[Isabelle] Le Prix de la Liberté

Le Stirland a la réputation d'être une province pauvre, arriériée et rustique, aussi ses soldats portent-ils souvent un équipement de fortune. Ses archers sont néanmoins réputés dans tout l'Empire pour leur adresse. Le Graf Albérich Haupt-Anderssen, issue d'une famille vieille de quatre cent ans, règne sur le Grand Comté depuis Wurtbad, la Ville du Vin.

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[MJ] Le Naufrageur
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Re: [Isabelle] Le Prix de la Liberté

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La bonne-dame, femme de l’aubergiste, se frotte la nuque et réfléchit la bouche entrouverte. Elle souffle comme un bœuf, et pose un de ses torchons sur une des tables de l’enseigne. Elle regarde à nouveau, d’un seul œil fatigué la borgne. Ce n’est pas de la honte, non, mais ce n’est pas de la fierté non plus. Elle est cependant perturbée, elle cherche ses mots mais sans grand succès. Trifouillant dans sa mémoire, ses yeux pétillent, mais ses lèvres se ferment d’un coup, comme un choc à sa mâchoire. Quelque chose la bloque, mais une part d’elle ne peut s’empêcher de partager plus qu’un ragot, une histoire.

« C’était y’a bien longtemps, comme je disais. Elle s’appelait Uldine, et que les Dieux m’en soient témoins, aucune femme n’était plus belle qu’elle. Magnifique, mais talentueuse aussi, oui, très talentueuse.

Elle soignait tous les maux, parfois d’un seul touché ou regard. Même la peste et ses bubons de mort ne lui résistaient. Elle faisait de drôles de choses parfois, avec beaucoup de bougies qu’elle échangeait avec le prêtre. En échange, on devait juste s’assurer de pas la déranger.
»

Ses yeux deviennent embrumés. Son expression n’a pas abandonné la confusion précédente, mais un détail perturbe aussi l’ancienne magister. Bien qu’elle ne le semble pas, la femme enrobée est certaine de ses mots, elle n’a aucun doute. Son désarroi, vient plutôt d’autre chose que les faits.

« On pensait tous que c’était une sorcière, une gentille, mais une sorcière quand même. Nous, en tant que bons Sigmarites, normalement, vous voyez quoi hein. Cependant, le prêtre, lui, ainsi que m’sieur Denyn, ils pensaient autrement.

Pour eux, c’était pas une sorcière, enfin, pas comme on l’entendait. Ils savaient pas comment elle… pouvait faire ses… trucs là. Mais ils n’avaient aucun doute, c’était autre chose. C’était différent.

Quand on vit par ici, la magie, et les saloperies qu’elle provoque, on connaît. Des nécromanciens, on en a eu, des enchanteurs qui n’étaient que des vils maudisseurs aussi on en a connu. Pourtant, Uldine, c’était jamais pareil.

Ouais, j’me souviens de ce qu'avait dit le prêtre Atti un jour. Elle n’appelle pas son pouvoir, elle n’invoque pas les mauvais esprits. Ses dons sont comme le forgeron, qui dégaine son propre marteau et bas le fer.

Puis un jour, Denyn, lors d’une de nos assemblées, était furieux. Il nous a dit que nous ne reverrons plus Udine, et qu’elle était partie pour toujours, à jamais. Sa colère, n’est pas bouillante. Je vous souhaite de ne jamais le voir en colère, j’ai failli avoir une attaque et pourtant, j’l’es avais fermé mes yeux.
»


Elle commence un peu à trembler avant de se reprendre. Elle secoue la tête et récupère ses affaires, et invite poliment de la main Breitenbach à se diriger vers la sortie. Lui souhaitant la bonne journée, elle referme la porte derrière. Le sol ne va pas se nettoyer tout seul, après tout.

En dehors de la bâtisse, le village est plutôt calme. Deux petites dizaines de personnes vaquent à leur occupation, marchant, discutant, travaillant ensemble. Le ciel est gris, mais il fait pourtant plus que clair. La balade d’Isabelle lui montre les différents établissements. Le village n’a pas eu du mal à faire de l’étalement, les maisons ne sont pas cloîtrées les unes aux autres, une preuve de qualité. Cependant, le sol de terre boueuse ne ment pas, ici, le concept de trottoir est inexistant. Le temple, ou plutôt une grande chapelle, est dédié à plusieurs dieux impériaux. Des autels, plaqués contre la surface extérieure, sont couverts de symboles, d’offrandes, et de petites œuvres d’art faites localement. Elle y reconnaît Morr, Shallya, Taal et Rhya et quelques autres. L’intérieur doit probablement être dévoué à Sigmar Heldenhammer.

Il y a un forgeron, un espace pour le chamoisage et la mégisserie, plusieurs cabanes dédiées à la traite du bois. Quelques agriculteurs spécialisés dans les légumes ont des fermes juste à côté. Un élevage de poulet ainsi que deux porcs sont de l’autre côté de Pluie du Corbeau. Il y a aussi un marchand généraliste. Au moins cinq huttes, au nord, sont pour les chasseurs. Enfin, un charpentier-maçon à l’air d’avoir une petite maison, dans un coin du centre. Une de ces habitations à de grosses fenêtres en bois, ouverte avec des planches formant un étale devant. Des symboles d’herbes et de plantes sont peints en vert foncé dessus. Derrière, une drôle de personne s’y tient, debout sur un tonneau.

Un visage aussi rond qu’une citrouille, un triple menton, ainsi que des feuilles dans les cheveux courts ébouriffés. Sa tignasse, désordonnée, est presque noire. Ses yeux émeraude, eux, brillent fortement. Sa taille est celle d’un jeune enfant. Son gros nez, et ses lèvres petites mais pulpeuses lui donnent un drôle d’air. Elle est particulièrement ridée. Ce n’est pas la première fois que la Dame d’argent voit une halfeline. Ses habits sont plutôt colorés, particulièrement le jaune et l’orange. Devant elle, un énorme livre est ouvert pendant qu’elle utilise un mortier et pilon, pour pilonner une plante. De nombreux bocaux sont sur des étagères derrière elle. En plus du tonneau, elle a une escabelle. Occupée à travailler, elle ne prête que bien peu d’attention à la nouvelle arrivée.
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Le reste du village, notamment les femmes, effectue probablement différents travaux, impossible à dire pour être précis. Ce n’est pas la place qui manque, mais aucun bâtiment n’est abandonné. Délabré, oui, ils le sont pour la plupart. Mais tous sont exploités par les locaux. Il faudra donc louer, ou construire pour s’y loger en gardant une vie privée. Cependant, la magister renégate s’en doute. Ici, les ressources de construction coûtent cher. Au vu des bois alentour, c’est plus que compréhensible. En effet, après quelques dizaines de yards défrichés, ce n’est que la forêt de la Sylvanie, partout. Le village est une véritable enclave humaine au milieu de nombreux problèmes de cette région maudite.

Écourtant sa balade, elle se rend au bureau du shérif. Celui-ci est un peu surpris de la voir aussitôt, il lève un sourcil, et l’invite à nouveau à l’intérieur. Il se place en face, sur sa chaise. Un énorme morceau de pain est posé sur un petit drap, et du fromage aussi juste à côté. Il était probablement en train de commencer à manger car un couteau est enfoncé en plein dans le fromage. Il écoute calmement, impassible, comme toujours.

« Je pensais que lorsque je vous ai appelé madame Estemer… vous auriez compris que la discrétion… est une politique que j’apprécie. »

Un coin de sa bouche se relève, montrant des canines acérées. Cet étrange sourire, complice, est difficile à imaginer sur le visage du colosse, alors le voir est un véritable choc. Il écoute la suite de la tirade de la magicienne, et en profite pour commencer son repas avec quelques bouchées de frometon et de pain, les deux à la fois. Surpris par la longueur de l’explication de la sorcière, il continue de manger, mais au fur et à mesure de celle-ci, ses yeux s’ouvrent de plus en plus. Il arrête de manger, et pose d’une main son pouce sur sa joue, et son index sur sa tempe. Par trois fois, il fait la moue avec ses lèvres. Il cligne plusieurs fois des yeux et attend quelques secondes de plus avant de répondre. Sa voix est ferme, mais détendue.

« Un Jacques de tous les métiers n’en maîtrise aucun… mais est souvent plus utile qu’un maître d’un.

Je n’ai pas de doutes sur vos compétences. Ni sur votre capacité à les exploiter. Cependant… vous présumez beaucoup. Vous présumez sur nos ressources. Que peut faire un forgeron… s’il n’a pas assez de métaux ? Que peut faire un alchimiste… sans ses ingrédients rares ?

Cela implique un suivi constant… et des efforts préparatoires. Le fruit est juteux… mais je ne suis pas inconscient des risques. Lors des kampanie wojskowe, j’ai vu des sorciers impériaux se vider les intestins simplement par… accidents imprévisibles. Très similaire à la poudre à canon… quand j’y pense. Même bien dosée… les choses vont vite.

Vous n’êtes pas Uldine, je n’ai donc pas à vous comparez à elle. De même dans l’autre sens… pour vous.
»

Il continue tranquillement son repas, lentement entre chaque pause. Chacune de ses bouchées, et des mastications qui les suivent, ajoutent de la tension dans l’air. Malgré son air de gargouille de pierre, il semble que cela cogite beaucoup derrière cette face cicatrisée.

« Nous n’avons aucun bâtiment libre. Tous occupés… ou trop endommagés pour servir à nouveau.

Je vous croyais plus raisonnable à propos du garçon. Vous croyez sérieusement qu’il peut travailler avec nous… et être votre apprenti en même temps ? Je ne sais pas comment vous enseigner… à Altdorf… mais la destruction des plus jeunes me parait… fou. Exercer deux métiers, c’est un moyen de réduire son espérance de vie… par deux.

Soit... les détails plus tard.
Estemer, j’accepte avec joie votre présence dans ce village. Ainsi que du jeune homme qui vous accompagne. Pour l’instant, vous logerez à l’auberge. Nous effectuerons la cérémonie… de citoyenneté, demain. Trouvez-vous un prénom entier entier. Madame Estemer n'est pas un nom... entier.
»


Il tend sa main, énorme et musclée. Ses ongles sont courts, et justes en dessous de leur limite, une fine couche de terre. Enfin, pour la Dame d’Argent, elle n’a plus besoin de fuir. La poignée échangée, le maître des lieux approuve en hochant de la tête. La journée continue, et elle retrouve son apprenti. Il aidait à dépecer un sanglier avec une femme locale. Réunie à la taverne avec plusieurs des locaux, Arwin, l’aubergiste, lui présente plusieurs des occupants des autres chambres.

Un homme, à la moustache extrêmement impressionnante, se trouve dans la chambre trois. Sa moustache mérite plus de détails. Aussi longue que trois nez, et aussi pointue qu’un clou de pont, elle, elle montre un goût d’une mode passée. Ses yeux sont marron comme le reste de ses poils et cheveux. Il porte cependant par-dessus ceux-ci une perruque blanche de juriste. De plus, sa toge est assortie à des habitudes académiques. Herr Reignach était un professeur en droit impérial à Nuln. Cependant, d’après ses propres mots, sa dernière thèse lui a valu de très nombreux soucis. Il a suggéré, logiquement d’après-lui, que les Tiléens et les Estaliens faisaient partie d’un même peuple autrefois. Les uns étant vicieusement violents, et les autres violemment vicieux était une preuve irréfutable selon lui. Alors qu’il vivait encore au chef-lieu du Wissenland, chaque jour, au moins une bombe était posée sur son chemin. Il a dû donc rejoindre une partie de sa famille ici.
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Madame Gozhit-Husina, est tout le contraire. Elle a grandi ici, et se passe bien de savoir lire et écrire. Ses cernes noires sont devenues permanentes, ainsi que du maquillage mauve qu’elle applique dessus . Ses cheveux noirs et huileux sont en catogan, et sa peau est couverte de grains de beauté. Sa tenue est cependant très stylisée, et dans un état remarquablement bien entretenu. Elle exerce la fonction d'équarrissage pour les animaux, ainsi que parfois des autopsies pour le reste. Sur ses poches, des crochets, scalpels, couteaux, serpes et autres outils essentiels à sa tâche se flânent. Elle parle encore moins que le shérif, sauf quand quelqu’un à le malheur de mentionner sa lignée de sang.
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Tout aussi étranges que les autres, les frères Ingulf et Baldor se distinguent par leur faciès aussi éloigné que possible. L’un a un nez digne d’un gnome et la moustache similaire à une brosse à chaussures, l’autre à une barbe de landsknecht et l’air d’avoir passé sous plusieurs chariots. Ce sont des trappeurs, spécialisés dans la pose de pièges “élaborés” et “modernes” d’après eux. Ils discutent constamment entre eux, et argumentent pour tout et n’importe quoi.
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La soirée à bien commencer, la nourriture est toujours aussi bonne, même si les quantités sont moins copieuses qu’avant. Seuls les occupants de l’auberge, ainsi que le couple gérant l’établissement, sont présents. Bien sûr, l’apprenti d’Isabelle, le fameux “Aaron”, est à ses côtés. Les discussions sont variées, mais presque toutes tournent autour de l’hiver qui approche. Les prévisions sont-elles bonnes ? Le bois est-il entreposé correctement ? Rien de bien anodin. Le feu crépite dans la cheminée, tandis qu’une bûchette est ajoutée dans son cœur enflammé. Frau Gozhit se tourne vers les deux inconnus.

« Mais dites moi, madame Estemer. Je suis assez curieuse, vous et le garçon qui venez de la grande ville, c’est comment là-bas ? Je me dis que cela doit être bien compliqué, surtout pour les cadavres. Il doit y en avoir tellement… »

Pensive, elle ne remarque même pas qu’Ingulf à posé son verre et reprend le crachoir à son tour.

« Ben ouais ! Ils font comment d’ailleurs avec toutes les saletés de bêtes et de monstres dedans ? S’ils mettent un piège, ils auront autant de chance de choper un colporteur ou un clodo plutôt que la bonne proie ! »
Test de CHA(-2) d’Isabelle : 1, réussite critique.
Test d’INT(+0) d’Isabelle : 3, très large réussite
Test de CHA(+1 car Éloquence) d’Isabelle : 2, réussite automatique.
Test de CHA(-4 car c’est gros, +4 car c’est très honnête) : 2, réussite automatique.
Test d’INT (+-???) de Grigory : 4, large réussite.
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Isabelle Breitenbach
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Re: [Isabelle] Le Prix de la Liberté

Message par Isabelle Breitenbach »

Grigory répond de manière satisfaisante à ma requête de discrétion. Certes, j'ai manqué de subtilité en insistant dessus, mais il me fallait être sûr. Nous avons trop couru, trop fui pour ne pas scrupuleusement couvrir nos arrières. Je cligne doucement des yeux en hochant la tête pour signifier que le sujet est clos.

Le shérif m'a écouté sans m'interrompre, continuant d'abord son repas puis l'écartant un moment pour me prêter toute son attention. Le poisson est ferré, mais il serait bien maladroit de penser la prise déjà dans l'assiette. D'ailleurs, sa première réponse déconstruit mes propositions, l'une après l'autre.
Oh, je ne vais pas m'en formaliser. J'ai mené assez de négociations au cours de ma vie pour connaître ce petit jeu par cœur. J'ai proposé un rêve grandiloquent, mon interlocuteur en a taillé les branchages et maintenant, il me faut l'ancrer dans la réalité.

Ce tabouret est fort peu confortable et je maudis l'absence de dossier pour m'appuyer. La position est très importante dans ce genre de négociations, car elle traduit l'humeur et l'ascendant - ou pas - de l'intermédiaire. Je suspecte notre homme d'avoir volontairement choisi ce type de siège pour garder une certaine hégémonie sur ses invités.
Qu'importe, je me laisse porter par cet échange. Ma gueule de bois s'est un peu résorbée et la chaleur de mes joues tient plus de l'excitation que de la douleur crânienne. Je croise les jambes pour afficher mon aise, mais aussi ma réflexion.


« Nehekhara ne s'est pas bâtie en un jour. Je ne vous propose que des possibilités, mais ne vous mentirai pas en les promettant pour demain. Les matériaux, le ravitaillement, tout cela viendra avec beaucoup de temps et d'organisation, mais leur seul frein reste votre détermination.
Si une civilisation a pu s'épanouir en plein milieu du désert, alors je pense qu'un petit village peut trouver de quoi améliorer un peu la vie de ses habitants. »


Je balance un peu ma jambe croisée au-dessus de l'autre, dirigeant l'attention de Grigory vers mes bottes encrassées par la boue.

« Paver les rues est un bon exemple. Il faut de la pierre, beaucoup de pierre pour cela. Je ne vous propose pas de la faire apparaître à partir de rien. Il faudrait établir une carrière et un ravitaillement sécurisé. Du temps, de la main d'œuvre et des ressources. Mais pour ce qui est du travail de la pierre, de son raffinage et son modelage, c'est là que mon expertise entrerait en jeu. L'entreprise colossale verrait l'une de ses étapes simplifiée et grandement accélérée.
Le résultat en vaudrait la chandelle : déplacements, entretien des carrioles, risques d'inondations diminués... et bien d'autres! Seule la détermination de Pluie du Corbeau à s'épanouir interdit ou autorise ce genre d'accomplissement.

Mais soit. Sur une logistique moins... bouleversante. Ce village a déjà bien des atouts qui ne demandent qu'à être exploités. Au cours de ma promenade matinale, j'ai identifié une halfeline herboriste. C'est une rare opportunité pour tout alchimiste! »


Le shérif remet ensuite en question mon sens de l'éducation. Cela m'irrite un peu, mais je ne pense pas qu'il ait réellement compris ma méthode. Cela-dit, avec du recul, je me dis qu'elle pourrait être simplifiée, plus efficace. Je regarde le plafond et m'égare dans une bouffée de tabac.

« Non, non. Je ne vais pas tuer le gamin à la tâche tout de même. Ses journées seraient pleines, mais j'attache beaucoup d'importance au repos réparateur. Travail communautaire le matin, études l'après-midi et devoirs le soir. C'est surtout que j'aurai moi-même besoin de temps pour mes propres recherches. De plus, je trouve nécessaire qu'un jeune garçon fasse régulièrement du travail manuel en plus de son éducation scholastique.

Peut-être qu'une organisation différente serait plus efficace. Études du Wellentag au Konistag, excepté l'Aubentag. Le jour des contributions et l'Angestag seront voués au travail manuel en communauté. Cinq jours à mes côtés, deux aux vôtres. Repos pour le Festag, bien entendu. »


Finalement, comme si sa décision était prise dès mon premier pas dans la caserne, le shérif accepta joyeusement ma proposition. Enchantée, je retiens un peu mes ardeurs et lui rends sa poignée de main avec un sourire amical.

« Merveilleux. Enchantée de faire pleinement votre connaissance, shérif Grigory Denyn. Vous pouvez m'appeler Estemer von Baum, ou simplement Frau Estemer. »

Ayant déjà réfléchi sur la question, j'ai choisi le nom von Baum. Une famille oubliée de l'aristocratie de Nuln, sans prestige ni véritable influence. Peu de risques donc d'attirer l'attention. J'aurais pu choisir un nom des bas-fonds de la ville, mais impossible de m'y résoudre. Il faudrait un travail colossal pour me forcer à refouler toutes mes marques de noblesse.



De retour à la taverne, je retrouve Tim en train d'assister une certaine Gozhit-Husina, une femme férocement laide qui a fait de son métier le hobby de plonger ses mains dans les intestins d'animaux. La vision de leur travail me tire la grimace, mais je fais un effort pour ne pas paraître dédaigneuse dès mon premier jour à Pluie du Corbeau. J'aurai tout le temps plus tard de remettre ces manants à leur place, une fois ma fonction dans ce village bien ancrée.

Arwin, l'aubergiste, me présente aux autres rentiers de l'auberge. Les frères Ingulf et Baldor n'ont rien à envier à la laideur de Husina, si ce n'est qu'elle a au moins un certain goût vestimentaire. Contrairement à eux.
Seul herr Reignach semble digne de mon attention. Un homme de lettres, un juriste avec un goût de la mode fort daté. Le simple fait qu'il porte ses vêtements officiels pour le repas du soir en dit long sur son état mental et la décadence qui l'affecte. Qu'il soit originaire de Nuln ne devrait pas poser de problème par rapport à mon faux nom, car je doute fort qu'il en ait déjà entendu la mention.

Les présentations terminées, j'échange un rapide clin d'œil avec Tim pour lui signifier que mon entretien avec le shérif s'est bien passé. Le repas débute pour mon plus grand plaisir. J'ai l'estomac vide depuis la veille!
Les conversations, elles, m'enchantent un peu moins. J'ai clairement affaire à des bourrins qui n'ont jamais mis les pieds dans une grande ville. Avec un peu de volonté, je parviens cependant à feindre un certain intérêt.


« Oh, j'ai bien peur de ne pas être experte sur le sujet, Frau Gozhit-Husina. Les nobles familles d'Altdorf gèrent cela en interne et font appel à un prêtre de Morr pour récupérer et s'occuper de la préparation du corps.
Pour ce qui est des bas-fonds de la ville, une carriole passe chaque semaine pour récupérer les défunts il me semble. Pendant des périodes d'épidémie ou de famine, son passage peut devenir quotidien. »


Malgré le sujet morbide, ma curiosité est éveillée. C'est un bon moment pour en apprendre un peu plus sur le fonctionnement de ce village.

« Qu'en est-il de Pluie du Corbeau? Y a-t-il une logistique particulière? J'imagine qu'étnt donné la nature de la région, certaines... précautions doivent être prises, n'est-ce pas? »

Les frères trappeurs ont aussi des questions, qui ne manquent pas de me surprendre d'effarement. Je suis un peu prise au dépourvu.

« Eh bien, je... Altdorf est une capitale. Les bêtes et les monstres n'y ont pas leur place. La chasse se déroule dans les campagnes en périphérie. Enfin... beaucoup de monstres rôdent à Pluie du Corbeau? Les rues ne sont pas piégées, j'espère? »

Vraiment, je ne connais rien à ce sujet, et c'est bien normal. Mais une pointe d'anticipation commence à m'affecter. Ce hameau reste au centre de la Sylvanie après tout et je préfèrerais éviter de retrouver Tim un matin, égorgé dans son lit ou déchiqueté dans un piège après une balade nocturne...
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Re: [Isabelle] Le Prix de la Liberté

Message par [MJ] Le Naufrageur »

En entendant les explications de la nouvelle venue, les autres locataires acquiescent chacun à leur tour de la tête. Le plus ferme dans son mouvement d’approbation est sans aucun doute Reignach, qui lui-même connaissait la réponse de par son origine urbaine. Il étire sa moustache d’une main et sourit en coin, tandis qu’il palpe sa robe de fonctionnaire. Il prend la parole, d’un ton contrôlé et particulièrement clair.

« Madame Estemer, non seulement à entièrement raison, mais en plus, me permet d’ajouter quelque chose de crucial. La présence du culte de Morr dans les villes, petites ou grandes, est toujours assurée.

De plus, je rebondis sur votre question, étant le plus habilité à y répondre. Depuis mon arrivée ici, je suis en charge de la documentation juridique. Si le shérif le désire, bien que cela ne m’enchante guère, il peut m’arriver d’être juge de paix. La loi est entre de bonnes mains, je vous l’assure. Pour ce qui est du reste, je vais laisser ma cousine vous l’expliquer.
»

Se rendant compte qu’on la mentionne, et qu’on l’invoque à la parole, Gozhit-Husina manque de s’étouffer du contenu de sa coupe. Elle reprend son sang froid, et ouvre ses yeux ténébreux avant de se rehausser sur son siège. Ce bref mouvement fait cliqueter une dizaine de petits outils métalliques.

« Nous sommes au centre d’un territoire composé de plusieurs villages. J’aime bien dire que nous sommes le cœur mais ce n’est pas bien d’être arrogant. Au nord, Nasserast, c’est facile à retenir, N comme le nord. Ils sont nombreux, et très…. comment dire les choses poliment ? Ils préfèrent porter des peaux de bêtes que du tissu.

Au sud-ouest, Gelblas. Si j’étais vous, je ferais en sorte de ne pas y foutre les pieds. C’est pas un village mais une forteresse. Les Morriens y investissent beaucoup pour faire des expéditions punitives, surtout après ce qu’il s’est passé à Leicheberg. Le comte von Stolpe soutient la chose pleinement.

Et puis, directement à l’Est d’ici, Lygnyein et Tillyein. Avant c’étaient deux hameaux séparés, mais ils ont grandi et sont devenus un seul village. Ils font des bougies, beaucoup, beaucoup de bougies.
»

« Bien que cela fait un moment que nous ne l’avons plus vu, toute cette région est tenue par le marquis Blut-Herz. Son château est à l’ouest de Nasserast. Et non, nos rues ne sont pas piégées, les chasseurs s’assurent que les problèmes n’arrivent pas jusque-là. Bien sûr, il n’est jamais recommandé d’être dehors la nuit. »

Le lettré appuie particulièrement les deux derniers mots d'une tonalité bien plus courte tout en pointant la porte d’entrée de la taverne avec son pouce. Les autres occupants, ainsi que l’aubergiste et sa femme, ricanent. Cependant, en fonction de l’individu, le rire est plutôt jaune. Tim, ou plutôt Aaron, tout particulièrement n’est pas rassuré. Voyant que le plus jeune n’est plus vraiment dans son assiette, Baldor, le frère d’Ingulf, lui tapote amicalement l’épaule.

« Oh n’t’en fais pas garçon. Oui, y’a de sacrées monstruosités dans l’coin, mais j’vais te rappeler un truc qu’les gens, ils oublient souvent. Les guerres vampiriques, ont les a gagnées ! Les trois, ouais. C’est pas un hasard, vois-tu ? C’est simple. Dans c’pays, le prédateur des monstres, c’est nous. »

Le barbu montre un sourire carnassier et légèrement tordu. Son frère et lui soulèvent chacun une corne attachée respectivement à leur ceinture. Les cornes sont aussi longues qu’une main et demie, blanche comme de l’ivoire.

« C’pas une corne ça, c’t’une dent. »

L’apprenti d’Isabelle semble pâle tandis que les deux trappeurs, eux, ricanent fièrement de leur trophée et s’échangent un tope-là. L’idée que des créatures locales ont des dents aussi longues que des couteaux est tout sauf rassurante. La soirée se poursuit tranquillement, et désormais, il est temps de partir se coucher.

Le lendemain matin se fait entendre, littéralement d’ailleurs car l’aubergiste vient toquer à chaque porte pour annoncer que le soleil s’est levé. Dormir dans un lit, au chaud, avec un bon repas dans le ventre, voilà un pur plaisir de la vie. Mangold est ravi en tout cas, il sourit un peu comme un benêt tandis qu’il se change pour la journée.

« Maîtresse, je me demandais, est-ce que vous pensez que nous pouvons nous installer ici ? Je veux dire, dans ce village ? »
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Isabelle Breitenbach
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Re: [Isabelle] Le Prix de la Liberté

Message par Isabelle Breitenbach »

Herr Reignach semble satisfait de mes réponses. Cela ne m'apporte pas de satisfaction particulière au sein de ce groupe peu reluisant, mais il est toujours agréable de briller en société.
Le juriste certifie que la loi est entre de bonnes mains dans ce hameau, et j'aurais pu le croire s'il ne portait pas sa perruque et sa toge en plein dîner. Cela dit, son excentricité m'amuse. Je l'identifie comme un individu atteint d'une immense insécurité, nécessitant de toujours s'afficher comme sa fonction pour garantir sa place et son importance. Il est probablement favorable aux flatteries et me lier d'amitié avec lui pourrait me servir à l'avenir.


« Je n'en ai pas le moindre doute, Herr Reignach! » Mon commentaire est orné d'un sourire plein de sincérité.

Gozhit-Husina, le menton encore luisant du contenu de sa bouche après avoir manqué d'en recracher la totalité, entreprend ensuite de me détailler les autres villages de la région. Je suis déçue d'apprendre que l'on est moins isolé qu'il n'y paraissait. Mais cela ne devrait pas poser un problème. Altdorf reste loin, ainsi que nos soucis. Il me faudra cependant gagner rapidement la cause de Pluie du Corbeau si je souhaite être réellement en sécurité. Après tout, les mercenaires pourraient finir par retrouver notre trace.

De plus, ces autres villages laissent imaginer des possibilités commerciales. Le shérif était dubitatif quant à mon approvisionnement de ressources, mais ces opportunités pourraient résoudre une partie du problème.

Je grave le nom du marquis dans ma mémoire. S'il a le contrôle de toute la région, il serait très utile que je le mette dans ma poche. Entreprise ambitieuse qui pourrait se retourner contre moi, mais cela ne m'a jamais freiné auparavant. Au cours de ma carrière, j'excellais pour remonter le courant d'influence de rivaux pour m'en faire des alliés... ou noyer les réfractaires. À voir maintenant si Blut-Herz partagerons les mêmes intérêts, ou s'il faudra faire preuve de manœuvres plus agressives pour le gagner à ma cause.

Nonchalamment, je demande :


« Parlez-moi un peu plus de ce marquis. Je suis curieuse de savoir quel genre d'homme tient cette région. »

La mention de sorties nocturnes semble avoir un effet étrange sur l'assemblée. Je repère plusieurs rires jaunes qui ne me rassurent aucunement. Ainsi, je sais à présent qu'il me faudra toujours rester sur mes gardes, non pas par peur, mais par simple pragmatisme. Les locaux pourront m'informer sur les moyens de se défendre contre les menaces extérieures. Bref, il me faudra me préparer à nous défendre. Hors de question de me cacher dans les jupons de traqueurs demeurés pour assurer notre sécurité.

Ces mêmes traqueurs paraissent cruellement sous-estimer la menace des créatures de la nuit. Tout en traumatisant efficacement Tim (ce qui n'est pas plus mal pour lui apprendre la prudence), Baldor se vanta de "notre" succès lors des guerres vampiriques. Personnellement, je ne les ai jamais combattues, et certainement que lui non plus d'ailleurs. De plus, c'est l'Empire qui a vaincu, pas un patelin de quelques centaines d'habitants. On n'oublie si facilement qu'avant la victoire, une infinité de hameaux et villages ont été balayés par des vagues incessantes de non-morts.
Mon passé est verrouillé, mais je crois avoir déjà affronté des créatures similaires au cours de mes voyages. Impossible de souvenir de quoi que ce soit sur le sujet, mais à chaque fois que je creuse, une profonde angoisse m'envahie.

Je garde mes commentaires et continue la soirée avec un intérêt poli pour les autres convives. Lorsque enfin, nous regagnons les chambres, je suis absolument lessivée. La migraine me revient, ainsi que le manque d'un sommeil réparateur. C'est tout habillée que je m'écroule dans le lit, sombrant quelques instants plus tard dans un ronflement sans retenue.


Ma profonde torpeur est décapitée par un toquement à la porte. J'ouvre les paupières d'un sursaut, avant de les refermer lentement. Plusieurs minutes s'écoulent avant que j'émerge de nouveau. Tim, lui, est déjà en train de s'habiller, ravi. L'opposé total de mon propre état. Il me faut plusieurs secondes pour resituer le contexte et l'endroit où nous nous trouvons. La migraine, bien moins forte que la veille, est toujours là, et ma bouche reste un peu pâteuse. Conclusion, j'ai peut-être encore trop tiré sur la bouteille durant le dîner.
Qu'importe! J'ai passé des décennies à boire de l'alcool de merde, enfermée dans mon manoir. Hors de question de me priver maintenant, même si cela me coûte quelques réveils difficiles!

Le jeune homme me demande si nous allons nous installer ici. Je me redresse en grognant un peu pour m'asseoir sur le lit. Je passe mes mains sur mon visage pour le dégourdir, avant de me rendre compte qu'elles sont pleins de maquillage. J'ai oublié de l'enlever la veille et le résultat doit être terrifiant. Un soupir de lassitude, puis enfin une réponse.


« Il semblerait gamin... Il semblerait. Ce n'est pas très reluisant comme endroit, mais Pluie du Corbeau est une excellente opportunité. »

Je tousse un peu en allumant une cigarette, puis je perds mon regard par-delà la fenêtre, le menton posé sur ma paume.

« Mais notre sécurité reste précaire. En plus de ton apprentissage et de mes recherches, il va nous falloir gagner de l'influence au sein du village. Nous rendre importants, capital à son bon fonctionnement. Tu comprends?
Sinon, au moindre mercenaire qui débarquera, ses habitants nous jetteront en pâture sans la moindre vergogne. »


Je souffle distraitement la fumée pendant un long moment, avant de reprendre.

« Tiens-toi au narratif. Ton nom est Aaron von Baum. Tes parents sont morts d'un empoisonnement alimentaire. Moi-même, ta grand-mère Estemer von Baum, t'a ensuite prise sous son aile et nous avons fui Altdorf peut après. Tu ne sais pas pourquoi. Si on te pose plus de questions, détourne le sujet ou dis que tu ne veux pas en parler. »

Je tourne enfin ma tête vers lui pour plonger mes yeux dans les siens.

« Mais surtout, garde toujours tes affaires en ordre pour pouvoir fuir à tout moment. Si un jour, je te dis la phrase "Je me demande quel temps il fait à Altdorf", c'est que nous sommes en danger. Qu'il faut partir dans les plus brefs délais. C'est compris? »

J'attends qu'il me réponde, je suis même prête à répondre à quelques questions (dans la limite de ma courte patience, bien entendu). Puis je me relève pour commencer à me préparer.

« Bien! Finis de te préparer et va prendre ton petit déjeuner. Une grosse journée nous attend, le shérif nous prépare une cérémonie de citoyenneté. »
Isabelle Breitenbach, Voie du Sorcier des Collèges de Magie
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Re: [Isabelle] Le Prix de la Liberté

Message par [MJ] Le Naufrageur »

Reignach écoute poliment, avant de répondre sans prendre le temps de triturer sa moustache.

« Le marquis est un homme occupé, c’est la meilleure façon de le décrire. Il passe le plus clair de son temps à résoudre des conflits plus profondément dans les terres, et quand une once de paix se profile, il reprend sa passion. Les vitraux. Il n’en reste pas moins un véritable Stirlandais, c’est aussi un homme d’armes, et il connaît sa lignée exacte jusqu'à la destruction de Mordheim, probablement. Les rares fois où nous interagissons avec sa seigneurie, c’est plutôt aux travers de ses baillis ou du collecteur d’impôts. Enfin, même si ce dernier ne vient pas chercher d’impôts mais plutôt de s’assurer que l’accord de têtes prises soit maintenu… »

Sur cette dernière phrase, l’homme de lettre hausse les épaules, lui-même semble un peu confus mais n’est pas choqué. Plus tard, Tim, ou du moins Aaron, écoute lui aussi poliment et attentivement son enseignante. Il n’a pas grand-chose à dire, les explications de la magicienne sont très claires. Il se prépare lui aussi, même si ça ne lui prend guère de temps comparé à sa voisine de chambre. Ils descendent, et se trouvent dans le salon principal de l’auberge. Reignach repositionne sa perruque, saluant poliment de la main les deux nouveaux.

« Bien, la cérémonie passe d’abord par l’administration. Par ici je vous prie. »

Bifurquant dehors, ils arrivent vers une petite bâtisse, jointe à l’auberge. Avec une clé, le perruqué ouvre la porte, et ils rentrent tous. Un bureau, assez large, mais surtout, pleins de petites étagères, remplies de documents, de petits papiers, de parchemins et de carnets. C’est un certain désordre qui règne par ici, et pourtant, c’est un véritable écosystème académique qui se profile sous les yeux de la dame d’argent. Du droit, des calculs de rendements, des rapports… l’ancien professeur n’a pas perdu la main. Frottant ses mains, il sort d’un tiroir deux fiches, qu’il pose sur la table. Dégainant un encrier et une plume, il se pose sur la chaise derrière, et commence alors à rédiger avec une vitesse fulgurante. Il écrit aussi vite, si ce n’est même plus rapidement que sa langue ne peut suivre. Il arrive à la fin, et prend bien le temps de répéter le dernier paragraphe.

«

C’est donc en ce jour, dans notre terre impériale, que deux nouvelles âmes, Estemer von Baum, ainsi que son petit-fils, Aaron von Baum, nous rejoignent.

Que Taal garde ses cornes loin d’eux. Que Rhya nourrice leur ventre. Que Sigmar leur partage sa volonté. Que Shallya purifie leur corps, et que Morr puisse les accueillir quand leur temps viendra.
»

Sans même s’en rendre compte, Isabelle écarte les yeux un peu plus. Cette expression religieuse, Isabelle la connaît bien. Elle provient d’un addendum philosophique d’un moine impérial célèbre. Berthold le bon, un des confidents et amis de l’Empereur Magnus. Cependant, ce n’est pas l’origine qui perturbe la magicienne. Autrefois, elle l’a entendu, et ses oreilles s’en souviennent. Elle n’arrive pas à savoir pourquoi, ou comment. Cependant, quand les mots de Reignach résonnent dans sa tête, l’écho, lui, est celui d’un autre homme. Son fils.

Quand elle reprend ses esprits, le lettré vient de fermer le tiroir pour ranger la lettre. Quand ils sortent, un coup de vent, mais surtout de bruit, les surprend. Grigory, Arwin et sa femme, le chasseur puni et le fermier à crottin, l’halfeline, madame Madame Gozhit-Husina, les frères Ingulf et Baldor, plusieurs autres femmes et hommes locaux. Ils doivent être une vingtaine, peut-être plus. Tous ont un sourire, beaucoup applaudissent. Parmi les nouvelles têtes, une devant ressort un peu.

Un homme, de l’âge d’Isabelle, se tient debout calmement les mains croisées. Habillé d’une toge blanche, d’un pardessus et d’une coiffe rouge, il ne fait guère de doute en sa fonction. Un prêtre. Ses mains sont couvertes de bagues composées de pierres précieuses, mais au-delà, il ne porte pas plus de richesse sur sa personne. Plutôt petit, en partie à cause de sa légère courbure, il ne semble guère impressionnant.
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Pourtant, ce que l'œil nu perçoit comme un simple vieil homme froqué, Isabelle ne peut dire de même. Tout autour de lui, une lueur, dorée et orange, calme, constante, entourant sa silhouette comme une cape. Cette lumière est forte, la dernière fois que la dame d’argent avait pu percevoir une telle chose, c’était à la cathédrale d’Altdorf, celle dédiée à Sigmar. En effet, accroché à sa tunique, des sceaux de pureté en classique, accompagné du symbole le plus sacré aux yeux des sigmarites, le marteau. À ses côtés, d’autres hommes, en tenue de voyage, l'accompagnent.

Son regard croise celui de la magicienne, et il sourit calmement. Les villageois encore inconnus se présentent les uns après les autres, mentionnant tous au passage leurs ancêtres, et certains, ajoutant même ceux-ci sur plus de cinq générations. Cependant, pour toute l’attention que reçoit Isabelle, Aaron, lui, en reçoit bien plus. Les plus jeunes, notamment, préfèrent largement lui parler. Après quelques instants, le colosse de shérif prend Isabelle sur le côté, adjoint de l’homme de foi.

« Je vous emprunte… un instant. Voici le père Otto. C’est lui qui… guide, les différentes paroisses de la région.

Mes salutations, madame von Baum. J’espère que vous allez bien. Le shérif s’est permis de me parler un peu de vous.

J’aimerais que, euh… nous poursuivions dans mon, bureau. »

Une fois installé tous les deux sur des troncs, du bon côté du bureau de Grigory, le religieux prend la parole.

« Oh, ne vous en faite pas, je n’ai pas besoin d’un bon siège pour être confortable. Et bien, madame, cette situation est assez irrégulière. J’ai cru comprendre certaines de vos activités désirées en ce charmant village. Cependant, je me dois de vous le demander, entre nos six oreilles, huit si on compte celle de l’ours empaillé.

Que pensez-vous… enfin, d’après-vous, pourquoi est-ce que je vous parle actuellement ? Une drôle de question, j’en conviens, mais je me dois de m’assurer que nous soyons sur le même pont.
»

Son regard est sérieux, mais n’est pas colérique, non. Il semble extrêmement curieux de la réponse.
Test d’INT(+1 car administration) : 10, réussite avec 4 degrés. Pas mal du tout.
Test de Théologie d’Isabelle : 10, réussite aussi.
Test de Mémoire d’Isabelle : ???, résultat caché.
Test de ??? d’Isabelle : 1, réussite critique. Très bien.
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Isabelle Breitenbach
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Re: [Isabelle] Le Prix de la Liberté

Message par Isabelle Breitenbach »

En entendant la formule prononcée par Reignach, j'ai une impression de Déjà-Vu. D'abord légère, puis bouleversante, au point de me donner le vertige. Je reprends un peu mes appuis, heureusement l'homme de lettre n'a pas remarqué mon moment de faiblesse.
Un écho du passé, voilà ce qui vient de me percuter de plein fouet. Aussi violemment qu'une carriole qui m'aurait roulée dessus. Car ce souvenir, verrouillé parmi tant d'autres, se dévoile juste assez pour l'associer à mon Wilfried.

Je ne sais pas quoi en tirer. Cela date-t-il de l'officialisation de la citoyenneté de mon fils? Pas sûr, car c'est bien sa voix que j'entends à la place de Reignach. Aucun contexte, rien. Juste une minuscule fenêtre vers un passé si lointain qu'il ne semble jamais m'avoir appartenu. C'est infernal, rageant... triste aussi.

Par ces quelques mots, le juriste vient de ruiner ma journée, pourtant porteuse de tant d'espoir.



Une fois dans le village, entourés de plébéiens surexcités, je n'ai toujours pas le cœur à la tâche. Mon esprit rumine ce terrible souvenir, sans pouvoir creuser plus. Ma pioche rebondit douloureusement sur de l'acier mémoriel, impraticable. Et je ne peux m'empêcher de m'interroger.
Qu'est-ce que je fous ici? Autour de ces inconnus? Si loin des réponses à propos de mon propre fils? Ne sont-elles pas la seule chose qui a motivé mon réveil des dernières décennies de décadence?

Tim? Il n'est qu'un pansement, une corvée imposée par une Déesse arrogante. Elle veut me détourner de mon objectif pour accomplir les siens, et cela me rend furieuse.
Je croise le regard du bonhomme, tout heureux de la foule, plein de vie et d'attente. Il ne rencontre que de la colère dans mes yeux, de la haine presque. Et son entrain s'amoindrit un peu, sapé par mon acte mesquin.

À mes côtés se tient un homme saint de Sigmar, accompagné d'une escorte. L'aura qui se dégage de lui me met un peu mal à l'aise. J'ai traité avec de nombreux hommes de foi au cours de ma carrière. Beaucoup que j'ai rallié à mes intérêts en échange d'une belle somme ou d'autre richesse. Malheureusement, ceux qui sont entourés de ce genre de lueur sont les plus difficiles à faire plier. Des "intègres" dont la foi dépasse tout besoin de rémunération.
Je les considère souvent comme des fanatiques.

Le shérif me prend à partie et nous nous retrouvons dans son bureau, assis devant le prêtre. Cette fois, Wilfried sort enfin de ma tête. Heureusement, car je sens que la prochaine conversation va être importante.

Le religieux n'y va pas par quatre chemins. Enfin si, vu qu'il ne prend même pas la peine de posé officiellement sa question. Bien, nous ne devrions pas en avoir pour trop longtemps à discuter théologie. Mais je dois rester prudente. Il sait ce que je suis et ces hommes de foi ont tendance à faire preuve d'une impressionnante fourberie pour accuser les magiciens dans mon genre.

Je me redresse et croise les doigts sur mes genoux.


« Votre Éminence, vous me demandez ce que je pense de notre Culte de Sigmar? M'interrogeriez-vous sur ma foi? Je pense surtout que ma nature vous rend méfiant, tant sur mes intentions que sur ma simple présence.

Je vais vous répondre avec grand plaisir : ma foi est pleine et pure, tout comme celle de mon fils. Nous savons que sans Sa bienveillance, nous ne serions pas ici aujourd'hui. À l'Est, si vous m'autorisez l'expression.
C'est l'espoir qu'Il confère en nous qui nous a permis de continuer dans les moments les plus sombres. »


Je dépoussière ma robe distraitement. C'est irritant, mais je vais devoir faire preuve de bonne foi, au moins le temps de forger ma présence dans Pluie du Corbeau.

« Quant à mes activités, vous avez toutes les raisons d'être prudent. Notamment d'après ce que j'ai entendu sur l'histoire de ce village. Uldine, c'est bien ça? Une femme mystérieuse aux pouvoirs inquiétants, de ce que j'en ai compris. Dangereuse, surtout dans une région pareille.
Les humeurs aethyriques de la Sylvanie sont réputées pour être particulièrement sombres. Elles noircissent, elles corrompent. Tout pouvoir incontrôlé est un danger sous son influence.

Mon expertise se base sur une étude académique, aux règles strictes. Si j'étudie les humeurs des huit vents de magie, seul Chamon me touche de son pouvoir. Une humeur stable, rigide, armée contre l'influence de la Ruine.

Le Culte de Sigmar est un phare dans la dangereuse nuit sylvanienne. Mais je pense que mes compétences pourraient s'avérer utiles pour repousser un peu plus le mal qui hante ces terres. »


Après un court silence, je reprends.

« Enfin, permettez-moi un peu de modestie après ce discours grandiloquent. Je ne suis qu'une humble magicienne en quête de foyer. Si j'ai de nombreuses années d'étude et de rigueur à mon actif, mes moyens restent très limités. Rien de quoi chambouler l'heureuse idylle qui régit dans ce village.
Je sais, je sais... les prêtres voient souvent d'un mauvais œil la manipulation des vents. Et c'est pour cela que je montre patte blanche.

"Je suis le métal, Sigmar est le marteau" cette formule s'adapte parfaitement au vent doré et à ma situation. Car je me considère toujours sous son autorité. »
Isabelle Breitenbach, Voie du Sorcier des Collèges de Magie
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Re: [Isabelle] Le Prix de la Liberté

Message par [MJ] Le Naufrageur »

Au fur et à mesure qu'Isabelle parle, le prêtre hausse les sourcils de plus en plus haut. Il cligne des yeux, ouvre la bouche mais se retient de dire quelque chose. Il souffle du nez, et laisse Von Breitenbach continuer dans sa tirade, encore et encore. Quand celle-ci se termine, il semble soudainement aller mieux. Il se lève, et enlève un peu de poussière de sa robe.

« Je demandais simplement pour vos projets, mais bon, soit. Je vais vous laisser. Bonne journée. »

Sur ces mots décevant, le prêtre s’en va. Lui-même ne donne pas fier mine, que du contraire. Ses yeux marron préfèrent regarder le sol pendant qu’il fait la moue des lèvres. Une fois en dehors, Isabelle regarde le shérif, qui ne fait que hausser les épaules en réponse, lui-même est plutôt bouche bée.

Après ce moment gênant, les deux se mettent à discuter d’autre chose. De matériel. Pour construire une nouvelle bâtisse solide, et assez spacieuse pour pouvoir travailler dedans, il va falloir des matériaux adaptés. Or, les édits du seigneur sont très clairs, il est absolument illégal d’effectuer de la sylviculture en dehors des endroits autorisés. La friche est tolérée, mais uniquement pour l’agriculture. Un seul village proche peut donc fournir l’entièreté du bois nécessaire. Gelblas. Près de là, se trouve un chantier forestier particulièrement actif.

Cependant, malgré la lettre qu’il a envoyée, celle en retour fut simplement “Non, ce ne sera pas possible.”, ce qui est particulièrement décevant. Ne voulant pas en rester là, et très certainement que la Dame d’Argent ne le veux pas non plus, il a décidé d’envoyer quelques personnes là-bas. Bien sûr, Isabelle est désignée volontaire.

Sur la route, à dos d’un simple chariot, tiré par deux chevaux, ils sont donc trois. Gozhit-Husina, Ingulf, et Isabelle. La première était libre, au vu de la saison, elle n’a pas trop de travail. Le deuxième s’est proposé, il a un copain à Gelblas et il souhaite lui faire passer un message. Le trajet prend une bonne partie de la journée, heureusement, ils sont partis le matin suivant. Le cocher est un vieux monsieur, qui voyage constamment avec son chien.

Pendant le trajet, ils discutent avec le cocher, il fait la route jusqu’à l’Averland, et passe par beaucoup d’auberges. Il raconte qu’une véritable vague de cultistes de Gunndred cause des troubles au sud de l’Empire, certains oseraient même s’attaquer à des élevages près de Nuln. Que des rumeurs qu’une tentative d’assassinat contre l’Empereur a été déjouée, et ce, grâce à un chat. Il semblerait que la situation soit très tendue au Reikland, les Von Trott recommencent à faire aiguiser leurs armes dans le Comté.

Après de nombreuses heures, ils arrivent à la lisière d’un camp, une foule de personnes semble s’être réunie, autour de quelque chose, ou quelqu’un. Ils entendent beaucoup de bruit, et il y a de l’agitation. Peut-être par réflexe, Isabelle choisit de regarder tout autour. Derrière de très nombreux buissons et arbres, à l’Est, elle a vu du mouvement, assez fort pour arracher à moitié un arbuste. Le mouvement disparaît plus loin.

Le coche s’est arrêté, voyant la scène devant.

« Hé, pourquoi tu t’arrêtes fieu ?[/color] »

« Y’a du bordel en face, je vais pas bourrer dans les gens comme un connard quand même. »

« Tu peux pas passer à droite ? Ça a l’air boueux, mais ce sera pas pour trop longtemps. »

« Mais qu’est-ce qu’ils branlent bon sang ? »

Pendant qu’un argument se poursuit, Isabelle se tient à l’avant, debout sur le chariot.
Jet de Charisme(+0) : 6. Ça va, il n'est pas trop irrité. :mrgreen:
Test de Ragot (+2) du groupe : 5, réussite large.
Test de Perception d’Isabelle (-4) : 3, réussite malgré tout.
Pour les fous qui désirent me rendre visite aux récifs.

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