Itch vivait et avait toujours vécu dans les landes balayées par le vent du Nord de l'Ostland, à l'exception des mois d'hiver où lui et ses compagnons Peaux-vertes partaient se réfugier dans la forêt que les "zoms" appelaient "Forêt des Ombres". Les Peaux-vertes de sa tribu quand à eux l'appelaient "lé bois où k'vivent dé trucs zarbis ki veulent te bouffer". Mais malgré les disparitions régulières qui y avaient lieu, cela ne les avait jamais empêché de partir s'y cacher quand la neige commençait à tomber à gros flocons. A vrai dire, il n'y avait pas beaucoup d'autres endroit où se cacher en Ostland vu que près des trois quart du pays était recouvert par les arbres, le reste étant composé des Monts du Milieu et des landes côtières ce qui réglait rapidement le problème quand quelqu'un en venait à se plaindre ; les Orques ayant par ailleurs un système de gestion des plaintes assez développé se résumant très simplement : celui qui tape le plus fort a raison.
Mais pour le moment l'hiver s'éloignait, et le campement avait été installé non loin d'un lac sur la lande pour profiter de l'eau fraîche -au cas où il n'y aurait plus de picrate et de bière- et de l'abondance de poissons. Enfin ... cela n'étant valable que jusqu'au tout début de notre récit. Car un des points sur lesquels Itch se démarquait de ses camarades était son amour des armes à feu et de la poudre, ce qui ne peut que conduire un gobelin trop curieux à la catastrophe.
Bien entendu, les Orques et autres Gobelinoïdes ne savent pas fabriquer d'armes à poudre -encore heureux pour l'Empire- ou alors des choses tellement bancales qu'il y a autant de chances qu'elles tuent l'utilisateur que la cible. Ce fut donc un jour qu'il pratiquait la bonne vieille méthode Orque de la "rékup" sur un cadavre humain qu'il découvrit cette arme fantastique qu'est le pistolet. Il apprit à s'en servir correctement avec le temps, jusqu'à ce qu'il explose en plein combat en le sauvant très probablement d'être massacré par les forces du Chaos au passage. Vint alors la période de ses "expériences" avec la poudre.
Un gobelin "expérimentant" sur la poudre, c'est comme un enfant de deux ans qui découvre le monde, sauf que tout ce qu'il touche explose ! Et compte tenu de la nullité légendaire des gobelins lorsqu'il s'agit de viser ... je vous laisse imaginer les dégâts collatéraux. Mais en bon apprenti savant fou, Itch savait que l'abandon n'était pas une option : il lui fallait une nouvelle arme ! Il essuya donc punition sur punition de la part de ses grands cousins Orques jusqu'à ce jour maudit où commence notre histoire.
Ce jour là, Itch s'était mis dans l'idée de fabriquer une grenade. Ou plutôt, il bidouillait avec de la poudre comme à son habitude et s'était rendu compte qu'un arc, ça vaut vraiment pas un pistolet pour lancer des trucs. Il choisit donc une méthode alternative de lancé : le bras, et modifia une de ses expériences précédentes pour obtenir un projectile. Puis il testa sa dernière création, et ce fut le drame ... La vessie percée se vida d'une partie de la poudre sur lui et quand l'engin explosa, la chaleur de la détonation enflamma la poudre le recouvrant. Il se retrouva projeté une dizaine de mètres plus loin, en feu. Ne faisant attention qu'à lui il couru s'éteindre dans le lac, sans se rendre compte de la réaction en chaîne dévastatrice qu'il avait initié. Dans un premier temps ce furent les tentes et les habitations faites de bric et de broc qui entouraient la zone où était atterrie la "grenade" qui prirent feu, puis cela se propagea à toute allure -les Orques n'étant pas de grands urbanistes- jusqu'à atteindre "la réserve à trucs pikés" où était stocké l’intégralité de la poudre et des munitions volées par la tribu.
De l'explosion cataclysmique qui s'ensuivit, Itch ne vit rien. Il était bien trop occupé à barboter dans l'eau pour éviter de finir en rôti. Mais une fois qu'il fut éteint pour de bon et qu'il retourna sur la terre ferme, il put se rendre compte de l'étendue de sa boulette : sur le camp d'une cinquantaine de tentes, pas une n'était intacte. Niveau survivants, c'était le même topo. Certains Peaux-Vertes avaient pris conscience de l'incendie assez vite et avaient fui le camp avant la catastrophe, mais soit ils étaient encore trop proches au moment de l'explosion et n'y avaient pas survécu, soit ils s'étaient pris un débris sur la tronche qui les avait tué dans leur fuite. Itch aperçu ainsi un Orque nommé Burg'hak dont seul la tête sortait de sous les restes d'un vaisselier, ou bien le nouveau chaman de la tribu transpercé par un pied de table en forme de patte de griffon ...
Après avoir farfouillé quelques temps dans le cratère fumant et y avoir récupéré les objets encore potables (quelques pièces d'armure de cuir, de la nourriture et des armes et par chance, une boîte d'allumettes qui n'avait pas brulé), Itch se décida à partir. Il n'avait plus rien à faire ici vu que tout le monde était mort. La question qui se posait était celle de la direction.
Il pouvait aller au Nord, et ainsi se rapprocher de la mer. C'était par là où vivaient les "zumains", ce qui rendait l'endroit dangereux mais qui voulait dire que peut-être pourrait-il y trouver une nouvelle arme à poudre.
Il pouvait aussi aller au Sud, vers la forêt. Les histoires qu'il avait entendu sur cet endroit n'était pas très rassurantes, et l'hiver dernier une demi-douzaine de membres de la tribu avaient disparu en allant chasser, pisser, ou faire des trucs divers et variés dans la forêt, mais certaines légendes racontaient que des Gobelins avaient réussis à dompter les monstrueuses créatures du fond des bois et qu'ils les montaient comme eux le faisaient avec les loups géants. Plus au Sud encore se trouvaient les Monts du Milieu, mais ça faisait déjà vachement loin.
Il pouvait aller à l'Est, mais il ne savait pas grand chose de la région qui s’étendait là-bas. On lui avait dit qu'il y avait un pays recouvert de neige et de glace en permanence, puis encore après des montagnes si hautes que les sommets se cachaient au dessus des nuages, mais cela ressemblait assez à un mensonge. D'ailleurs c'était le chef qui lui avait raconté ça, donc il y avait de grandes chances qu'il se payait sa tête.
Il pouvait enfin aller à l'Ouest, bien que ce soit un peu la même chose qu'aller au Sud. A l'Ouest s'étendait aussi la forêt, sauf que cette fois au lieu de raconter des histoires de monstres, les légendes racontaient que dans ces bois se cachaient les pires de tous les monstres : des Elfes !
Il ne lui restait plus qu'à choisir. Plutôt rapidement, de préférence, puisque vu la puissance l'explosion toute personne vivant dans un rayon d'une vingtaine de kilomètres possédant une ouïe en bonne état l'avait entendu, et très bientôt quelqu'un viendrait voir ce qui s'était passé ici. Or qu'ils soient Humains, Orques, ou autres, les investigateurs risquaient de ne pas trop apprécier notre jeune héros.