilleuse.
Son assurance ne manquait pas de souligner la présence de comparses sur les bords du chemin, et nombreux de surcroit. Je ne comptais nullement accéder à sa demande, pas plus que je n'avais envie de perdre mon temps à m'occuper du cas de sa bande. Alors, au fond de mon âme noire, je recherchais le pouvoir qui m'avait été donné. Plus qu'un don c'était un droit que je tenais par le sang, pour ainsi dire héréditaire, et j'allais en faire usage ou du moins tenter d'y faire appel. Aussi je mobilisais les ténèbres cachées derrière la blancheur satinée de ma peau, bandant ma volonté comme on pourrait bander un arc. J'étais versée dans l'art de la Nécromancie, en théorie plus qu'en pratique : je savais qu'il fallait se saisir des miasmes de magie environnants, les plier à mon désir et ainsi canaliser ce que les sorciers appelaient la Dhar. Mais là ne s'arrêtait pas l'ouvrage, car il restait encore à insuffler cette force brutale dans le souffle de Shyish, le vent pourpre du trépas, avant de façonner les sortilèges de la magie des morts. Il planait sur ces lieux, ombre discernable à mes seuls yeux de prédateur mais perceptible parfois aux mortels sous la forme d'un pressentiment, d'une mauvaise impression, d'un murmure glacé dans le dos...

Ainsi j'en appelais à la Nécromancie, saisissant les fils de la Dhar et de Shyish et tissant une lugubre tapisserie en quelques instants, à la seule force de mon esprit. Satisfaite, je projetais l'écheveau mortuaire sur la droite de la route, quelques pas dans la pénombre derrière l'importun : les défunts l'apercevraient si j'avais bien travaillé, et se relèveraient de terre afin de répondre à mon appel.


- De grâce, messires, soyez assez adroits pour remettre son dû à notre hôte, ainsi nous pourrons aussitôt reprendre la route.

J'espérais que Gustaf et Conrad comprendraient mes sous-entendus, craignant que ma formule ne soit trop subtile pour eux. En termes simples, elle revenait à ceci : passer à droite du chemin, tenter d'estourbir le malandrin au passage et poursuivre notre périple en semant les poursuivants.
Histoire d'être un peu plus claire, j'invitais le grand roux à passer devant d'un geste élégant de la main - et avec un grand sourire carnassier.


- Allez-y le premier, et n'oubliez pas que ce sieur souhaitera vérifier de ses dents la teneur du métal. C'est coutume parmi le peuple, ai-je ouï dire.

J'utilise donc Réanimation en visant le bord droit du chemin, derrière l'autre malotru (où se cachent ses camarades je suppose). Par mes mots j'essaie de faire comprendre à mes suivants la marche à suivre, à savoir tenter de passer à toute allure du côté droit de la route, là où (j'espère !) quelques squelettes se seront relevés. Et si au passage Gustaf réussit à prêter sa lance en guise de cure-dent à monsieur le voleur, je ne pourrai qu'approuver le geste. C'est d'ailleurs lui que j'invite à passer en premier, suivi de Conrad puis de leur magnifique maîtresse :3 Il faut bien que je veille sur leurs arrières après tout.
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[MJ] Scipio
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par [MJ] Scipio »

L'action qui suivit sous le regard amusé de Séléné fut des plus confuse, et il n'y eut bien qu'elle qui put en comprendre les aboutissants.
Faisant preuve d'un sens tactique rare pour quelqu'un de son sexe et de son âge, Aemilia avait d’instinct posé les bases d'un plan de bataille qui aurait dû lui permettre de passer sans coup férir au milieu du traquenard des bandits comme une hirondelle dans une toile d'araignée. Faisant appel à toutes ses connaissances nécromantes, la belle avait dirigé l'énergie de son sort de telle façon à ce qu'avec un peu de chance un mort vengeur se relève pour semer la confusion parmi ses détrousseurs.

Jet d'INT pour le lancement du sort Réanimation : 3. Réussite.
Gain de 1 pm
Lancé impeccablement, l'énergie du sort avait été propulsée à proximité du barrage, avec pour seul manifestation un sifflement d'air que tous mirent sur le compte du vent. Pendant un instant, la jeune Von Carstein crut que son sortilège avait échoué jusqu'à ce qu'elle sente un vague contact à la lisière de sa conscience. En se concentrant un peu, elle put alors se rendre compte que le résultat n'avait pas vraiment été à la hauteur de l'effort : faute de cadavre humanoïde à se mettre sous la dent (la journée avait été fort mauvaise pour les gibiers de potence), l'énergie nécrotique s'était rabattue sur la seule carcasse disponible, à savoir celle de Squeeky l'écureuil, mort le matin même dévoré par un corbeau. L'animal se releva donc, achevant de perdre le restant de son panache caudal, et leva son museau en étudiant avec curiosité son environnement de ses yeux pâles dans l'indifférence générale.

Sur un registre moins champêtre, il s'avéra que si ses braves gardes du corps avaient bel et bien entendu ses directives, il n'était pas certain qu'ils aient percé à jour les intentions véritables de leur jeune maîtresse. En effet, vivre au service d'un noble sylvanien entraînait plus souvent qu'à son tour à fermer les yeux sur certains agissements, de crainte d'en être la prochaine victime... pour être poli, cela encourageait davantage au développement de la discrétion qu'à celui de l'intelligence.

Jet de Charisme pour voir si les gardes t'écoutent : 13. Échec
Hélas, il advint que les deux soldats avaient leur propre idée sur la meilleure façon de réagir à de telles embuscades. Gustaf ne bougea pas, préférant ne pas attiser l'excitation des archers qu'il devinait massés par dizaines dans les buissons... tandis que Conrad, tel le jouvenceau pétri de récits chevalresques qu'il était, prit la plus mauvaise décision possible.

- Mylady, il est impensable que nous cédions à ces vauriens. Laissez-moi un instant, je vais balayer cette racaille !

Sur ces mots, il piqua aussitôt des deux et chargea le bandit la lance en avant, tout en hurlant la devise de la maison qu'il servait.

- QUE L'OURS LEUR CROQUE LE CŒUR, BARENHOOOOLF !

Si ses compagnons furent trop surpris par sa enthousiasme pour réagir, il n'en fut pas de même pour le malandrin : ayant visiblement déjà vécu cette situation à plusieurs reprises, il se contenta de plier les genoux comme si il s'apprêtait à bondir, tandis que son sourire mauvais s'élargissait comme celui d'un crapaud.
Il n'était cependant pas le seul à se tenir aux aguets, et des ténèbres de chaque bas-côté du barrage jaillit une flèche qui était destinée à son assaillant monté.

Jet de TIR pour la première flèche : 1 ! Coups critique !
Jet de TIR pour la seconde flèche : 7. Réussi !

Jet de dégât pour la première flèche : 15 x 2 du au coups critique : 30.
Jet de dégât pour la seconde flèche : 20.
PV restant de Conrad : 10
Le premier trait, quoique grossièrement taillé, atteignit Conrad aussi surement qu'une flèche elfique en plein torse. Les mailles de son armure se tordirent comme si elles avaient été de mie, puis ce fut la fine chemise de cuir qui céda, une autre de lin, et enfin la chair. Le poumon gauche du pauvre jeune homme qui se croyait chevalier fut perforé de part en part, le faisant tressauter dans un hoquet d'incompréhension. Plus mort que vif, il aurait néanmoins pu demeurer en selle si le second trait n'avait pas trouvé son chemin jusqu'à son genou gauche, qui lui ne bénéficiait que de la protection de braies de mauvais cuir. L'os fut défoncé, et ce nouvel impact acheva de le désarçonner. Il chuta lourdement au sol en émettant un borborygme sanglant, tandis que son cheval se cabrait et tentait de faire demi-tour en hennissant d'effroi.
Jet de TIR : 13. Raté
Un troisième tir, provenant cette fois des buissons directement à la gauche d'Aemilia, avait été décoché à la hâte. Heureusement, celui-ci avait déraillé et était allé se planter dans la poussière du chemin loin des cavaliers. Pendant la mise à mort de son cadet, Gustaf avait profité du chaos pour lâcher les rênes et s'emparer de son bouclier passé dans son dos tout en poussant un juron sonore. Bien lui en prit, car aussitôt la voix du chef de bande éclata, plus gouailleuse que jamais.

- haha, faut-y être con comme un orc pour faire ça, c'est pas possible !
Allez les gars, c'est l'heure de la curée ! Mais attention, la première danse avec le tendron est pour moi !

Poussant des grognements d'excitation, un bandit sortit des buissons de chaque côté d'Aemilia, armés l'un d'une hache et l'autre d'un gourdin. Pendant ce temps, le chef avait dégainé son cimeterre ébréché et avançait d'un pas conquérant sur ce qu'il considérait depuis le départ comme sa proie. A croire que la vue du sang l'avait mis en appétit.
Les archers ne se montraient toujours pas, sûrement encore indécis entre l'option de bander à nouveau leurs engins de mort et celui de les laisser tomber pour participer eux aussi à la "curée", comme l'avait ordonné Gueule-Grêlée.

Pour information, je te précise que tu as techniquement toujours le temps de faire volte face pour repartir d'où tu es venu. Bien sûr, tu peux toujours tenter de forcer le passage ou de te battre, sachant que tu as toujours à tes côtés Gustaf et Squeeky l'écureuil (qui est à côté de l'archer se trouvant du côté droit du barrage).
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Æmilia von Carstein
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par Æmilia von Carstein »

Thème d'action, et oui !
Il semblait que nul mortel n'ai eu la décence de trépasser par ici, et je m'en trouvais bien ennuyée. Il était décidément impossible de leur faire confiance, et ce jusque dans leur inéluctable destin puisqu'il renâclaient à l'accomplir... Sauf Conrad, bien sûr, qui avait eu l'idée aussi chevaleresque que déplaisante de n'en faire qu'à sa tête, qu'il avait fort vide. Je pinçais les lèvres lorsque les traits empennés jaillirent du noir pour mordre dans son corps, perçant le métal et la peau sans distinction apparente. Le cavalier chuta lourdement au sol, évitant du même coup un énième projectile qui aurait manqué de lui ôter son dernier souffle. Car je le sentais : l'homme à l'ascendance tiléenne n'était pas mort. Cela en ferait peut-être un serviteur plus valable, songeais-je avec ironie. Son coeur battait toujours, affolé et laborieux : j'entendais sa panique résonner à mes oreilles, les échos de sa douleur le forçant à l'immobilisme.
J'aurais aimé le sauver. Les yeux de fauve avec lesquels je le couvais étaient presque bienveillants, ou presque tristes, qui aurait pu le dire ? D'un autre côté, il avait agi en imbécile et sans aller jusqu'à dire qu'il méritait son sort, du moins en était-il largement responsable. Je poussais un léger soupir, avant de secouer la tête pour agiter ma crinière de rubis sombre. J'éclatais d'un rire froid et mauvais, écartant les bras comme pour accueillir l'étreinte de la nuit. Je ne comptais pas combattre, mais s'il restait une toute petite chance, néanmoins, de sauver Conrad... je la tenterai.


- Je suis heureuse qu'il existe encore des ânes bâtés dans votre genre pour faciliter les choses...

La terreur était l'arme des seigneurs, et l'une de mes préférées. Je devais m'entraîner à l'utiliser, encore et encore, jusqu'à l'aiguiser comme d'autres aiguisent leur épée. Dans cette optique, je fis appel à l'un de mes pouvoirs qui, aux yeux de mon auditoire, avait pour effet d'affermir ma présence. Si ces coupe-jarrets se laissaient impressionner, nous pourrions emmener Conrad jusqu'à l'auberge dont avait parlé Gustaf et nous affairer à le sauver.

- Je sens le désir dans votre coeur... fis-je d'une voix suave, souriant de toutes mes dents. Il fait gonfler le mien d'une irrépressible envie. Vous voulez du sang ? Vous allez en avoir, plus que vous n'en avez jamais rêvé dans les plus rouges de vos cauchemars.

Tandis que je parlais, je relâchais la bride de mes propres constrictions. Mes ongles s'étirèrent jusqu'à briller comme des rasoirs effilés sous le regard de la lune, et dans sa lumière argentée mes crocs apparurent en luisant de salive, reflétant la faim du fond de mes yeux qui n'avait rien de feinte. Une fois de plus je me mis à manipuler les vents de magie, mais avec bien moins de force que précédemment. Ce n'était rien qu'un tour de passe-passe, mais il faisait forte impression sur les crédules et l'ambiance s'y prêtait bien. Je jetais mon esprit à l'assaut de la réalité, cherchant à convoquer les feux-follets que la rumeur populaire associait volontiers aux esprits malins. Si j'y parvenais, ils surviendraient tout autour de nous, projetant leur fausse clarté aux tons de vermeil sur la scène. Quant à Squeeky (adorable mais que pour l'instant, j'aurais certes troqué contre un serviteur un peu plus martial), je lui suggérais au travers de ma volonté de grimper sur l'épaule du chef des malfrats afin de lui couiner aux oreilles. Cela aurait pour effet de faire ressortir encore davantage l'aspect surnaturel que je donnais aux instants présents.
Je continuais en grondant entre mes dents, faisant marcher Noxeris droit sur le bandit se tenant au-devant des obstacles.


- Vous m'avez fort divertie, raclures. Et je ne suis pas votre seul public : l'esprit des morts marche à mes côtés, car ils me servent et se rient de vous. Les entendez-vous se gausser ? Ils devisent sur la façon dont vous les rejoindrez.

Je me permis un autre rire, perclus d'une joie impie, comme si je venais de faire la plaisanterie du siècle.

- J'aime les frustrer, aussi je vous laisse quelques secondes pour disparaître. Tournez les talons messires voleurs, me moquai-je ouvertement, et vous aurez une chance de ne pas me servir après votre trépas. Pour le divertissement que vous m'avez procuré, c'est là... ma miséricorde.

Je dévisageais mon vis à vis d'un regard de loup qui ne cillait pas, ayant fait tout mon possible pour instiller la terreur dans son coeur. Néanmoins je tenais fermement la bride à ma monture et à la moindre alerte, lui ferai faire volte face pour décamper : Conrad ne valait pas non plus que je risque ma personne pour lui.

Donc dans l'ordre... :P
1) Abandon de l'apparence humaine
2) Utilisation de Charisme surnaturel (jet INT+2 => CHA+2)
3) Utilisation de Feux-Follets (jet INT+3 => 1D10 feux follets)
4) Tentative d'intimidation sur les bandits (proie présumée qui se rebiffe comme une méchante de dessin animé, concours de Squeeky la terreur des Bois, un peu de mensonges par-ci par-là... \o/ )

Je me permets de faire beaucoup d'actions différentes parce que c'est une scène plutôt qu'une bagarre mais si ça ne va pas j'éditerai ^^
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Re: [Aemilia Von Carstein] Un mariage et deux enterrements

Message par [MJ] Scipio »

Alors que les malandrins s'étaient mis à lentement encercler la fille de seigneur et son garde du corps (à supposer qu'encercler soit synonyme d'oublier de couper toute retraite), le temps s'était soudainement comme figé. La lune resplendissait alors de son plus bel éclat opalin, jetant sur la route un voile spectral qui avait enveloppé tous les protagonistes visibles de cette sinistre farce champêtre. Le cœur même de la forêt avait cessé de battre tandis qu'Aemilia von Carstein laissait choir son masque de petite noble sylvanienne au verbe haut.
Jet d'INT pour le don du sang apparence humaine (inversé) : 2. réussi.
Était-il possible d'établir le moindre lien entre la délicate jeune fille et la bête aux crocs aigus et aux yeux fous qui les toisait comme seuls savaient le faire les grands fauves envers leurs proies ?
Les yeux de tous les hommes présents s'écarquillèrent de surprise, leur esprit refusant pendant quelques instants d'admettre ce que leur renvoyaient leurs sens.
Ils ne pouvaient pas imaginer que la vampire ne s'arrêterait pas là pour faire étal de sa sombre splendeur... révélatrice d'une coquetterie toute féminine, sans doute.

Jet d'INT pour le sort charisme naturel : 19. Échec.
Jet d'INT pour le sort Feu Follet : 13. Réussite.
Dans un geste délié, la créature de la nuit fit apparaître le long de ses bras graciles quatre flammèches fantomatiques qui se mirent aussitôt à danser une sarabande maléfiques autour d'elle, comme si elles étaient animées d'une vie propre. Ces feux follets apparurent comme autant d'âmes damnées les invitant à les rejoindre. Ce fut le point d'orgue du spectacle, si bien que personne ne prêta attention à l'intervention de Squeeky, qui avait courageusement bondit aux pieds de Gueule-Grêlée pour lui cracher le mépris de sa maîtresse au visage.
Un instant transis d'horreur, il advint que l'un des bandits retrouva suffisamment l'usage de ses cordes vocales pour pousser un cri strident qui signa le début de la débandade de tout ce beau monde à travers bois.

Ce qu'Aemilia n'avait en revanche pas escompté, c'est que le brave Gustaf réagirait exactement de la même façon, et que ce n'est que par réflexe qu'il tourna bride pour se ruer en direction du seul endroit qu'il pensait sûr (sur le moment), le domaine Barenholf. Vu le train d'enfer qu'il imposait à sa monture comme si il avait tous les archidémons connus à ses trousses, il ne faudrait que peu de temps avant qu'il ne soit plus qu'un point suivi d'un panache de poussière à l'horizon.
Si bien que sur le chemin encombré, il ne demeura plus que la demoiselle aux crocs impudiquement dénudés, un Conrad toujours bavant de sang qui avait des difficultés à trouver la penne de la flèche à arracher de son torse chenu et un écureuil mort-vivant qui se demandait comment il avait pu échapper à une seconde mort par piétinement lors de la débandade générale.

Une compagnie pour le moins originale, et déplorable pour une demoiselle perdue au milieu des bois.
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Æmilia von Carstein
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Message par Æmilia von Carstein »

- Evidemment, maugréai-je entre mes canines en regardant Gustaf piquer des deux de fort discourtoise façon. Ce n'était pas à lui que s'adressaient mes menaces, alors pourquoi s'enfuir ? Mon père n'avait-il pris soin de me déléguer des hommes au secret de notre nature ? Il ne semblait pas, et bien que la chose se comprenait je n'en tenais pas moins rigueur à mon paternel. Enfin, autant en emporte le vent ! J'étais décidément bien mal servie, et les mortels me semblaient à jamais incompréhensibles.

En parlant de mortel il en était un qui ne paraissait guère loin de trépasser, et si l'idée m'eût agréée plus tôt, je ne comptais plus désormais laisser Conrad passer dans l'autre monde. Surtout pas après les efforts déployés pour lui venir en aide. Néanmoins, à y bien réfléchir, la meilleure façon de voler au secours d'une telle tête brûlée serait peut-être bien de le laisser se vider de son sang - ce dont mon seigneur m'aurait blâmée, car c'était là du gâchis.


- Qu'est-ce que tu en penses, Squeeky ? fis-je à l'intention du rongeur, venu se percher sur mon épaule.

L'intéressé se borna à couiner de façon énigmatique, mais nul doute que son propos recélait une sagesse insondable m'étant malheureusement opaque. Formulant le voeu intérieur qu'un jour la race des écureuils prenne l'ascendant sur celle des hommes, tellement plus stupide, j'allais m'agenouiller auprès de Conrad tout en réfrénant au mieux l'appétit que son état faisait pulser dans mon être. Et mieux valait aussi réfréner mon apparence : avec un peu de chance, il avait été suffisamment ébranlé pour ne pas comprendre la scène venant de se dérouler, ou la mettre plus tard sur le compte du délire s'il venait à survivre.
Une fois au chevet du blessé je me mis à regarder les étoiles, une main posée sur son torse émaillé de sang.


- C'est une triste nuit pour mourir, Conrad. Vous n'allez pas me faire cet affront, n'est-ce pas ?

Sans savoir guérir autre chose qu'un bleu, et encore, je pouvais tout de même juger qu'il était plus proche de la mort que je ne l'étais. Ou peu s'en fallait, aussi devenait-il urgent d'agir pour son salut ou sa fin, selon que je me sentais d'humeur charitable ou aimable. Me sentant portée par un élan de générosité (et refusant catégoriquement qu'il tourne en ridicule mes efforts pour le sauver en se contentant d'expirer ici), j'allais chercher son cheval affolé d'abord en lui saisissant fermement la bride, puis en le cajolant comme j'aimais le faire avec Noxeris. La bête parut se calmer un peu, assez pour que je l'amène auprès de son cavalier au sol.

- Un coup de main, Squeeky ?

L'effronté se contenta de me regarder tandis que je me démenais pour remettre Conrad en selle, ou plutôt le faire tenir en équilibre sur sa monture. J'étais plus forte qu'un homme ordinaire, mais loin d'avoir la puissance époustouflante caractérisant les guerriers de mon espèce, et l'affaire ne fut pas aisée. Observant mon serviteur vaseux manquer de dégringoler de son perchoir, je ne pu m'empêcher de pousser un soupir exaspéré. Au moins son sang avait-il un peu de goût, comme je le remarquai en me léchant subrepticement la main.

A mon tour de monter, enfourchant mon hongre d'un mouvement alerte. Loin de me contrarier (hormis dans mon espoir de voir un jour la race des hommes briller par son intelligence, si jamais j'avais eu cette espérance), les derniers évènements venaient de me ragaillardir. Quoi de plus vivifiant qu'un peu de cabotinage devant des mortels arriérés et la présence stimulante d'un homme couvert de sang à mes côtés ? Je réalisais bien vite, tandis que nous reprenions la route, que mes coups d'oeil en direction de Conrad ne tenaient pas tant de la bienveillance que de l'appétit. C'était une provocation de se tenir ainsi, entre la vie et la mort, laissant s'écouler un filet de sang sur soi. S'il venait à trépasser l'idée de me nourrir de lui deviendrait vite immonde, et ç'aurait été gâcher un joli potentiel.
Secouant la tête et pinçant les lèvres, je me forçais à regarder droit devant moi. Ma gourmandise finira par me perdre.

Bien décidée à me distraire de ces pensées pernicieuses, je m'adressais à mon nouveau compagnon de route.


- Alors, petit écureuil, où se trouve cette auberge d'après toi ? Tu penses que Conrad survivra jusqu'à ce qu'on l'atteigne, mh ?

Je ne sais pas ce qu'il me répondit, mais je suis certaine que ce n'était pas ce que le mourant aurait voulu entendre. Partant d'un rire discret, j'intimais à l'animal de se fourrer dans l'une de nos fontes et de me prévenir s'il flairait un quelconque danger pour ma personne. Je ne tenais pas particulièrement à ce qu'il cherche à me faire part, à sa façon, de tout ce qu'il considérait comme un prédateur pour lui-même : la liste en serait infinie.
Gustaf continuait malgré tout de me préoccuper : je gageais qu'il irait jusqu'au domaine pour rendre compte de ses mésaventures, mais là n'était pas le problème. Mon paternel saurait s'occuper de cette histoire... ce qui me vaudrait des remontrances désagréables, à n'en pas douter. A cet instant, il faudra ruser, battre des paupières, faire la bouche en coeur... Tous ces stratagèmes auxquels les pères ne savent pas résister.

Je croyais que c'était su, que j'avais une alimentation déséquilibrée ! =X
Donc on reprend la route avec dans l'idée d'atteindre l'auberge dont a parlé l'autre fuyard de Gustaf. J'espère qu'il se noiera dans un marais, je suis vexée par sa réaction...
Aemilia von Carstein, Page éternelle
Profil: For 9 | End 9 | Hab 9 | Cha 11 | Int 11 | Ini 9 | Att 9 | Par 9 | Tir 9 | NA 1 | PV 80/80

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