Von Essen (Essen) vs Helmut Markus Heldenhame (Vytrium)
« Dites, vous ne trouvez qu’il fait un peu frisquet pour ce qu’on avait jusqu’à présent ?
- Chi fait, mein cher ami, mais ch’est plutôt une bonne nouvelle, ja ?
- Vous savez, dans notre métier on apprend parfois à se méfier des bonnes nouvelles… »
Celui qui s’exprima avec autant de sagesse était nul autre que Helmut Markus Heldenhame, envoyé officiel de la comtesse Emmanuelle von Liebwitz dans les contrées sauvages et inhospitalières de la Lustrie. Officier-lieutenant du 347ème régiment de la milice de Nuln, l’homme avait reçu l’insigne honneur de sa classe dirigeante d’être nommé responsable-en-chef d’une périlleuse mission pour la gloire du Wissenland et de la dynastie von Liebwitz. Si ses camarades de régiment pouvaient le voir, à présent, sur le pont d’un navire, flanqué d’un sous-lieutenant de la milice et d’un doyen des chevaliers du Corbeau…
« Commandant Heldenhame, regardez.
- Qu’est-ce que…
- De la sorcellerie, mein Herr. Le Gardien des Trépassés nous ait en sa sainte garde. »
Le ciel se couvrait. A bord du navire affectueusement baptisé « Emmanuelle », un des marins éternua. Le vent qui s’était levé n’avait rien des courants chauds et humides qui gonflaient habituellement les voiles. Les eaux vertes de l’Amaxon empruntèrent subitement une teinte métallique aux nuages qui les surplombaient désormais.
« De la sorcellerie, Herr Ritter ? Soldats !! Tous à vos postes !
- De la chorchellerie, fous croyez ?
- Mes os vous le garantissent, offizier. »
Helmut vit alors son sous-lieutenant les saluer et s’en aller d’un bon pas afin de passer les hommes en revue. Il le savait courageux, simplement il était comme beaucoup de siens : particulièrement allergique à ce qui ne pouvait être proprement abattu d’un tir d’arquebuse. Inspecter la bonne conduite des troupes et s’affairer à instaurer la discipline en devenait alors le meilleur moyen de se préserver de frayeurs inutiles tout en se préparant à l’inévitable. En revanche, lorsqu’il commença, contre toute attente, à neiger à gros flocons, Heldenhame lui-même préféra demander :
« Herr Ritter, s’il y a quoi que ce soit que vous puissiez me dire à propos de ce curieux phénomène, dites-le maintenant, je préfère.
- Mes hommes sont parés à toute éventualité, commandant Heldenhame. Les vôtres aussi, je crois. Le reste est du ressort des dieux, et je prie que Mórr soit clément envers nous aujourd’hui. »
Helmut scruta le vieux chevalier puis s’en détourna, comprenant qu’il n’en tirerait rien de plus : il venait d’ailleurs d’avoir été plus bavard au cours de ces quelques minutes qu’au cours de tout le reste de leur traversée, c’est dire ! Le commandant regretta une fois de plus d’avoir laissé son pistolet à Nuln : celui qui lui avait été confié à bord avait, disons, moins été éprouvé que le sien. Entretemps, le phénomène de « sorcellerie » prenait de l’ampleur : presque tous, à l’exception notable de quelques chevaliers de Morr, grelottaient désormais à bord de l’Emmanuelle, qui n’avançait presque plus : on aurait dit que les eaux du fleuve avaient été muées en plomb. La neige qui tombait se mua peu à peu en une masse tourmentée par le vent, réduisant la visibilité en tous sens et s’introduisant dans les moindres replis des vêtements. Puis, alors que les yeux des marins ne savaient plus où regarder et que les cris du sous-officier bravaient à présent la bourrasque, Helmut aperçut à tribord quelque chose qui se mouvait sur le fleuve, un navire, bien moins gros que le leur…
Subitement, le vent se tut. À tribord, un navire à la proue élancée, une voile unique ; à son bord, des individus solidement bâtis, barbus et armés jusqu’aux dents : haches et boucliers ronds, reconnaissables entre tous.
« LEEEEEEEEEEEEEEERRROOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOYYYYY !!! »
Une bonne douzaine de crochets d’abordages se rivèrent au bastingage de l’Emmanuelle ; à son bord, cependant, une ligne d’hallebardiers se forma, l’autre derrière et la troisième - derrière encore. Quelques coups de feu retentirent ; il était malheureusement un peu tard pour charger les canons. Les guerriers nordiques franchirent la distance entre les deux navires avec une agilité qui faisait foi de leur soif d’en découdre. Helmut estima qu’ils ne pouvaient être aussi nombreux que son régiment mais il avait suffisamment entendu parler des prouesses martiales de ces guerriers pour croire à une victoire facile. Le doyen le somma de rester en retrait, ce à quoi Helmut consentit de mauvaise grâce : il avait bien plus l’habitude d’être dans le feu de l’action que dans la supervision.
Pendant quelques secondes, il se crut effectivement dans ce rôle si déplaisant de l’officier haut-gradé que les troupiers n’hésitaient pas à qualifier de couard. Lorsque quelque chose atterrit sur le gaillard d’avant à quelques pas de lui, il comprit le combat venait le chercher tout seul. Heldenhame dégaina son pistolet et tira.
Le mécanisme cliqua : l’arme n’était pas chargée. Son maître lui accordait décidément moins d’attention qu’au précieux objet laissé à des milliers de nœuds marins, là-bas, à Nuln. La chose qui venait d’atterrir se redressa : Helmut distingua un individu recouvert tout entier d’un épais manteau de fourrure, coiffé d’un chapeau de fourrure également. A la différence de tous les autres assaillants, celui-là était imberbe et nettement moins massif.
« Guten tag, noble wissenlander ! »
Le reikspiel de cet inconnu résonna telle une insulte à l’oreille d’Helmut. Nullement disposé à échanger des politesses avec l’ennemi, il dégaina son épée. L’individu rejeta son manteau en arrière : des habits de brocart rouge et noir, dans un style impérial quelque peu désuet ; à sa ceinture, une épée et une dague.
Helmut chargea l’individu avec toutes les intentions de lui fendre le crâne ; ce dernier répliqua presque la manœuvre, armant un coup d’estoc ; les deux combattants se croisèrent dans un bruit de crissement métallique : le cœur de l’impérial fut protégé par son armure, la tête de l’individu… intangible ? Helmut avait pourtant eu la conviction visuelle d’être passé au travers ! (Von Essen : 3T, 1B, 1 svg ; Helmut : tests réussis ! 3T, 1B, 1 invu !)
L’individu chargea à son tour ; au dernier moment, Helmut crut que ses yeux lui jouaient des tours : il y en avait deux à présent ?! (Helmut : tests ratés !) Il se défendit comme un beau diable, sentant une fois de plus l’héritage de Frédéric le Grand lui sauver la peau ; au terme de l’échange, il aperçut du noir sur le tranchant de son épée. (Von Essen : 4T, 1B, 1 svg ; Helmut : 3T, 1B, 1 PV !)
Von Essen jura intérieurement : la peste soit des soldats de métier ! Alors que ses maraudeurs faisaient leur affaire en contrebas contre des recrues protégées par du cuir bouilli, lui se retrouvait face à la fine fleur de l’Empire ! Par Nagash, la peste soit des armures !! (Von Essen : 4T, 3B, 3 svg ! Helmut : tests réussis ! 2T, 1B, 1 PV !)
Helmut vit son adversaire se figer telle une statue, puis se retourner dans un mouvement tellement fluide que l’impérial n’y comprit rien : une des amulettes qu’il eut empruntée à la comtesse vibra contre sa poitrine ; la dague qui fut à un cheveu de se ficher dans sa gorge rebondit sur celle-ci dans un bruit sec. (Von Essen : 4T, 3B, 2 svg, 1 blessure ignorée !) Von Essen sentit son moral vaciller ; il opposa la meilleure défense qu’il pût à la charge de l’impérial galvanisé (« Pour Sigmaaar !!! »), reculant à chaque botte adverse, atteignant rapidement le bastingage, esquivant pour récupérer son manteau de fourrure, se faisant cueillir d’un solide coup de taille qui l’envoya à terre. (Helmut : tests réussis ! 3T, 1B, 1 PV !!!)
Le coup de grâce de Helmut fut évité par un Von Essen qui, en quelques secondes, fit poussière les planches du gaillard d’avant sur lesquelles il se trouvait, tombant lourdement à l’étage en dessous. Le vampire s’empressa alors de trouver la sortie et fut presque pétrifié par l’odeur cuivrée du sang qui régnait sur le pont : les derniers maraudeurs de son drakkar se battaient comme s’ils venaient de débuter… Le chroniqueur prononça les mots incantatoires : le vent se remit à souffler comme sur les mers gelées de la Norsca. C’était le signal de la retraite. Une autre incantation releva les corps encore tièdes de maraudeurs et de soldats tombés précédemment : les hallebardiers durent faire face à cette nouvelle menace et ne purent que constater le départ précipité des chaotiques survivants. Helmut, qui avait bondi dans le trou à la poursuite de son ennemi, fut à son tour forcé de trancher dans des corps gorgés de magie noire, et crut entendre dans le blizzard qui s’amplifiait des malédictions prononcées à son égard…
Phy’lis (Prestenent) vs Alicia de Meissen (Alicia)
L’imagination est une corne d’abondance dont les contenus sont souvent déterminés par la hardiesse de l’individu qui en est doté. Ainsi un poltron imaginera souvent des dangers fictifs, alors qu’au héros s’ouvriront des solutions imaginables à tout danger bien réel. Phy’lis, cependant, n’était ni un héros, ni un poltron. Reconnu capitaine à bord du reaver, Phy’lis était avant tout un survivant.
Il reconnut immédiatement la jungle pour ce qu’elle était réellement : un paradis perdu. Tout ici respirait à la fois la vie et la mort, l’odeur des fleurs et celle de la putrescence, tout était chaos et harmonie à la fois. Les rares moments où les insectes cessaient de l’inquiéter, Phy’lis souriant à la vision qui s’offrait à lui : un monde vierge de toute corruption, ou plutôt un monde vierge de toute hypocrisie, de toute pitoyable imploration de pitié. S’ils n’avaient pas eu ce bénéfice d’emprunter cette vaste voie fluviale, Phy’lis en était certain, son équipage et lui-même seraient probablement déjà tous morts…
Quelque part non loin, là où tout était chaos et harmonie à la fois, là où les insectes eux-mêmes ne se privaient pas de vous dévorer à condition d’être en nombre suffisant, une colonne d’humains progressait vigoureusement le long du fleuve, ignorant tout des pensées secrète du capitaine du navire qu’ils voyaient au loin mais solidement déterminés à s’emparer dudit navire à la moindre occasion. À leur tête se trouvait une inquisitrice à la discipline de fer et au caractère bien trempé, Alicia de Meissen. Nulle créature aux alentours n’avait suffisamment de conscience pour réaliser toutes les prouesses que l’expédition impériale réalisait au quotidien dans cette jungle, ses membres guidés par… beaucoup de choses. Rêves de gloire, de richesses, devoir, honneur, dévouement à la cause, foi aveugle en une hypothétique protection divine, résignation, espoir, frayeur… Une chose était certaine : celle qui guidait ces soldats en tranchant la végétation à grands coups de dague (utile aussi pour trancher les serpents qu’elle croisait) inspirait suffisamment de crainte et de respect en même temps pour prévenir toute velléités de mutinerie. Des morts, des désertions… Enfin, pour ces dernières, dans cet enfer, c’était tout comme la mort… Alicia, quant à elle, était déterminée à mener cette expédition aussi loin qu’elle le pourrait : il fallait rapporter quelque chose, n’importe quoi, qui donnât un sens à toutes ces privations et qui glorifie l’Empire pour des décennies à venir.
Au crépuscule, le navire noir entama une approche prudente de la côte. Par hasard, c’était celle où l’expédition de feu le Feldmarshall Hoffenbach les attendait, soldats comme supérieurs tapis dans la végétation du mieux qu’ils le pouvaient. Leur odeur, en revanche, ils ne s’en inquiétaient pas : l’odeur de la jungle les poursuivrait toute leur vie…
Phy’lis atterrit lestement sur le terrain sablonneux qui précédait le mur végétal lustrien ; il inspira à pleins poumons ces humeurs d’humidité et d’humus. Theyclos le corsaire, également navigateur de l’équipage druchii, le vit se figer pendant un quart de seconde de trop, à ce qui lui sembla, mais il se garda bien d’en faire la remarque.
« Theyclos ? Fais signe aux hommes de se tenir aux aguets, discrètement.
- Aux aguets ? Discrètement ? Plus que d’habitude ? – le corsaire ne pouvait s’empêcher de faire étalage de son esprit face à celui qui ne s’en privait pas à longueur de journée.
- Fais-le. Maintenant. »
Le corsaire obtempéra avec un frisson. Phy’lis, quant à lui, huma l’air une deuxième fois afin de confirmer ses soupçons. Toutes ces effluves… Il ne devait qu’à son passé parmi les ombres cette capacité de déceler ainsi les nuances d’une odeur qui trahirait quelque chose de… civilisé… dans les parages.
À peine quelques cent coudées plus loin, tapie contre le tronc d’un arbre, Alicia plissa le regard : la nuit tombait, il fallait soit agir vite, soit attendre que les agneaux allument leurs feux et s’installent à leur aise. Ses hommes attendaient son signal. L’inquisitrice opta pour l’attente : ils avaient dû se démener à poursuivre ce navire au pas de course, tout le monde devait avoir les jambes en feu.
Puis, un anaconda jugea opportun de prendre par derrière le botaniste du collège ducal de Talabheim, seul civil de l’expédition, qui poussa un cri de terreur.
Merde.
« POUR L’EMPIRE !!! »
Le serpent fut exécuté d’un tir de pistolet bien ajusté, presque invisible à tous les soldats qui n’avaient compris qu’une chose : ils attaquaient maintenant. « Avant que l’ennemi ne comprenne à quel point nous sommes tous épuisés, glissa furtivement dans l’esprit de l’inquisitrice. »
Les elfes noirs de Phy’lis, cependant, étaient loin d’être au sommet de leur forme physique et mentale : le climat, les insectes et la malnutrition d’une expédition modestement préparée étaient là pour s’en assurer…
« Khaïne nous sourit, druchii ! S’ils n’ont plus rien à manger, alors nous mangerons leurs cœurs !!! »
La harangue de leur commandant les raffermit et les guerriers de l’équipage formèrent une ligne de fortune ; en face, ils apercevaient la masse informe d’impériaux s’extirper de la jungle telle une meute de chiens sauvages. Il ne fallut que quelques secondes pour que la mêlée s’engageât.
L’humaine la plus importante du lot était inratable, c’était celle qui criait le plus d’invectives à l’adresse de ses troupes et déviait toutes les attaques de ses guerriers avec le plus d’aisance, non, de précision, pensa Phy’lis. S’il pouvait l’éliminer rapidement…
Il se faufila parmi les rangs désorganisés des druchii, droit vers sa cible, dague effilée au clair.
L’inquisitrice bien trop aguerrie n’aperçut que trop facilement cet… adolescent ?!
Cette hésitation faillit lui coûter la vie, elle vit la dague dans sa main, comprit qu’elle n’aurait guère le temps d’esquiver ; sa dague à elle, cependant, était tout aussi proche…
L’acier s’enfonça, indifférent quant à la main qui le maniait et aux chairs qu’il malmenait. Ce fut cependant Phy’lis qui sentit la lumière quitter sa vision, alors qu’Alicia resta debout, cruellement blessée au flanc. (Phylis : 4T, 2B, 2 PV !! Alicia : 3T, 3B, 3 PV !!!)
Phy’lis se réveilla alors qu’il faisait nuit noire, il se sentait délirant et fut prêt à croire qu’Ereth Kial lui avait ouvert les portes de son royaume. Le visage mauvais de Theyclos en plein milieu lui fit réaliser que l’enfer devait certainement être plus doux que cela.
Ils avaient perdu le reaver.
La troisième chose que l’elfe noir constata, par ailleurs, c’était la présence d’une personne qu’il ne s’attendait absolument pas à rencontrer de nouveau.
Ignea, la Gardienne de l’Amaxon, se tenait agenouillée à quelques pas de lui, flanquée de deux guerrières amazones arborant des pelages de jaguars. Elle ne souriait pas.
Yelmerion d’Yvresse passe automatiquement la première journée !
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