« Ils sont morts, Isolde. S’ils ne le sont pas, ils le souhaiteront très vite. Les répurgateurs n’ont pas l’habitude de bien traiter les prisonniers.
Notre priorité est de retrouver Lazarus Mourn avant qu’il ne parvienne à découvrir l’emplacement du Nexus. S’il a capturé un enfant, il tentera de le sacrifier afin de continuer ses rituels, et chercher dans l’Immatériel des signes qui lient magiquement l’ancien artefact elfe. Avec la présence de Sigismond dans ces bois, cela n’augure rien de bon…
Puisque tu me dis que les camarades avec toi ne peuvent pas nous aider, alors il n’y a pas le choix. Nous l’arrêterons toutes les deux. »
Et sans plus de commentaire, elle continua son chemin, gaillardement, à travers les bois, malgré la blessure qui l’affligeait. À chacun de ces pas, elle semblait aller de mieux en mieux, là où Isolde souffrait toujours de son combat face au répurgateur. Elle marchait au milieu des arbres centenaires, dans une forêt où il devait être bien aisé de se perdre – et pourtant, à aucun moment elle ne demanda de l’aide à la chevaleresse pour s’orienter. C’est comme si elle savait instinctivement quelle direction prendre ; à moins que ce ne soit par l’action d’un sortilège ?
Toujours est-il que la nuit commençait à tomber, et il devenait nécessaire de se trouver un abris qui soit suffisamment en sécurité pour échapper à d’éventuels poursuivants. Chose que la Damoiselle semblait deviner :
« Nous ne ferons pas de feux. Trop dangereux. Ne laissons pas de traces derrière nous. »
Elle s’approcha d’un tronc d’arbre quelconque, et s’assit en tailleur devant. Elle éleva ses mains, récita un étrange cantique éthéré, et alors, du sort, sortirent des flammes bleues translucides. Elles ne produisaient aucune chaleur, mais permettaient d’y voir beaucoup plus clair dans le noir qui commençait petit à petit à tomber.
« As-tu de quoi manger froid ? »
Isolde avait bien du pain dur et des biscuits à grignoter, de quoi tenir encore trois jours – au moins, ils ne mourraient pas de faim.
« Comment as-tu perdu tes enfants ? Ils sont morts ? »
C’était lunaire. La damoiselle n’avait absolument pas changé d’intonation pour demander si Isolde avait à manger, puis évoquer la perte de sa famille. Elle se contentait de parler avec une voix calme, quelconque, un peu sèche. Difficile de savoir pour quelle raison elle posait soudainement cette question, de nul part, d’ailleurs.