[Maria] La ville bleue

Le vaste pays désertique qu'est l'Arabie se trouve de l'autre côté de la mer en face de la Tilée et de l'Estahe. Il y a plusieurs cités habitées, certaines sur la côte et d'autres à l'intérieur des terres, ainsi que bien des ruines désertes remontant aux légendaires Guerres de la Mort. Les pirates d’Arabie sont des pilleurs invétérés, dont on peut parfois apercevoir les navires aux voiles sombres dans les ports d’Estalie ou de Tilée.

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[MJ] Le Grand Duc
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[Maria] La ville bleue

Message par [MJ] Le Grand Duc »



Etant donné la nature cosmopolite (les arabéens ne parlent pas la langue, ce qui rend les manœuvres hasardeuses) de l'équipage ainsi que sa taille réduite, le trajet s'allonge de 1d3 = 3 jours. Vous mettez donc 8 jours à arriver en vue de la côte.

Jets sur la table des événements :
Jour 1 : 18, Mer bonace
Jour 2 : 1, Mer Bonace
Jour 3 : 5, Vent favorable. Le temps de trajet est réduit de 1d3 = 3 jours !
Jour 4 : 9, Mer bonace
Jour 5 : 4, Malade. Gravité déterminée par jet caché.

-140 Rations
Je copie ici le mp envoyé à la Sire au sujet de son équipage.

Les pirates du Corbin :

- Jan Janz, un marin originaire de Marienburg qui est arrivé à Sartosa il y a une dizaine d'année. Réduis à travailler sur les quais de l'Homme Mort après s'être endetté à cause de son amour pour la bibine et le jeu. Servait sur le Corbin en tant que gabier.

- Martin "Tête-de-Pioche", né à Sartosa d'un père inconnu et d'une prostituée. Caractère de cochon, têtu comme une mule, d'où son surnom. S'est retrouvé à travailler sur les quais de l'Homme Mort après avoir tout perdu au jeu un soir de beuverie. Servait sur le Corbin comme servant de pièce.

- Tim Ward, appelé "la Perche", orphelin de Sartosa. Il n'a pas plus de 16 ans mais est déjà très grand, plus que la plupart des autres marins. Et très maigre. Il prétend avoir le meilleur coup d’œil des mers du Sud, et qu'il peut compter "le nombre d'plumes qu'une mouette à autour du cul à plus d'deux encablures." Condamné à travailler huit mois pour un armateur véreux du quais de l'Homme Mort après avoir essayé de lui voler son pistolet. Servait sur le Corbin en tant que vigie.

Les arabéens :

Du peu qu'ils arrivent à se faire comprendre, ils étaient principalement matelots et gabiers. L'un d'entre eux mime une arme de tir (arbalète ?) et fait mine de recharger en pédalant des mains avant de tirer vers une cible imaginaire. Quoi qu'ils en soient, ils semblent un peu réticents à s'adresser directement à la Sire, et préfèrent visiblement s'en remettre à Lucio quand ils ont besoin de quelque chose. Enfin, ça reste succin, puisqu'ils ne comprennent personne et que personne ne les comprend.
La gîte, quoi que faible, faisait tanguer doucement la caraque estalienne tandis que cette dernière voguait sur les flots bleus des Mers du Sud. Une petite brise soulevait de faibles vagues et soufflait par le travers de l'Estrella, qui avançait au largue. Au loin, on pouvait apercevoir les voiles blanches de quelques navires qui filaient vers leur destination. Le soleil brillait, haut dans le ciel, et seuls quelques nuages filandreux mouchetaient l'azur.

Lucio était posté sur le gaillard arrière, une main posée nonchalamment sur le gouvernail auquel il manquait deux manettes, arrachées par le tir de canon ordonné par la Sire. Le tiléen faisait lentement pivoter la barre de gauche à droite, équilibrant ainsi la direction du navire. Ses yeux parcouraient rêveusement le pont et la mer dans qu'il fumait de sa main libre, tirant sur une longue pipe au conduit incurvé.

Sous lui, sur le pont, trois arabéens étaient occupés à lover les manœuvres. Assis en tailleur, ils enroulaient les cordages sur eux-même et accrochaient ensuite l'anneau ainsi formé sur des crochets prévus à cet effet sur le mât ou contre le bastingage. Ainsi, les centaines de mètres de corde utilisés à bord du navire ne gênait pas les déplacements sur le pont et restaient à portée de main. Les rayons du soleil frappaient la peau mâte de ces marins torse-nus, faisant briller les magnifiques tatouages qui leurs ornaient le buste et les bras. Ces arabesques raffinées s'emmêlaient dans une trame difficile à appréhender pour un profane et semblaient former des mots, des phrases. Ces trois pirates n'étaient pas bien différents de leurs homologues de Sartosa, et c'est donc en chantant qu'ils travaillaient. Mais leurs chansons n'avaient rien des ballades grivoises et graveleuses que les autres forbans avaient l'habitude de beugler à tue-tête. La litanie des arabéens était lente et rythmée, douce et triste. Elle ressemblait à une belle prière, dans laquelle un mot revenait sans cesse, un nom peut-être, celui d'Ormazd, "Qawi Jidaan Ormazd." Il n'avait pas échappé à la Sire que ces anciens corsaires étaient très croyants. Plusieurs fois par jour, ils se réunissaient sur le pont et se prosternaient en cœur vers le Levant tandis que l'un d'eux dirigeait l'office en chantant de sa belle voix aux accents enroués.

Non loin, Martin "Tête-de-pioche" briquait le pont, agenouillé sur les planches qu'il astiquait vigoureusement. Il trempait de temps en temps son carré de savon dans un seau d'eau à côté de lui avant de se remettre à gratter, manches relevées jusqu'aux épaules. C'était un homme solide à la mine renfrognée et au caractère taiseux. Il avait appris à Maria qu'il officiait sur le Corbin en tant que servant de l'unique pièce que comptait ce rafiot, ce qui expliquait probablement son problème de surdité. En effet, Tête-de-pioche parlait peu mais lorsqu'il parlait, il le faisait en gueulant car il ne s'entendait presque pas.

Jan Janz, l'un des trois autres anciens membres d'équipage du Corbin, était occupé à pêcher à la ligne. Gabier, il passait le plus clair de son temps dans les gréements, suiffant les cordages ou manipulant amures et écoutes. C'était un marienburger, un homme né les pieds dans l'eau. Malgré son âge avancé, il était parfaitement à son aise sur les marchepieds de vergue comme lorsqu'il fallait manipuler les manœuvres. Il était du genre amical, un sourire franc fendant souvent son visage au cuir tanné par le soleil et le sel. Il s'était rapidement lié avec deux arabéens qui, eux aussi, officiaient probablement comme gabiers sur leur ancien dhau, au vu de leur facilité de déplacement dans le gréement. C'est ainsi qu'ils travaillaient tous les trois, essayant de se comprendre à travers les gestes et les exemples. Les premiers jours avaient été difficile mais ils étaient peu à peu arrivés à trouver un système explicatif basique pour coordonner les différentes manœuvres. Pour le moment, Jan était appuyé à l'un des canons de 18 livres, avec entre les mains une canne à laquelle était attachée un fil. Quelques sardines rutilantes s'agitaient dans un seau à côté de lui, tandis que le marin fredonnait une chanson du Pays Perdu.

Tim "la Perche" Ward, quant à lui, était rapidement devenu la coqueluche de l'équipage. Jeune, jovial et débrouillard, c'était un garçon plein de ressources et dont les pitreries ne manquaient pas de faire rire les autres. Même Ducio "Toro", qui n'était pas du genre à se dérider facilement, s'était esclaffé lorsque la Perche avait imité Martin, un soir dans les dortoirs du gaillard arrière. Tim était malin comme un singe, et souvent moqueur ou mielleux à souhait. Il complimentait la Sire dès qu'il en avait l'occasion et disait à qui voulait bien l'entendre qu'il lui récitait des poèmes la nuit. Lorsqu'il n'amusait pas la galerie, Tim se perchait dans le nid-de-pie en haut du grand mât et scrutait les alentours aussi bien que le pont. Et gare à celui qui trébuchait ou qui se grattait le fondement en espérant que personne ne le voit, car la Perche n'attendait pas un instant pour lancer une pique cinglante qui déclenchait l'hilarité du reste de l'équipage, à l'exception des arabéens qui n'y entendaient rien.

Les trois tiléens, quant à eux, avaient rapidement trouvé leur place comme mentors de l'équipage. Ducio faisait office de la figure d'autorité, parlant peu mais remettant régulièrement les autres à leur place. Il était d'un tempérament colérique et grincheux, mais pouvait parfois faire preuve d'un humour insoupçonné. Valante, quant à lui, était généralement discret. Il se contentait de fumer sa pipe et d'écouter ce qui se disait, observant tour à tour les autres membres de l'équipage et ne participant que lorsqu'il était sollicité, et toujours de façon très succincte. Un lien spécial semblait unir ces trois hommes, sans que la Sire puisse déterminer si c'était de la complicité, de l'amitié ou encore autre chose. Ducio remplaçait Lucio à la barre lorsque le quart de ce dernier était terminé, et autrement aidaient aux manœuvres en tant que simple matelot. Valante, lui, faisait office de cambusier et avait dressé un inventaire précis de l'armement, des réserves et de la cargaison dont disposait l'Estrella. Il s'occupait également des prisonniers, leur distribuant leurs rations une fois par jour et les surveillant la plupart du temps. Lucio, enfin, était fidèle à lui-même. Il s'imposait naturellement comme un meneur, un homme à l'écoute des autres et dont l'avis importait. Sourire charmeur et regard confiant, il semblait veiller sur les autres sans jamais douter. Il ne manquait pas une occasion de discuter avec Maria, et lui parlait de Remas et de ses campaniles, de Miragliano et de ses canaux, de Tobaro et de ses grottes maritimes, et d'autres trésors encore de son pays. Il était parfois enjôleur, voir flatteur, mais toujours avec une pointe d'ironie qui lui était propre, comme si tout cela n'était qu'un vaste jeu.

Le trajet s'était déroulé dans d’extrêmement bonnes conditions. La mer était calme tandis qu'ils avaient longé les côtes estaliennes jusqu'aux îles rocheuses et au littoral déchiqueté des Rochers du Fol. Cet endroit était connu comme étant le repaire de nombreux pillards et pour être parsemé de hauts fonds pernicieux, mais le journal de bord de l'ancien capitaine de l'Estrella permis à la Sire d'éviter ces désagréments, tandis que le pavillon magrittain qui battait au vent fut apparemment suffisant pour tenir les autres pirates et les navires estaliens à distance. Du fait d'un problème de compréhension entre les deux moitiés de l'équipage, les premières manœuvres s'avérèrent hasardeuses et menacèrent de rallonger considérablement le trajet mais, au troisième jour, le vent se leva et porta l'Estrella vers sa destination plus vite que les marins ne l'auraient imaginé. Ils déployèrent les voiles et profitèrent de cette bénédiction avec joie. Enfin, deux jours plus tard, ils approchaient du littoral arabéen en suivant l'itinéraire contenu dans le journal de bord. Ces eaux étaient d'ordinaire infestées de corsaires avides de butin mais, là encore, les voiles que la Perche aperçu à l'horizon ne firent jamais mine de les prendre en chasse. Cela était certainement dû au contrat que la Sire avait trouvé dans un petit coffre en bois, dans ce qui était désormais sa cabine. Ce document spécifiait que l’émir Hisham Ibn Abd al-Malik, le Prince aux mille femmes de Maharek, garantissait que les corsaires sous sa férule n'attaqueraient pas les navires magrittains tant que ces derniers vendaient la totalité de leurs esclaves sur les marchés de Maharek. Et ce contrat stipulait également que les femmes capturées devaient être réservées à l'émir contre un prix raisonnable.

Cette paix et le temps qui était au beau fixe contribuaient à l'atmosphère paisible qui régnait sur le pont du navire. Le moral de l'équipage était bon et chacun prenait peu à peu ses marques par rapport aux autres. Ducio et Tête-de-Pioche s'entendaient comme cochons, Jan et les gabiers arabéens passaient le plus clair de leur temps ensemble quand bien même ils ne se comprenaient pas et Lucio palabrait parfois des heures avec la Perche, lorsque ce dernier était juché dans son ni-de-pie et que le tiléen était à la barre. Ce petit monde commençait à exister, et cet équipe de circonstances devenait peu à peu un véritable équipage sous le commandement du capitaine la Sire.

Image
Maria était dans sa cabine lorsque quelqu'un frappa à la porte en bois. C'était Valante. Le cambusier avait quelque chose à lui montrer. Son ton était calme, comme à l'ordinaire, et ne laissait rien présager de malheureux.

- "Venez voir, capitaine. Il y a un problème."

Lorsqu'elle fut prête, il l'emmena dans le gaillard arrière, où les hommes avaient leur dortoir. Lucio fit un clin d’œil à la jeune femme lorsqu'elle passa près du gouvernail. Valante et Maria passèrent la porte de la chambrée. C'était une pièce au plafond bas où des hamacs étaient pendus de toute part autour d'une table et de quelques tabourets. Un hamac était occupé par l'un des arabéens. Un de ses camarades se tenait à ses côté et regarda la Sire quand elle s'avança entre les hamacs repliés.

- "محاولة لطيفة."

Valante se tenait en retrait, les mains croisées dans le dos, impassible.

Le marin arabéen était recroquevillé, les bras croisés, il tremblait et sa mâchoire claquait. Il semblait pris d'une forte fièvre, et son cou ainsi que son dos étaient marbrés de lésions rosées, comme des traces de brûlure superficielle. Il regarda la Sire et l'autre arabéen, les yeux dans le vague, puis reposa la tête contre le filet de son hamac. Ses lèvres étaient parsemées de petites tâches roses pâle.


- "Ça m'a tout l'air d'être la gigue de la boiteuse." C'était l'un des surnoms de la vérole. "La poussée de fièvre se calmera d'ici ce soir, mais si quelqu'un a le malheur de le toucher alors qu'il a une coupure ou une brûlure sur la main, il sera contaminé." dit Valante dans le dos de Maria.

Au même moment, un cri résonna depuis l'extérieur.

- "TERRE ! TERRE EN VUE !" beugla la Perche depuis son perchoir.

Ils arrivaient probablement en vue de la baie de Maharek.
Concernant ta cabine : elle se trouve sous la dunette, elle est petite, contient un lit, un coffre, une table, une armoire et une petite fenêtre et elle est jouxtée par une autre cabine, vide celle-ci. Les hommes, eux, dorment dans le gaillard arrière.
Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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Re: [Maria] La ville bleue

Message par La Sire »

Le bonheur que de voguer de nouveau. Celui d’être sur le château arrière de son propre navire, de pouvoir sentir la fibre d’un bois séculaire frémir sous sa main, de percevoir la nef réagir au moindre mouvement de la barre. Les embruns gonflant les voiles, apportant leur parfum de sel, les vagues qui clapotaient contre la coque, délicatement scindées par l’étrave. De pouvoir jouir d’une certaine oisiveté, alors que j’étais au poste de timonier, à m’émerveiller de la vastité de l’océan, de l’horizon inatteignable, de l’azur majestueux du ciel, et du soleil qui l’était tout autant, dispensant au monde la nitescence de ses rayons qui se réverbéraient sur les eaux profondes et turquoises. Là-haut, quelques mouettes annonçaient la proximité soudaine de la terre, et juste en-dessous d’elles, les gabiers finissaient de redescendre du gréement après avoir exécuté la dernière manœuvre.

Tout le bordel qui régnait auparavant sur le pont, dernier vestige de la conquête de l’Estrella, avait été effacé par le labeur des marins, et plus rien ne se voyait désormais, si ce n’était les dégâts les plus importants au niveau du gaillard arrière, vite fait colmatés. Les hommes évoluaient avec une prestesse chaque jour décuplée par l’aroutinement du voyage, agissant de plus en plus de concorde, comme un vrai équipage. Les débuts avaient été laborieux, presque catastrophiques, alors que personne ne semblait être en mesure de comprendre les actes et les intentions de son partenaire. La barrière de la langue, notamment entre les arabéens et le reste, représentait un véritable fossé pour qu’ils agissent comme un seul homme, et les erreurs étaient monnaie courante. Fort heureusement, il n’y avait pas eu de blessé ; la mer avait été calme tout du long du voyage, au même titre que ce dernier.

Maharek fut la destination que j’avais choisie, notamment après avoir consulté le journal de bord que détenait l’ancien capitaine du navire. Les informations qui y avaient été retranscrites m’avaient paru fort intéressantes, en particulier l’accord commercial qui unissait l’Estalie à L’Arabie. Si jamais j’avais eu quelques doutes sur ma faculté à me débarrasser des esclaves, ils avaient été éclipsés. La ville était assez grande, et il s’agissait d’un port commercial d’envergure, aussi trouver un marchant peu scrupuleux, quelque fois que l’Estrella eût des contacts habituels, ne devrait point poser trop de souci. Et il en irait sûrement de la marchandise. Ou peut-être, mieux encore, que les marchands n’étaient pas très regardants sur la provenance de ce qu’on leur refourguait ; après tout, des estaliens pouvaient tout à fait être emmenés à l’étranger pour y être vendus en tant qu’esclave après avoir commis quelque crime que ce fût dans leur nation d’origine.

Le trajet pour se rendre dans la ville arabéenne était indiqué avec plus ou moins de précision sur le carnet de bord, et je le suivis scrupuleusement, au moins au début. Cinq jours pour y parvenir, en longeant la côte estalienne, en passant par-delà la Pointe des Fous. A ce moment-là, l’équipage n’en étant qu’à ses débuts, nous voguions très lentement. Bien nous en prit ; tous ces îlots à bâbord devenaient soudainement bien dangereux, d’autant plus que la présence de terres en surface en annonçait des myriades d’autres, à peine discernables sous l’eau. Et si la Perche était capable de les repérer de loin, encore fallait-il que l’équipage se mît en branle pour amorcer la moindre manœuvre destinée à nous éloigner des hauts-fonds menaçants. En fin de compte, je décidai de naviguer bien loin de la côte, en comptant spécifiquement sur la Perche pour nous signaler que la Pointe des Fous demeurait toujours bien sur bâbord.

Dans la cabine, en sus du journal de bord, j’avais également trouvé deux cartes ; une détaillant la Mer du Sud, dont les côtes étaient somme toute assez facilement reconnaissable en dépit du travail grossier, et une seconde, représentant de manière détaillée la baie de Maharek. En vérifiant les coordonnées inscrites sur la carte tout en faisant le point sur le trajet lorsque survenait midi, nous parvînmes à faire une bonne route. Puis vint le moment de s’engager au cœur de la Mer du Sud, quittant la Pointe des Fous, perdant tout repère visuel

Difficile de s’y retrouver ainsi, aussi décidai-je, dans la mesure où aucune carte n’était précise en termes de longitude, de pointer droit au sud, laissant le soleil là aussi sur bâbord. Lorsque l’astre diurne était au zénith, je mesurais sa hauteur à l’aide de l’astrolabe, ce qui me donnait, en fonction de la date, la latitude sur laquelle nous nous trouvions actuellement. Ce ne fut que lorsque j’atteignis la latitude de la ville de Maharek que je décidai, en m’aidant et de la boussole, et du soleil, de mettre cap à l’est, voguant tout droit en direction de notre destination.

La mer était calme, avec quelques creux de faibles envergures ; tout juste ce dont il nous fallait pour progresser rapidement. En dépit de notre faible nombre, des manœuvres plus compliquées à faire, ce qui découlait sur notre vitesse, les vents furent favorables, et nous filâmes vers l’horizon. Souvent, la Perche nous indiquait le passage de quelques navires lointains, voiles blanches se découpant à peine sur la limite mer-ciel, là où le turquoise se mêlait de cyan, mais sans pour autant que cela nous fût menaçant. Les autres embarcations nous laissaient en paix après avoir observé notre pavillon, que nous battions magrittain et, de notre côté, nous ne furent pas assez stupides pour leur chercher des noises, quand bien même nous étions mis en tête que de se livrer à la piraterie. Le nombre était trop faible, et la cohésion l’était encore quelque peu, pas assez forte.

Cela dit, il y eut des changements d’attitude au fur et à mesure que nous nous rapprochâmes de Maharek. Les trois tiléens savaient s’y faire en matière de sociabilité, et Ducio comme Valente, qui semblaient de prime abord bien renfermés, taciturnes, s’ouvrirent au restant de l’équipage, sympathisant avec la Perche, que tout le monde semblait apprécier, étant lui-même assez farceur et jovial. Jan Janz était tout autant apprécié, notamment pour ses qualités de pêcheur ; se taper des biscuits secs tous les jours devenaient pénibles à la longue, quand bien même n’étaient-ils pas mauvais, et le poisson permettait de redécouvrir l’utilité d’un palais. C’était un vrai plaisir que de manger de la viande, fût-ce du poisson, et il y avait toujours un volontaire pour le préparer. Plus encore, l’homme s’était mêlé aux arabéens, pour le moment groupe encore légèrement à part, du fait de leur langue que personne ne comprenait véritablement.

Pour ma part, une fois que le cap avait été décidé, que le navire avait été orienté selon celui-ci, et que les marins avaient effectué les manœuvres, le temps devenait subitement libre, si ce n’était pour les menues tâches à effectuer quotidiennement sur un navire, que ce fût pour laver le sol, réparer une manœuvre ou une voile, inspecter la charpenterie du navire, prendre la barre, surveiller l’horizon, écoper la cale... En fin de compte, un homme n’était jamais inutile sur un navire, tant y avait-il de choses à faire.
Cela ne m’empêcha pas de parler avec l’équipage, le plus que je pus le faire, et de me livrer à ces tâches que je leur avais assignées, les aidant au même titre que tout autre homme. Rien de mieux pour s’intégrer, et faire passer le temps par le biais de quelques jaspinages. Ce fut en parlant avec les marins que j’en appris davantage sur eux, de manière évidente, et ils m’expliquèrent leur ancien rôle sur leur ancien navire. Ceux du corbin, par exemple, je ne les connaissais pas tous ; ils n’étaient pas du même quart et de la même bordée que la mienne. Sur un navire, tout fonctionnait par paire, et les marins se liait à un autre, partageant le même hamac, bien qu’alternant. Ainsi, si jamais il y avait quarante personnes sur un navire, alors seules vingt étaient d’astreinte, l’autre moitié étant libre de vaquer à leurs occupations respectives ou à se reposer dans les hamacs. Et lorsque le quart était terminé, alors inversait-on les rôles. Cela permettait aussi bien d’économiser les forces de l’équipage que de gagner de la place sur un navire, notamment en retirant un maximum de branles.
C’était ainsi que j’avais décidé de placer la Perche au poste de vigie, Tête-de-Pioche en tant que servant de pièce, et Jan en tant que gabier. Quant aux arabéens, j’avais décidé de les laisser en tant que marins de pont et gabiers également, pour ceux qui savaient évoluer avec aise dans le gréement.

Il en allait de même pour les tiléens. Lucio me parlait de son pays natal, me contant des grandeurs architecturales de la Tilée, la beauté des canaux de Miragliano, de Tobaro et de ses cavités souterraines crées par les eaux. Valente, en tant que cambusier, m’avait fait part de ses calculs. Nous en avions encore pour une semaine de provision, ce qui m’avait paru quelque peu juste. Fort heureusement, une fois de plus, le beau temps avait été au rendez-vous. Le tiléen s’occupait également des prisonniers que nous avions mis en cage, et il ne semblait pas y avoir de souci de ce côté-là.
J’avais également profité de la quiétude du voyage pour alimenter le journal de bord de ce que traversions, quand bien même était-ce fort plat. Mais tant mieux ; cela signifiait que nous ne connaissions nulle anicroche. En fin de compte, je ne fis que répéter ce qui avait déjà été couché sur ces pages.

J’étais justement en train de me livrer à cette activité lorsque l’on vint m’interrompre. Valente entra dans la pièce, après avoir frappé et obtenu mon consentement. Il y avait un problème, semblait-il. Je le suivis, que pour découvrir un des arabéens malade comme un chien. Il claquetait des dents, divaguait, les yeux fiévreux, le front halitueux, et sa peau était sclérosée de scrofules, surtout au niveau des lèvres et du dos. Un autre arabéen, aux côtés du malade, parla dans son dialecte, mais je ne pigeai rien de ce qu’il me raconta. Ce fut à Valente de définir la maladie.

«Ouais, je vois le délire. On va l’isoler du restant de l’équipage afin d’éviter les risques de contaminations. Attendez là deux secondes. »

Mitoyenne à ma propre cabine s’en trouvait une autre, elle aussi pourvut de tout le nécessaire à logement, y compris d’un hamac. Je décrochai celui-ci, l’emportai avec moi, et revins au niveau de l’arabéen malade. Le hamac que je tenais, propre, je le confiai à son comparse, en bonne santé.

«Propre, fis-je en désignant la toile. Tu l’accrocheras. Après. »
J’avais désigné le hamac du malade et les manœuvres de fixation. Je me tournai vers Valente.

«Il y a une cabine de libre à côté de la mienne. Je pense que ce serait une bonne chose que de le mettre en quarantaine là-dedans, en attendant ce soir. Et pour éviter justement tout contact, on va le porter jusque là-bas dans son hamac. Un coup de main ne serait pas de refus. »
Je tâchai de dénouer l’amarre du branle avant de fermement le tenir. J’étais prête à l’amener dans la cabine. Au même moment, la Perche gueula bien fort que la terre était en vue. Assurément, cela mit du baume au cœur à tout le monde. Pendant que nous étions en train de transporter le malade jusqu’à sa nouvelle cabine, nous passâmes de nouveau près de la barre où se tenait Lucio.

«Lucio, prépare les hommes à la manœuvre, quelque fois qu’ils n’aient pas entendu. »
Modifié en dernier par [MJ] Le Grand Duc le 18 mars 2016, 00:34, modifié 1 fois.
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Re: [Maria] La ville bleue

Message par [MJ] Le Grand Duc »

Valante et la Sire décrochèrent le hamac du malade, soulevant chacun un bout pour l'emmener dans la cabine vide qui jouxtait celle de la jeune femme. Ils ressortirent sur le pont avec leur fardeau et montèrent les marches qui menaient à la dunette. Le pauvre arabéen geignait dans sa couche, trimbalé comme un vulgaire sac de blé. Il suait beaucoup et tremblait, les bras enroulés autour de son torse. Ses lèvres bougeaient fébrilement au rythme des borborygmes qu'il déblatérait à voix basse, comme s'il délirait.

L'équipage les suivit du regard tandis qu'ils remontaient vers la dunette. Valante poussa la porte du pied et ils entrèrent dans la minuscule cabine d'ordinaire réservée au second du navire. Ils attachèrent les cordes du hamac aux branles qui étaient fixés au mur et hissèrent le malade au dessus-du sol. Le marin leur jeta un regard vague et embué, puis se tourna vers l'autre côté en frissonnant.

Lorsque la Sire ressorti sur le gaillard arrière, elle vit la côte arabéenne face à elle. Ses yeux suivaient la longue plage dorée et les dunes parsemées de fourrés d'oyat. Plus loin, elle pouvait deviner la cime des pins maritimes et des acacias. Il y avait une échancrure dans ce littoral ondulant, point d'entrée de la baie de Maharek. Cette trouée était longue d'environ un mille marin, et gardée des deux côtés par des fortins aux murs blancs et bleus. L'un de ces deux bastions était surplombé par une longue tour circulaire perchée sur un escarpement de garrigue et au sommet de laquelle brûlait un grand feu. De toute part, des voiles apparaissaient à l'horizon et convergeaient vers ce point, tandis que d'autres navires quittaient la baie en passant entre les deux forts. Le soleil frappait fort et sa lumière éblouissante se réverbérait sur ces murs tapissés de chaux.


- "La porte d'Al-Alnon. Al-Alnon signifie l'Unique. Les arabéens la nomment ainsi d'après la légende de leur dieu, Ormazd. Ils prétendent que durant son exil, il s'écroula à cause de sa grande fatigue et faillit mourir de soif. Pour le sauver, la mer elle-même se souleva et perça la côte pour courir sur la terre et venir l'abreuver." lança Lucio en regardant le phare, une main sur le gouvernail.

Sur le pont, les matelots et les gabiers se préparaient à manœuvrer pour passer le chenal.

- "Quelque chose me travaille l'esprit, Maria." Le quartier-maître ne l'appelai "capitaine" qu'en présence des autres marins. "Si l'émir s'attend à voir débarquer ses vieux amis magrittains ... ne sera-t-il pas surpris par notre présence ? Ou par celle de des estaliens dans nos cages ?" demanda-t-il avec un sourire en coin.
Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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Re: [Maria] La ville bleue

Message par La Sire »

Valente n’émit aucune objection à l’idée que je proposais afin de mettre en quarantaine le malade, et nous le portâmes dans la cabine mitoyenne à la mienne. Si jamais la fièvre ne tombait pas, comme l’avait stipulé le cambusier, alors peut-être pourrions-nous trouver un médecin sur terre. La science des arabéens était assez poussée et reconnue, et leurs médecins devaient assurément profiter de toutes ces connaissances pour guérir les maux les plus virulents. Durant le trajet, l’on nous observa ; je m’étais demandé ce que penseraient les marins arabéens de tout cela, s’ils avaient des coutumes ou des traditions vis-à-vis de leurs propres blessés mais, apparemment, ils pensaient comme nous. Mieux valait l’isoler pour le bien commun, et le concerné lui-même ne se fendit d’aucune remarque. De toute façon, vu son état, il y avait fort à parier qu’il n’avait pas même envie de l’ouvrir pour balancer la moindre remarque qui fût.

De retour sur la dunette, je pus apercevoir la côte arabéenne, nitescente d’or. Les plages et son sable doré, bordées d’arbres maritimes et de fourrés d’oyat. Les toits des habitations qui scintillaient tout autant sous les rayons du soleil, englobés par la tapisserie concolore du ciel, d’un azur des plus purs. La différence entre l’architecture du Vieux Continent et celle de l’Orient était flagrante, même à cette distance. Tout n’était que courbe, voûte, arc de cercle et grandes tours élancées aux couleurs chatoyantes et bigarrées. Un point de rencontre pour tous les navires dont les voiles blanches se découpaient plus ou moins loin sur la côte, convergeant vers l’entrée de la baie où n’allions pas tarder à accoster nous-mêmes en passant entre les deux fortins qui gardaient le port.

Lucio me conta quelques légendes arabéennes dont j’ignorais tout. Les marins appartenant à cette nation répétaient souvent un mot que j’étais parvenue à comprendre à force de répétition ; Ormazd. C’était donc le nom de leur dieu, ou de ceux qu’ils vénéraient, s’ils en avaient plusieurs.

«Leurs déités peuvent donc mourir de soif. Intéressant. »

Bien portée sur la religion que j’étais, c’était là tout ce que je retins. Je préférais plutôt me focaliser sur la diction de la manœuvre alors même que nous nous apprêtions à rentrer dans la baie. Vent de travers, les voiles donnaient le maximum de rendement, la gîte était presque nulle du fait de notre armure, et nous avancions à vive allure.

«Lucio, serre au vent ! Marins, bordez les voiles ! »

Mieux valait ralentir quelque peu, d’autant plus que je n’étais pas familière de la baie, quand bien même avais-je pu analyser les cartes que j’avais trouvées dans la cabine du capitaine. Lucio se rapprocha donc du vent en tournant la barre quelque peu comme les marins bordèrent les voiles en tirant sur les écoutes, forçant la toile à se remettre dans l’axe du navire. Tandis que nous lofions, les vagues, dans le sens du vent, heurtèrent de plus en plus la coque du navire, laquelle fendait les ondes sans difficulté aucune, et un certain roulis fut perceptible. Ce qui était tout à fait naturel. Je jetai un coup d’œil au gréement comme aux autres navires, plus proches désormais. Cela me semblait bien, et nous n’étions pas trop proches des autres nefs. Apparemment, pour ce que je voyais, la baie était vaste et ouverte, profonde, et il n’y avait pas besoin de lamaneur du port pour venir piloter le navire dans ces eaux traîtres que seul lui connaissait.

«Gouverne-nous un peu au vent du port. Marins, prêt à lofer. Amenez la grand-voile et le grand hunier, et carguez-les ! Bordez davantage l’artimon, à plat ! »

Tout près du quai, l’Estrella s’arrêta sur l’onde, et, étant contre le vent, se mit bientôt à culer, à avancer par la poupe.

«Préparez l’ancre, laissez filer la bitture, Lucio, dresse la barre ; le reste, carguez et serrer toutes les voiles ! »

L’ancre avait été préparée dans toute sa bitture ; la chaîne avait été découlée du cabestan dans toute sa longueur, en zigzague sur le pont. Lorsque l’on jeta l’ancre à l’eau et que son diamant perça les flots, elle fila tout droit vers le fond, directement, évitant de nous faire perdre du temps et de nous éloigner du port comme le navire était en train de culer. Il y eut ce bruit caractéristique de la chaîne qui se tendit, les maillons grincèrent, puis l’embarcation s’immobilisa pour de bon. Point besoin d’affourcher l’Estrella ; le port nous protégeait des courants, aussi une seule et unique ancre était nécessaire au bon maintien immobile du bâtiment.
A Lucio que de me faire part de ses inquiétudes.

«Bha, j’imagine que les esclaves estaliens existent tout autant. Des malfrats, des violeurs, meurtriers et assassins, des nobles déchus, des traîtres… Toussa-toussa. Puis ce serait diablement étonnant que ce soit l’émir en personne qui vienne nous recevoir, non ? M’est avis que ça sera plutôt quelque marchand d’esclaves comme l’on en trouve partout. Peut-être même, si ça se trouve, que l’on pourra les écouler de manière plus ou moins discrètes. La ville semble assez grande ; le commerce interlope doit bien subsister quelque part. »

Sur le quai, les lamaneurs s’activèrent, et une passerelle marqua définitivement notre atterrage.
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Message par [MJ] Le Grand Duc »

L'Estrella fût amarrée à quai, parmi les autres navires, et les marins jetaient déjà les cordes aux lamaneurs pour qu'ils les attachent aux bittes en métal rouillée qui dépassaient du sol ça et là.

Maharek se dressait face à eux. C'était une cité importante, bâtie sur une série de collines qui surplombaient la baie ensoleillée. De toute part, des quartiers entiers se dressaient vers le ciel d'azur. Ce fatras de constructions à l'organisation anarchique n'avait rien à envier aux bourgs les plus encombrés de l'Empire : des tours d'habitation et des casbah à toit plat occupaient le moindre pouce de terrain, séparées seulement par des escaliers étroits, des palmiers ou de hauts minarets qui dominaient le tout en un ensemble brouillon et grouillant de vie. Les bâtiments étaient tous conçus de la même manière : leurs façades alternaient la chaux blanche et les teintes bleues, transformant la ville côtière en une mosaïque magnifique. Le palais de l'émir surplombait Maharek depuis la colline la plus haute. Des remparts le séparait de la ville basse, et derrière eux on pouvait apercevoir un immense dôme doré encadré par des tours fines et élancées, au toit pointu. Un vol de colombes passait entre la cime des dattiers du jardin princier, donnant une dernière touche pittoresque à ce spectacle merveilleux.

Le port regorgeait d'activité. Une foule bigarrée se pressait sur les quais : on y voyait des Estaliens, des Tiléens, des Impériaux parmi la foule d'arabéens. Charretiers enturbannés, marchands, gardes, enfants voleurs, charmeurs de serpent, caravaniers et leurs bêtes. Ca criait dans tous les sens, ça vendait du lait de chèvre et des dattes à la volée, ça marchandait des tapis ou des colliers de perles. Un monde fou de trouvait dans cet endroit, mais tout le monde semblait savoir où il se rendait. De part et l'autre de l'Estrella, c'étaient des dizaines de navires qui étaient amarrés. Des chebecs élancés, des dhaus larges comme des galions, des caraques, des caravelles, des flûtes et des frégates marchandes. On chargeait et déchargeait sans cesse de nouvelles marchandises, qui étaient ensuite englouties par la foule pour être entreposées ou emmenée sur l'un des nombreux marchés de la ville. Maharek était connue pour son commerce de perles et d'épices, qu'on vendait par monticules entiers, entassés le long des rues.

Une délégation des autorités de la ville attendait l'équipage de l'Estrella au pied de la passerelle. Un fonctionnaire, visiblement, encadré par six gardes aux uniformes composés d'une tunique d'un jaune vif tissée de losanges dorés. Le préposé aux affaires du port portait un lourd turban fait d'une longue écharpe beige enroulée sur elle-même plusieurs fois. Son gilet était en cuir rouge finement marqueté et son pantalon blanc bouffant se terminait sur une paire de babouches au bout recourbé. Il portait un registre, une plume et un coffret qui pendait à une chaîne passée autour de son cou. Un collecteur de taxe, à n'en pas douter. Il héla l'équipage en estalien.


- "Je m'en occupe." se contenta de dire Lucio avant de s'avancer vers le bastingage et d'engager la conversation avec l'arabéen.

La Sire, qui ne comprenait pas la langue, fut incapable de dire ce qu'ils se racontèrent, mais Lucio se retourna vers elle et le reste de l'équipage après de longues minutes.


- "Il a cru que j'étais le capitaine. Je lui ai dit que c'était toi, et il ne m'a pas cru. Alors j'ai juré sur son dieu, et il l'a fermé pendant quelques secondes." lança le tiléen avec un sourire narquois. "Il nous souhaite la bienvenue à Maharek et nous fait dire que l'émir nous attendait impatiemment. Il souhaite inspecter la cargaison pour choisir les pièces qui reviennent à son maître, et il nous autorise à vaquer à nos occupations après ça. Enfin ... après avoir payé la taxe du port, évidemment."

- "S'il descend dans la cale, l'ancien capitaine de ce rafiot va pas pouvoir s'empêcher d'ouvrir sa boîte à guano. Et ça risque bien de nous foutre dans la merda." grogna Ducio.

- "Je peux descendre lui couper la langue." rétorqua Valante, imperturbable.

La Perche leva les yeux au ciel.

- "Si on est obligé de couper la langue à tous nos prisonniers, j'vois mal comment vous allez pouvoir payer vos putes." dit la jeune vigie en poussant un soupir.

Les regards se tournèrent vers Maria, dans l'attente de ses directives. Si l'un des prisonniers déclinaient leur véritable identité, les serviteurs de l'émir seraient dès lors au courrant qu'ils avaient à faire à des pirates, et non à des marins magrittains. Quelle serait leur réaction ?

Pour te donner une idée de ce à quoi ça peut ressembler, voici la ville de Jodhpur, en Inde. Bien entendu, Maharek est plus petite
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Maharek changeait drastiquement de ma cité natale que je n’avais que trop fréquentée, et beaucoup trop de choses me faisaient de l’œil. Notamment tous ces navires mouillant à quai. Les chébecs étaient élégants, dans cette mixité estalienne et arabéenne, mais ils ne m’inspiraient pas tant que cela. Les caraques comme les caravelles équivalaient plus ou moins à l’Estrella, et je n’avais ainsi pas tant que cela à les envier. Quant aux flûtes, elles demeuraient pour la plupart trop petites. Mais cela ne m’empêchait pas pour autant que de mirer leurs gréements et leurs allures, repérant çà et là quelques différences de voilure vis-à-vis de ce que j’aurais fait moi-même à leur égard. Chacun avait ses petits trucs, en tant que capitaine d’un navire. Toutefois, il y avait véritablement un certain type de navire qui me faisait saliver. Les frégates, fussent-elles marchandes. Bien plus imposantes et redoutables, car elles pouvaient être armées pour la guerre, et facilement modulables si l’on trouvait un maître charpentier et voilier assez doués pour ce faire. En dépit de leur taille légèrement plus imposante que le navire que je possédais actuellement, elles pouvaient se montrer très rapides en fonction du type de voile, même lorsqu’elles étaient lourdement équipées. Mieux encore, si l’on remarquait une éventuelle perte de vitesse, celle-ci était largement compensée par la puissance des batteries, capable de démâter n’importe quelle embarcation afin de pouvoir la rattraper par la suite.

Tout cela se découpait sur un tableau pittoresque de la ville de Maharek, surplombée par le fortin et ses antiques murailles. Un paysage de chaux et de turquoise mêlé de cyan, des maisons étrangement carrées au beau milieu d’un style architectural pourtant tout en arc, en courbe, et en tours rondes, séparées par un tissu de venelles étroites qui devaient assurément faire le bonheur des malandrins. Mieux valait s’y aventurer sous bonne garde lorsque l’on contemplait ce réseau urbain sans même le connaître. Quelques feux, semblait-il, venaient apporter une lueur jaunâtre chatoyante sur les murs blancs, ponctuant çà et là la ville d’un millier de petites touches bigarrées.

Si j’en prenais plein les mirettes, il n’y avait pas que la vue qui s’en trouvait touchée. L’ouïe, également, en la présence de tout ce charivari de cris, de chants et de brouhaha. L’on hélait le chaland ribon-ribaine afin de lui faire connaître les merveilles de l’Orient, l’on gueulait sur les portefaix chargés de remplir les lourdes caisses d’un navire en partance, l’on aboyait sur les charretiers qui bloquaient les rues de leur tombereaux, et se mêlaient à tout cela, enfin, les myriades de conversations de chacun. Quant à l’odorat, les embruns salés apportés par le vent vous enivraient tout autant de saveurs épicées, d’un parfum de sable, le tout masquant l’insidieuse et douceâtre exhalaison de la ville, des hommes, et des humeurs qu’ils charriaient.
Enfin, si je devais en revenir à la vue, je constatai sur le quai la présence de quelques gardes et d’une espèce de fonctionnaire chargé de nous accueillir, à leur manière.

Si l’Estrella était attendue pour la vente de ses esclaves, alors le collecteur de taxes devait très certainement savoir que ses occupants parlaient l’estalien. Aussi Lucio se proposa-t-il tout naturellement pour ce faire, dans la mesure où seul lui savait le parler sans réel souci. Je hochai du chef, et des épaules, aussi, un peu, lui annonçant qu’il pouvait procéder. Je ne compris rien de ce qu’il se trama là-bas, mais quand le tiléen revint me voir, il m’expliqua ce qu’il s’était passé.
Apparemment, le bougre d’arabéen n’avait pas très bien pigé que j’étais le capitaine de ce navire. Si je devais en croire tous les racontars sur leur société, cela ne me surprenait guère. En tout cas, la tronche qu’il avait dû tirer avait eu le mérite de faire sourire Lucio, lequel ne se départait pas de son petit rictus amusé. Compréhensible. Par contre…

« L’Emir nous attend ? Est-ce une formule de politesse ou une autre foutaise dans le genre, ou bien celui-ci nous attend véritablement, genre il veut nous accueillir en chair et en os ? Je ne vois foutrement pas pourquoi il se déplacerait pour l’Estrella en particulier, un navire parmi tant d’autres dans son port. Bon. Et c’est combien, la taxe ? »

Restait le souci, effectivement, de l’inspection de la cargaison. Les bougres n’avaient pas tort. Si jamais l’ancien capitaine de l’Estrella commençait à l’ouvrir, cela n’ajouterait que davantage encore de confusion, et, clairement, je m’en passerai bien. Mieux valait qu’il ferma sa gueule pour de bon. Valante se proposa pour aller lui couper la langue, et l’ensemble des regards se tourna dans ma direction, attendant mon approbation ou mon refus.

«Je ne vois pas pourquoi les prisonniers perdraient de leur valeur avec la langue coupée. Surtout s’ils sont condamnés au bagne ou aux mines. Pas besoin de parler pour ça. Mais bon… Mmh… Je soupçonne quand même le capitaine de pouvoir être une grande gueule, ouais. Et de potentiellement l’ouvrir. Faisons un exemple. Valente, je consens à ce que tu t’occupes de lui, uniquement. Mais ne la lui coupe pas. Arrache-la-lui, de manière à ce que les autres comprennent le message. S’ils l’ouvrent pendant l’inspection, enfin, s’ils l’ouvrent tout court, on leur fait subir le même sort. Pas besoin d’avoir une langue pour être esclave, m’est avis. »
Modifié en dernier par [MJ] Le Grand Duc le 05 avr. 2016, 13:36, modifié 1 fois.
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Re: [Maria] La ville bleue

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- "Il dit que la taxe est de vingt-cinq pièces d'or." l'informa Lucio tandis que Valante dégainait son couteau et descendait dans la cale, accompagné par Toro et Tête-de-Pioche. "Je vais le faire attendre un peu, le temps que notre ami l'estalien n'ai plus envie de parler."

Le quartier-maître se pencha au bastingage et entama la conversation avec le collecteur de taxe, feignant de lui poser une question et ne pas entendre la réponse pour gagner un peu de temps. Maria entendit un cri étouffé en provenance de la cale, trop faible pour qu'on puisse l'identifier depuis le quais, puis Valante et les deux autres remontèrent sur le pont au moment où le fonctionnaire arabéen et ses gardes gravissaient le ponton. L'enturbandé fronça les sourcils en regardant la Sire et lui dit quelque chose en estalien qu'elle ne comprit pas, mais Lucio se dépêcha de répondre à la place de son capitaine pour ne pas éveiller les soupçons. Il descendit avec eux dans la cale sous les yeux du reste de l'équipage. Les corsaires arabéens, bras croisés sur le torse, regardaient les gardes d'un mauvais œil mais s'abstinrent bien de dire quoi que ce soit.

Une fois la cargaison inspectée et la taxe payée, les autorités du port redescendirent à quais et se perdirent dans la foule bigarrée.


- "Bon, et maintenant on peut prendre un peu de bon temps ?" lança la Perche.

- "Va falloir faire comprendre à ces macaques qu'il faut revenir au bout d'un moment." grogna Ducio en pointant désignant les marins arabéens du pouce.

- "Ou en recruter d'autres ... Ce ne sont pas les marins étrangers qui doivent manquer, ici." ajouta Jan Janz.

- "Quoi qu'il en soit, montrez vous discrets." leur dit Valante en essuyant sa lame sur un bout de chiffon. "S'ils viennent à savoir qu'on est pas les magrittains qu'ils attendaient, on est bon pour la potence."
-25 pièces d'or sur le Trésor
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Re: [Maria] La ville bleue

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Vingt-cinq pièce d’or. Ça allait encore, sur les cent trente-cinq couronnes que renfermait le trésor que contenait alors l’Estrella au moment de sa conquête. De toute façon, ce n’était pas comme si l’on avait le choix.
Après quelques mots à l’intention de Valente, et celui-ci se dirigea en direction de la cale, prêt à sévir sur l’ancien capitaine. C’était cruel, ouais. Mais m’était avis que mieux valait être cruelle plutôt que finalement être mariée à chanvre et balancer les pieds dans le vide. C’était lui ou nous. Un gus qui pâtissait pour la survie de quinze autres. Ça valait clairement qu’on lui arrachât la langue, définitivement. Et afin d’être certain que le collecteur de taxe ne vînt pas interroger trop tôt nos esclaves et leur tirer les vers du nez, Lucio s’interposa habillement entre la cale et l’homme, gagnant du temps en lui tenant distraitement une conversation de broutilles.

Les gardes grimpèrent sur le pont au moment même où Valente ressurgissait de la cale, l’air de rien. Mais le travail avait été fait, j’avais bien cru en entendre les effets. Fallait pas deux heures pour arracher une langue. Le rapace enturbanné qui devait assurément aimer l’argent me contempla, me balançant quelques mots en estalien que je ne compris pas, et ce fut à Lucio que de sauver la mise en s’interposant une fois de plus droit entre nous deux, répondant sûrement à la question posée, si toutefois s’agissait-il d’une question. C’était assez comique, à vrai dire. Une vraie mascarade, et pas forcément des mieux jouée. Mais fallait croire que ça suffisait. J’avais pourtant une foutue envie de balancer un « hola » le plus aléatoire du monde, et, en dépit de la situation, je retenais un étrange rire nerveux, ce petit sourire qui provenait de je ne savais où. Mais je pris sur moi, quand bien même étais-je fortement joueuse, et la fermai définitivement, laissant Lucio faire la conversation. J’avais tout de même pris le soin de glisser à ce dernier les vingt-cinq couronnes demandées, au cas où.

L’inspection de la cargaison, faite par le collecteur de taxes, ne pris pas bien longtemps, et cela était de bon augure. Rien à dire, rien à signaler, apparemment, et ils s’en furent, allant inspecter de nouveaux bâtiments qui venaient d’arriver. Parfait. C’était l’occasion que tout le monde attendait pour enfin mettre le pied au plancher des vaches, s’enivrer dans les tavernes et aller à la cueillette aux putes et aux maladies qu’elles véhiculaient de bon gré.

«Ouais, la Perche. »

Ducio lorgna du côté des arabéens. Il n’était pas certains que ceux-là demeurassent en notre compagnie. Je ne savais quoi en penser. D’un côté, c’étaient des hommes déjà « recrutés » si jamais ils restaient à bord de l’Estrella. De l’autre, et ils ne parlaient pas un traître mot de notre langue, et c’était parfois bien la misère pour se comprendre. Alors, pourquoi ne pas les remplacer carrément par d’autres marins avec lesquels l’on pouvait au moins échanger des trucs bateaux dans le genre bonjour ou au revoir ? Ah, bha justement, Jan Janz qui venait de parler, ici présent.

« Tiens, toi que j’ai déjà aperçu en train de parler avec deux arabéens, tu les comprends probablement mieux que moi. On va les voir à deux, et l’on va tâcher de savoir s’ils comptent rester à bord ou bien partir. Je préfère leur laisser le choix, que l’on soit fixés. Sinon, Valente, combien de jours nous reste-t-il de provisions ? Pas grand-chose, me semble-t-il. Faudra aller voir pour se faire ravitailler. L’on a beau être arrivés à bon port, il nous reste ce genre de choses à régler. Et l’on en profitera aussi pour vendre ce que l’on a. »

Sur ces mots, je partis à la rencontre des arabéens, accompagnée de Jan, lequel pouvait être mieux à même de traduire ce que je pouvais raconter.

«Quels sont vos projets ? Est-ce que vous voulez rester ici, à bord, ou bien partir définitivement du bateau ? Je veux savoir. Pas de problème, que vous partiez, ou que vous restiez. Je veux juste savoir. »

Je n’étais pas trop dans l’envie de parler petit nègre pour me faire comprendre, mais j’avais toutefois pris la précaution de parler très, très lentement, espérant qu’ils pouvaient piger ce que je leur disais. En même temps, j’avais désigné l’Estrella, le pont du navire, puis le port, en fonction de ce que je racontais. Histoire qu’ils comprennent plus facilement, peut-être. Je me tournai vers Jan. Il avait peut-être quelque chose à rajouter, des mots à traduire, ce genre de trucs. De quoi faire passer un message plus facilement que je ne le pouvais dans ma langue.

Lorsque cela fut fait, ou pas, je descendis sur le ponton en compagnie de Valente, cherchant dans les alentours du port de quoi acheter et vendre de la marchandise. Trouver des marchands, des entrepôts, voire peut-être même s’adresser aux gens du coin et aux lamaneurs pour se renseigner sur les personnes à qui s’adresser pour ce faire. Ce ne serait qu’une fois que ces détails seraient réglés que je pourrai laisser quartier libre à tout le monde. Encore qu’il était fort possible à ce que, pour s’en aller en garouage dans les tavernes, Lucio m’accompagnerait. Surtout pour le recrutement. Il devait bien y avoir deux ou trois vaisseaux de guerre, ici, l’enfer sur mer d’où voudraient s’échapper quelques pauvres marins. Ou bien des jeunes gens en quête d’aventures, des types qui s’en foutaient pas mal de ce qu’ils pouvaient bien faire tant que ça leur rapportait gros. L’on pouvait bien trouver de tout, dans un port.
Modifié en dernier par [MJ] Le Grand Duc le 08 avr. 2016, 14:12, modifié 1 fois.
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Re: [Maria] La ville bleue

Message par [MJ] Le Grand Duc »

Jan haussa les sourcils et se gratta la tête lorsque la Sire lui demanda de connaître les intentions des arabéens. "Parler" était un bien grand mot pour désigner les gestes et les quelques mots qu'il employait pour échanger avec eux, et il semblait assez dubitatif.

- "Euh ... oui, capitaine."

Il se dirigea vers les arabéens, accompagné de la jeune femme.

- "Vous voulez rester avec nous ?" dit-il lentement en articulant, hachant un peu les mots avec son accent du Pays Perdu. Il désigna le navire du doigt, puis le reste de l'équipage avec lui. "Rester ?" Puis il montra la ville qui montait sous leurs yeux, grouillante et grimpante sur les collines qui surplombaient la baie aux eaux d'azur. "Partir ?" Il réitéra plusieurs fois en jetant un regard à la Sire comme pour lui signifier que c'était tout ce dont il était capable.

Les arabéens l'observèrent en fronçant les sourcils puis entrèrent dans une grande discussion, tournant le dos à leurs interlocuteurs. Ils s'agitèrent un peu, agitant leurs mains dans tous les sens à mesure qu'ils débattaient dans leur langue âpre et rapide. Les autres pirates les observaient en silence, certains montrant quelques signes d'impatience.

- "Bon, ils se dépêchent, les sauvages ?" maugréa la Perche avant d'essuyer un regard réprobateur de Lucio.

- "D'toute façon on a pas vraiment besoin d'eux, si ?" renchérit Tête-de-Pioche. "On trouvera d'autres recrues dans l'port. Autant leur faire comprendre dès maint'nant, qu'y arrêtent d'jacasser comme des perroquets."

- "Fermez la un peu." grogna Ducio, ses bras velus croisés sur le torse. "Plus vite vous les laiss'rez finir, plus vite on s'ra repartis. Rappelez vous qu'rien les empêche d'nous balancer aux gardes, et là vous ferez moins les malins."

La discussion entre les arabéens mourut peu à peu et ils se tournèrent à nouveau face à Jan et la Sire. L'un d'eux s'avança et se désigna d'un geste, ainsi qu'un autre de ses comparses, tandis que les trois autres restaient en retrait.

- "Rachid," dit-il en se pointant du doigt, "Hissin," il montra l'autre, "Reste." Il désigna les trois autres. "Partir. Maharek."

Ceux qui étaient restés en retrait s'avancèrent finalement et jetèrent un regard à l'équipage. Ils dirent quelques mots à leurs deux compatriotes désireux de rester à bord de l'Estrella, puis s'approchèrent de la Sire. Tour à tour, ils inclinèrent la tête devant elle en se touchant le front avec leur main, lui adressant une formule dans laquelle la jeune femme reconnu le nom d'Ormazd. Ils semblaient la saluer ou, peut-être, la remercier. Ils s'en allèrent ensuite dans le dortoir et en ressortirent rapidement avec leurs sacs de toiles, puis ils descendirent la rampe sans se retourner et se dirigèrent vers la foule des quais pour y disparaître.

- "Et l'autre, le malade, là haut. On en fait quoi ?" demanda Tête-de-Pioche.

- "Moi j'dis qu'on le passe discrètement par dessus bord, histoire de donner à manger aux crabes." marmonna Ducio. Peut-être était-ce une manière de plaisanter, ou peut-être pas.

Suite à ça, la Sire et Valante descendirent sur le ponton auquel l'Estrella était amarrée et le remontèrent en direction des quais. Ils passaient entre des monticules de caisses de marchandises, des débardeurs suants sous leurs turbans, des passagers et des marins oisifs. De très nombreux navires étaient amarrés aux alentours, dont la grande majorité étaient de facture arabéenne. La plupart étaient conçus pour le commerce, avec de larges cales et de grandes écoutilles, mais certains semblaient taillés pour la guerre et alignaient gueules de canon, balistes embarquées ou pierriers. La Sire remarqua quelques galères marchandes, estaliennes ou tiléennes, ainsi qu'un ou deux grands voiliers.

- "Nous avons suffisamment de vivres pour deux semaines en mer, du moins si aucune avarie ne se déclare entre temps et qu'on laisse les prisonniers ici. A vous de voir si on essaie de s'en procurer plus, capitaine." l'informa Valante.

Ils s'enfoncèrent à leur tour dans la foule bigarrée qui se hâtait sur le port et dans les ruelles adjacentes. L'odeur enivrante des épices montait à la tête et le soleil frappait fort sur les esprits. Des flots incessants d'hommes et de marchandises se pressaient à l'ombre des bâtiments au crépi bleu et blanc et les marchands ambulants se mélangeaient avec les ouvriers, les charretiers et autres matelots. Il y avait de tout, ici : des vendeurs de bijoux, de nourriture, de poudres et de mixtures, de cuir, de vêtements, d'articles en fer ou en cuivre, de poules, de lin, de sucre ou de faïence en argile vernie. Au détour d'une rue, la Sire et son cambusier débouchèrent sur une petite place où des cages étaient disposées à l'ombre d'un étal et attiraient les curieux. Si elle poussait les badauds, la jeune femme pouvait voir un magnifique félin au pelage sombre d'une taille impressionnante qui feulait, oreilles couchées en arrière, et qui n'avait de cesse de faire des allers et retours contre les barreaux de sa prison. Il y avait aussi des singes de couleur et de taille différente, dont certains étaient affublés d'accoutrements ridicules et faisaient des pirouettes. Des oiseaux colorés, des reptiles dans des paniers et même quelques uns de ces étranges bêtes de somme d'Arabie, une sorte de grande vache aux pieds plats et ayant une bosse sur le dos.

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Maria et Valante continuait de se laisser porter par leurs pieds, montant et descendant les escaliers du quartier du port sans trop savoir où ils allaient, essayant de voir où et à qui ils pouvaient vendre leurs marchandises. Ils se retrouvèrent à nouveau sur les quais, plus loin que là où mouillait leur navire cependant, et la Sire pouvait voir le pavillon magrittain de l'Estrella battre par delà les mâts et les bastingages des autres navires. Ils continuaient d'avancer parmi la foule, et beaucoup de personnes se retournaient sur le passage de la jeune femme. Ils semblaient peu nombreux à avoir déjà vu un femme à la peau si claire et qui marchait avec tant d'arrogance. Et pour cause, Maria avait remarqué que la plupart des femmes d'ici se cachaient derrière des voiles amples et colorés. Plusieurs fois, des enfants des rues essayèrent de faire les poches de la Sire ou de Valante, mais ce dernier attrapait la main des petites chapardeurs et leur brisait un doigt pour leur apprendre la leçon. Après plus d'une heure de marche dans ces rues bondées, ils passèrent la terrasse d'une auberge où l'on mangeait des crabes et des araignées de mer fraîchement pêchées, puis ils tombèrent sur un convoi de marchandise intéressant : une longue file d'esclaves avançait parmi la foule qui se fendait devant eux, harcelés par un garde chiourme et ses claquements de fouet. Les pauvres bougres étaient attachés entre eux par des chaînes en fer, et leurs mains étaient liés devant leur bassin.

Valante conseilla de les suivre, ce qu'ils firent, et après quelques minutes ils arrivèrent sur une autre place qui faisait visiblement office de marché aux esclaves. Des acheteurs se tenaient devant une estrade ombragée en bois sur laquelle on faisait monter les lots, tandis que les autres attendaient dans des enclos à bétail en bordure des maisons, chacun gardé par un grossiste qui négociait avec ses fournisseurs. Le tout se faisait à l'ombre des palmiers et des constructions désordonnées de la ville de Maharek.


- "C'est ici qu'on doit amener nos estaliens." dit Valante en regardant les clients lever haut leur main en criant en même temps pour gagner l'enchère sur l'un des lots d'esclaves. "J'essayerai de négocier le prix avec l'un des propriétaires de ces enclos, là."

Le tiléen était éternellement impassible, d'un sang froid à toute épreuve. Plongé dans cette foule bruyante et assommante, il ne se plaignit pas une fois. Au contraire, il semblait observateur et indiqua même à la Sire qu'il avait aperçu un marchand blanc qui tenait un emplacement dans le bazar des quais où il semblait vendre des barriques de liqueur. Le cambusier comptait l'approcher pour, peut-être, lui vendre le vin, et lui demander où vendre les fourrures et où trouver une taverne de marins occidentaux.
Vraiment navré pour l'attente.

Bienvenue dans les marchés de Maharek ! Libre à toi de faire ton petit shopping, pour toi ou pour le navire/l'équipage.
Si tu souhaites acheter des choses, dis moi quoi en MP et que t'indiquerai si c'est disponible et à quel prix.
Si tu veux le jouer pour marchander telle ou telle marchandise, n'hésite pas, sinon c'est Valante qui s'en occupe.

Pour ce qui est de la taverne, tu entendras parler de "L'Albatros Borgne", un rade des quais tenu par un ancien marin bretonnien et où se retrouvent la plupart des équipages occidentaux du port. Libre à toi d'y aller, ou non !
Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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Re: [Maria] La ville bleue

Message par La Sire »

Jan n’eut pas l’air bien convaincu de l’ordre que je lui transmis, mais c’était ça ou demeurer dans le doute encore un bon bout de temps. Et l’indécision, c’était bien quelque chose qui me gavait fortement, m’empêchant parfois d’aller de l’avant. Enfin, en vérité, le bougre éprouvait davantage un manque de foi dans sa capacité à se faire comprendre qu’à la visée de mon injonction, qu’il comprenait très bien, m’était avis. Mais nous nous engageâmes tout de même à travers le pont jusqu’à parvenir aux arabéens. Là, après m’avoir écoutée dégoiser avec grande lenteur et patience, le voilà qui se mit à parler petit nègre, chose que je refusais tout simplement. A défaut d’avoir de l’estime pour les arabéens, lesquels ne bittaient en général que dalle, j’en avais pour moi-même. Jan reprit plus ou moins mes gestes, désignant le navire, le port, utilisant des intonations différentes en fonction du message qu’il voulait faire passer. En fin de compte, il n’était pas bien capable de faire plus que ce que j’avais moi-même déjà fait. Mais qu’importait ; de par mon fait ou le sien, il y eut une réaction.

Comme ils l’avaient déjà montré, ce qui devait être une certaine habitude pour eux, la petite secte que formaient les arabéens fit étalage de sa disparité en se refermant sur elle-même, nous tournant le dos pour déblatérer dans leur langage que personne n’était à même de comprendre. Ça se chahuta quelque peu, ça bougea, agita les mains, toussa-toussa, sans pour autant qu’une décision fût prise au final. Tout ce petit cirque provoqua des mouvements d’impatience chez nos confrères pirates ; la Perche et Tête-de-Pioche maugréèrent quelque peu, arguant que, de toute façon, l’on n’avait clairement pas besoin d’eux avec le port de Maharek qui regorgeait de marins prêts à partir à l’aventure. Les tiléens, eux, de leur côté, se montèrent plus tempérés, allant jusqu’à décocher quelques regards réprobateurs en direction des plus grands râleurs.

Finalement, tout cela se termina bientôt, et deux pirates sortirent du lot que pour mieux se présenter. Rachid, et Hissin. Je répétai consciencieusement leur prénom juste après qu’ils l’eussent dicté, histoire de bien montrer que j’avais compris. Il était évident que ces deux-là demeureraient à bord. Quant aux trois autres, ils avaient décidé de mettre les voiles, mais pas avec l’Estrella, non. Plutôt à terre. Il y eut, là encore, quelques palabres, plus intimes, celles-ci ; les adieux de ceux qui quittaient les leurs pour emprunter un autre chemin bien différent de ces derniers. Ils saluèrent leurs anciens compagnons de bord avant de se présenter face à moi, s’inclinant diligemment en se touchant le front avec leur main. Un témoignage de la reconnaissance qu’ils éprouvaient envers moi pour les avoir libérés de leurs fers, m’était avis. C’était la moindre des choses, et, même s’ils partaient au loin, j’éprouvais une certaine satisfaction mêlée de fierté à ce qu’ils pussent se rappeler de moi en ces termes. De la gratification, voilà tout. Là également, j’inclinai doucement le chef en réponse à leur salutation et leur adieu.

«Bonne route à vous, et qu’Ormazd guide vos pas. » Ça me paraissait assez probant, comme dernières salutations.
Demeurait le cas du dernier malade arabéen. Lui, de toute façon, n’avait pas d’autre choix pour le moment que de rester à bord, qu’il le voulût ou non. Trop faible pour partir, assurément. Et si Ducio préconisa de le balancer par-dessus le bastingage, je gageai qu’il s’agissait là d’une plaisanterie. Certes, je pouvais parfois me montrer dure, allant jusqu’à torturer ou couper la langue de prisonniers. Mais, à l’inverse, je ne voyais pas non plus la nécessité de causer du mal de façon tout à fait gratuite, si rien ne m’était bénéfique. Et, en la présence du malade, je n’imaginais pas à ce que cela me coûtât grand-chose que de le laisser, pour le moment, là où il était.

Suite à tout cela, Valente et moi-même entrâmes dans Maharek, débarquant de l’Estrella pour nous engager sur les pontons portuaires. Nous louvoyâmes entre des tas et des tas de marchandises en tout genre, réparties dans une pléthore de paniers, caisses, sacs, d’amphores, et d’autres jarres. Des armes, des armures, des bijoux, de la nourriture, des bouquins, des chandeliers, des vêtements, des matières premières, des ustensiles, des céréales, des animaux, du tissu, des teintures, des huiles, et tout un tas d’autres objets inclassables et hétéroclites. Au milieu des coqs et des cochons, des caisses que l’on déplaçait ou que l’on ouvrait, que l’on entreposait ou que l’on chargeait, régnait une belle pagaille, et le brouhaha ambiant s’élevait bien haut dans le ciel de la cité.
Valente me confia que nous avions encore pour deux semaines en mer, si tout se passait bien et que l’on vendait effectivement les prisonniers.

«Je compte bien à ce qu’ils soient vendus, oui. Toutefois, j’imagine bien que, alors qu’ils s’en iront, d’autres viendront les remplacer, mais en tant que marins, et non pas en tant qu’esclaves. Cela fera tout autant de bouches à nourrir. Peut-être davantage, même. Aussi trouverais-je plus prudent que nous augmentons nos vivres. Il y a l’air d’y avoir de tout, ici. Mmh… De la viande et du poisson salés et ou fumés, des biscuits marins, des végétaux, genre ceux qui se conservent le mieux, comme des légumes secs ou des racines ; patates, blé, manioc, riz… Sel, saumure, eau potable, et pourquoi pas de l’alcool, pour ceux qui ne seront pas de quart. Et vu le climat, pourquoi pas des fruits, aussi ; ils ne doivent pas être très chers, ici. La conservation n’est pas leur fort, tu le sais bien, et ils seront donc à manger en premier. Mais c’est toujours bon pour le moral, ça, la diversité des repas. Nous faudrait un maitre queux, t’en qu’à faire, aussi. »

En sus de toutes les marchandises auxquelles l’on pouvait s’attendre dans un port comme celui-ci, il y avait d’autres choses, bien plus exotiques. Je vis des bestioles que je n’avais jamais vues auparavant, comme des matous, mais bien, bien plus gros. Ça m’évoquait possiblement quelque chose, mais je ne parvenais pas à mettre un nom sur ces créatures félines. J’en avais peut-être même déjà vu dans un bouquin, quand j’étais gamine, mais de là à les voir en vrai… Ce n’était clairement pas la même chose. Et si l’on passait outre les chats, il y avait aussi de ces chevaux spéciaux conçus pour traverser les terres arides et les déserts. Je n’avais jamais trop chevauché, et il m’était difficile de concevoir des journées ainsi à dos de cheval, alors je ne préférais pas même imaginer ce que ça donnerait si la monture en question présentait une grosse bosse inconfortable sur son dos. Assez casse-gueule, le truc.

Alors que nous nous enfoncions dans les terres, quoique légèrement, la population changea subrepticement. Plutôt que des portefaix et autres marins, nous eûmes le droit aux indigènes locaux et, surtout, à leur foutu marmaille, laquelle n’hésitait pas, parfois, à se glisser dans nos dos et nos flancs pour nous dérober nos sous. Saloperie. Valente n’hésita pas non plus à leur apprendre aussi bien la vie que les manières en leur brisant un doigt ou deux, et, bien satisfaite de les voir gémir et s’en aller en chialant, je ne tardai pas à l’imiter. Rien de mieux pour laisser passer sa frustration –que je ne ressentais pas vraiment, en fait, mais qu’importait-, que de briser les doigts des bambins pleurnichards. Je vis également bon nombre de ces indigènes qui se retournaient sur mon passage. Je pouvais les comprendre ; ils n’étaient assurément pas habitués à voir une femme de ma trempe. Je marchais bien droit devant moi sans jamais baisser les yeux, et je défiais du regard tous ceux qui tentaient de me le faire obvier. A croire qu’ils avaient pour coutume que d’avoir des fantômes en guise de femmes. Enfin, après une heure de perlustrations, nous parvînmes à ce qui semblait être le marché aux esclaves.

Pas très compliqué à deviner, dans le sens où une foule de types à moitié dénudés se traînaient les uns à la suite des autres sous le regard peu amène d’un garde chiourme, lequel n’hésitait pas à user de son fouet sitôt que l’un des gus sortait des rangs. Tout au bout, les premiers de la file montaient sur une estrade, exhibés à la vue de tous, et étaient vendus par lot ou en solitaire. Valente me confia qu’il tenterait de négocier le prix de nos esclaves estaliens, ce qui m’allait parfaitement. J’estimais qu’il était le plus compétent dans ces affaires de marchandage et que, si jamais il devait y avoir quelqu’un pour s’occuper de tout cela afin de tirer les meilleurs prix à lui, c’était bien ce tiléen-là.

J’avais songé à m’intéresser un peu davantage à tout ce que pouvait proposer le port de Maharek, notamment en munitions et en canons, car les quatre que nous avions sur l’Estrella faisaient un peu pâle figure en comparaison des autres navires que j’avais pu apercevoir mouillant dans la baie. Mais les canons étaient aussi difficiles à trouver qu’ils étaient chers, en plus d’être, pour la plupart, marqué et retraçables. Et puis nous n’avions pas encore la somme perçue suite à la vente des esclaves. Aussi préférais-je, dans un premier temps, assurer un nombre conséquent de pirates à bord avant de me lancer dans une course à l’armement. Et puis, le bon côté des choses, c’était que les pirates ne coûtaient pas grand-chose, à vrai dire. Il n’y avait aucun salaire à attribuer, tout payés qu’ils étaient à la prise d’un butin.

Mais pour le moment, le cambusier semblait avoir repéré un marchand, blanc de peau, encadré de barriques de liqueur. Assurément le genre de type à qui l’on voudrait bien vendre la cargaison de l’Estrella ; une tonne de vin de Molena, et cinq quintaux de fourrures des Irranas.

«Si tu parviens à négocier un prix avec le marchand d’esclaves de tout à l’heure, dis-moi quoi. Il serait bon de pouvoir envisager la somme que l’on gagnera, afin de ne pas avoir les yeux plus gros que le ventre lorsque viendront les premiers achats. Mais l’on peut déjà avoir un aperçu de ce que l’on récupérera rien qu’avec ce que contient la calle. T’as l’air plus doué que moi dans les affaires, ès qualité de cambusier. Vas-y, chef, apprends-moi les ficelles du métier. Bon, je sais déjà que la fourrure, c’est genre deux couronnes l’unité, c’est bien ça ? Et le vin, c’est une couronne le litre. Après, ça, ce sont les prix du côté de Sartosa et du vieux continent. Je ne sais pas ce que ça vaut ici. Après ça, j’aurais bien envie d’une bonne partie de dés. »
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La Sire - Maria Lucini, voie du Forban.
Profil: For 8 | End 8 | Hab 9 | Cha 8 | Int 8 | Ini 8 | Att 9 | Par 8 | Tir 9 | Mag 8 | NA 1 | PV 60/60

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