L'ambiance était pesante sur les épaules du skaven noir. Braqué par tous les yeux rouges, le regard de Scuzz se plongeait à la fois partout et nul part. Il savait très bien au fond de lui que Trois-Vérités aurait dé zingué ce grand type au torse de fer s'il s'était approché. Scuzz restait fier de lui. Il avait saigné une chose homme d'une certaine importance. Il se retrouvait certes dans une position inconfortable mais, un défi à relever. Ce défi lui permettrait-il de gagner en notoriété ou simplement de redorer son blason ? L'assassinat du bossu à trois bras dans les sous terrains, la lame que Trois-Vérités lui avait offert et les regards envieux de ses congénères lui semblaient bien loin à ce moment-là. Il était certainement le skaven le plus populaire de sa meute. Aucun d'entre eux ne souhaitaient la maudite popularité de Scuzz. Dans certains regards on pouvait lire de la haine, de la moquerie, de l'humiliation, du défi. Tous s'étaient rangés derrière Trois-Vérités.
Cela ne prendra que peu-peu de temps, laissez-moi-moi regrouper le nécessaire-suffisant Ô sombre Trois-Vérités. Scuzz savait que dans ce genre de situation il ne fallait pas trop en faire, car la patience de son leader était très limitée.
Il s'empressa de récupérer le parchemin scellé, le rangea dans la sacoche du messager. Ce morceau de papier avait autant d'importance que sa vie.
Il se dirigea vers la sortie croisant le regard de Zyeck et Suture. Les deux affichaient un sourire diabolique.
Scuzz quitta la salle sans un couinement.
*****
L'escale humaine était maintenant infestée de rats. Scuzz pris le temps de grignoter la cuisse d'une chose-homme avant de prendre la route. En plus du morceau de cuisse, il lui ôta la cape sombre qu'il portait. Les choses-hommes mortes étaient de toutes évidences très utile.
Sur le chemin vers la sortie, Scuzz n'hésita pas à prendre quelques bouts de viandes séchées et de fromage en plus des steaks qu'il venait de découper sur les cadavres.
La nouvelle avait dû se répandre très vite, car il essuyait encore les regards de certains de ses confrères.
Passant la porte, s'éloignant, il sentait le poids des regards disparaître petit à petit. L'odeur des bois en pleine nuit lui était encore nouvelle. Avançant sur le bord du chemin de terre, le ciel étoilé lui éclairait les montagnes qui s'élevaient au-dessus de la cime des arbres. Une légère brise dans le dos le poussait à avancer un peu plus vite. La brise rapporta à ses narines l'odeur de deux de ses semblables. Un sentiment de panique l'envahit. Se retournant la main posée sur la garde de son épée courte, il aperçu Nikkit et Thrak. Sans un bruit, ils le rattrapèrent. Scuzz restait méfiant, il ne savait pas s'ils lui avaient été envoyés pour l'éliminer suite à son erreur ou s'ils étaient eux aussi lié à la mission que Trois-Vérités lui avait confié.
Le trio décida de presser le pas. Encore sous tension après l'assaut ils décidèrent de suivre le chemin qui menait vers les hauteurs. Ils avançaient à bon rythme à une cinquantaine de mètres de la route, eux-même espacé d'une vingtaine de mètres chacun. Ils ne ralentiraient pas la cadence avant les premiers rayons de soleil. La nuit les enveloppant, ils profitaient de sa noirceur.
*****
Le ciel s'éclaircissait doucement. L'aube. Une douce chaleur s'installait dans les sous bois. Scuzz fit part à ses frères qu'il allait falloir couvrir les traces olfactives qu'ils avaient laissés pendant leur escapade nocturne. Lorsqu'ils tombèrent sur un point d'eau, le trio se trempa comme Trois-Vérités leur avait enseigné quelques jours au part avant.
Enduisez-vous-vous de terre et de vase. Les trois des Lames du Cornus usent de cette technique pour dissimuler leur odeur. Je n'ai pas su les sentir-sentir près de moi.
Les néophytes se frictionnaient fortement et recouvraient la gueule et le corps.
Ils continuèrent de se déplacer, cette fois ci, beaucoup plus lentement et espacé que d'une dizaine de mètres seulement. Évoluer de jour n'était pas aussi plaisant. Certes le bruit de leur déplacement était couvert par les bruits d'une forêt éveillée, mais leur visibilité les exposaient trop.
S'enfonçant un peu plus loin, s'éloignant de la route ils diminuaient leur chance d'être repéré.
Ils décidèrent de faire une escale dans le trou qu'un arbre déraciné avait laissé. L'arbre était toujours là, complètement desséché en appui sur un talus d'herbe s'emmêlant dans le branchage d'un autre.
Deux se reposeraient et un s'occuperait de guetter les alentours. Nikkit commença son tour de garde, alors que Thrak lui s'endormit quasiment instantanément. Collé à Thrak dans le trou, Scuzz n'était toujours pas serin sur les intentions des deux coureurs l'accompagnant. Les yeux fermés, il réfléchissait à présent à la stratégie qu'il utiliserait pour remettre la sacoche aux autorités naine en éveillant le moins leur soupçons. Quelques idées émergèrent et son attention sombra dans un sommeil non contrôlé. Il fut réveillé par Thrak, Nikkit s'était endormi non loin de Scuzz.
Reste sur tes gardes-gardes. Nikkit a aperçu des habitations dans cette direction.
Scuzz devait les réveiller dès que le soleil descendrait derrière les montagnes. Resserrant bien la sacoche de la chose-homme contre lui, il se servit du tronc d'arbre incliné pour se poster en hauteur. La terre qu'il avait pris soins d'étaler sur tout son corps s'était effrité partiellement à certains endroits de son corps et totalement à d'autre, laissant des morceaux séchés collé dans le pelage. Un sentiment d'être observé ou la paranoïa prenait possession de Scuzz plus le temps passait. Le soleil avait maintenant entamé sa descente vers le col d'une montagne. Il était l'heure de réveiller ses deux partenaires.
Le crépuscule s'installait doucement. Les coureurs reprirent leur route en allant jeter un oeil aux habitations que Nikkit avait repéré plus tôt dans la journée. Deux sentinelles procédaient à la fermeture des portes. Ne cherchant pas à attirer l'attention des choses-hommes, le trio se remis en route, s'enfonçant dans l'épaisseur de la forêt.
A tour de rôle, Thrak, Nikkit et Scuzz se retournaient. Le même sentiments de doute les envahissaient. Un musc peu prononcé se dégageait de leur peau. Ils échangèrent quelques regards et sans rien dire, ils s'éloignèrent comme la première nuit. Les trois skavens après avoir accéléré le pas, s'immobilisèrent. Contre un arbre ou encore plaqué au sol, ils attendraient quelques instants que leur pisteur s'avance un peu trop près. Imprudent, c'est un petit être à peau verte qui s'avançait d'un pas léger. Un gobelin. Il avait l'air très à l'aise sur ce terrain. Chacun des ses pas était sourd. Ses yeux scrutaient les moindre recoins. Sa tête bougeait très légèrement, sa petite lance à la main, suivait elle aussi le mouvement. Scuzz épousait parfaitement le sol contre un buisson. Il attendrait son prochain pas pour lui sauter dessus. Le gobelin bougea et Scuzz donna une impulsion sur ses pattes avant pour bondir. Le mouvement du gobelin esquiva étrangement l'attaque du skaven noir en basculant sur son côté droit. Scuzz remarqua une plaie éclatée au niveau de la tempe. Non loin de son corps, une pierre ensanglantée. Thrak arriva rapidement proche de la scène.
Il t'aurai échappé... Couina Thrak.
Les trois skavens se regroupèrent autour du corps inanimé. Nikkit sorti un morceau de corde pour lui ligoter les mains et les pieds. Pendant que Thrak le bâillonnait Scuzz observait les alentours.
Scuzz souhaitait utiliser le corps d'une chose-homme sur le bord de la route pour simuler la mort du messager. Avec cette trouvaille verte pas trop abîmé, ils ne leur restaient plus qu'à livrer le colis avec une bonne mise en scène. Scuzz hésitait, il ne pouvait pas se permettre de se présenter aux portes naines et déposer la sacoche... En simulant le vole de la sacoche, les nains s'estimeraient chanceux la retrouver et ne se poseraient pas de questions. Il retournait la question dans tous les sens, mais il se persuadait que les humains étaient trop stupides pour chercher plus loin que la trouvaille de leur bien.
Le malheureux était léger, les skavens le portait à tour de rôle. Ils avaient trouvé le porteur du message pour les nains.
Le petit détachement Eshin avançait beaucoup moins vite. Le paquet qu'il transportait devenait de plus en plus encombrant avec le relief montagneux qui commençait à prendre forme sous leurs pattes.
Les bois épais laissaient de plus en plus place aux roches. Toujours à bonne distance de la route, ils enjambaient et escaladaient. De temps à autre, la chose-verte revenait à elle. Un coup sec sur le crâne suffisait à la rendormir pour quelque temps.
*****
Les feux de gardes des portes naines étaient maintenant visibles. Scuzz et ses frères n'iraient pas plus loin.
Croquons-le et exposons-le dans les roches proche du chemin-chemin. Murmura Nikkit.
Non-non ! Découpons-le ! Annonça Thrak, montrant ses dents pleines de salive.
Je préfère planter mes dents dans la chaire encore chaude, reprit Nikkit.
Brisons-lui les membres, mutilons-le avec des pierres et faisons croire à une chute. Tant pis pour le repas. S'exclama Scuzz.
Les deux autres déçu, mais convaincu par l'idée du skaven noir, observèrent les alentours. Non loin, d'une hauteur, proche du sentier qui serpente la montagne, ils placèrent le corps. Ils enlevèrent ses liens puis son bâillon. Ils lui brisèrent les membres, les deux jambes et un bras. Sous la douleur, le gobelin hurla. Un cri aigu résonna contre les roches. Dans la panique, Scuzz attrapa le crâne du torturé et le fracassa fortement contre la pierre. Ils placèrent ensuite la sacoche entrouverte en évidence non loin du cadavre. Veillant à ne pas laisser de traces de pas, ils se repliaient dans les roches en foutant le sol avec une brindille feuillu tenu par leurs queues.
Ils attendraient maintenant le passage des choses-hommes pour s'assurer que ce maudit morceau de papier arrive à bon port.
Après que l'aube ait laissé sa place à une matinée nuageuse, une caravane principalement mené par des nains était en vue. Ils priaient tous les trois le Rat Cornu pour ne pas être vue et pour que ses sales petites-choses ramassent le contenue de la sacoche. Arrivant à hauteur du cadavre, la caravane ralentit.
Par ma barbe, que fait un gobelin échoué par ici ! Ils ne se sont jamais approchés de la sorte.
Pressez le pas, c'est peut-être un piège !
Les nains et les quelques humains qui accompagnaient le convoi, dégénèrent leurs armes. Ils pressaient le pas en observant les hauteurs. Les skavens pestaient, car personne ne prêtait attention à la sacoche. Le cortège s'éloigna rapidement.
Scuzz, Nikkit et Thrak se regardaient méchamment. Les incisives grinçaient et des couinements hostiles raclaient les gorges. Les menacent de mort commençaient à fuser. Ils perdaient leur calme et cherchaient forcement un fautif. Nikkit et Thrak avaient l'air de se rapprocher et remettre la faute sur Scuzz.
Un bruit synchronisé, presque mécanique se rapprochait. Un détachement d'une vingtaine de nains tous en armure avançaient en quatre colonnes. Il n'en fallait pas plus pour que les trois skavens restent figés par la peur. Ils n'étaient pas de taille, la question ne se posaient même pas.
C'est ici qu'j'l'ai vu !
Les trois rats observèrent la scène sans comprendre si qui était dit. Les quatre colonnes se séparèrent pour former une zone de protection autour du gobelin. Le témoin et le nain à la barbe brune qui avait l'air de diriger le peloton s'approchèrent du cadavre.
Après quelques coups de pied dans le gobelin, il sorti sa hache qui dans un mouvement circulaire vint séparer la tête du tronc du gobelin.
Si c'est un piège sortez vermines !
Sa voix résonna dans la montagne. Ils étaient prêts à en découdre et à faire respecter leur territoire. Les skavens terrifiés, étaient en train de fusionner avec la roche.
La barbe brune ramassa la sacoche et son contenu. Après un ordre clair, les colonnes se déplacèrent pour reformer les rangs. Haches et gourdins à la main, ils s'éloignèrent dans le lacet qui menait jusqu'aux portes de Karak Ziflin.