[Armand de Lyrie] Maman

La Bretonnie, c'est aussi les villes de Parravon et Gisoreux, les cités portuaires de Bordeleaux et Brionne, Quenelles et ses nombreuses chapelles à la gloire de la Dame du Lac, mais aussi le Défilé de la Hache, le lieu de passage principal à travers les montagnes qui sépare l'Empire de la Bretonnie, les forêts de Chalons et d'Arden et, pour finir, les duchés de L'Anguille, la Lyonnesse, l'Artenois, la Bastogne, l'Aquilanie et la Gasconnie.

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[MJ] Katarin
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[Armand de Lyrie] Maman

Message par [MJ] Katarin »



Est-ce que cette nuit à partager un peu de tendresse et d'amour avait permis à Armand de faire fuir ses démons ? Difficile à dire, mais au moins n'avait-elle pas été agitée des mêmes sinistres cauchemars qu'à Derrevin, et au réveil, il eut la bonne surprise de voir que les effets secondaires de l'élixir de Perrin Melchine s'étaient totalement estompés. Si les épreuves à venir avaient de quoi affecter le mental du chevalier, sa forme physique était de nouveau au beau fixe.

Se présentant de bonne heure à Castel-Aquitanie, Armand fut immédiatement reçu par l'intendant qui lui confia le décret officiel attestant de son nouveau statut, rédigé par le Grand Justicier et signé par le Duc en personne. Après avoir fait signer un document retranscrivant son serment, le factotum l'accompagna jusqu'à l'armurerie du château où deux domestiques l'assaillirent de questions sur ses préférences en terme de poids et de style. Après avoir pris ses mesures en long et en large, Armand eut à subir l'essayage de plusieurs armures, chacune mettant plus d'un quart d'heure à être enfilée et ajustée, et tout autant à être retirée ensuite.
Il lui fallut choisir entre des harnois et des heaumes aux gravures stylisées de griffon pour montrer son allégeance au Duc d'Aquitanie, ou quelque chose de plus neutre, mettant en avant l'efficacité fonctionnelle aux dépends de toute notion ostentatoire. En effet, n'ayant pas le temps de se faire fabriquer une armure sur mesure, impossible pour Armand de s'équiper aux couleurs de la Lyrie ou de Derrevin pour le moment.

L'exercice terminé et l'équipement choisi, l'intendant accompagna Armand jusqu'aux écuries du château afin de lui présenter sa nouvelle monture : un magnifique destrier bretonnien à la robe alezan, mesurant un bon mètre soixante au garrot. Nommé Ravel, l'animal était tout bonnement superbe, sa carrure athlétique débordant de vigueur. Le garçon d'écurie confia à Armand qu'il avait rarement vu si bel animal, et que ce si ce dernier avait encore un caractère un peu rebelle dû à son jeune âge, il était déjà parfaitement formé au port d'une barde complète et au poids d'un chevalier.

Le nouveau chevalier du royaume ayant pu faire connaissance avec sa monture, il se fit ensuite guider par l'intendant vers la cour du chateau : là-bas, il avait rendez-vous avec tous ses potentiels compagnons pour sa future quête.

Avant même de parvenir à destination, venant de pénétrer dans le couloir qui menait au cloître, Armand eut la surprise de voir Triboulet débouler en courant droit vers lui, tout particulièrement ému de retrouver son sire - en armure clinquante de surcroît ! Alors qu'il enlaçait virilement le seigneur de Lyrie dans un fatras métallique, Félix s'approcha lui aussi, expliquant à Armand que son compagnon paysan l'avait cherché dans la moitié de la ville toute la soirée tant il était inquiet à son sujet après leur séparation un peu sèche de la veille. Tous deux se montrèrent bien évidemment très curieux du moral d'Armand, Triboulet inquiet des réprimandes qu'aurait pu lui faire le Duc, et Félix préoccupé par la réponse qu'il avait pu donner aux négociations concernant Derrevin.

L'intendant leur laissa un peu d'intimité pour discuter, prenant congé avant d'indiquer une dernière fois à Armand la porte menant au cloitre où l'attendaient les chevaliers errants volontaires pour se mettre au service de sa bannière. Armand put ainsi résumer son entrevue avec le Duc à ses deux compagnons, qui, s'ils ne furent sans doutes pas aussi estomaqués qu'Armand la veille, réagirent malgré tout avec une surprise non dissimulée.

Triboulet devint blanc comme un linge. Les mâchoires crispées, le regard fou, il sembla vouloir dire quelque chose avant de renoncer, et ce à de multiples reprises. Il était évident pour Armand que malgré tout l'amour que lui portait le paysan, l'idée de voyager aux côtés d'une prophétesse de la Dame pour se rendre dans un endroit qui n'avait jamais été qu'une source de souffrance et de malheurs dans son existence, où résidait désormais un mort-vivant qui n'était autre que la terrible mère de son compagnon, horrifiait totalement le pauvre homme dont l'instinct de survie lui hurlait de décamper sur le champ.

Félix quant à lui fut bien plus terre à terre tandis qu'il répondit à Armand avec une mine plus sérieuse qu'à l'accoutumée.

- Et bien, voilà des événements que je n'avais pas prévu, seigneur Armand.

Il n'avait même pas fait d'effort pour dissimuler son sarcasme, quand bien même ce dernier semblait davantage animé par un esprit taquin que par une vraie rancune.

- Je ne sais pas comment Carlomax va accueillir cette décision, et je ne suis pas sur de savoir moi-même si c'est une bonne chose ou non - ne m'en veuillez pas, je doute que vous le sachiez vous-même. Mais gérons un problème après l'autre : la Lyrie, donc. Une corruption qui refuse de disparaître, un spectre qui résiste à son combat contre une prophétesse... dire que je croyais que l'insurrection paysanne de Carlomax serait la chose la plus incroyable qui puisse se dérouler dans ce duché pendant mon voyage. Si vous le souhaitez, je peux vous prêter ma lame : je ne crains pas les vieilles légendes, et en ai déjà affronté quelques-unes. Et surtout... je ne prétends pas avoir la prestance de vos futurs compagnons de voyage, mais... êtes-vous certain de vouloir recruter des chevaliers errants d'Aquitanie ? Votre nom a été traîné dans la boue, vous devenez seigneur d'une baronnie de hors-la-lois dont l'ancien dirigeant était un chaotique ignoble - vous qui êtes l'enfant de chaotiques - et vous savez que des hommes comme Jourdain peuvent encore gangrener la capitale, cachés parmi la noblesse. Si vous vous doutez que mon amitié ne va pas sans une certaine curiosité des mystères cachés dans votre domaine, au moins puis-je vous promettre une loyauté qui sera sans doutes plus fiable que celle des nobles là-dehors, qui ne vous dévoileront pas avec la même sincérité que moi les vrais motifs de leur volonté à vous suivre...

Félix fit un regard en coin à la porte menant au cloître, avant de conclure :

- En revanche, vous m'aviez dit, lorsque nous avions quitté la demeure du seigneur Brandan, que le jeune Andry de Maisne souhaitait vous aider à reprendre la Lyrie lorsque le jour serait venu. Sans doutes ne pensait-il pas que ce moment viendrait si rapidement, mais en lui je pense que vous pouvez avoir confiance - rien ne lui ferait plus plaisir que de contrarier sa famille en aidant la Lyrie : encore mieux si c'est vous qui héritez de Derrevin. Ma monture est un coursier aussi fiable que rapide : si je pars tout de suite au triple galop, et que vous ne pressez pas trop le pas en compagnie de votre prophétesse, vous pourriez avoir un allié digne de confiance de plus dans votre entreprise. Qu'en dites-vous ?

Félix fit un étrange sourire à Armand, ses yeux pétillants de malice. Toujours rieur et agréable, parlant même des sujets les plus sérieux avec un air rieur, le ménestrel serviteur de Véréna était à l'image de son ordre et de ses intentions : mystérieuses et imprévisibles.

Lorsqu'Armand se décida à rejoindre la cour du château de Lyrie, il put arriver dans un grand espace à l'herbe parfaitement coupée, qui servait sans nul doute de terrain d'entrainement aux chevaliers. Pour l'heure, seuls trois d'entre eux étaient présents.

Le premier était un vieil homme auquel on pouvait attribuer une bonne soixantaine d'années, en train de faire les cent pas dans la cour. Le visage marqué par le temps, le crâne partiellement dégarni encore agrémenté de quelques longs cheveux fins et blancs tirés en arrière, il portait en bandoulière son épée bâtarde par dessus une armure constituée d'un gorgerin en plaque par-dessus une longue chemise de mailles.

Le second était à l'inverse, tout particulièrement jeune. Équipé d'une armure de plaques ajustée à sa petite taille, l'adolescent était en train de déchaîner toute sa fougue sur un mannequin d'entrainement. Ses mouvements étaient vifs et précis, et il maniait avec un talent évident une épée bâtarde adaptée à son gabarit.

Seul la troisième individu, adossé à un mur, était familier à Armand. Les cheveux bruns coupés courts, des oreilles décollées, un plastron portant l'emblème du Duc sous sa cape jaune, un regard mauvais à peine visible derrière ses yeux perpétuellement plissés, impossible de ne pas identifier le chevalier Casin. Un sire sans domaine, aristocrate au service du Duc, qui avait autrefois des vues sur Anne de Lanneray avant que son cœur ne soit conquis par Armand VII de Lyrie. Il détestait cordialement le père d'Armand qui lui avait ravi son amour de jeunesse et le domaine qu'il aurait pu obtenir en conséquent - et bien entendu, sa haine s'étendait aussi au fruit de leur union, qu'il semblait pourtant vouloir aujourd'hui accompagner en Lyrie...



Voilà donc la "longue" liste des volontaires souhaitant se mettre au service d'Armand de Lyrie, fils de serviteurs de la ruine, et seigneur d'une communauté de hors-la-lois...




Les trois chevaliers
Le vieux :
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Le jeune :
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Casin :
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Jet d'END : 3, les plaques d'eczéma ont disparu, Armand est totalement rétabli.

Jet d'empathie d'Armand sur Félix : 12. Mystère mystère, les intentions de Félix resteront compréhensibles de lui seul...

Jets d'int pour connaitre les chevaliers présents : 15, 19 et 5.

Pour ton armure et ton heaume, tu peux choisir entre deux styles : neutre, ou portant des gravures stylisées de griffon. Tu me dis - à toi de voir si tu veux chercher des fanarts pour donner une idée de la chose. Quoiqu'il en soit, ta fiche est à jour avec ton nouveau stuff, destrier compris.

A toi de décider comment tu t'entretiens avec les trois chevaliers - un bureau est à ta disposition si tu souhaites leur faire passer des entretiens privés (auquel cas on fera les trois en parallèle)

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Armand de Lyrie
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par Armand de Lyrie »

J’observe Oranne se rhabiller. Torse-nue, elle se brosse rapidement ses cheveux trop secs, laissant des tignasses entières sur la brosse. Épingle dans la bouche, elle se regarde dans un petit miroir, sans pour autant avoir quoi que ce soit à sa disposition pour faire disparaître ses cernes, ses débuts de rides ou ses boutons.

« Tu vas m’regarder longtemps, mon chat ? »

Je souris et me soulève du lit. Je ramasse un par un mes vêtements qui sont disposés sur le canapé, et me rhabille assez rapidement. Elle me propose un truc à bouffer, je prend une pomme plus très fraîche dans une corbeille, et du biscuit rance et moite qui doit avoir plusieurs jours. On discute d’un truc débile, vous allez pas le croire : ses plantes. Je lui demande c’est quoi qu’elle arrose le soir, et elle part dans une courte explication sur ses bleuets et coquelicots. On parle pour parler, voilà tout. On parle pour faire du remplissage, pour meubler entre les bruits salivaires et la mastication. On meuble en attendant que je parte.

« Hé, tiens. »

Elle retire la bague argentée qu’elle porte au bout de son auriculaire, et me la jette dans ma direction. Je m’en saisis à la volée, et la glisse à nouveau sur le doigt de la chevalière, en l’observant un petit peu.

« Va aller miauler ailleurs, maintenant, qu’elle m’ordonne avec un grand sourire.
– Au revoir, Oranne. »

Je quitte l’appartement en remettant ma ceinture et en jetant mon manteau sur les épaules. Je pars immédiatement, fait grincer les escaliers, tape un peu fort dans la vieille porte de l’entrée du bâtiment. Je redescends sur la sente de la ruelle, puis rejoins le pavé citadin.
Je me sens étrangement détendu. Calmé. Encore endormi, alors que j’ai les yeux grands ouverts. Je remonte lentement le quartier pour retourner jusqu’au palais du duc, avec la senteur de vin et de sueur de la tenancière qui survit encore dans mes narines.
C’est marrant, la vie. Elle vous jette toutes les merdes qu’elle veut à votre gueule, mais le monde, il s’en fout, lui, il continue de tourner. Il peut vous arriver les choses les plus terribles qu’il soit possible d’imaginer, le monde tourne toujours. Le soleil dans le ciel brille toujours. Le froid picote toujours. La neige plus très fraîche s’écrase sous vos pieds. Les pommes ont toujours leur saveur sucrée. Et il y a encore des gens pour rire, et du vin pour vous adoucir, et des femmes pour vous prendre dans leurs bras.
Je vais pas m’effondrer et céder à la panique. Parce que le monde ne s’arrêtera pas pour moi. Le monde n’est pas tourné autour de moi. Il va continuer de tourner encore et encore, tant qu’il y aura des gens pour faire leur devoir.

Je vais mettre ma mère en terre, et la vie continuera de tourner.

Je suis passé par la grande place. Y avait des gens qui faisaient leur petite vie, des marchands bien habillés, des petits boutiquiers qui s’activaient dans tous les sens pour faire tourner la forge, le four à pain, et les métiers à tisser. Sur une estrade au milieu, devant l’arbre où on clouait des papiers pour des recherches d’emploi ou des informations, il y avait un gros monsieur à la puissante voix, résonnante comme la nef d’une église, qui était entouré de deux solides écuyers, des soldats roturiers portant brigandine, cervelières, et longues vouges à leurs épaules.

« ...Les ordures ménagères, elles, ne seront collectées qu’aux Vêpres de Landouin et lors de la Parade des Cerises, et nous rappelons qu’une amende forfaitaire de cinq deniers sera subie par tous ceux qui jetteraient des déchets ne correspondant pas aux jours de collectes !
Oyez, Oyez !
Son Illustre Altesse Armand, Par la Grâce de la Dame, Duc d’Aquitanie, Saint Chevalier ayant bu le Graal, Proclame ceci :
Que le chevalier errant Armand, fils d’Armand, ignoble, indigne et déchu comte de Lyrie, et d’Anne, ignoble, indigne et déchue seigneuresse de Lanneray, ayant prouvé sa valeur, a accroché pennon à sa lance et a été élevé Chevalier du Royaume de Bretonnie ; Ayant prêté hommage-lige, lui sera confié le fief banal de Derrevin en ban absolu. La Dame veille sur lui !
Oyez, Oyez !
Le Temple de Shallya de Castel-Aquitanie organise une collecte de torchons, vêtements et linges anciens et rapiécés pour le bien des indigents, orphelins et estropiés de la ville ! Par la Grâce de Shallya, sont chaleureusement invités à participer toutes les personnes qui- »


Ignoble, indigne, et déchu. C’est une sacrée formule. Ça me suivra toute ma vie. Je suis fils de quelqu’un. C’est mes enfants, si j’en fais, qui auront la chance d’avoir un père honorable, dont on peut prononcer le nom sans être révulsé.
Je suis sur mon chemin. J’étais parti en Quenelles avec l’haleine suicidaire. Maintenant, j’ai envie de vivre. Dame soit avec moi – j’ai envie de vivre.




« Que dites-vous de cette armure ? »

Je me sens mal à l’aise dans le plastron de plate. L’armet m’étouffe. J’essaye de bouger dans des cliquetis métalliques.

« Je suis tellement peu habitué…
C’est normal qu’elle pèse vraiment lourd du côté droit ?

– C’est pour faciliter le combat à la lance, monseigneur.
– Je sais, mais ça se ressent vraiment pas mal, à pied… Si je pouvais la porter plusieurs mois, je dis pas, je m’habituerais, mais vous auriez pas quelque chose de plus équilibré ?
L’armet est sympa en revanche, très coquet. J’aime beaucoup.

– C’est une copie de style Tiléen, monseigneur. Toute l’aristocratie de Remas et Miragliano en porte.
– Ils ont bon goût. »

L’intendant et l’armurier sont aux petits soins avec moi. Des valets et des pages vont dans tous les sens, s’affairent pour sortir les spalières, les gorgerins, les gantelets et tous les autres morceaux de métal censés me garantir du trépas causé par la morsure d’une lame.
Mon cœur bat de fierté.
Je ressemble enfin à un vrai chevalier.

« Celle-ci devrait plus correspondre. Brigandine matelassée, maille sur tout le corps, les canons d’avant-bras ont été limés et allégés.
– Je suis très à l’aise dedans, en effet. Mais elle fait assez… Assez rustique, non ?
– Fonderie FitzDaniel, c’est l’équipement que portent les écuyers à pied de Son Altesse. On a simplement renforcé les aisselles, l'aine et la gorge avec des pièces de plates. Pour l’heure elle n’est certes pas majestueuse, mais croyez-moi, on ne vous confondra pas avec de simples fantassins, et vous pourrez plus tard rajouter des orfèvreries pour correspondre avec vos meubles héraldiques.
– Si vous le dites. »

À me regarder dans le miroir, je suis, pour dire vrai, moyennement convaincu par les assurances de l’armurier. Il continue de me proposer de nouveaux choix, des cubitières armoriées, des pièces pectorales reprenant l’héraldique du Duché d’Aquitanie : Beaucoup de becs et de pattes de cruels d’oiseaux.
Et puis, alors que les valets d’armes et les pages font passer des choix, mes yeux s’arrêtent soudain sur l’un des équipements.

« Attendez.
Je peux essayer ça ? »


L’armurier claque des doigts pour que ses apprentis se mettent au travail et se dépêchent d’à nouveau me déshabiller et me revêtir : ça doit faire maintenant deux heures que je fais des essayages.
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« Harnois plate-et-maille, camail en étoiles, surcot au-dessus aux couleurs de l’Aquitanie, spalières à bec. L’armure est sommes toutes plutôt traditionnelle, comme vous le demandez – Il vous faudra tout de même faire vos marques dans le harnois, mais ça viendra petit à petit. Le casque est une salade magnifiée : Nous nous sommes inspirés des heaumes qui sont à la mode dans l’Empire, mais nous lui avons ajouté une touche Bretonnienne de saveur bien accueillie. Les yeux sont bien au bon niveau ou il y a besoin d’un coup de vis ? »

Je suis bouche bée. Je baisse la visière du heaume au-dessus de mon visage, ne voyant à présent le monde qu’à travers les fines fentes de la salade. J’entends ma respiration. Je me sens lourd, et pourtant, étrangement vigoureux. Je refixe bien la ceinture, la serre autour de ma taille.

« Le manteau est… »

Je trouve même pas d’adjectif qui peut convenir, ça fait sourire l’armurier.

« C’est très fragile, il faut le laver de manière délicate, il vaut mieux l’entretenir avec des produits alcalins qu’on achète chez les apothicaires, plutôt qu’avec du savon.
– Merci pour tout, armurier.
Je vais prendre celle-là. »


J’ai les yeux rivés dans le miroir. Un énorme sourire derrière ma visière de métal.

Et si ça n’avait été que l’armure.

Me séparant de l’armurier, l’intendant m’a amené jusqu’aux écuries ducales. Un gigantesque bâtiment, de stature et de goût royal. Il m’a amené vers une magnifique bête, presque aussi grande que moi. Un destrier, un véritable, un de ces chevaux qui fait la fierté et la supériorité de la Bretonnie sur le reste du Vieux Monde – exporter un Destrier Bretonnien dans un autre pays est un des crimes les plus graves imaginables. Quand on m’a dit qu’il était à moi, je ne l’ai pas cru.
J’ai tendu une main gantelée de plate, que j’ai posé sur son museau. Il a soufflé très fort de ses nasaux.

« Ravel, c’est ça ? »

Je l’ai observé, de long en large. Les chevaux m’avaient manqué. Énormément. Mais lui est tellement… Il y a quelque chose dans son regard, je vous jure. Il pétille.

« Tu es tout beau, toi. Tu es magnifique.
Tu m’amèneras charger jusqu’au Bord-du-Monde, Ravel. »




Je suis sorti un peu plus loin. J’ai rencontré Triboulet et Félix. Triboulet a sauté dans mes bras, et j’ai répondu à son embrassade en le serrant de mes petits bras métalliques.

« Désolé pour hier soir, Triboulet, j’étais…
J’étais pas bien, mais ça va beaucoup mieux. »


Je lui frotte le haut du crâne, tandis que Félix me fait un signe du regard.
Et du coup je leur raconte tout ce que le Duc m’a raconté.
J’épargne aucun détail – à quoi bon ? Tout. Mon beau discours. La réponse sèche de la prophétesse. La solution du Duc. Et surtout, la survie de ma mère.
Triboulet en est devenu livide. Paniqué. À un moment, il est parti, à ma grande incompréhension.

« Hmpf.
Je lui parlerai plus tard. »


Du coup, je peux intriguer avec Félix. Il a l’air bien accorte. Je crois. C’est difficile de lire en lui. Il me propose son aide. Et je vous avoue que, j’hésite, franchement. J’hésite parce que c’est un homme… Étrange. Je ne sais pas trop quoi penser de lui. Et il a l’air attaché à l’honnêteté : Or, comme je lui ai dis, les secrets nous forment.
Est-ce vraiment une bonne idée de le laisser retourner sur mes terres ? De découvrir l’endroit où j’ai grandis ?

« Félix…
Bon sang. Tu parles bien. Beaucoup trop bien. Cela te joue pas des tours, des fois ? »


Je passe une main sur mes lèvres.
Qu’est-ce qu’il a bien pu raconter au Duc ?
Inutile de lui demander à lui. Peut-être que c’est le genre de questions que je pourrais poser à Dame Melaine...

« Très bien. Pars donc, le plus vite possible, et nous nous retrouverons aux portes de la Lyrie. Les routes soient clémentes avec toi. »

Je lui serre virilement la patte, et conclue donc ce marché.



J’ai trois volontaires. Je vous avoue que je suis déçu. D’un autre côté je sais pas combien j’en attendais. Je sais pas moi, vingt ? Ça me paraît un bon chiffre, vingt, ça fait un conroi. C’est un ordre du Duc quand même. Ok on part par en Croisade pour l’Arabie, mais… Mais quand même quoi, ça me laisse pantois.
En plus je reconnais un des types. Mais qu’est-ce qu’il fout là ce crétin ?

L’intendant m’a proposé tout à l’heure de les recevoir un par un. Pourquoi pas, après tout ? J’ai aucune idée de quoi dire, mais bon, on verra bien comment ça marche.



Mon casque est posé sur le bureau. Je suis assis sur mon siège, avec mon harnois flambant neuf et mon manteau de plume. Le premier chevalier entre, c’est le plus âgé de tous : crâne dégarni, cheveux blancs. Je me lève lorsqu’il entre, et lui désigne le siège.

« Venez, frère. Asseyez-vous.
Vous désirez boire quelque chose ? »


J’attends qu’il s’installe pour reposer mes fesses.

« Je n’ai jamais eu le plaisir de vous rencontrer. Comment vous appelez-vous donc, et d’où venez vous ? »

J’attends qu’il se présente.

« Pour quelle raison souhaitez-vous vous aventurer en Lyrie ? Savez-vous ce qui nous y attend ? »



Mon casque est posé sur le bureau. Je suis assis sur mon siège, avec mon harnois flambant neuf et mon manteau de plume. Le second chevalier entre, si seulement il peut mériter ce titre : Je sais que les chevaliers errants sont censés être jeunes, mais lui il l’est vraiment plus que tout. Je me lève lorsqu’il entre, et désigne le siège.

« Viens donc, mon frère. Assied-toi.
Tu veux boire quelque chose ? »

Je lui fais un sourire plus chaleureux que pour celui beaucoup plus âgé de tout à l’heure, et n’hésite même pas à le tutoyer.

« Je t’ai vu t’entraîner dans la cour. Félin, agile… Tu sais bien te déplacer. Qui donc t’as entraîné ? »

J’attends qu’il me réponde, avant de continuer.

« Pour quelle raison souhaites-tu t’aventurer en Lyrie ? Sais-tu ce qui t’y attends ? »



Mon casque est posé sur le bureau. Je suis assis sur mon siège, avec mon harnois flambant neuf et mon manteau de plume. Le troisième chevalier entre. Celui que me laisse le plus pantois. Je lui souris pourtant lorsqu'il entre, me lève du siège et l'invite à s'asseoir.

« Monseigneur. Installez-vous.
Désirez-vous boire quelque chose ? »


Je pose mes fesses sur la chaise seulement après que lui-même s’est assis.

« Je ne suis pas sûr d'avoir déjà fait votre connaissance. Pouvez-vous me parler un peu de vous ? En espérant que je ne mets pas en doute votre élan si vous vous êtes déjà illustré au service de notre pays. »


Bien sûr que si je sais qui il est. Sire Casin. Mon père adorait faire des jeux de mots sur lui, et le tourner en dérision. Moi-même n'ai pas la moindre idée de qui est ce larron : j'ai rien contre lui. Lui, en revanche, il est très, très possible qu'il ait quelque chose contre moi...
Et j'ai donc envie de voir : Est-ce qu'il va jouer cartes sur table avec moi ? Me dire la vérité ? Ou bien est-ce qu'il va m'inventer un grossier mensonge ? Si c'est cette dernière option, il faut vite que je l'écarte, de peur de me faire poignarder dans le dos à la première occasion.

« Qu’est-ce que vous attendez de la Lyrie ? Savez-vous ce qui nous y attend ? »
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 27 nov. 2019, 21:30, modifié 2 fois.
Raison : 6 xps, +1 parce que j'aime tjrs autant le réalisme que tu donnes aux scènes avec tous ces petits détails ^^ / Total d'xp : 7
Fiche : wiki-v2/doku.php?id=wiki:fiche_armand_de_lyrie
Image

Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par [MJ] Katarin »

- Un verre d'eau s'il vous plait, demanda le vieil homme en s'asseyant lentement et précautionneusement sur sa chaise.

Si ses gestes se faisaient lents, son regard restait vif, et sa voix assurée. Si l'âge avait assurément atteint sa vivacité de corps, son esprit semblait encore acéré.
Alors qu'Armand lui signale ne pas le connaitre, il semble un peu surpris, avant d'afficher une mine gênée.

- Oh. Chevalier Rolet du Bois, pour vous servir, sire Armand.

Si d'apparence, ce grand-père n'avait effectivement pas percuté les souvenirs d'Armand, son nom lui permit immédiatement de faire fonctionner sa mémoire. Le chevalier Rolet était presque légendaire en Aquitanie, et pas pour les bonnes raisons. Surnommé Rolet l'élu de Ranald, voire Rolet le Guignard, il était réputé pour être le plus vieux chevalier errant du duché, si ce n'était de toute la Bretonnie. C'était presque une légende vivante : il était en errance depuis presque quarante ans, et n'avait jamais réussi à terminer une seule des quêtes héroïques qu'il entreprenait - et pourtant, ce n'était pas faute d'y mettre de la bonne volonté. Il bat une déreliche ? Le lendemain une autre a pris sa place avant même qu'il ne puisse se vanter de son exploit. Il part affronter un griffon ? Un coup de griffe sur son casque l’assomme, et il se réveille seul survivant de son équipe. Il part chercher une relique sacrée dans une vieille crypte ? Après un mois de voyage, à peine ouvre t-il la lourde porte en pierre pour y entrer que tout l'intérieur s'écroule dans un gigantesque éboulement, rendant toute exploration impossible. Il y a des dizaines et des dizaines d'histoires de ce genre, et toutes se concluent de la même manière : toutes les quêtes de Rolet finissent invariablement par un échec, quand bien-même lui s'en tire toujours bien vivant. A force, il était devenu une blague entre chevaliers, voire même une menace que les parents faisaient à leurs enfants s'ils ne travaillaient pas assez : "sois plus assidu, ou tu finiras comme le chevalier Rolet !" - même si bien entendu, le respect entre nobles empêchait quiconque de se moquer de lui en sa présence...

Rolet du Bois sembla voir dans le visage d'Armand que son nom avait ravivé sa mémoire, car il réagit en conséquence.

- Ah, maintenant vous me remettez. Ecoutez, je sais que ma réputation est ce qu'elle est... mais je refuse de mourir sans avoir réussi à prouver à la Dame au moins une fois ma vaillance. J'essaierais encore et encore, tant que mes vieux os me permettront de lever mon épée. Je sais que votre vieille demeure était gangrenée par les agents du Corrupteur, que désormais c'est un spectre qui y vit, je veux vous aider à l'affronter, et suis prêt à mourir à vos côtés pour ce faire. Je comprendrais votre refus cependant, j'ai l'habitude...



***


- Non, merci, sire Armand, je ne souhaite ni m'asseoir ni me désaltérer.

Le jeune homme ne manquait pas d'assurance dans la voix, quand bien même celle-ci était encore fluette. Alors que, pendant l'entretien précédent, Rolet du Bois avait plutôt tendance à détourner le regard, celui-ci semblait naturellement inverser les rôles, comme si c'était lui qui jaugeait Armand pour voir s'il était digne de lui et non l'inverse.

- Je suis Artur de Fluvia, quatrième fils du comte de Fluvia - c'est lui et mes frères qui m'ont entraîné. Néanmoins, partir construire des châteaux ne m'intéresse pas, pas plus que la guerre futile de mon père avec la famille Desroches. Je ne veux qu'une chose : prouver ma valeur à la Dame au plus tôt, pour devenir chevalier de la quête et pouvoir la rencontrer. Le duc en personne est allé enquêter dans votre domaine, et a choisi non pas de tuer le spectre qui y résidait, mais de faire déménager tous ses habitants en laissant le mort-vivant sur place : un fantôme de cet acabit est donc un adversaire digne de forger ma légende, et d'attirer l'attention de notre déesse.

Clairement, s'il ne manquait apparemment ni d'assurance ni de courage, ce n'était pas la modestie qui étouffait ce chevalier-ci...




***


Le sire Casin ne s’embarrassa pas à cacher son animosité envers Armand : à peine arrivé dans le bureau, il ne répondit pas à la demande d'Armand quand à ce qu'il souhaitait boire, se contentant de saisir un pichet de vin pour s'en servir un gobelet qu'il sirota juste après, laissant le verre du chevalier de Lyrie vide.

- Alors votre père ne vous a jamais parlé de moi, sire Casin Baillet ? Quelle surprise : j'aurais cru qu'un chevalier corrompu comme lui, aussi sournois que perfide, aurait vanté chaque soir à sa progéniture comment il a dérobé une femme aussi pure que parfaite à son honorable rival, pour pouvoir la vicier dans son sinistre domaine.

Un regard de défi, comme celui que lui avait jeté Herbin de Maisne quelques jours plus tôt. Il était évident qu'il cherchait la confrontation... et pourtant il se calma rapidement, comme se ressaisissant de lui-même.

- Depuis que le roy l'a nommé duc d'Aquitanie, je n'ai eu de cesse que de mettre en garde notre seigneur Armand contre la perfidie de votre père. C'est donc bien naturellement que j'ai rejoint l'ost punitif du Duc lorsque vous êtes venu pleurer devant lui, et c'est avec la joie du devoir à accomplir que j'ai affronté la clique de chevaliers maudits que votre père a formé. La victoire des forces du bien a été écrasante, mais gardait un gout d'amertume dans ma bouche : si le cadavre de votre père avait été retrouvé, Anne avait réussi à s'enfuir de son duel avec notre prophétesse, pour disparaître dans les profondeurs du château de Lyrie...

Sa voix devient plus sinistre, mais aussi plus triste.

- Dame Anne de Lanneray était un joyau d'innocence, de pureté, de bonté. Ce qui lui est arrivé... c'est de ma faute. Parce que j'ai perdu en duel contre votre père. J'ai essayé de trouver sa trace après la purification de votre duché, en vain. Alors quand hier, j'ai appris de la bouche du Duc que le spectre qui hantait la Lyrie portait son visage, je... je...

Voyant qu'il se faisait hésitant, il finit son gobelet cul sec, avant de se resservir pour en descendre un second.

- Je n'ai pas pu la sauver de son vivant. Je veux au moins l'aider à trouver la paix maintenant. Dussé-je me mettre au service de... de... de vous.


Jet d'INT d'Armand, +2 pour réputation du vieux : 8, réussi
Pas besoin de jet pour le gamin : la famille de Fluvia et Desroches, le lore du duché en parle, tu connais ce que la BI en dit. Note qu'il ne porte aucun signe distinctif de sa famille sur lui - Fluvia c'est un griffon qui survole un fleuve, en toute logique :D

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Armand de Lyrie
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par Armand de Lyrie »

Oh putain. Y a Rolet du Bois qui est volontaire pour m’accompagner en Lyrie. J’y crois pas une seule seconde. Je suis obligé de réprimer l’envie de soupirer lorsque ça fait enfin « tilt » dans ma tête, et que je me rends compte de qui est assis devant moi. J’étais même pas sûr que ce gars existait réellement, pour tout vous dire : au bout d’un moment on lui a inventé tellement « d’exploits » que ça en est devenu ridicule. Mais si, si, il est là, le chevalier errant aux cheveux blancs ; Au bout d’un moment il aurait fallu raccrocher, moi à sa place j’aurais remis mon cheval aux écuries, j’aurais épousé une fille de marchand et j’aurais terminé le restant de mes jours à vivre comme un bourgeois à gérer des affaires d’argent extrêmement peu nobles. Mais non : Vieillissant, ridicule, il préfère s’acharner plutôt que de juste rentrer chez lui.
Et encore, ça, c’est si on donne du crédit à ses histoires. Car peut-être que s’il ne devient pas Chevalier du Royaume, c’est aussi par malveillance. Peut-être que la Déréliche qui aurait été remplacée dans la journée n’a en fait jamais été combattue. Peut-être que le Griffon ne l’a pas assommé, mais qu’il a fuit. On n’ose pas dire ce genre d’accusations à voix haute – diffamer un noble ça va très loin, ça se fini en duels singuliers. Mais on peut tout de même le penser.

Qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire de lui ? J’en ai un sourire pincé, affreusement gêné, alors qu’il répond à ma question en sirotant son verre d’eau que je lui ai servi.

« Savez-vous que je suis très superstitieux, damoiseau ? Cela me met très mal à l’aise d’avoir un poissard à mes côtés. Ça ne me met pas dans de bonnes dispositions pour retourner sur la terre maudite de mes parents. »

Je me lève de mon siège, et contourne le bureau, les mains dans le dos. Je viens me placer pas loin de lui, le jugeant malgré mon impiété familiale, malgré ma jeunesse et les rumeurs sur mon compte – après tout, je suis un chevalier du Royaume, et pas lui. Par les voies impénétrables de la Dame, je suis devenu son supérieur.

« Le Corrupteur tentera de s’immiscer par tes oreilles. Il te murmurera de grandes promesses. De gloire. De moqueries à effacer. De nobles qui se sont amusés en tournant ton nom en dérision qui se retrouveraient à s’agenouiller devant toi…
Si tu dois m’accompagner en Lyrie, ce ne doit pas être la gloire qui te motive. Ce ne peut pas être de réparer les insultes passées. Et ce n’est pas non plus pour te jeter avec hardiesse vers ta mort, dans la première embuscade que l’ennemi te tendra. Tu y vas pour la Dame, et la Bretonnie, qu’importe que cela se finisse en échec ou en victoire.
Ce que je dis peut te sembler évident, frère-chevalier, et pourtant, c’est extrêmement important. Ma mère est une femme charismatique, et forte pour entrer dans les consciences des gens, même des plus honnêtes chevaliers. »

Je le regarde droit, droit dans les yeux, et lui parle avec un ton volontairement bas et rauque. Très sérieux.

« Si tu m’accompagnes en Lyrie, j’ai besoin que tu me jures que tu obéiras à mes ordres. Que tu me confieras le moindre doute, la moindre hésitation que tu éprouverais. Je ne veux pas te voir t’enfuir, ou au contraire charger en avant sans que cela soit nécessaire. Je ne veux pas te voir ruminer des pensées qui ne seraient pas les tiennes au fond de ton for intérieur. Et je ne veux pas d’héroïsme – je veux de la pureté de cœur, et d’âme.
Si tu peux me jurer cela, alors ton épée se tiendra derrière mon pennon, Rolet. »




Le garçon me plaît. Irrévérencieux. Hautain. Y a quelque chose dans le fond de ses yeux, je peux pas m’empêcher de sourire. Et je sais qu’il est sûrement à la hauteur de ses paroles – il y avait qu’à voir sa façon de bouger dans la cour tout à l’heure. Il est jeune, mais il a un tel potentiel.
Je suis sûr que Quentin de Beauziac aurait adoré le rencontrer. Il l’aurait travaillé comme on travaille un diamant, pour le faire resplendir.

« Tes motifs sont preux, jeune Arthur. Nul doute que notre pays irait bien mieux si tous les chevaliers parlaient comme toi.
Mais as-tu déjà affronté des ennemis ? Ou pour l’heure, as-tu uniquement tes entraînements comme expérience ? »

Je me lève de ma chaise. Lui se tient bien debout, au garde-à-vous. Je suis pas beaucoup plus vieux que lui, pour tout dire. Ni plus épais. Ni plus barbu. Et j’ai une sale réputation à traîner. La seule chose qui me donne un peu plus de superbe par rapport à lui, c’est que j’ai un énorme manteau de plumes sur le dos. Je suis pas sûr que je l’impressionne beaucoup, tout au contraire.

« Je ne te ferai pas l’insulte de te dire que la vraie guerre ça ressemble pas aux joutes dans la sécurité de lices de tournois – ça je suis sûr que des tas de vieux, ton père, tes frères, ont dû te le répéter jusqu’à te rendre malade. Non. Je souhaite te mettre en garde contre autre chose.
Ma mère n’est pas une Déréliche. Ni un Bestigor que l’on tue en lui opposant uniquement son hardiesse militaire et son élan chevaleresque – Elle est… Charismatique, intelligente, manipulatrice. Elle sait faire tomber les plus preux et les plus intègres des enfants de la Dame. Elle saurait te faire miroiter beaucoup de choses – des titres, de la reconnaissance, du pouvoir… Ce que tu crois ne pas désirer aujourd’hui, elle saura te mettre à genoux pour l’implorer.
Si tu viens avec moi en Lyrie, je serais mal placé pour te donner des conseils de guerrier. Mais je souhaite que tu restes malgré tout à mon écoute. Que tu me confies le moindre doute, le moindre murmure que tu pourrais entendre. J’ai besoin que tu me confies absolument tout, et que tu m’obéisses, même si je ne suis pas ton suzerain, même si tu n’éprouves aucune obligation envers moi. Parce que je connais ce pays, et que je sais ce dont l’ennemi que nous affrontons est capable.
C’est uniquement si tu acceptes de me jurer ceci que tu pourras te battre derrière mon pennon. »




Bien sûr que oui mon père se vantait. Il a visé dans le mille. Au moins j’apprécie son honnêteté : S’il éprouvait une réelle malveillance, il aurait pu se faire passer pour quelqu’un d’autre, choisir de se forger une fausse identité, afin de pouvoir mieux me planter une dague au moment qu’il jugerait le plus propice. Mais non. Il ravive volontairement les souvenirs d’animosité qu’il a pu éprouver envers mon paternel.
Il est toujours amoureux de ma mère. Et ça, c’est un grave, grave problème.

« On a retrouvé le cadavre de mon père, oui. Mais d’après ce que l’on m’a dit, on ne l’a pas retrouvé au combat, et ce ne sont pas des guerriers de l’ost ducal qui l’ont occis.
D’après ce qu’on m’a dit, on l’a retrouvé… Profané. Torturé. Aucun des chevaliers qui est revenu de Lyrie n’a véritablement osé me regarder dans les yeux et décrire exactement ce qui est arrivé à mon père, mais je crois avoir bien assez d’imagination pour m’en rendre compte.
Vous avez beau haïr mon père, à la fin, il y avait bien encore pire que lui en Lyrie. N'est-ce pas ? »

J’affronte Casin en le regardant droit dans les yeux, à l’évocation de ce souvenir. J’essaye de retenir quelques larmes qui ont envie de s’enfuir. Pas le moment de chialer.

« Vous avez aimé ma mère. Personne ne peut vous en vouloir. Je suis son fils. Moi aussi je l’aie aimée, sire Casin. Sûrement plus fort que vous encore… Et même aujourd’hui, je ne peux me défaire de ces sentiments que j’ai éprouvé pour elle.
Je n’ai pas choisi ce qu’elle et mon père ont bien pu commettre comme fautes. Mais je veux que vous ayez ceci à l’esprit : Elle est impossible à sauver, à présent. Rien, absolument rien, ne peut la faire revenir à la raison, ou la purifier. Elle ne sera plus jamais votre. Ni mienne. Nous allons en Lyrie pour lui donner la paix, comme vous le dites, mais également parce qu’elle est un danger pour notre pays. »


Je ne me lève pas de mon siège – inutile de l’impressionner, lui. Je me surprends à le prendre en pitié, ce sieur Casin, quand bien même il me hait. Je le comprend. Je me mets à sa place. J’aimerais juste qu’il se mette à la mienne. Un instant.

« J’ai envie de vous entendre le dire, et le dire avec solennité – vous ne pouvez pas aller en Lyrie avec la moindre once... le plus infime soupçon que ma mère puisse être repentie, et trouve vos bras à enlacer. La femme pure et innocente que vous avez connue est morte. Et même si elle se manifeste à vous, tente de vous séduire, de pleurer, de vous implorer de l’aider, ce ne seront que des propos amenés à vous corrompre et vous entraîner dans la ruine.
Si vous aimez ma mère comme je l’aime, je souhaite que vous me juriez que vous la tuerez à vue. Et que rien de ce qu'elle dira ne saura vous faire hésiter.
C'est une chose difficile à jurer, mais vous et moi n'avons pas d'autres choix si nous désirons l'affronter, et enfin faire notre deuil d'elle. »
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 09 déc. 2019, 13:48, modifié 1 fois.
Raison : 6 xps / Total d'xp : 13
Fiche : wiki-v2/doku.php?id=wiki:fiche_armand_de_lyrie
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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[MJ] Katarin
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par [MJ] Katarin »

Lorsqu'Armand parla de ses superstitions, le chevalier du Bois se mit aussitôt à fixer ses pieds avec une moue résignée, comme s'il s'attendait d'ores et déjà à essuyer un refus et qu'il ne comptait pas batailler plus que cela à ce sujet. Pourtant, ce rejet ne vint pas : à la place, le seigneur du royaume de Derrevin se mit à parler d'un futur éventuel dans lequel il accepterait la compagnie du Guignard, et ce dernier releva en conséquence la tête, avec une lueur d'espoir dans le regard.

- Sire Armand, ce n'est pas pour faire taire les quolibets d'autrui que j'erre encore aujourd'hui, ni pour une gloire éphémère dont je ne pourrais sans doutes plus profiter bien longtemps. Je... j'aimerais dire que j'y vais pour la Dame, pour mon pays, mais j'ai trop vécu pour que ces beaux idéaux remuent encore ma carcasse à eux seuls, quand bien même ils garderont toujours leur part d'importance dans mon vieux coeur. Non, messire, si je suis là aujourd'hui, c'est pour moi-même. je veux juste... pouvoir rejoindre les jardins en me disant que ma vie aura servi à quelque chose ou à quelqu'un. Juste une fois.

Il humecta ses lèvres desséchées, avant de conclure de sa voix assurée.

- Je jure de vous obéir, sire Armand. Je ne peux vous promettre d'être épargné des mauvais coups du sort de la part de ce dieu cruel qu'est Ranald en ma compagnie, mais je peux en revanche vous jurer de la sincérité de mes intentions et de mon cœur, et de la confiance que vous pouvez avoir en mon épée. Votre mère pourra susurrer ce qu'elle veut à mes oreilles, rien ne pourra compter davantage pour moi que de mener à bien votre mission.


***



- Que des entraînements, répondit Artur de Fluvia en se mordant la lèvre, apparemment agacé de devoir faire cet aveu.

Demeurant debout, il écouta attentivement le discours tenu par Armand, avec toujours cette attitude de défi dans le regard et le menton haut. Il accumulait les mouvements inutiles, dansant d'un pied sur l'autre quand il ne serrait et desserrait pas ses phalanges, comme animé d'une énergie qu'il avait du mal à contenir.

- Je suis pas sur de pouvoir vous dire tout, absolument tout, sire Armand. Je vous connais pas, et ce qu'on dit de vous et de votre famille... ça donne pas envie. Le duc vous fait confiance pour purifier votre ancien domaine, mais en même temps, c'est que justice que vous répariez les torts de votre famille, ou que vous mouriez en essayant.

Il détourna enfin son regard, fixant la porte de sortie avant de grommeler.

- Mais oui, ça va, évidemment que je jure que si j'ai des doutes je vous en ferai part. Votre domaine, votre famille, votre mission : je ne vous cacherai aucun information quand on sera là-bas, ni à vous ni à dame Melaine, vu que vous serez les plus aptes à prendre les bonnes décisions. Et j'obéirais à tous vos ordres, même s'ils sont pas conformes à ma volonté. Ça vous va ?



***



Lorsqu'Armand parla de son père, le chevalier Casin Baillet se fit un peu moins provocant, sa voix devenant plus grave et profonde. Comme pour contredire Armand, il lui parla bel et bien les yeux dans les yeux.

- J'ai vu le cadavre de votre père, et en effet, il n'est pas mort au combat. Tout porte à croire que lorsque les cultistes ont appris que sa progéniture avait causé leur perte, ils ont décidé de se retourner contre lui... J'aurais moi aussi préféré qu'à défaut de sa vie, il puisse obtenir une mort honorable.

Il poussa un long soupir désabusé.

- Ecoutez, gardez vos discours héroïques pour les moments où vous aurez besoin de vous écouter parler pour vous rassurer, Armand. Je sais quelle est notre mission, et je ne compte pas me couvrir de déshonneur en faiblissant face à mon devoir. Si je me laissais corrompre par quelque promesse éthérée du mal, alors je ne serais guère meilleur chevalier que l'était votre père. Si votre mère est devenue un spectre, alors la plus belle chose à lui offrir qui soit à ma portée, c'est le repos. Je peux donc vous jurer que je mettrais tout en oeuvre pour pour la tuer aussi promptement que possible.

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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par Armand de Lyrie »

Petit sourire à sire Rolet du Bois. Ses paroles l’honorent. Son intégrité me plaît. J’ose espérer qu’il n’a pas été victime du mauvais sort de ce fieffé Ranald : Devant le chevalier, mi-sarcastique, mi-moqueur, je croise mes deux doigts l’un sur l’autre, pour imiter ce geste impie qui est réservé à ceux qui prient ce Bouffon :

« Répétez cette phrase en le jurant sur la Dame, et vous pourrez venir avec moi, frère. Et moi, en échange, je vous jure cela : Je vais mettre votre âme et votre corps dévoué à profit.
Nous nous tiendrons devant le Corrupteur et on lui crachera à la gueule. »


Geste de tête bien solennel à Artur. Le damoiseau est plein d’audace, mais il reste une bleusaille. Un gamin qui devait téter sa mère y a pas longtemps encore. Et alors ? Moi j’ai trois poils sur le menton, c’est pas parce que j’ai accroché un pennon à ma lance et que j’ai embrassé la bague du duc que je peux soudain donner des leçons sur l’expérience. La Bretonnie c’est pas l’Empire. Nous sommes un pays qui aime la jeunesse et la folie naïve – Il serait un mauvais chevalier qui refuserait l’aide des jeunes coqs un peu trop fous.

« Je suis heureux d’entendre ton honnêteté. J’espère pouvoir te prouver que j’ai mérité mes éperons, comme toi tu me prouveras que tu mériteras ton pennon.
Rassemble tes affaires. J’ai très hâte de croiser le fer à tes côtés. »

Grimace pincée et triste à Casin. Mon regard est fuyant un petit instant, avant d’à nouveau trouver ses yeux à affronter avec les miens – mes yeux, dont on m’a toujours dit qu’ils étaient bleus et froids, la copie conforme de ceux de ma mère.

« Nous n’y survivrons peut-être pas, monseigneur.
Je sens que vous ne m’aimez pas. Sachez que ce n’est absolument pas un sentiment partagé – je ne sens aucune inimité à votre égard. Au contraire. J’espère que je pourrais vous prouver, à vous et à toute la noblesse d’Aquitanie, que je n’ai rien à voir avec mon père.
Vous viendrez vous battre à ma droite en Lyrie. »




Un poissard, un gosse, et un frustré. Ce sont les chevaliers que je mérite. Comment pourrais-je les juger ? Verser dans le mépris ? Éprouver le moindre doute sur eux ou leurs capacités ? Ça serait bien hypocrite de ma part. Qu’est-ce qu’ils doivent se dire, dans leurs fors intérieurs ? Je suis le fils de lâches corrompus. Je porte la souillure de mes ancêtres.
J’accroche sur mon armure ma broche héraldique, l’écu miniature qui porte la guivre Lyrienne. Elle tranche mal avec mon magnifique manteau en plumes d’oiseaux. Lors de la Deuxième Bataille Légendaire, il est dit que les Orques chevauchaient des vouivres, et que c’est pour les forcer à s’écraser au sol que le Compagnon Frédémond a sonné dans son cor et appelé à lui des rapaces et des oiseaux pour s’effondrer sur eux. Vous voyez la poésie de porter sur soi un mantel d’emplumé, un tas d’aigrettes de cygnes et de colombes ? J’ai une guivre à tuer moi aussi.
Je suis repassé par la chapelle du Graal. J’ai profité de son silence et de sa basse fréquentation : Y a juste cinq pèlerins pouilleux, pieds nus ensanglantés et haillons sur leurs corps, qui sont en pleine méditation, genoux par terre, poings collés contre leurs fronts, devant la dépouille d’un chevalier du Graal recouvert d’un manteau pourpre de velours. Je suis retourné devant l’autel, devant lequel j’ai tendrement embrassé du bout des lèvres des éperons de cavaliers et une bride de pégase. J’ai prié, rapidement. Prié pour obtenir un peu de courage. Devenir un peu plus résolu. Me donner le coup de sang nécessaire pour tenir face à ce que je vais affronter.

Je ne veux pas mourir.

Je n’ai toujours pas peur de la mort. Je sais que mon âme appartient au doux Faucheur – je ne le crains pas, Morr avec son manteau de ténèbres, je vous l’ai déjà dis tout un tas de fois, dans les tumuli de Cuilleux. Je ne respire pas en tremblotant devant son inévitable arrivée. Mais quelque chose a changé depuis mon arrivée à Derrevin, mon voyage avec Félix, mon entrevue avec les Maisne, la rencontre de Margot, de Maussade, d’Oranne…

Je ne veux plus mourir. Les paroles de la grande-prêtresse Alys, son invective envers moi, continuent de raisonner, alors que je pose un genou à terre, que je baisse la tête, et que je répète des formules d’honneur envers la Dame et mon serment de chevalier du Royaume :

« Souhaiter mourir contre les orcs ? Justifier vos actions présentes par les spectres de votre passé ? Si vous voulez vous en sortir, commencez par cesser cette lâcheté sire Armand. Vous êtes responsable de ce que vous choisissez de faire tout comme ce que vous choisissez de ne pas faire. Si votre corps obéit à ceux qui susurrent à vos oreilles, cela reste votre choix, et donc votre faute que de les avoir écoutés. Et croire qu'il serait honorable de fuir votre culpabilité en mettant en jeu inutilement votre vie n'est qu'un mensonge que vous vous racontez pour vous rassurer. »

Je ne veux plus mourir. Et ça m’énerve. Ça me fait grincer des dents. Parce qu’on m’y envoie, vers le danger. C’était facile de jouer au preux chevalier avec l’haleine d’un suicidaire. C’était facile de tenir tête au chevalier dément de rouille quand on ne craignait pas la morsure de sa lame et la semaine horrible d’agonie et d’infection que j’aie vécue, délirant, dans le lit de l’hospice de Shallya. Mais maintenant j’ai envie de vivre. J’ai envie de respirer l’air, me débarrasser du passé, aller en avant. Et revient alors cet instinct, purement humain :
J’ai la trouille. En fait si. Si maintenant j'ai la trouille, je vous ai mentis.
Avec mes trois nouveaux compagnons, j’ai fais le beau, j’ai parlé tout seul pour me convaincre, Casin a vu parfaitement clair dans mes propos. C’est facile de leur parler de la Dame, de leur demander de tout me dire, d’obéir à mes ordres – mais maintenant que je me rends compte de l’inévitabilité de mon sort, je me mets à trembloter.

Dame, aide-moi. Je ne souhaite pas te décevoir.
Shallya, ne m’oublie pas – ce que je t’ai promis devant ta statue de Derrevin tiens toujours.
Morr, pardonne-moi : Je t’aime, mais c’est pour te servir que je souhaite t’éviter pour l’instant.

C’est uniquement une fois que je me sens assez fort que je force mes mains contre mon épée bâtard posée devant moi. Je la range à mon fourreau, et sort par la grande porte. Sur le chemin, je fais une petite révérence aux pèlerins fanatiques, qui ne sont pas troublés par ma présence. J’aimerais avoir leur relâchement. Je croyais l’avoir, mais j’avais tort.

Je repasse le long du cloître de la chapelle. Je traverse une cour, et je retrouve Triboulet. Il est là, assis, les jambes qui tressautent, à regarder dans le vide. Il me lance un regard, mais éloigne vite ses yeux pour à nouveau observer… Rien, rien. Juste pas me voir.

« T’es prêt ? Qu’est-ce que nous aurons comme vivres, pour le chemin ? »

À ma très, très grande surprise, il ne me répond pas. Il ne se met pas à sourire, et du tac-au-tac, me parler de sauciflard et de vin coupé qu’on pourra emporter avec nous. Il se mure dans le silence. Chose qu’il ne fait jamais. Jamais.
Et pour la première fois depuis… Depuis longtemps, il m’oblige à me répéter.

« Triboulet ? »

Il lève son visage avec des yeux humides. Un regard de chien battu. Je me rends à nouveau compte à quel point il est jeune – je vous l’avais déjà dis, que c’est dur, avec sa trogne malade et ses joues rendues creuses par la malnutrition et son front ridé par l’alcool, de se rendre compte qu’il n’avait que quelques années de plus que moi. Mais là, à le voir, très clairement, au bord de l’angoisse, je suis obligé de faire un minuscule pas en arrière.
Et la voix tremblante, il me parle.

« Je… J’peux pas v’nir avec vous en Lyrie, messire. »

Je comprend pas.

« Je… Je comprend pas ? »

Petit regard à ma gauche. Il y a juste un écuyer d’armes qui est en train de traverser la cour en portant des pavois. Triboulet profite de sa momentanée présence pour rester silencieux, et probablement réfléchir à comment il va m’expliciter ce qui me fait défaut.

« J’peux pas v’nir, c’est tout. »

Pas de côté. Lui assis, moi debout, je peux lui faire ressentir toute ma force et ma supériorité. Je le regarde bien, tête légèrement penchée de côté.

« Comment ça, tu peux pas ? Qu’est-ce que ça veut dire ?
– Je, ne, peux pas, continue-t-il plus sèchement, sans me regarder, en parlant soudain bien plus proprement que d’ordinaire.
– J’ai reçu une mission du duc. Tu es mon valet.
– Je ne peux pas.
– Tu es malade ? Non t’es en pleine forme. Rassemble mes
– J’peux pas, j’peux pas…
– affaires, et je vais avoir besoin que tu selles
– J’peux-
– mon nouveau cheval. Tu te fous de ma gueule ? Je hausse pas le ton là mais c’est quoi ton problème, peux-tu me dire ? Sérieux je-
– J’veux pas ! »

Il se lève soudainement, comme saisi d’un diable, et me crie ce mot en me regardant directement, il me postillonne à la figure. Ça a le mérite de me faire taire. Il s’avance, passe ses mains dans ses cheveux, fais quelques pas au hasard en me tournant le dos.
Il a dit veux, et non peux. Cette subtile et minuscule transformation d’une lettre a le mérite de rabattre mon caquet. J’en deviens muet, et pince mes lèvres.

Il grommelle. Tente de s’exprimer. Se ravise. Je sens que quelque chose veut sortir. Quelque chose qui a envie de sauter, comme de la merde qui bloque un égout. On a jamais eu de conversations à cœur ouvert avec Triboulet. On a une relation assez bizarre. Entre de l’amour et du mépris, ça dépend des instants. Ça dépend des moments.
Et là, je sens que tout ce qu’il retenait va soudainement sortir. Je le vois à ses sourcils obliques et ses lèvres gercées tremblantes.

« J’peux pas ! J’suis désolé ! J’ai la trouille ! J’ai les j’tons ! »

Je grimace. Je fronce les sourcils. Je le bute du regard, et ma voix devient soudain plus noire et ferme.

« T’as tout le temps. Les. Jetons. »

Il a un pouffement de rire nerveux qui sort tout seul. Il passe sa main sur sa bouche, puis à nouveau dans ses cheveux gras.

« Vous savez pourquoi qu’je suis v’nu avec vous en Quenelles, messire ? Hein ? Savez pourquoi qu’j’me suis pas barré loin d’vous ?

– Je m’étais fais une idée. Mais dis-moi.
– Parce que j’croyais qu’vous vouliez vous casser l’plus loin possible d’vot’ pays, messire. Tout laisser derrière-vous. Jamais r’venir. »

Je hoche la tête, de haut en bas, en détournant un peu le regard.

« C’était ce que je voulais, en effet. Les Dieux en ont décidé autrement. Je ne peux point fuir les Dieux juste parce que j’ai peur d’eux – j’ai un devoir, Triboulet.
– Vous oui ! Pas moi ! »

J’ouvre la mâchoire. J’ignore quoi répondre à ça. Ma voix reste noire, mais cassante, parcourue de quelques petites pointes de tristesse – ma colère est blessée.

« Tu es mon valet. Tu as un devoir envers moi.
– J’étais vot’ souffre-douleur, messire, pas un valet ! C’pas pour ça qu’vous m’avez traîné avec vous, hein ? C’était quoi, pour vous rach’ter du mal qu’vous m’aviez fait, non ? C’éti pas ça ? »

Je baisse les yeux. Et maintenant y a plus aucune once d’ire dans ma gorge.

« J’veux pas r’tourner dans l’endroit où j’ai vécu des… Des trucs horribles. J’veux pas r’voir votre mère. Je fais des cauchemars sur elle tous les soirs. Zêtes pas comme elle, j’sais ben, zavez su d’venir un bon gars, malgré tout c’que vous m’faisiez subir.
Mais j’peux pas l’faire, messire.

– Tu me laisserais partir en Lyrie tout seul ? Tu veux fuir devant tes démons ?
– Oué. Qu’est-ce ça peut m’foutre ? J’ai quoi à r’trouver en Lyrie ? Et vous, d’ailleurs, zavez quoi à y voir ?
– Le duc me l’ordonne.
– Et vous, pourquoi vous m’l’ordonnez ? J’suis pas un bon valet, nan. J’sais pas m’battre. Pour quelle raison zavez envie de me voir aller là bas ? »

Y en a pas. Enfin si, y a une raison. Une raison tellement conne.

« Je t’en supplie Triboulet. M’abandonne pas. Pas maintenant.
– Pourquoi ?
– Parce que t’es tout ce qu’il me reste. »

Il en est étonné. Et maintenant, c’est lui qui fronce les sourcils. Et qui a de la colère dans sa voix.

« Zêtes tout c’qui m’reste aussi, messire. Pour ça qu’j’ai pas envie d’vous voir r’partir là bas. J’voulais qu’on fuie ensemble.
– J’ai pas le choix.
– Ben sûr qu’si zavez l’choix. C’est juste qu’zavez choisi d’obéir au duc. De r’devenir un chevalier. C’est vot’ choix. L’mien c’est pas d’y r’tourner.
C’est moi qui vous supplie, messire. Laissez-moi partir. »


Cet enfoiré m’a écorché le cœur à vif. J’aurais envie de chialer, si seulement j’étais pas aussi blessé. Et le pire c’est qu’il a raison. Il a raison ce sale…
J’en serre le poing. Puis je hoche la tête de bas en haut.

« Très bien… Très bien.
Pars, Triboulet. Je te libère. Tu ne me dois plus rien. Retourne à Derrevin, fais ta vie. Si elle te convient pas, va ailleurs. Tu es libre, à présent. »


Il s’agenouille à terre, juste devant moi.

« Merci. »

Je hoche la tête, puis m’éloigne rejoindre Dame Mélaine, et me mettre à sa disposition.

« Hé, messire ! Je... »

Je le regarde même pas. Je m’arrête juste pour qu’il me dise la dernière phrase qu’il souhaite me dire.

« Zêtes pas comme vos parents. L’oubliez jamais. »
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 10 janv. 2020, 13:00, modifié 1 fois.
Raison : 6 xps / Total d'xp : 19
Fiche : wiki-v2/doku.php?id=wiki:fiche_armand_de_lyrie
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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[MJ] Katarin
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par [MJ] Katarin »

Si Armand avait gagné dans la ville d'Aquitanie le titre prestigieux de chevalier du royaume, il avait perdu en échange ses deux compagnons de route. Triboulet et Félix absents, il se retrouvait désormais en compagnie d'un petit groupe de chevaliers bien peu enclins au rire, tandis qu'ils cavalaient tous vers en direction de la Lyrie dans une ambiance pesante.

Au centre de leur petite formation, dame Mélaine chevauchait en amazone sur un magnifique palefroi ambleur à la robe aussi blanche que la neige qu'il foulait aux sabots. Si la présence de la prophétesse auréolait leur expédition d'une importance divine, comme si la Dame elle-même les accompagnait, elle semblait également alourdir l'atmosphère de par son importance intimidante. En effet, il semblait difficile de faire preuve de légèreté lorsqu'on sait pareille figure capable de vous entendre, voire de vous juger.

Chevauchant à ses côtés, Albert de Faviere semblait aussi muet que Maussade, ou presque puisqu'il lui arrivait parfois de laisser échapper une ou deux syllabes en réponse aux questions qu'on pouvait lui poser. L'homme n'était pas aquitanais d'origine, mais couronnois, comme l'indiquaient les têtes de lions métalliques ornant sa spallière droite et son plastron. Il n'avait soulevé sa visière que pour saluer le seigneur de Derrevin, révélant un visage enlaidi par d'horribles brûlures mal cicatrisées. Son cheval de guerre semblait à son image : sans doutes autrefois sublime, il portait lui aussi les stigmates des flammes à plusieurs endroits où ses poils n'avaient jamais repoussé.

Les chevaliers Baillet et de Fluvia semblaient apprécier leur compagnie mutuelle, même s'ils parlaient très peu. Chevauchant souvent ensemble, ils semblaient partager le même dédain pour Armand, et semblaient tous deux faire leur possible pour ne pas avoir à échanger le moindre mot avec lui. Puisque personne ne semblait vouloir non plus approcher du chevalier maudit, c'est donc à l'arrière de la troupe que Rollet du Bois progressait, sur une monture aussi fatiguée que lui - assurément, c'était au rythme de son cheval que le groupe avançait, celui-ci ne supportant au mieux que l'allure du trot, rappelant presque la vieille mule malade de Triboulet. Le vieil homme s'était excusé plusieurs fois, rappelant que hier encore l'équidé était en pleine forme, mais personne ne lui répondit jamais.

Trois écuyers accompagnaient aussi les chevaliers, au service respectif de Casin et Artur. Ils servaient d'éclaireurs à leur procession, s'occupaient des chevaux à l'exception de celui du sire de Faviere, cuisinaient les repas, et exécutaient toutes les basses besognes nécessaires au bon confort de la noblesse. Néanmoins, aucun ne semblait avoir le droit de s'approcher à moins de cinq mètres de la prophétesse, soit par décision tacite, soit par crainte de sa majesté naturelle.

La première journée s'écoula donc lentement, chacun étant libre de ruminer ses pensées, le silence uniquement interrompu par le bruit du craquement de la neige sous les sabots des chevaux et les cliquètements des armures. La météo fut aussi morne que la journée, se contentant d'un ciel gris sans frontières du matin au soir. Peu habitué à porter aussi longtemps pareil équipement, sur un cheval qu'il ne connaissait pas, Armand avait peut-être craint de se ridiculiser en commettant un impair : ce ne fut pas le cas. Bien au contraire, il se découvrit une empathie toute naturelle avec Ravel, sans qu'il ne puisse expliquer comment ni pourquoi. Alors qu'on lui avait parlé du caractère rebelle du destrier, celui-ci se montra particulièrement obéissant avec Armand, répondant à toutes ses demandes, et venant naturellement chercher une caresse lorsque son cavalier descendait à terre. Ce lien naissant avec Ravel lui permit même d'impressionner Albert de Faviere, qui, avec une économie de mots remarquable, témoigna de son approbation face à une telle complicité entre un homme et sa monture.

Leur première halte se fit dans la demeure du seigneur Herbert de Rivel, mais les chevaliers n'eurent guère l'occasion de profiter de son hospitalité : Dame Mélaine insista pour que le repas leur soit amené directement à la chapelle du Graal, dans laquelle leur groupe resterait toute la soirée, bien que les écuyers ne furent pas conviés.

Si la chapelle de Rivel ne pouvait être comparée au grandiose de celle d'Aquitanie, elle restait bien plus impressionnante que celle qu'Armand avait pu visiter non loin de la forêt de Chalons. Étrangement dénuée d'ornements ostentatoires, elle était réputée non pas pour ses décorations, mais pour son gigantisme. Ses murs et ses piliers en pierre soutenaient un plafond haut d'une bonne vingtaine de mètres, sur lequel se multipliaient de magnifiques voûtes en ogive au sein de la nef. L'effet était identique à la salle d'audience du Duc : la chapelle donnait naturellement aux visiteurs l'impression d'être minuscules face à la grandeur du divin. Il n'y avait aucun banc pour s'asseoir, l'on ne pouvait que prier debout ou à genoux, tandis que trois vitraux aussi fins que hauts décoraient la paroi du fond. Celui du centre représentait de nombreux chevaliers des légendes rencontrant la Dame, tandis que les deux autres présentaient leurs exploits.

L'apparence de cette chapelle n'était pas anodine : elle avait été ainsi crée en la mémoire du duc Gilon d'Aquitanie, le chevalier du Graal ayant donné sa vie pour repousser le Duc Rouge en 954. Il avait la réputation d'être un homme n'appréciant guère les artifices, qui aurait préféré la vie d'ermite au sein d'une chapelle qu'à celle de Duc, mais son devoir avait primé sur ses désirs. Chevaucheur de pégase, il était aussi réputé pour manier une gigantesque lame à deux mains, l’Épée des Géants, réputée pour donner à son porteur la force d'un géant s'il se montrait digne de la porter. L'arme était conforme aux légendes, posée sur un présentoir digne de sa démesure sur l'autel de la chapelle - sa taille impressionnait tout autant que sa simplicité, sans aucune gravure fantaisiste ni ornement sur sa garde et son pommeau.

Le chevalier du Graal protégeant celle chapelle se fit un plaisir de jouer son rôle auprès des visiteurs. Il leur fit un sermon d'une bonne heure retraçant toute l'histoire du Duc Rouge et de ses descendants, du destin de Gilon et de son fils Richemont face à leur parent mort-vivant, et de comment l’Épée des Géants, bénie par la Dame, avait su infliger une blessure terrible au Duc Rouge, qui l'avait obligée à fuir avec son armée vers la forêt de Chalons pour qu'il y disparaisse à jamais. L'histoire enfin conclue, il quitta la chapelle sur la demande de Dame Mélaine, lui assurant que conformément à sa demande, personne ne viendrait les déranger pour la soirée.

Les portes de la chapelle se fermèrent, laissant Mélaine, Albert, Casin, Artur, Rollet et Armand seuls en son sein.

- Messires, je dois vous parler de ce qui nous attend dans deux jours, lorsque nous arriverons dans la demeure d'Armand de Lyrie.

Dame Mélaine fit un hochement de tête à Armand, comme pour attendre son assentiment avant de continuer. Le sujet à venir était délicat, et elle semblait vouloir laisser au moins quelques secondes à Armand por se préparer mentalement.

- Lorsque le Duc et moi avons affronté pour la première fois la famille corrompue de Lyrie et leur alliés, le combat le plus difficile ne fut pas celui qui nous opposa aux chevaliers déchus, mais bel et bien à Anne de Lyrie. Elle était l'épicentre de la corruption, la source du mal qui infestait ces lieux, et disposait de la part de ses sombres maîtres une terrible puissance magique qu'elle a opposé à la mienne. Lorsque le donjon a pris feu, ce n'était qu'une conséquence involontaire du déchaînement de puissance qui nous a opposé. Malheureusement, les flammes s'en sont très vite prises aux poutres vermoulues soutenant l'édifice, et ce dernier s'est écroulé sur nous, interrompant notre affrontement. Anne de Lyrie avait alors disparu, vraisemblablement tuée dans l'éboulement du donjon, mais sans que nous ne réussissions à trouver son corps pour le prouver.

Elle marqua une courte pause, avant de reprendre.

- Des rumeurs parlant de son spectre hantant et tuant les habitants de Lyrie nous sont parvenues, aussi le Duc et moi sommes retournés sur le domaine d'Armand. Pour y découvrir une abomination : Anne de Lyrie était bel et bien morte, mais était devenue une redoutable banshee. Non seulement elle possédait encore une partie de ses précédents pouvoirs, mais en plus elle semblait attirer à elle une multitude de spectres et d'esprits maléfiques qui se mettaient naturellement à son service. Nous avons affronté ces morts-vivants au sein des ruines du château de Lyrie et les avons vaincus non sans mal, tout comme l'épée bénie du Duc a su mettre fin à la non-vie d'Anne... mais cela n'a pas suffi.

Elle soupira alors, avant de planter son regard dans celui d'Armand.

- Armand, votre mère n'est pas devenue une banshee à cause d'une malédiction, ou du refus de Morr de l'accueillir en son jardin. Elle a délibérément trouvé un moyen d'échapper à la mort, quand bien même ce n'est plus qu'un simulacre d'elle-même qui vit encore, avide de vengeance et de destruction. Et ce moyen... c'est vous.

Tout le monde se tourna vers Armand, l'observant d'un œil soit curieux, soit méfiant. Casin avait même posé la main sur la garde de son épée, prêt à la dégainer.

- Elle a utilisé une magie impie pour se lier à vous. Elle vous utilise comme une ancre pour relier son âme à notre monde. Peu importe que nous l'affrontions et la tuons à nouveau, tant que cette connexion existe, elle utilisera ce fil d'Ariane pour revenir des limbes encore et encore. C'est vous, bien malgré vous, qui permettez à votre mère de survivre. Elle vous a maudit, Armand, pour lier sa vie à la votre à tout jamais.

- Et si le sire Armand venait à mourir ? demanda le jeune Artur sans le moindre effort pour ménager le jeune seigneur de Derrevin, avec un peu de défiance dans la voix.

- Alors le lien serait rompu, et la banshee pourrait être définitivement vaincue. Mais il y a un autre moyen de détruire le cordon qui les unit, sans attenter à la vie d'Armand. Si ce sortilège est une corde, qu'Armand en tient une extrémité et Anne l'autre, alors il suffit de la couper pour les séparer. Malheureusement, le lien est trop solide pour que je puisse simplement l'exorciser : pour dissiper ce sort, je dois trouver l'endroit le plus fragile, et ce n'est autre que l'endroit exact où Anne a accompli ce sinistre rituel. Si nous trouvons ce lieu, et qu'Armand se tient à mes côtés, la Dame me donnera la force de défaire ce qu'elle a fait.

Malgré les paroles de Dame Mélaine, la méfiance générale envers l'héritier de la Lyrie ne semblait pas décroître. Seul Albert ne regardait pas directement Armand à travers sa visière, apparemment perdu dans l'examen de l'Epée des Géants.

- Armand, vous souvenez-vous d'un moment de votre vie où votre mère aurait utilisé sa sinistre magie sur vous ?

Et de fait, des souvenirs, Armand en avait. Un en particulier, une irrégularité dans le comportement routinier de sa mère, une étrangeté plus bizarre encore que ce à quoi elle avait pu l'habituer et qui avait su devenir avec le temps "la norme". Comme s'il avait toujours su que ce moment précis de sa vie avait été une anomalie, qu'il l'avait enterré au fin fond de son esprit en se convainquant de sa banalité, mais que les paroles de Dame Mélaine avaient su déterrer d'un seul coup de pelle.
Lorsqu'il était encore adolescent, elle était venue le voir dans sa chambre, comme tant d'autres fois. Et pendant ses habituels attouchements, elle s'était interrompue pour pleurer. Elle avait éclaté en sanglots, d'une tristesse sincère que son fils n'avait jamais vu jusqu'alors, et qu'elle n'avait pas su expliquer à Armand. Plus que la sexualité, c'est surtout l'étreinte rassurante d'un fils aimant qu'elle avait semblé rechercher ce soir là. Et ensuite... elle l'avait convaincue de boire une potion. Il se souvenait mal des événements, de ce qu'elle avait dit, et de tout ce qui avait pu se dérouler après. Ses souvenirs semblaient à portée, mais s'échappaient dès qu'il tentait de s'en saisir. Il y avait des voix, des échos, du sang, des spectres, le froid. mais rien de tangible, juste de mauvais rêves, qui avaient disparu au matin.

La chapelle, avec la présence intangible du divin au dessus des humbles chevaliers priant la Dame
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Jet de CHA envers son cheval : 1, Réussite critique.
==> Ravel gagne +2 en Docilité. De plus on considérera que tu possèdes la compétence de dressage vis-à-vis de ta monture si tu souhaites lui apprendre certaines choses - plus tu passes de temps à t'occuper d'elle, plus elle pourra monter en stats.

Jet d'INT pour te souvenir de comment le rituel a pu se produire : 6, réussi.
==> Je te laisse bien sur réinterpréter la scène à ta convenance, ci-dessus ce sont les lignes directrices générales, mais les détails t'appartiennent.

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Armand de Lyrie
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par Armand de Lyrie »

On ne se rend compte qu’on tenait vraiment à quelqu’un que lorsqu’il nous manque. Vous souvenez-vous de mon premier voyage avec Triboulet ? De ma marche vers Quenelles et mon passage à Magone ? Rappelez-vous la manière dont je décrivais mon valet. Je le trouvais collant, fatiguant, un boulet sur pattes, un poivrot encombrant et humiliant, un ivrogne pleutre qui méritait le fouet.
Je n’ai jamais eu autant envie de l’avoir à mes côtés que lorsque je me retrouvais à petit à petit creuser la distance entre notre conroi de chevaliers, et la ville de Castel-Aquitanie dont le haut clocher de la chapelle du Graal rapetissait et disparaissait progressivement, derrière les courts coteaux et les sommets feuillus des arbres. J’eus du mal à regarder derrière-moi, à observer cette ville qui s’estompait hors de ma vue. J’avais envie de maudire le nom de mon ancien souffre-douleur, en même temps que son absence me blessait.
Je n’avais pas menti. Il était véritablement tout ce qu’il me restait. Pas l’ami que je voulais, mais celui que je méritais.

Et donc, comme je vous y habitue depuis le début, nous sommes repartis dans une cavalcade à travers les plaines de mon beau pays. Avec le cœur plus noir et plus morne que lorsque je pouvais gambader aux côtés de Félix et de Trib’, comme lorsque je pouvais faire la connaissance du chevalier Evrard le Gasconnais. Nul rire, nulle joie, nulle complicité. Je sens sur moi les regards lourds et pesants de Casin et du tout jeune dernier de Fluvia. Je sens le devoir morne du paladin Albert de Favière, qui, s’il ne me déteste pas, n’a en tout cas aucune affection envers moi. Plus que tout, je me sens extrêmement mal à l’aise à être à proximité de Dame Mélaine – Sa grâce est froide, et le respect que je témoigne envers elle est teinté d’une forte appréhension. Une Prophétesse du Graal, on a envie de se courber devant elle, et de ne jamais dire un mot de travers, de faire le moindre geste, le moindre signe qui pourrait être jugé comme inopportun : Elle a l’autorité suffisante pour ordonner nos vies et nos morts, de nous commander comme elle le souhaite, sans même avoir besoin de respecter les liens, familiaux ou féodaux, qui lient tous les Bretonniens entre eux.

J’aurais pu tenter de parler avec les écuyers qui cavalent devant en éclaireur. Mais je me suis vite résigné à cette idée. Ils ne sont pas sous mon emploi, et de toute façon, le fossé entre les soldats roturiers et les nobles chevaliers est trop grand : Les trois roturiers ne sont pas seulement écartés de notre compagnie, comme des parias, ils sont solidaires entre eux. Ils rient, boivent, plaisantent et dorment ensemble, très à l’écart de nous et de la Prophétesse – peut-être est-ce leur odeur fantasmée, l’odeur qu’on prête aux gens du commun, au sang trop rouge, qui la dérange. Mon beau discours merveilleux sur le sort d’un Derrevin libre n’avait absolument pas convaincu la sainte Mélaine, alors, il est peu étonnant de la voir refuser la proximité des écuyers. Vont-ils se plaindre ? Certainement pas. Toute leur vie, ils ont dû apprendre ce fossé qui sépare le gentilhomme du manant, ils l’ont intégré, et à présent, ils se contentent de faire leur boulot. Ils sont ici parce qu’ils sont payés, je suis sûr qu’ils sont même grassement soldés (Du moins mieux rétribués que s’ils avaient fait le boulot ingrat d’ouvrier agricole, ou d’apprenti-menuisier à Castel-Aquitanie…), aussi, inutile d’aller leur parler d’honneur ou de mission divine. Pour eux je dois être rien de plus qu’un autre peigne-cul de sang-bleu, trop fier et téméraire pour son bien, et s’ils n’oseraient jamais m’insulter à voix haute, ils n’en penseraient pas moins.

Me restait sire Rollet. Il est gentil et sympathique, tout le temps peiné à cause de son cheval. Mais là, c’est moi qui le rejette. C’est un poissard, je suis superstitieux, ça fait pas bon ménage. Après qu’il ait tenté trois ou quatre fois de lancer une conversation avec moi, mes réponses sèches, du tac-au-tac, sans ajouter de détails dans mes expressions, a dû le convaincre que je ne souhaitais pas converser avec sa personne. Pauvre homme, il n’avait même pas l’air déçu – sans doute qu’il était trop habitué à être ainsi rembarré. Ça m’a mit assez mal à l’aise un instant. Peut-être que j’essayerai plus tard de me montrer plus amical envers lui, mais pour l’heure, je n’ai tout simplement pas la tête à ça.



Ostracisé d’absolument tous ceux qui cavalent avec moi, je me suis concentré sur mon beau Ravel. Chevauchant plus vite et plus loin que les autres, j’ai un peu défoulé mon tout jeune destrier. Il a de la ressource, et de l’endurance. Les destriers Bretonniens sont les plus beaux et les plus forts chevaux du Vieux Monde, grâce à leur magnifique sang elfique qui coule dans leurs veines. Ils sont nobles, pour des cavaliers nobles, rien à voir avec les gros percherons solides mais rustres que montent les Impériaux, ou bien nos sergents-à-cheval roturiers dans notre Royaume. En posséder un a toujours été un beau rêve pour moi, mais ce Ravel, il a quelque chose… Une lueur dans le regard, une vivacité dans les pattes. Je tente de l’épuiser, de le faire courir dans la neige, de le faire cavaler, mais j’ai l’impression qu’il me teste plus que l’inverse ; Il inverse les rôles, alors qu’il tournoie, écrase les flocons avec ses sabots. On m’a prévenu dans les écuries ducales, qu’il était indiscipliné. Ou bien ils m’ont menti, ou bien Ravel m’apprécie, parce que je sens sous moi un magnifique bestiau caparaçonné, d’une demi-tonne, qui décide de ne pas me renverser. Alors que je fais la gueule, triste et en colère depuis ma séparation avec Triboulet, lui parvient à me rendre mon sourire. Je l’embrasse sur son museau, lui donne de grandes tapes avec mes mains dont je retire les gants malgré un froid mordant à se faire des engelures afin de mieux sentir son poil brillant. Je profite de sa compagnie lors des petites pauses qui morcellent notre voie, lorsque dame Mélaine souhaite boire ou se dégourdir ses jambes, le seul moment alors où les chevaliers peuvent eux aussi soulager leurs fesses écrasées comme de la compote – Absolument personne ici n’oserait demander à Mélaine un arrêt pour aller déféquer derrière un arbre, ça serait évidemment trop gênant, et je suis sûr qu’elle serait capable de transformer en grenouille le premier baronnet qui oserait la déranger. Je suis sûr qu’elle sait transformer les gens en grenouilles, ça faisait bien partie des contes que maman me racontait sur ses genoux.

Comme j’aimerais que l’aristocratie d’Aquitanie me regarde ainsi. Avec mon magnifique harnois scintillant, ma plate Montfortoise et mon manteau en plumes d’oiseaux blancs, colombes et oies, mon tabar brodé aux couleurs ducales, et mon destrier si grand et si vif ; je devrais être un chevalier impressionnant. Je devrais susciter l’admiration, en passant devant des tribunes de tournois, le poing sur la hanche, la tête relevée, visière de la barbute abaissée. Tout ce que mes camarades ressentent à mon égard, c’est du mépris, ou de l’indifférence. J’en serre les dents. Je porte toujours la honte de ma famille sur mes épaules, un fardeau écrasant.
Et pourquoi, en fait ? Pour quelle raison ?
Ce n’est pas moi qui invoquait les puissances de la Déchéance. J’ai dénoncé ma propre dynastie dans l’intérêt de notre religion et de notre pays. Pourquoi est-ce moi, un enfant innocent, qu’ils détestent ainsi ?
Vous voulez que je vous dise pourquoi ? Parce que ce qu’ils ne supportent pas, ce qui les empêches de dormir la nuit, ce qui les écœures, ce n’est pas le triste état de notre duché – c’est le fait que quelqu’un ait osé leur ouvrir les yeux. C’était trop facile pour eux de raconter les souvenirs des Croisades Arabéennes, de la lutte contre le Duc Rouge, de l’exemple du Compagnon Saint-Frédémond, pour se complaire dans leur luxe et leur audace nobiliaire. Ils me haïront toujours, inconsciemment, non pas parce que je suis le fils du Serpent, mais bien parce que je leur ai montré à tous comment ce Serpent-là s’était glissé dans leurs maisons, avait fait son terrier dans les fondations de notre Temple, et lézardait à présent les piliers de marbre. Ils auraient préféré sombrer aveugles et satisfaits que d’à présent lutter avec les yeux grands ouverts, au vu et au su des duchés voisins de notre nation.

Hélas, pauvre pays. Trop terrifié pour se regarder en face. Pour eux, l’Aquitanie n’est plus le pays où ils sont nés – c’est le pays où ils mourront. Ils m’en veulent car j’ai brisé leur mythe. Car j’ai fané les fleurs, empoisonné le vin, gâté la nourriture. Ils peuvent se dire ce qu’ils souhaitent lorsqu’ils dorment, Casin peut bien voir le reflet de mon père dans la glace, Fluvia peut bien maudire mon nom, je sais que je suis innocent.
Je suis seul, avec la Dame.

Maman, j’arrive.



Mélaine nous a sommés d’entrer dans la chapelle du Graal du domaine de Rivel. Bien que je n’ai su opposer la moindre objection, cela m’a un peu embêté, car sitôt sauté hors de la selle, je me suis empressé d’aller m’occuper de mon Ravel. Je lui ai caressé le museau, et je lui ai rappelé qu’il était beau. Je me suis permis de l’ausculter de partout, de soulever ses sabots pour vérifier qu’il allait bien. Je souhaitais même me réduire au rang de simple palefrenier, juste pour passer un moment avec lui ; Palefrenier, voilà une de ces professions roturières qu’un noble ne peut que respecter. Lorsque j’étais tout jeune, j’étais trop indiscipliné et précieux pour passer mon temps dans les écuries, qui fleurent le fumier et où on salit ses bottes neuves avec la paille sèche – j’aimais les chevaux, oui, mais que le côté beau et noble des chevaux. Maintenant, plus vieux, assagi, j’ai envie de partager du temps avec Ravel. J’ai envie de prendre soin de lui, de m’occuper de décrotter ses fers à cheval, de vérifier qu’il mange bien son avoine et lèche bien sa pierre à sel. J’ai même demandé à un garçon d’écuries si je pouvais avoir deux carottes pour offrir moi-même la friandise à mon destrier. Je lui ai fais un grand câlinou, et avec tout ça, j’ai été le dernier à entrer dans la chapelle, en catimini, en espérant que personne n’ait remarqué mon léger retard. J’aurais aimé dormir dans le foin, à ses pieds.

La chapelle du Graal était magnifique.
Je ne sais trop comment vous la décrire autrement. Toutes les chapelles du Graal sont magnifiques, qu’elles soient petites ou grandes, délabrées ou toutes neuves. Mais elles ont un magnifique qui s’incarne différemment. Ici, c’est un magnifique majestueux, un magnifique qui force à l’humilité par sa grandeur. Le plafond est si haut que chaque mot prononcé résonne dans un petit écho, l’idéal lorsqu’on a un grand chevalier du Graal, preux et magnifique comme tous les chevaliers du Graal, pour mener un sermon.

J’ai posé un genou à terre, juste à ses pieds. Une heure à entendre parler de Gilon d’Aquitanie. Je connaissais déjà l’histoire, mais lorsque je me suis rendu compte que l’épée qui reposait sur l’autel derrière-lui était celle que l’ancien duc avait soulevée de ses deux mains, j’ai senti un picotement gagner l’entièreté de mon échine. J’ai observé le métal de la lame avec deux yeux écarquillés, et j’ai eu très envie de poser mes lèvres dessus. Lorsqu’il eut terminé, je me relevais pour dégourdir mon genou endolori, et étirer mon dos. Et puis…

Et puis la Prophétesse a fait ses révélations. Chassé les questions que je me posais durant le chemin. Pourquoi avais-je été choisi pour cette mission ? Moi et pas un autre ? Qu’était-il arrivé à ma mère ? Je n’avais, pour une fois, plus d’interrogations. Enfin, depuis le début de cette aventure, tout semblait clair, tout faisait sens, le puzzle était reconstitué. Je savais quel était mon devoir, mon objectif. J’avais l’équipement et les camarades pour.

Et pourtant, à mon grand étonnement, absolument rien n’allait vraiment.


J’ai hésité, un moment, à poser une main, non à mon épée, mais à ma dague qui se trouvait dans mon dos. La faute à ce fieffé Casin, et à ce jeune coq d’Arthur qui suggérait l’idée de mon trépas – je suis superstitieux, je vous le répète bien assez, parler de la mort de quelqu’un c’est convaincre des Dieux farceurs de venir danser autour de moi. Je ne l’ai pas fais, car je suis dans une chapelle du Graal et que je ne souhaite pas blasphémer la Dame, d’une, et ensuite, car je veux feindre le calme et l’abnégation devant mes camarades. Une main dans le dos, épaules en arrière, face quelconque. Je me suis efforcé de ne pas avoir le moindre petit tic sur mon visage, le moindre petit saut de bout de lèvres. Je n’ai regardé aucun d’entre eux dans les yeux, et j’ai fais comme si j’étais parfaitement calme et compréhensible face aux révélations de Mélaine.
Alors qu’en vrai, j’étais mortifié.

Un lien lie ma mère à ce monde. Elle m’utilise comme un marin utilise une bouée pour ne pas être avalé par la gueule de Stromfels. La magie me terrifie, et je me rends bien compte que la sorcellerie qu’elle utilise pour se lier à moi doit certainement avoir de sévères insinuations. On peut pas fuir son destin ? Tu m’étonnes, quand on utilise l’immatériel pour s’en assurer. Un instant, je songe à l’idée de prendre un bain chaud pour m’ouvrir les veines, comme l’aiment le faire les sénateurs Tiléens qui ont tout perdu, sauf leur honneur, afin d’achever leur vie en pleine gloire, comme une étoile qui s’éteint, plutôt que de s’abaisser à tout perdre et croupir dans de sombres geôles. Ma mort arrangerait l’Aquitanie. Elle aurait une mythologie sacrificielle sans doute très poétique. L’Aquitanie ne peut plus me voir en pâture, ma vie met mes compatriotes mal à l’aise, ma mort les sauvegarderait, épargnerait les populations pourchassés par les spectres enragés de ceux qui étaient ma famille et mes amis.
Vous m’auriez dit ça y a trois mois, qu’il suffisait pour moi de boire de l’absinthe, d’ouvrir ma peau et de sombrer sous l’eau d’une baignoire pour définitivement retirer la souillure qui colle à ma peau, je m’y serais résigné.
Que les Dieux aillent se faire foutre. Ils m’apprennent ça après que j’aie retrouvé goût à la vie. Leur cruauté est malsaine. Ils auraient pu me tuer dans l’Orquemont, ou dans les tumuli de Cuilleux. Ils ont choisit d’attendre que je devienne un chevalier du Royaume, que je m’amourache de jeunes femmes, que je confie mon affection à Triboulet, que je sois fier de moi en me regardant dans la glace, pour maintenant m’apprendre que mon décès arrangerait des milliers de gens qui ont tout perdu par la faute de mes aînés.

Nul doute que c’est d’ailleurs toujours à l’ordre du jour. Ça se voit dans les regards de mes camarades. Je sais que si je tentais de m’enfuir, à présent, comme un lâche, ils n’auraient plus aucun scrupule à vouloir me faire mordre la poussière et m’abattre comme un chien – quitte à devoir demander à leurs sergents, leurs écuyers, les roturiers qui se fichent de l’honneur, de commettre la basse œuvre afin de garder leurs mains propres. Ou bien l’un d’entre eux va-t-il me défier en duel ? Ce serait une sortie bien singulière.
Mais voilà. Je veux vivre.

Les appels au souvenir de Mélaine sont la seule chose qui parvienne à me troubler. Momentanément, je me retrouve forcé de lui tourner le dos – sacrilège horrible, tourner le dos à une prophétesse. Je m’éloigne du reste du groupe en faisant quelques pas, un peu au hasard. Je passe mes mains devant moi, et serre les gants si fort que je peux entendre le cuir craqueler. Je passerais bien mes doigts dans mes cheveux, si seulement cela n’était pas un geste très visible, qui trahirait immédiatement ma blessure.





Les premières fois où ma mère venait dans mon lit, j’en étais terrifié. Sans savoir véritablement l’exprimer, je savais au fond de moi que ce comportement était déviant et malsain. J’en faisais des cauchemars. Je luttais contre elle, cédait devant ses larmes et ses cadeaux.
Lorsque je devenais adolescent, le moment où Margot s’est mise à me haïr et à ne plus mettre les pieds au château de Lyrie, les choses étaient différentes. Je me mettais à aimer les instants où maman venait me voir dans mon lit, qu’elle me réconfortait toujours avec ses « mon trésor » soufflés dans mon oreille, quand bien même j’entrais dans l’âge de la pagerie, et que sieur Quentin de Beauziac me taillait pour devenir un homme. Inconsciemment, je sentais que je jalousais mon père, les soirs où elle allait dans son lit plutôt que le mien. Ouais, glauque, hein ? Je la voulais comme l’ivrogne veut son verre. Ce n’était pas de l’amour, ce n’était pas un désir merveilleux, ce n’étaient pas les papillons dans le ventre et l’attente amoureuse des romans de chevalerie. C’était plus… Dérangeant que ça. Le moment où je me suis mis à devenir grandiloquent et obsessionnel – vous vous doutez bien que mes énormes paragraphes d’introspection et de chouinerie interne, ils sont pas naturels, hein ? Quelle personne saine d’esprit va mettre vingt minutes à vous parler de ses états d’âmes ?

Je n’avais pourtant jamais senti la corruption de ma mère. Au-delà de sa déviance, je n’imaginais pas… J’imaginais pas ce qu’il y avait derrière. On ne m’a jamais montré des signes ésotériques, des costumes étranges, je n’ai pas été le témoin de sacrifices humains ou d’invocations de démons. Du moins, jusqu’au jour où mes parents se sont décidés à m’introduire, de force, dans leur culte. J’ai lutté, j’ai hurlé. Et alors, papa m’a permit de m’échapper, et… Et on en est là aujourd’hui.
Autant vous dire que, à la question de Dame Mélaine, je me suis senti mal à l’aise. Ça a fait « tilt » dans ma tête à un moment. Cette nuit… Une nuit pourtant comme absolument toutes les autres. Elle n’avait rien de spécial. Rien. En quoi boire quelque chose était plus étrange que… Que tout le reste ? Ce n’était même pas la nuit la plus insultante envers la morale que nous avions vécue. Elle ne s’était pas forcée sur moi, elle voulait juste que je l’enlace et que nous discutions. Il lui arrivait parfois de se mettre en colère, ou de pleurer sans raison, je n’en pensais rien de spécial.
Comment ai-je pu être aussi con à ce point ? Comment n’ai-je pas su ? Je suis lié à l’immatériel, je suis marqué, maudit, et je n’ai rien remarqué ? Comment n’ai-je rien remarqué ?! Je devrais avoir… Avoir quelque chose, je sais pas, merde ! Est-ce cela que Ophélie a vu en moi ?! Qu’est-ce que cela implique, qu’est-ce que cela veut dire ? Suis-je un mutant ? Suis-je désigné comme du bétail, suis-je la propriété du Serpent, comme ce qui est greffé dans les chairs du dos de Margot ?!

Ai-je la moindre chance de m’en sortir ?

Je soupire, par les narines. Je fais un bruit salivaire, en entrouvrant mes lèvres. Il me faut un moment pour trouver les mots. Répondre sérieusement à Dame Mélaine.

« Ma Dame. Je… Je ne me souviens pas de lieux en particulier. Ma mère ne m’a… Elle ne m’a jamais conduit quelque part de spécial.
Tout avait lieu dans le donjon de ma famille, pour tout ce qui me concernait. S’il y avait des actes impies qui étaient perpétrés ailleurs, je n’en ai pas la moindre souvenir. Si ma mère m’a… S’il y a eu un lien avec elle, c’était là où j’ai vécu et grandi. »


Je tord mes lèvres, et avale ma salive.

« Dans ma chambre, très probablement. J'ignore quels ont été les dégâts dans le château... Le donjon s'est effondré, mais le reste tient-il encore debout ? »

Cela c’est la question simple.
Mais j’en ai une deuxième.

« Est-ce que…
Ce lien qui m’unit à ma mère… Cette ancre… Est-ce qu’elle n’a pas… Est-ce qu’elle n’a pas d’effets sur moi ? Sur ma conscience ? Des rêves, des… Je ne sais pas, quelque chose qui pourrait agir sur moi ? »
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 10 janv. 2020, 13:00, modifié 1 fois.
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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[MJ] Katarin
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par [MJ] Katarin »

La prophétesse ne répondit pas à la première question du chevalier, mais tourna la tête vers le sire Baillet, comme pour lui donner l'autorisation de parler, ce qu'il fit avec déférence après avoir relâché le manche de son arme.

- A l'intérieur du chateau, les cultistes avaient tendu plusieurs embuscades, et posé des pièges sournois, souvent à base de poudre noire. Des pans de murs ou de toit sont tombés sur nos camarades, les tuant lâchement, et condamnant plusieurs couloirs et escaliers. Progresser ne sera pas facile, surtout si nous devons atteindre les étages supérieurs.

Dame Mélaine hocha la tête, avant de croiser à nouveau le regard d'Armand. Elle avait des yeux absolument sublimes, avec un halo de feu entourant sa pupille, pour s'étouffer peu à peu dans la teinte bleue de son iris. Sa douce voix profitait de l'écho de la salle pour résonner, la rendant aussi belle qu'intimidante.
En posant une question aussi ciblée, Armand avait également fait un aveu sur ses propres tourments, que ce soit volontairement ou non : et la méfiance de ses compagnons semblait avoir encore augmenté d'un cran maintenant qu'il avait admettait à mi-mots d'éventuels troubles le hantant.

- Je ne peux pas répondre à cette question Armand. Je peux ressentir la nature viciée d'une magie impie, constater son étendue, observer les dégâts qu'elle occasionne, déceler ses fluctuations pour trouver ses points faibles, mais je ne la comprend pas en profondeur. Le sortilège qui vous unit à votre mère ne semble pas avoir d'autre rôle que de vous relier à elle par-delà la mort, mais il est en effet possible que cette énergie harnachée à votre corps ait eu des effets secondaires.

Silence de cathédrale, tandis tous les regards se figeaient sur le jeune homme. Puis, brisant la glace, dame Mélaine offrit à Armand un sourire d'une douceur inégalée, le même qu'elle n'avait jusque là adressé qu'au Duc. Le jeune homme habituellement en proie aux doutes se sentit alors instantanément plus confiant en ses capacités, désormais certain qu'il saurait affronter l'adversité aux côtés de la prophétesse et de la Dame.
Relevant la tête pour que son regard englobe tous les chevaliers, dame Mélaine partagea cette force avec chacun d'entre eux. Leurs muscles se détendirent, leurs yeux se firent brillants de larmes de bonheur, et tous sans exception mirent à nouveau un genou à terre instinctivement, en position de prière face à la prophétesse qui leur souriait tendrement.

- Oubliez vos craintes et vos rancœurs messires, dit-elle avec un écho de plus en plus puissant dans la voix. Le sortilège qui affecte Armand n'est qu'une tentative désespérée d'une femme folle pour tromper son destin. Cette misérable magie n'est rien face à la force que nous confère la Dame lorsque notre foi est sincère. Elle regarde chacun de vous, elle est fière de votre courage, fière de toujours voir des chevaliers de Bretonnie se dresser contre le mal lorsqu'il apparaît, se moquant du danger pour uniquement faire ce qui est juste. Face à sa puissance, les pitoyables efforts des cultistes ne peuvent qu'être balayés au vent. Ensemble, accompagnés par sa bénédiction, nous serons solidaires les uns des autres, et vaincrons en son nom.

Elle tendit ses deux mains devant elle, et une douce chaleur se mit à émaner de son corps, tandis qu'elle semblait s'entourer d'un halo de lumière blanche. Sa cape noire et or tout comme sa robe blanche s'agitaient comme victimes de bourrasques imaginaires, tandis que sa chevelure se dressait sur sa tête et que ses pupilles prenaient une teinte blanchâtre.
Soudainement, les épées des chevaliers glissèrent hors de leur fourreau, emportées par magie dans les airs, pour se mettre à tournoyer lentement autour de la prophétesse en transe. La lumière blanche qui émanait d'elle se répandait maintenant dans toute la chapelle, l'illuminant comme en plein jour. Derrière dame Mélaine, l’Épée des Géants de sire Gilon se mit à son tour à léviter et à rayonner de la même énergie que la prophétesse, se juchant à la verticale juste au-dessus de sa tête tandis que les autres lames continuaient à tournoyer autour d'elle, prenant peu à peu la même teinte nacrée. Tous les chevaliers sans exception ne purent que pleurer agenouillés face à l'admiration de ce qui ne pouvait être qu'un miracle divin.

Par l'intermédiaire de la prophétesse du Graal, la Dame du Lac bénissait chacun d'entre eux.

Considère que tous tes compagnons sont en train de marmonner mille promesses de courage et de loyauté, de sacrifices héroîques et tutti quanti - si tu souhaites faire voeu de quelque chose c'est le bon moment.
Ton épée est en train d'être bénie par la Dame - elle obtiendra la capacité de toucher les ennemis ethérés, et possèdera l'attribut "Bonus de +1d3 dégâts par PdC (envers la Dame) dépensé avec l'attaque".
Tu peux dépenser des pdc pour améliorer définitivement cet attribut :
5 pdc : Bonus de +1d4 dégâts par PdC (envers la Dame) dépensé avec l'attaque
10 pdc : Bonus de +1d5 dégâts par PdC (envers la Dame) dépensé avec l'attaque
15 pdc : Bonus de +1d6 dégâts par PdC (envers la Dame) dépensé avec l'attaque
20 pdc : Bonus de +1d8 dégâts par PdC (envers la Dame) dépensé avec l'attaque
Il n'y a que maintenant que tu peux l'améliorer ainsi, plus tard ce sera impossible.

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Armand de Lyrie
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Re: [Armand de Lyrie] Maman

Message par Armand de Lyrie »

Jamais, de toute ma vie, n’ai-je vu une femme aussi belle que Dame Mélaine.
J’ai approché la pureté et la merveille de la Dame du Lac à travers les réalisations éblouissantes des vitraux des cathédrales ; J’ai vu, à travers les carreaux colorés bâtis par de pieux verriers maîtres de leur art, passer des rayons de soleil plongeant des nefs dans la contemplation de l’image de ma Déesse, de la Fée Enchanteresse et de ses Damoiselles Servantes. Mais même toute l’expertise des années de travail et la dévotion de ces humbles maîtres d’œuvres n’atteignent la féerie qui prend place juste devant mes yeux indignes, mes yeux immondes qui ont osé, un instant, sur le dos de ma tendre Margot, faire battre mon cœur pour une trace fétide et obscène de la Corruption.
C’est une beauté atroce, une beauté qui étrangle ma gorge, qui fait palpiter mon cœur, qui rend mes mains moites, qui place une poussière dans mes yeux. Une beauté qui me rappelle à quel point je suis indigne et misérable, alors même que les mots de la Prophétesse nous encouragent, nous poussent à nous rappeler notre devoir, notre service, notre amour de la Dame. J’ai l’impression que je pourrais la toucher. Que je n’ai qu’à tendre la main pour aller dans les boucles des cheveux de ma Déesse. Que je n’ai qu’à m’agenouiller pour lui embrasser les pieds.

Et mes camarades aussi se retrouvent plongés dans cette transe inexplicable. Il y a un instant, j’avais envie de me saisir de mon poignard au cas où je devrais me dégager d’eux. Je sentais de la tension, de la rancœur, du mépris. À présent, je me sens insufflé de force. Je pourrais me jeter devant eux pour les garder du mal. Je pourrais choisir de m’égorger pour qu’ils rentrent chez eux en vie. J’ai envie de le crier. J’ai envie de le hurler à m’écorcher la gorge.

J’ai jeté un genou à terre. J’ai senti mes joues se couvrir de larmes. Et avec la voix faible et aiguë, dément, je me suis mit à psalmodier :

« De la foudre et du tonnerre,
Ma Dame, délivre-nous.
De la maladie, de la tentation et de la guerre,
Ma Dame, délivre-nous.
De la soif du Serpent,
Ma Dame, délivre-nous.
De la malédiction des mutants,
Ma Dame, délivre-nous.
Du blasphème des défunts,
Ma Dame, délivre-nous.
Des présents des démons,
Ma Dame, délivre-nous.
Des horreurs des corrompus,
Ma Dame, délivre-nous.
De nos vices et de nos fautes,
Ma Dame, délivre-nous. »


Je me lève soudainement, sur mes deux pattes. J’attrape, férocement, le pommeau de mon épée qui lévite dans le ciel. Je sens une résistance s’y opposer ; Une force écrasante la retenir, m’empêcher de bouger mon bras comme si j’avais la puissance d’un nourrisson. Mais je la tire, malgré tout, et en pose la pointe contre l’autel de la Dame. Fièrement, devant mes camarades aussi bouleversés et fascinés que moi, soumis à une Mélaine étincelante, je me mets à rugir, les mots me parvenant tout seul à ma bouche, sans que j’aie eu besoin de répéter quoi que ce soit.
C’est comme si ce que je voulais hurler depuis des mois, des années, sortait tout d’un coup. Comme si ce que je voulais aboyer à la gueule de Brandan de Maisne, de sire Elbiq, de Carlomax, se débloquait de mon cerveau. La malédiction que je souhaitais cracher à la gueule de mon paternel. La verve avec laquelle je vais condamner ma mère à rejoindre les jardins de Morr :

« Entendez-moi, preux chevaliers, frères de ma race, comparses devant la Déchéance – Mon nom est Armand, fils d’immoraux, d’ignobles, de dépravés, de vénaux. Tous mes proches, mes amis, mes alliés se sont rendus coupables de vices qui vous donneraient envie de vomir, et vous empliraient d’une sourde colère. De crimes dont vos pieuses consciences se refuseraient à en imaginer la plus infime profondeur.
Et pourtant, même entouré de bestiaux dissolus, la Dame a su me trouver. Elle a su me guider. Me faire résister aux pires tentations.
Je jure ici, devant vous, devant la Dame en personne, de suivre à compter d’aujourd’hui, et jusqu’à mon dernier souffle, l’exemple du Compagnon Saint Radémond de Quenelles ; Je jure d’à chaque moment, tant dans mes actes, que dans mes paroles, que dans mes pensées, d’être à jamais enfermé dans un donjon de pureté, de garder ma conscience avec des barrières de fer, de respecter et de défendre la morale, de m’éloigner des plaisirs terrestres, et de respecter les femmes et la Dame.
Que la Déesse me donne la force de tenir ce serment ! Que les décadents qui s’opposent à Elle tombent devant ma lame ! »


Je dépense 10 Points de Croyance envers la Dame pour obtenir l’amélioration à +1d5.
Je choisi également de prêter serment sur la Vertu de la Pureté. Slaanesh, j’arrive pour ta peau.
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 10 janv. 2020, 18:45, modifié 1 fois.
Raison : 6 xps / Total d'xp : 31
Fiche : wiki-v2/doku.php?id=wiki:fiche_armand_de_lyrie
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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