[Anne de Lanneray] Des comptes à régler

La Bretonnie, c'est aussi les villes de Parravon et Gisoreux, les cités portuaires de Bordeleaux et Brionne, Quenelles et ses nombreuses chapelles à la gloire de la Dame du Lac, mais aussi le Défilé de la Hache, le lieu de passage principal à travers les montagnes qui sépare l'Empire de la Bretonnie, les forêts de Chalons et d'Arden et, pour finir, les duchés de L'Anguille, la Lyonnesse, l'Artenois, la Bastogne, l'Aquilanie et la Gasconnie.

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Armand de Lyrie
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par Armand de Lyrie »

La sensation la plus marquante au moment où j’ai enfoncé ma dague dans la gorge de Margot, c’est à quel point la lame est entrée facilement. Il y eut un tout petit son lorsque l’acier a percé sa trachée, comme une sorte de « ploc » inaudible, le même bruit que lorsqu’on enfonce un couteau dans du gibier cru. Mais c’était tellement facile. Il y a pourtant bien des éléments qui ont résisté à ma poigne – il y a une artère, des organes, de la chair, jusqu’aux cervicales derrière. Jamais, de toute ma vie, n’ai-je poignardé quelqu’un. Pas un autre être humain. Les passes d’armes bien chevaleresques ne comptent pas – on est armurés de la tête aux pieds comme des scarabées, gorgerin de plate-et-maille compris, et on évite les coups dans les endroits justement trop dangereux. C’est pas la même chose lorsqu’on est au-dessus d’une jeune femme, frêle, mince, désarmée, et totalement à notre merci. La Miséricorde est une dague qui a été inventée pour mettre à mort ; ce n’est pas une arme faite pour combattre, les quillons sont bien trop courts. Mais la lame, elle est longue, très longue, elle est faite pour glisser entre les creux des os, sous une aisselle, ou dans la fente d’un casque, pour lentement perforer et écarter les tissus et les chairs avant de trouver un organe à ouvrir et assurer une blessure mortelle.

J’ai enfoncé mon couteau jusqu’au fond de la gorge de Margot. Et immédiatement après le « ploc », le deuxième son qui a résonné dans mes oreilles, c’était une sorte de gargouillis aigu, le même bruit que fait du gruau en train de trop-cuire sous une marmite. Les doux yeux de Margot se sont écarquillés. Ils se sont posés directement vers moi, en exprimant une demi-douzaine d’émotions à la fois – aucune colère, pas de froncement de sourcils, c’est trop soudain pour qu’elle puisse être en colère. De la surprise, par contre… Non. De la sidération. De l’incompréhension. De la peur, aussi. De la douleur, surtout.
Elle a entrouvert la bouche, peut-être pour tenter de dire un mot. Mais du fer trempé obstruait toute sa gorge. Un léger filet de sang carmin a giclé sur ses lèvres roses. Un trait de salive, avec quelques glaires, est remonté sur sa langue. Ne pouvant rien dire en exhalant depuis ses poumons, je sentais que Margot m’implorait de répondre à une question avec seulement son regard :
Pourquoi ?



Si la destinée me permet de quitter ce putain de Temple en vie, c’est une question qui me hantera peut-être pour longtemps. C’est une question qu’on sera très prompt à me poser, surtout si je reçois la semonce de mon Duc pour venir m’expliquer – c’est qu’il y en a des putains d’explications à fournir. Je saurais même pas par où commencer.
Mais allez, pourquoi ? Pourquoi ai-je enfoncé mon couteau dans la gorge de Margot de Ternant ?

Il y a mon devoir. Il y a ce que j’ai juré en embrassant mon épée, au moment de recevoir mon fief, et lorsque j’ai prêté serment de suivre le Vœu de Saint-Radémond de Quenelles ; Honni Soit l’Abominable. Ma plus grande erreur, le tout premier moment où j’ai failli, est lorsque j’ai omis de déclarer à mon suzerain la Corruption qui gangrenait le dos de Margot. J’avais peur pour sa vie. J’avais peur qu’elle périsse au bûcher. Je croyais les prêtresses de Shallya assez doctes et assez pieuses pour la garder du mal ; Mon silence, pour ne pas dire mon mensonge par omission, a provoqué indirectement tout ce que je vois autour de moi. Je suis un peu coupable, moi aussi, et à présent, en enfonçant mon couteau dans Margot, j’agis en chevalier héroïque. Même si c’est une femme sans armes que j’occis. Même si c’est une femme que j’ai désiré.

Mais tout ça c’est un tas de conneries. Tout ça c’est ce qui est bon à dire, ce qui est arrangeant – la version officielle. Celle devant laquelle me retrancher face aux témoins, face aux barons et aux sujets de Sa Majesté Louen. Ce qui me permet d’encore maintenir la fiction selon laquelle je suis dans le camp des méritants, et le descendant des Compagnons. Autant le dire directement ; Des clous.
Si j’étais vraiment résolu et guidé par le devoir, ce serait une autre mine que j’offrirais à Margot. Un regard plus déterminé. Peut-être une lèvre retroussée, ou des traits crispés. Mais non. Mes sourcils sont obliques sur mon front, ma mâchoire pendante, ma main bien légère. Et tout ce que Margot pourra lire dans mes yeux, comme toute réponse muette à sa question soupirée, c’est un mélange de tristesse et de regret.

Pourquoi ai-je poignardé Margot de Ternant ? Pourquoi ai-je poignardé ma meilleure amie ? Mon amour d’enfance ? Celle avec laquelle je rêvais de danser jusqu’à l’autel ?

Parce que ma mère me l’a demandé.

Il n’y a aucune autre raison. Aucune autre justification pour mon geste. C’est tout. Ma mère était en colère. Une colère sourde, violente, bonne à faire bouillir mon sang. Elle voulait tuer Margot de Ternant, alors, j’ai tué Margot. Et il n’y a aucune autre cause qui a pu peser dans la balance de mon for. C’est fini. Je me suis abandonné à elle.
À moins que je fusse déjà fini aux pieds des escaliers de la salle d’apparat du donjon de Lyrie, lorsque, directement face à elle, n’ayant plus qu’une douzaine de marches à gravir pour la trancher avec ma bien-nommée « Matricide », je décidais plutôt d’implorer sa pitié et confiait un amour dégénéré. J’en ai voulu à Mélaine. Maintenant une part de moi se rend compte qu’elle aurait dû me tuer à cet instant même.
Ou bien peut-être que je suis perdu depuis bien plus longtemps que ça. Depuis que j’ai huit ans, le jour où elle est venue se forcer sur moi sous mes draps pour la première fois. Ou depuis que je suis bébé, et qu’elle décidait de me lier éternellement à elle en demandant à sa servante de nous poignarder tous les deux avec Symbiose…



J’ai senti une douleur dans mon cœur. Je me suis recroquevillé sur moi-même. J’ai levé mon bras droit, et je me suis mis à grimacer. Comme une brûlure gagnait mes organes. Je sentais quelque chose me ronger, un peu comme si j’étais recouvert de ces essences alcalines que les lessiveuses utilisent pour blanchir leurs draps ; J’ai râlé, d’abord grave, puis carrément aigu lorsque j’ai senti la source de chaleur percer mon dos, chercher un endroit où fuir à travers mon corps. Ma bouche s’est ouverte pour clamer un juron que Margot m’avait appris il y a dix ans, puis je me suis mis à hurler de douleur.
Par le trou qu’avait laissé Constance en me poignardant avec la rapière, j’ai senti quelque chose filer. Et, recouvrant vite mon propre hurlement, un Cri, un vrai Cri, strident, abominable, retentit dans tous la pièce. Mon sang s’en glaçait. De la chair de poule recouvrait tous mes membres. Et en levant les yeux, je voyais, au-dessus de moi, tout ce qui restait d’années d’intrigues, de complots, de trahisons, de pactes démoniaques et d’offrandes noires qu’avait infligés mon père au Duché de Saint-Frédémond ;
Toute la haine viscérale du couple maudit de Lyrie-Lanneray, forçant toute l’assistance à la soumission, transformant leur délicieuse orgie en cauchemar tout éveillé.

J’espérais de tout mon cœur qu’où qu’il soit, Armand VII de Lyrie puisse sourire de voir ainsi comment son traître de fils avait finalement décidé de revenir enterrer la descendance de sa maîtresse félonne.

« Toi et moi, maman. »

Je descendais mes yeux vers Margot alors que je tirais la Miséricorde hors de sa gorge. Mais une peur panique s’empara de moi en découvrant une lueur blanche colmater la brêche. J’agitais la tête de gauche à droite, à toute vitesse.

« Non... Non ! »

Shallya soit maudite. Comment peut-elle faire ça ?! Comment cette chienne de colombe peut tolérer la vie d’une impie ?! Comment peut-elle permettre à une engeance horrifique de naître ?!
Pas après tout ça ! C’est moi qui aie le plus souffert pour elle ! J’ai versé tout mon sang dans le domaine de Cuilleux, j’ai menti à mon Duc pour Derrevin, j’ai défendu ce village de gueux la servant devant le sire Maisne ! C’était pas assez ?! J’aurais dû encourager Brandan à renverser les murailles, et jeter sa sergenterie de sous-chiens violer et égorger toutes ces prêtresses ! Je me suis tourné plein de rage pour voir Alys, cette immonde salope, la seule à ne pas paraître choquée par le hurlement spectral de ma maman.
Je m’apprêtais à lui répondre, lorsque Thecia, l’ancienne roulure de mon père, me défia d’un coup de dague. Le court espace d’une seule seconde, je dus résister à la pulsion malsaine de me jeter sur elle pour lui poignarder le cœur et lui faire fermer sa gueule – mais elle n’a aucune importance.

C’est Alys le danger. C’est elle, la pouffiasse qui est en train de permettre à Margot de mettre au monde une chose. C’est elle la meneuse du troupeau. Celle qui a tué le sire Binet. Celle qui mène la bande. Celle qui a les pouvoirs de faire du mal à ma mère. Celle qui doit payer pour toutes ses fautes – et surtout ses offenses envers moi.

Alors, j’ai offert à Thecia un sourire dément, et un simple clin d’œil enjôleur. Avant de tourner mon regard vers Alys.

« Révérende mère ! »

J’ai joué du couteau pour mieux enserrer la dague, et j’ai chargé comme un furieux, détalant autour de l’autel pour me jeter vers elle.

« Tu vas hurler ! »

Aucune pitié. Aucune retenue. Il faut que je la tue. Pas que je la lacère, pas que je la poignarde ; que je la tue. Je me jette sur elle comme un limier, directement vers sa gorge. Quitte à tirer sa robe. Quitte à tirer ses cheveux. Quitte à la tuer le plus salement au monde.
Il faut que je protège ma mère, et pour ça, elle doit crever.

Utilisation de ma mineure pour charger sur Alys, et de l’action majeure pour faire un coup précis dans sa trachée.
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 05 oct. 2020, 15:53, modifié 1 fois.
Raison : 6 xps / Total d'xp : 63
Fiche : wiki-v2/doku.php?id=wiki:fiche_armand_de_lyrie
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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[MJ] Katarin
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par [MJ] Katarin »

N'accordant aucune importance à la jeune prêtresse en robe jaune qui se dirigeait droit vers lui avec sa dague en main, Armand lui tourna le dos pour foncer droit vers Alys, contournant l'autel à toute vitesse pour pouvoir lui planter son acier dans la gorge.

- Armand, je ne suis pas votre ennemie.

Elle semblait sincère. Alors qu'il courait droit vers elle, miséricorde en main, elle n'avait pas esquissé le moindre geste pour tenter de se défendre. Sa voix était calme, mesurée, presque même patiente et attentionnée. Comme si elle s'adressait à un patient de son hospice, un malade qu'elle tentait de rassurer.

Quand bien même il n'était pas un mage, la perception d'Anne l'assura que le pacifisme de la prêtresse n'était qu'un faux semblant : elle usait de magie divine pour paraître meilleure qu'elle ne l'était, tentait de tromper Mais la grande prêtresse se décida finalement à réagir à la dernière seconde : reculant par reflexe d'un pas, elle raffermit la prise sur son bâton en bois et l'utilisa non pas pour frapper Armand ou parer son coup, mais simplement le repousser loin d'elle.

Il ne fallut guère davantage pour laisser le temps à Thecia de rejoindre sa supérieure et son ennemie : hurlant de manière hystérique, elle n'hésita pas même un fragment de seconde avant d'abattre sa propre dague sainte vers le dos d'Armand. Celui-ci se retourna pour tenter de parer le coup, mais sa dague miséricorde n'était pas conçue pour des manœuvres martiales qu'il accomplissait habituellement avec son épée bâtarde : il fut trop gauche et trop lent, et le poignard de la sœur se planta profondément dans son omoplate. Grognant de douleur, il la repoussa d'un coup de pied avant de se tourner à nouveau vers Alys, son objectif meurtrier inchangé.

- Armand, je vous en conjure écoutez-moi.

Mais Armand n'écoute pas. Il tente le tout pour le tout : un coup d'estoc droit vers son visage. Mais là encore, Alys lui réserve une mauvaise surprise : d'un mouvement aussi vif que précis, elle abat son bâton avec force sur la lame qui file vers elle, provoquant un impact si violent qu'il désarme Armand. La miséricorde s'échappe entre ses doigts endoloris, et tombe sur le sol de pierre avec fracas.

Face à cette défense inattendue, Armand n'a même pas le temps de d'improviser une nouvelle attaque : du corps d'Alys se met à émaner une lumière divine d'une blancheur immaculée, rayonnant avec tant de force qu'elle l'aveugla momentanément. Forcé de détourner le regard, il ne put que constater comment la situation dégénérait en sa défaveur autour de lui. Si la foule terrifiée restait tétanisée, des remous en son sein trahissaient la progression d'individus qui avaient eu le courage de surmonter le cri funèbre pour désormais jouer des coudes pour rejoindre l'autel. la plus proche, qui ne saurait tarder à se dégager une route jusqu'à lui, il la reconnut sans mal tant sa silhouette colossale dépassait de la masse de paysans bossus : c'était Maussade, la guerrière muette. Derrière Armand, Thecia reprenait également son souffle, et se préparait à lui bondir à nouveau dessus avec son poignard. Dans les airs, la banshee continuait d'incanter, psalmodiant dans une langue incompréhensible tandis que d'inquiétantes volutes noirâtres s'aggloméraient autour d'elle et semblaient déformer la réalité elle-même... mais il n'y avait toujours aucun résultat palpable à l'horizon. Et sur l'autel, son fils continuait sa lente progression à travers les entrailles et la peau de Margot : c'étaient désormais six griffes noires qui tailladaient la chair, et du ventre absurdement distendu de son amie d'enfance s'échappait lentement une abomination digne des pires histoires d'épouvante. Car derrière les appendices de chair rosie et les griffes en chitine noire se dévoilait un abdomen énorme, sorte de poche orangeâtre gonflée qui peinait à s'extirper pleinement du corps de Margot. La jeune femme quant à elle avait les yeux exorbités, des larmes fuyant ses pupilles folles qui bougeaient dans tous les sens, et la bouche grande ouverte dans une mimique absurde de plaisir, de souffrance et de terreur mêlée. Elle semblait vouloir crier aussi fort que possible, mais avec sa gorge charcutée et recousue par la magie divine, aucun son ne réussissait à s'en échapper.

Coucou
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- Thecia, ça suffit.

La jeune prêtresse se figea suite à cette injonction de sa supérieure. Alys darda ensuite ses prunelles sur le chevalier désarmé pour s'adresser à lui, quand bien même la lumière rayonnante qui émanait d'elle empêchait son interlocuteur de lui rendre la pareille.

- Armand. "Si votre corps obéit à ceux qui susurrent à vos oreilles, cela reste votre choix et donc votre faute que de les avoir écoutés". C'est le sermon que je vous avais fait la dernière fois que nous nous sommes vus. Je vous supplie d'y prêter attention aujourd'hui car Armand, vous êtes devant moi possédé par un esprit maléfique. La chose en vous, elle vous manipule, elle altère votre perception pour que vous accomplissiez ses desseins et lui cédiez votre âme. Ce que vous voyez n'est pas vrai, c'est cette créature qui vous trompe pour ses propres intérêts égoïstes, qui manipule la réalité pour faire de vous son pantin. Oubliez tout ce qu'elle a pu vous murmurer, les visions qu'elle a pu vous montrer, les sentiments qu'elle a pu vous faire miroiter, ne vous fiez qu'à vos souvenirs antérieurs à sa présence car tout le reste n'est qu'un voile destiné à vous rendre docile. Vous pouvez encore lui résister, mais je ne peux pas sauver quelqu'un qui ne désire pas être sauvé. Que Shallya vous donne la force Armand, de retrouver le chemin de la pureté.

Et quand bien même regarder dans sa direction restait difficile tant la prêtresse rayonnait de pureté, Armand l'aperçut retirer une main du manche de son bâton pour la lui tendre, paume ouverte, dans un geste d'invitation pacifique.




Ordre d'ini :
Banshee - Alys - Armand - ??? - ??? - Thecia



Banshee incante un sort.
Alys lance "Aura de paix" : utilisation de l'ingrédient , donc difficulté sur FOI+2 = 17.
==> 7, réussi de 13 (+3 en degré de réussite grace à la puissance divine).
La banshee tente une dissipation : nécessite deux jets car magie vs foi : 2 et 6. Je garde le plus mauvais, 6, ce qui fait une réussite de 12 (+3 en degré de réussite grace à la MA) ==> Raté.

Pour attaquer Alys, Armand doit réussir un jet d'INT-4.
==> 4, réussi tout juste ! Pas de malus pour Armand qui attaque.

Armand attaque : je ne peux pas t'accorder le bonus de la demi-action "charger" car elle nécessite l'absence d'obstacle : hors tu dois contourner l'autel pour atteindre Alys. Ta demi-action sert donc basiquement à la rejoindre. Du reste tu as un malus de 3 pour viser sa tête :
Jet d'ATT : 17, raté.

??? progresse dans la foule : jet de FOR pour tracer = 12, avec le malus de peur, c'est raté.
??? progresse dans la foule : jet de FOR pour tracer = 14, avec le malus de peur c'est raté.

Thecia : demi-action pour rejoindre Armand, pas de bonus de charge car doit aussi contourner l'autel.
Jet d'ATT : 7 réussi tout juste avec la peur.
Puisque Alys ne te frappe pas, que tu savais que Thecia allait arriver derrière toi, je suis gentille et ne vais pas te donner de malus de parade du à l'encerclement :D Néanmoins, c'est une dague donc l'attribut rapide file un malus de 2.
Jet de PAR : 18. Ah bah si tu fais pas d'effort aussi...
==> dégats = 16+13+1-9-3 = 18 de dégâts, localisation 18 = dos. Fallait pas la sous-estimer et laisser ton dos ouvert :D Il te reste 49 pvs.

==> Info rp : Armand a l'étrange impression que la banshee a elle aussi souffert de ce coup. Info rappelée par mp.

Banshee incante un sort.

Alys lance "Blancheur éblouissante" : 17, raté.

Armand attaque encore en coup précis (malus de -3)
6 = réussi de 4 !
Jet de parade de Alys : (malus de 2 pour le rapide de la dague, mais bonus de +2 donné par l'arme Baton) = 1, réussite critique. Ah...
==> Armand est désarmé, sa dague tombe au sol (nécessite demi-action de la récupérer) J'ai fait trois jets foireux dans le canal de lancés de dés parce que je voulais un sys d'éloignage de la dague en mètres, mais en vrai c'est débile, un coup de bâton dans la dague, l'acier il va pas faire un vol plané à travers le temple c'est bon.

??? deuxième jet de FOR : 3, réussi ==> Sur le tour, a avancé de 2. Est encore à 3 tours d'Armand.
??? deuxième jet de FOR : 17, raté ==> Sur le tour, a avancé de 1. Est encore à 6 tours d'Armand.

Banshee lance Nova de Mort, malus de -2 en MAG car légendaire et 3 en MA ==> 15, raté de 2...

Alys lance "Blancheur éblouissante" : 6, réussi. Durée 1d4 tours = 3. Désormais Armand a -2 PAR, ATT et TIR sur les trois tours à venir car la rétine flinguée par la lumière éblouissante qui a subitement émané de Alys ^^°

Test d'empathie d'Armand vs CHA / jets cachés : Rien d'intéressant à en tirer.

Et beh.

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Armand de Lyrie
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par Armand de Lyrie »

Dans les romans de chevalerie, quand le preux héros aux joues creuses se jette sur son infâme ennemi, il peut pas s’empêcher de l’ouvrir. C’est toujours dans les moments comme ça où le troubadour fout dans la gueule de notre héros quelques bons mots, des phrases aussi assassines que sa lame, des promesses grandiloquentes et autres aveux de services.
Je ne me suis jamais jeté sur quelqu’un pour le tuer – jamais avec une véritable intention meurtrière. Je vous le jure. Jamais je n’ai souillé une lame de sang. Blessé quelqu’un dans un tournoi ? C’est certain. Terrassé quelques gobelins ? Je suis passé dans l’Orquemont face à cette merdaille, pour ce que ça vaut.
Alors je vais vous dire ce qui s'est échappé de ma bouche lorsqu'est venu le moment pour moi de me jeter avec toute ma sauvagerie sur une Alys qui demeurait impassible. Je vais vous dire le seul mot qui est sorti de ma gueule barbouillée du sang de ma Margot, avec mes cernes, mes larmes, et ma gorge sèche :

« CRÈVE ! »

J’ai hurlé ça à en postillonner, comme un de ces clébards errants qu’un bourreau doit finir au croc ferré pour rédimer ses basses œuvres. J’ai serré ma poigne contre la dague, et j’ai chargé une femme âgée vouée à un culte pacifiste, à une Déesse répugnant le sang.
Et j’ai raté.

Peut-être justement parce que j’ai attaqué trop vite, et trop férocement. Peut-être parce que face à un chevalier en armure, comme Evrard, comme l’insane de Cuilleux, comme mon propre aïeul dans ce putain de mausolée, j’ai le réflexe de maintenir ma garde, de préparer la riposte, et pas contre un adversaire frêle comme Alys.
Ou peut-être juste parce que je suis taré. Parce que la haine de ma mère bouillonne en moi. Parce que je suis crevé. J’en sais rien. Mais sous mes yeux, la grande-prêtresse se dérobe, m’éloigne. Je recule, me redresse, crispe mon dos ;
Et c’est là que je reçois un coup de poing dans l’omoplate.

Quand vous êtes poignardé, c’est ça que vous ressentez : un coup de poing. Il n’y a aucune douleur sur le coup. Quelque chose agit en vous, quelque puissance trompeuse, peut-être un reste de bassesse humaine, qui vous fait sous-estimer vos blessures. J’ai râlé, dans un cri, avant de me retourner pour donner un coup de taille sans aucun effet vers Thecia qui avait eu bien assez de temps pour retirer sa lame de mon doublet perforé, et ainsi être bien à l’écart de ma portée.

« ARGH ! Sale CHIENNE ! »

C’est marrant que ce soit la première insulte qui soit parvenue jusqu’à mes lèvres. Mon registre est très canin. Quoi de plus déshonorable dans mon beau pays que d’être poignardé dans le dos ?
Attaquer des femmes c’est pas mieux. Mais on en est plus à une forfaiture près ces derniers jours. Je crois que ça fait longtemps que je ne raconte plus des anecdotes sur ce qui dans ma merveilleuse nation est licite et ce qui est infâme – ça va faire un petit moment que j’ai chuté du piédestal sur lequel Son Altesse le Duc m’avait permis de grimper.
Remarquez que c’est le même piédestal qu’ont bâti maman et Margot pour moi. Mais on va y venir tout de suite.

Alys est juste face à moi. Encore une fois, elle tente de me raisonner. Pourquoi ? C’est stupide. Il faut vraiment être le dernier des abrutis pour demander à quelqu’un de visiblement en train de vriller, et armé qui plus est, d’en revenir à son bon sens. Il faut être le dernier des abrutis sorti d’une fosse à pieux des tumuli de Cuilleux.
Je veux la faire payer. Je veux la faire payer. Pourquoi tant de haine ?
Pour maman.
C’est tout. Ma mère veut tuer, Alys peut empêcher ma mère de tuer, alors je vais tuer. C’est le seul sentiment qui me traverse. Il est magnifique par sa pureté.
Alors je tourne ma lame, et je me jette dans un sprint brutal, m’imaginant déjà comment je vais accomplir ma promesse de la faire hurler ; Comment je peux tirer sur sa robe de bure, comment je peux déchirer ses cheveux pour libérer sa gorge. Ça reste très théorique. Je peux même pas me vanter d’avoir déjà vu des compagnons de boucherie le faire, vous vous doutez bien qu’avec mon éducation ça aurait été mal vu. Même à la chasse, on avait des gueux pour faire le boulot salissant, pour se charger d’avoir les cauchemars à se remémorer comment la bête s’est débattue, a eut des hurlements pitoyables dans ces derniers instants – vais-je éprouver la même sensation ? Je n’ai jamais tué. Je n’ai jamais tué. J’ai juste vu Casin lentement se désagréger sous mes yeux, avec des filets de magie noire émanant de mes propres mains, tandis qu’il hurlait à la mort en se débattant au sol – mais ça compte pas, pas vrai ?

Mais ça restera théorique. Parce qu’Alys ne se laisse pas tuer. Parce qu’Alys manipule adroitement son simple bâton, et d’un coup de taille exercé, peut-être qu’elle-même s’étonne secrètement de son habilité, voilà que je suis frappé dans la main, et que je contreviens à la première règle que mon maître d’armes m’avait pourtant répétée :

Ne lâche pas ton épée. Ne lâche pas ton épée. Il aboyait ça, ce chien pédéraste, je peux encore sentir sa putain d’haleine d’ail quand il tonnait cette sempiternelle instruction. Ne lâche pas ton épée, tu es un homme mort si tu lâches ton épée.

Et assurément, j’ai lâché ma dague. Je l’ai sentie me filer entre mes doigts, et j’ai entendu le tintement métallique alors que la lame a touché la dalle du sol.
C’est pas grave.
On m’a entraîné, je suis un chevalier, j’ai des automatismes. Je ne suis pas perturbé. Un putain de roc.
Je pose mon pied gauche sur la dague, fermement, de manière à la contrôler, de manière à empêcher quiconque de se jeter dessus. Et je me place dans la même posture que j’ai affichée devant Rémon et sa horde de gueux dans cette putain de taverne ; Poings fermés, garde relevée, comme si j’allais affronter un autre solide laboureur de six pieds et treize pierres dans l’instant.

Mais la femme frêle en robe se contente de me regarder, de bouger ses lèvres pour mimer une quelconque litanie silencieuse. Et tout ce qui suivit fut un éclair. Une profonde lueur blanche qui envahit tout mon champ de vision. L’espace d’un instant, toute mon agressivité se dissipa – non pas que j’étais calmé, mais imaginez plus la stupeur du même chien errant qui a la rage, quand le bourreau lui file un coup de pelle sur sa truffe. Je fais la même tête. Béat, la bouche ouverte, à battre rapidement des cils comme si mes paupières allaient arranger quelque chose.

« Thecia, ça suffit. »

Je regarde à droite pour me tourner vers Thecia. Enfin, du moins, je me tourne vers là où je crois voir Thecia, car présentement tout ce que mes yeux affichent c’est une putain de lueur blanche.
Pourquoi rappelle-t-elle sa chienne ? Pourquoi m’offre-t-elle une nouvelle chance ?

Mes yeux s’habituent difficilement à l’éclair. Mon cerveau semble enfin comprendre que la lumière provient d’Alys, et uniquement d’Alys. Je peux donc tendre une main – c’est facile quand on est désarmé – pour la placer près de mes paupières, et ainsi regarder vers l’autel le superbe résultat de ma charge.
Maman est toujours là-haut, en train de flotter. Mon adorable mère est une espèce de monstre sorti d’Outre-Tombe, une insulte à Morr en train d’essayer d’appeler des maléfices pour arracher les corps agonisants de ses victimes.
Margot est toujours allongée, en train de se tordre. Ma petite amie est déchirée par une espèce de monstre boursouflé, chitineux, qui ne peut que m’évoquer la vision des Déréliches m’offrant mon père en train d’être lentement étouffé par des tentacules fort similaires.

Voilà. C’est là où j’en suis.

« Armand. "Si votre corps obéit à ceux qui susurrent à vos oreilles, cela reste votre choix et donc votre faute que de les avoir écoutés". C'est le sermon que je vous avais fait la dernière fois que nous nous sommes vus. Je vous supplie d'y prêter attention aujourd'hui car Armand, vous êtes devant-
Ferme-la... »

J’aurais aimé hurler ça. J’aurais aimé la faire se taire, dans quelque cri bestial. Mais c’est pas sorti comme le râle héroïque du héros. C’est sorti comme un instrument de musique mal accordé, aigu et cassant.
J’obéis encore avec le conditionnement chevaleresque de sire Quentyn. Il faut que je me tire du guêpier.
Alors, la dague qui est sous ma botte, je l’envoie dans un coin vers lequel je pourrai lentement reculer. Le meilleur moyen de m’en emparer le plus furtivement possible. J’entends plus que je n’aperçois la dague filer sur le sol, je n’ai qu’à lentement reculer vers l’arme tout en faisant face aux deux prêtresses – ça serait con de pas profiter du soudain avantage qu’Alys m’offre.

« -moi possédé par un esprit maléfique. La chose en vous, elle vous manipule, elle altère votre perception pour que vous accomplissiez ses desseins et lui cédiez votre âme. Ce que vous voyez n'est pas vrai, c'est cette créature qui vous trompe pour ses propres intérêts égoïstes, qui manipule la réalité pour faire de vous son pantin. Oubliez tout ce qu'elle a pu vous murmurer, les visions qu'elle a pu vous montrer- »

Et c’est là, alors que je fais deux longs et lents pas félins derrière moi, que j’ai soudain un petit problème.

Mon dos.

Je vous ai dis que quand on se fait poignarder, on n’a pas mal. C’est pas tout à fait vrai. On n’a pas mal sur le coup. Les quelques secondes après la lacération, on est dans un état parfait, bien conservé.
Mais là, mon corps vient de m’apprendre ce qui s’est passé. La chair sanguinolente est assaillie. J’essaye de passer une main là où j’ai été frappé – comme c’est pile sur les omoplates, bien trop haut, je dois ressembler à une espèce de marionnette pataude. J’arrive tout de même, avec le bout de mes doigts, à sentir quelque chose de poisseux qui inhibe la fabrique de mon vêtement.
Je gémis. Un gémissement de couard, pour rester dans le lexique des chiens. Je me sens soudain très essoufflé, alors qu’Alys continue sa diatribe religieuse.

« -les sentiments qu'elle a pu vous faire miroiter, ne vous fiez qu'à vos souvenirs antérieurs à sa présence car tout le reste n'est qu'un voile destiné à vous rendre docile. Vous pouvez encore lui résister, mais je ne peux pas sauver quelqu'un qui ne désire pas être sauvé. Que Shallya vous donne la force Armand, de retrouver le chemin de la pureté. »

Les sermons religieux ont beaucoup d’emprise sur moi. Enfin, je crois. Une partie de moi. Un fragment d’Armand de Lyrie, un que ma mère ne s’est pas encore amusée à aller briser en morceaux, est encore très influençable quand il y a tous les oripeaux divins. L’encens, les vitraux, les versets. La force avec laquelle Alys a déjà su me faire plier devant elle. Avec laquelle Mélaine m’a guidé. Avec laquelle un oblat de Morr m’a enseigné l’importance de l’Éternité qui nous contemple.
C’est puissant la religion. Pas parce que les Dieux existent, ça c’est secondaire – parce que vous voulez croire qu’ils existent. Parce que vous avez envie de croire, avec toutes vos fibres, tout votre être, qu’il y a quelque chose, quelque part, qui vous aidera à un moment.

Comment Alys peut-elle encore parler de Shallya avec les horreurs qui m’entourent ? Avec ce que je vois sortir de Margot ? Elle parvient à me faire douter. Oui, elle y arrive. Elle arrive à ensemencer des putains de germes de doute…
…Et en même temps, c’est trop dur. C’est trop dur. Ma mère aussi a passé un moment à me démolir. Mais à me démolir avec tendresse. Ça fait tellement longtemps que j’ai plus entendu un chant en Classique. Mais j’ai encore la berceuse de ma mère dans mes oreilles. Je pleurais, et elle m’a chanté une berceuse. J’ai encore les paroles qui défilent, là, en ce moment même…

Allez, amusons Alys. Jouons son jeu. Ne nous fions donc qu’aux souvenirs d’avant le moment où j’ai hurlé à la mort, après que la Rapière m’ait déchiré mon âme, sur le sol froid du mausolée de mon ancêtre.

Il y avait ce putain de tableau. Il y avait ce putain de tableau. Et Margot. Et la marque autour de Margot…
…Et mon père, qui en a aussi été victime. Mais il méritait. Mais c’était mon père.
Il y avait Mélaine. J’ai prêté serment sur la Vertu de la Pureté. J’ai juré de servir la Dame. Mais Mélaine m’a menti. Mélaine était prête à me tuer. Mais Mélaine avait raison. Elle aurait dû me tuer.
Qu’est-ce que Margot était belle. Qu’est-ce qu’elle est belle. Qu’est-ce qu’elle est haïssable. Elle était fière de moi pour ne pas avoir fini comme mes parents. Mais je suis mes parents. J’ai été avec mes parents pendant vingt putains d’années de ma vie. Vingt ans.
Vingt ans à torturer Triboulet. Vingt ans à fanfaronner sur des tournois. À humilier Quentyn pour ce qu’il m’a fait subir durant ma pagerie. À courtiser des jeunes femmes avec mon charme, et à me forcer sur elles si elles osaient me rabaisser en me refusant. À chanter avec des amis, à boire et danser jusqu’à l’aube sur des lices de tournois, puis à être enragé au point de vouloir ruiner leurs vies lorsqu’ils me faisaient mordre la poussière lors de nos joutes.
Et puis j’ai été sauvé. Sauvé par des croyances, par des superstitions. Par des paroles de petits hommes malingres en robes de bure, par la crainte de puissances invisibles. Je me suis mis à avoir peur de mes parents. Et à sentir la colère divine de femmes – la Dame, Shallya, Véréna, c’est toujours des femmes… Morr le Sombre a au moins de la retenue froide dans son ire. Je hais les femmes…

J’ai dénoncé ma mère. C’était le nom le plus dur à donner au Duc. Tuer son propre père, c’est dur, mais bizarrement compréhensif. Un père peut voir son fils le trahir, et pourtant le comprendre. Il y a que des hommes qui soient capables de relations aussi barbares.
Mais ma mère ? Je l’aime. Elle m’a violé. Elle était incapable de maîtriser son propre esprit – je le sais, j’étais dedans. Elle est folle à lier. Elle souffre, depuis… Peut-être depuis toute petite. Et plutôt que de souffrir toute seule, elle a décidé de partager ses souffrances avec moi, de m’abaisser à son niveau, et elle a appelé ça de l’amour. Je devrais lui faire des reproches pour ça. Mais c’est ma maman. Elle s’est sacrifiée pour moi. Je fais tout ce que je peux, mais je ne parviens pas à la haïr.
Et là en ce moment elle est au plafond sous une forme spectrale à essayer de buter des dizaines de gens.

Alors voilà. Je suis désarmé, blessé, aveuglé, acculé, sans aucune échappatoire. Rempli de haine, et avec absolument personne en qui je peux avoir confiance – à en croire Alys, je ne serais même pas capable de faire confiance à mes propres sens, à l’horreur indicible qui m’entoure. Elle se fout de ma gueule. Évidemment qu’Alys ment. Évidemment que Margot est en train de mettre au monde quelque ignominie issue de l’Autre-Côté. Je l’ai vue. Elle m’a déjà montré son dos ; J’avais envie de lui arracher sa robe et de la mordre. Je n’ai pas halluciné ce moment.
Et pourtant, j’ai envie d’y croire à ce qu’Alys dit. Parce que ça serait tellement arrangeant. Comme ça serait plus simple. Comme j’ai envie de me plonger dans cette béatitude aveugle – gommer ces derniers jours. Gommer ces derniers meurtres. Gommer tout ce que j’ai vu en Lyrie. Gommer le souvenir de Symbiose me déchirant à en hurler jusqu’à l’extinction de voix. Gommer le martyr de mon père ou de celui de Casin. Oui, admettons, que tout ce qui est autour de moi est faux, qu’il n’y a pas tout un village en train de bêtement s’avilir. Au fond, est-ce que Hubert de Ternant n’était pas heureux ainsi ? Heureux quand il était absent, ailleurs, dans les nuages ?
Et quitte à partir, pourquoi pas se réfugier plus loin que tout ça ? Pourquoi laisser à Alys le privilège ? J’étais bien à Castel-Aquitanie. Comment j’étais bien, dans les bras d’une tenancière de taverne pourrie, une simple soirée avec une simple personne. Comment j’étais bien, à jouer aux cartes avec des marginaux, et à danser en tenant les pattes d’un adorable toutou de clochard.
Je rêvasse. Rêvasse de moi embrassant cette vie. D'être le noble qui est devenu pouilleux.

Mais non, ma mère est une Banshee au plafond et je suis entouré de tentacules. J’en suis là. Et je peux pas juste fuir en rejetant la réalité.



Alors je dois avouer que ça m’étonne que ça ne me soit pas arrivé avant, j’ai été pas mal endurant, mais là, je suis carrément en train de vriller. Désarmé, blessé, aveuglé, acculé, à douter de tout le monde, dans l’œil de l’horreur, c’est finalement le moment que j’ai choisi pour vriller. Je me suis crispé sur moi-même, j’ai serré mes dents de toutes mes forces, j’ai eu envie de chialer comme une fillette, j’ai senti la morve commencer à dégouliner de mon nez, mais à la place, je me suis mis à avoir une espèce de grimace sardonique.

J’ai regardé Alys avec cet immense sourire. Et avec une toute petite voix, toute minuscule, gênée, et polie, j’ai juste dit :

« J’ai…

J’ai…

J’ai eu une très longue semaine. Très longue semaine. »


J’aimerais éclater de rire après mon euphémisme, mais c’est un sourire sans joie.

J’ai eu un très long mois plus généralement. Je dois avouer commencer à ressentir plus que jamais la solitude. Ça fait un moment que je suis tout seul.
Triboulet me manque. Il me manque tellement.




La dague est derrière moi.

Si j’avais encore un peu de force, je pourrais me retourner dans un cri, me jeter dessus, m’en emparer, poignarder le premier adversaire qui se sera rué sur moi.

Mais je vais pas faire ça.

Je pourrais me diriger vers la main que me tend Alys, répudier ma mère, une énième fois, la dénoncer, la répugner. Trouver le courage de rejeter l’amour toxique d’une violeuse pédophile.

Mais je ne vais pas faire ça non plus.

Alors qu’est-ce que je peux faire ?

« La vérité, Révérende Mère, c’est que je sais même pas ce que je désire. Je la sens juste, là, en train de lentement… Gratter dans ma cervelle… Comme si j’avais une migraine… »

J’ai un petit hoquet. Putain, Thecia m’a bien lardé. Elle est forte, faut admettre ça…
…Ma place est dans un asile de Shallya. Ma place est d’être à jamais sédaté par de la mandragore et séquestré loin du monde. C’est peut-être ce que la gentillesse apparente d’Alys cache. Elle a tué Binet. Je sais très bien ce dont sa rage est capable.
Et je sais ce que la rage de Maman peut aussi réaliser.

Alors, je fais un signe de tête vers la Banshee.

« Non franchement Révérende, que Shallya vous donne la force à vous de la calmer.
Parce qu’elle veut tous vous tuer. Peut-être même moi dans le tas… »


Je ne veux plus lutter. Pour personne. J’ai déjà tellement inutilement lutté, à vouloir trop en faire, pour tout le monde. Je suis entouré de traîtres, dans un duché de traîtres, et aujourd’hui je peux même plus prétendre valoir mieux qu’eux tous.

Le Duc, Maman, Margot ; Ils n’ont cessé de me couvrir de compliments, que j’ai cru sincères. Mais derrière les gentillesses, on attend juste le meilleur moment de pouvoir m’utiliser.
Alors tant pis.

Je pose un genou à terre et baisse la tête. Je ferme mes yeux encore brûlants de l’éclair. Et ainsi, je scelle mon destin en décidant de m’y abandonner :
Je deviendrai l’esclave du gagnant.
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 23 oct. 2020, 11:49, modifié 1 fois.
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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[MJ] Katarin
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par [MJ] Katarin »

Si Armand avait cru pouvoir ainsi capituler face à l'adversité, c'est qu'il avait mal mesuré la pugnacité de la grande prêtresse. A peine son genou avait-il touché terre et sa tête s'était baissée vers le sol, que déjà le bâton d'Alys tombait au sol et ses deux mains le saisissaient par le col et le tiraient vers le haut pour le forcer à se relever. Elle darda son regard dans celui du chevalier, et tant pis si celui-ci se brulait les rétines en étant ainsi forcé d'observer son interlocutrice : la quarantenaire en colère n'en avait cure.

- VOUS avez été nommé seigneur de Derrevin, VOUS êtes le PROTECTEUR de ces gens ! Vous avez JURE, aux dieux, au Duc, et à chaque habitant de cette ville ! Je ne vous laisserai pas faire comme Binet, je ne vous laisserai pas justifier notre souffrance par vos difficultés personnelles ! Relevez la tête même si votre corps est meurtri, et souffrez le martyr autant qu'il le faudra car c'est nos vies à tous que vous avez entre les mains ! Ne m'obligez pas...

Des larmes s'échappaient de ses yeux rougis.

- Ne m'obligez pas...

Sa poigne sur le col d'Armand faiblit, tout autant que la force dans sa voix dans ces derniers mots. Auréolée d'une lumière divine, Alys semblait pourtant plus humaine et fragile que jamais.

- Vous pouvez sauver tous ces gens et votre âme Armand. Il n'est pas trop tard. Je vous en supplie. Aidez-nous. Aidez-moi.

Dans le temple, la catastrophe était à son paroxysme. Du corps éthéré de la banshee émanait une fumée noire qui évoquait de terribles souvenirs. La réalité elle-même semblait se distordre autour de la morte-vivante qui psalmodiait, tandis que la température semblait avoir baissé d'une dizaine de degrés et que l'espoir lui-même semblait avoir été aspiré par l'accumulation de puissance qu'elle se préparait à déchainer. Sur l'autel, la créature s'était enfin échappée des entrailles de sa génitrice, et irradiait d'une énergie maléfique. Elle semblait observer l'entité spectrale de ses deux yeux rouges, et la couronne de dards entourant son énorme abdomen se mit à frétiller avant de s'orienter dans sa direction.

Bousculant une dizaine d'habitants qu'elle n'hésita pas à envoyer au sol pour progresser, Maussade surgit aux côtés de Thecia, épée longue en main. Mais tout comme la jeune prêtresse, elle n'attaqua pas. Toutes deux avaient leurs armes levées, prêtes à franchir les trois pas les séparant d'Armand pour lacérer son dos découvert, mais restaient immobiles.

Peut-être dans l'attente d'un miracle.



Ordre d'ini :
Banshee - Alys - Armand - ??? - ??? - Protecteur - Thecia


Banshee : On est reparti pour une incantation \o/
Alys : Parle, + test de FOR pour soulever Armand : 6, réussi.
Armand : Pleurniche
Maussade progresse dans la foule : jet de FOR pour tracer = 1, réussite critique compte double, Maussade est sortie de la foule et est aux côtés de Thecia !
??? progresse dans la foule : jet de FOR pour tracer = 10, avec le malus de peur c'est réussi tout juste : est encore à 5 tours d'Armand.
Protecteur : S'est désormais échappé entièrement des entrailles, agit au prochain tour.
Thecia : reste immobile.

Je n'ai utilisé qu'une NA pour chacun, de ta décision dépendra la fin du tour en cours.

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Armand de Lyrie
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par Armand de Lyrie »

Tout comme je n’ai plus d’armes en main, Alys décide de laisser son bâton s’écraser au sol. Elle pose ses doigts sur mon doublon, et me relève – j’aurais pu aisément résister à son emprise, si seulement je n’avais pas actuellement la même constitution qu’une guimauve.

C’est dangereux, de se mettre dans une telle situation. D’ainsi se dévoiler devant un adversaire défait. Elle aurait pu profiter de ma reddition pour ordonner à Thécia de se jeter sur moi. Ou pour se réfugier ailleurs. Mais non. Elle me relève à son niveau, et elle…
Elle pleure.

Comment on peut frapper une femme qui pleure ? Je recule devant une femme qui pleure. N’est-ce pas comme ça que ma mère pouvait éternellement me vaincre ? Des larmes. Il ne faut pas autre chose pour qu’une jeune femme règne en Bretonnie. Pourquoi il a fallu que j’affronte une femme ? Pourquoi c’est toujours des femmes ? Je regarde derrière moi, et celle qui veut me tuer, c’est Thécia. Et celle qui vient la suppléer, c’est Maussade, épée au clair. Où est Carlomax pour venir m’achever proprement ? Pourquoi ce n’est pas ce gros Rémon qui vient me menacer ? C’est facile à haïr, un homme.

Je sais plus. Je sais plus ce que je veux. Je sais plus si je peux faire confiance à Alys elle-même – ses mots, ses mots révèlent beaucoup… Elle a l’air de me menacer. Et en même temps elle a l’air de vouloir me sauver. Elle compte sur moi, et je n’ai pas envie de la décevoir, pas quand elle me regarde avec ses yeux brûlants qui renforcent ma migraine, qui me forcent à essayer d’échapper à son regard…
…Et en même temps, je la hais. Je hais la duplicité de tout le monde dans ce duché. Je hais les mensonges, et les secrets. J’ai ruiné ma vie en les abattant, j’ai tout perdu le jour où j’ai décidé d’être honnête. Mais mes ennemis peuvent bien cacher tout ce qu’ils souhaitent. Evrard, Carlomax, Maisne, le Duc ; tous. Tous des menteurs. Même Alys. C’est Margot elle-même qui a dû me révéler la corruption qui la gangrenait. Ce putain de tableau… Pourquoi personne parle du tableau ? Ma mère m’a mise en garde contre cet artefact maudit.
Et quelque chose termine de sortir des entrailles de Margot. Quelque chose qui la déchire, qui la perfore, et qui maintenant se dresse face à la Banshee qui est toujours élevée en l’air, prête à saccager tout ce qui m’entoure. Je ne rêve pas ça – comment pourrais-je simplement rêver de ça ?

Je voulais juste abandonner, et laisser le destin décider pour moi, parce que je suis perdu. Je suis complètement perdu ; je n’ai plus de pulsion, plus d’instinct, je ne sais plus ce qui en moi m’appartient, ce qui est influencé par la peur, par la haine, par la crainte, ou même par le désir. J’ai poignardé Margot. J’étais tellement peu hésitant quand je lui ai enfoncé une putain de lame d’acier dans sa gorge. Ses derniers mots sont des gargouillis. Je n’ai jamais voulu fauter, mais il y a tellement d’ordres contradictoires auxquels obéir : Sers la Dame, sers Shallya, protège les innocents, protège l’ordre, obéis à tes parents, obéis à ton seigneur…
Chaque fois que je suis seul avec quelqu’un, c’est toujours quelqu’un d’assez parleur, d’assez écrasant, paré de bonté, pour que je dise oui à tout ce qu’il me dit – et sitôt que j’en suis éloigné, j’ai la version de quelqu’un d’autre. Mais là y a un putain de monstre qui se promène sur l’autel ; et en même temps j’ai moi-même déchaîné un autre maléfice dans un Temple de Shallya. Je suis aussi coupable que ceux à qui je reproche des crimes.
Il n’y a bien qu’Alys pour croire qu’il n’est pas encore trop tard.

Rien de ce qu’elle dit me semble faux. Mais rien de ce que me dit quelqu’un n’a jamais l’air faux. Ils ont toujours l’air… Ils ont toujours tellement l’air dans le vrai. Même l’injustifiable est toujours justifié. Alors qu’est-ce que je suis censé faire ?
J’ai peur. Au fond de moi, j’ai la trouille, d’à nouveau souffrir.
J’ai la haine. Au fond de moi, je suis grisé par les regards de peur qui transparaissent dans les pupilles des fidèles de la chapelle.
Je ne voulais faire de mal à personne. J’aurais dû devenir un clochard. Ça aurait prouvé à mon père qu’il avait raison. Un chevalier vit pour faire souffrir les autres, il lui suffit juste de choisir qui mérite de souffrir. Personne n’a versé de larmes pour mes parents quand ils ont été meurtris, après les avoir pourtant acceptés comme des pairs durant tant d’années…

Mais Derrevin, est-ce qu’ils méritent de souffrir ? Après tout ce qu’ils ont traversé ? Ils avaient l’air tellement heureux, lorsqu’ils étaient béats, et avilis, et…
Je veux régner. Je veux les écraser. Mais je veux aussi les garder, et les protéger, comme Alys le dit. Je l’ai juré à Shallya. J’ai juré tellement de choses… J’ai juré tellement de choses à tellement de gens…

Si seulement je pouvais réfléchir. Si seulement j’avais le temps de réfléchir. Si seulement j’avais pas une putain de lumière en train de cramer mes yeux. Je suis entouré d’horreurs et je ne supporte plus les horreurs. Dans mes souvenirs, même les moments de plaisir maquillaient l’horreur.





Maintenant que Maussade est là, peut-être qu’Alys peut se sentir pousser des ailes. Peut-être va-t-elle ordonner mon exécution sur-le-champ. Mais elle aurait pu… Elle aurait pu le faire avant. Elle aurait pu. Pourquoi elle essaye pas de me buter ? Pourquoi lâcher son bâton ?
La vérité, c’est qu’elle a gagné en faisant ça. J’aurais dû l’égorger. J’aurais dû la tuer avant qu’elle ne parle. Elle aurait dû me donner une raison de la haïr. Mais en tenant Thecia éloignée, en refusant de profiter de ma faiblesse, comment pourrais-je l’attaquer ?
Je sais pas ce qui parle. Peut-être une espèce de reste dégénéré et immonde d’esprit chevaleresque. C’est débile. Je suis foutu. Je suis tellement foutu. Tout le monde a été témoin de la Banshee sortant de mes entrailles. Casin est mort de mes mains. Margot est…
Mais Alys a gagné en refusant de combattre. Parce que je trouve pas la force de tuer des gens qui ne m’ont rien fait.

Je recule en attrapant mes cheveux. Je ferme à nouveau mes yeux en me recroquevillant debout. Et j’essaye de trouver la… La chose qui m’a transpercé ma chair et mon âme.
Je parle à la Banshee qui se réfugie dans mon corps.

J’aime Margot. J’aime Margot.
J’ai aimé Margot plus que je ne t’ai aimé toi.


Peut-être que cette atroce provocation sera suffisante pour attirer son attention.

Et pourtant, je lui ai enfoncé une dague dans la gorge, pour toi, parce que tu me l'as simplement demandé. Je lui ai ouvert la trachée, parce que c'était ton souhait le plus cher. Tu sais que nous sommes liés, maintenant.
Mais tu m’avais promis d’épargner Derrevin en échange. Je t’ai laissé profiter de mon corps pour Derrevin.
Alors épargne-les, s’il te plaît.
Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 26 oct. 2020, 14:34, modifié 1 fois.
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Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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[MJ] Katarin
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par [MJ] Katarin »

Trois jours auparavant, qui était Armand de Lyrie ?
Il était un nouveau chevalier du royaume, parti pour gouverner Derrevin sur l'ordre de son Duc, mais qui devait auparavant régler ses affaires familiales.

Trois jours auparavant, qui était Anne de Lanneray ?
Un écho enfermé dans le corps de son propre fils depuis qu'il était bébé.
Et un second écho piégé dans son château, hantant les lieux en ressassant son passé.

Trois jours auparavant, Symbiose réunissait de force la mère et le fils, les obligeant à cohabiter dans un même corps.

A trois reprises, Armand a pêché.
Le premier jour en acceptant les attouchements de sa mère.
Le second jour en lui ouvrant son cœur, en lui offrant amour et pardon et en se détournant de ses valeurs.
Le troisième jour en lui donnant l'autorisation d'utiliser son corps pour déchainer toute sa puissance et massacrer les habitants de Derrevin.

A trois reprises, la fine frontière empêchant leurs âmes de fusionner avait été bafouée. Et cela n'allait pas sans conséquences.

Dans le feu de l'action, Armand n'avait encore rien remarqué.
Pas remarqué que sa mère ne lui parlait plus dans sa tête, car elle était désormais si profondément mêlée à son être qu'elle ne pouvait plus être considérée comme une seconde entité avec qui discuter.
Pas remarqué que son corps avait poursuivi ses changements, affinant son visage, réduisant sa pilosité, atténuant sa musculature, et lui offrant une discrète poitrine, trop féminine pour être confondue avec des pectoraux trop saillants.
Pas remarqué que la banshee, autrefois symbole de toute la haine et la colère de sa mère, était désormais un écho de ses propres pensées.

"Détruis tout".

C'étaient ses mots. Ses désirs. La banshee n'avait en conséquence fait que tenter d'accomplir sa volonté, en déployant toute sa puissance dans l'unique objectif de ne laisser aucun survivant.
Et s'il restait le moindre écho d'Anne de Lanneray dans cet océan de colère, alors la mort de Margot avait largement contenté ses désirs. La catin qui avait osé séduire Armand, profité de lui dans son sommeil, fille de l'usurpatrice de Ternant. Le miracle de Shallya avait cessé d'opérer, et de la gorge de Margot coulait désormais un filet de sang. Si ses yeux étaient toujours écarquillés, il n'y avait plus aucun doute sur le fait que la vie l'avait quittée.

Sans discuter, sans s'opposer à son ordre, la banshee interrompit son incantation, et se précipita vers Armand pour retourner dans son corps. L'ambiance funèbre accompagnant l'accumulation de pouvoir magique qu'elle avait concentré dans le temple disparut aussi rapidement qu'elle était apparue : la brume noire s'évanouit, l'air sembla redevenir plus respirable, et lentement les habitants de Derrevin semblèrent réussir à retrouver leurs esprits, maintenant que la source de leur terreur était partie.

Le retour de la banshee dans son corps ne se fit pas un terrible contrecoup pour Armand, qui subit une profonde fatigue physique. L'énergie qu'avait tenté de déployer l'écho de sa mère était colossale et même si le sortilège n'avait pas abouti, il ressentait quand même l'asthénie de pareil effort. Ses muscles tremblaient, sa tête était lourde, et ses paupières semblaient vouloir faire abstraction de toute notion de sécurité en restant désormais closes.

La situation semblait presque revenue à la normale. Plus de banshee dans les airs, plus de chair luisante sur les murs, plus de tentacules perforant le toit du temple... mais la créature qu'avait enfanté Margot était toujours là, installée sur le corps de sa mère défunte, observant désormais Armand de ses yeux rouges tandis que les multiples pointes de son abdomen le prenaient pour cible. Elle était recroquevillée sur elle-même, comme pour se préparer à bondir sur lui pour finir le travail de ses griffes noires au cas-où ses épines ne suffiraient pas. Pourtant, son attitude menaçante ne fut pas suivie d'actes : la bête restait immobile, dans l'attente peut-être d'une action hostile de la part du chevalier de Lyrie.

- M... Merci, Armand.

Alys avait bégayé. Cinq secondes plus tôt, l'apocalypse semblait prête à se déchainer sur la ville. Elle avait réussi à raisonner Armand, et semblait avoir bien du mal à accuser le coup de sa réussite. Malgré tout son aplomb, toute la grâce du rayonnement mystique de Shallya qui l'entourait, la grande prêtresse avait très probablement envisagé le pire avec l'échec de sa tentative de diplomatie.

Elle retrouva néanmoins rapidement sa contenance. Sans même sécher les larmes qui avaient coulé sur ses joues, la grande prêtresse aposa sa main sur Armand, et de sa paume rayonna une douce lueur blanche. A défaut de pleinement le revigorer de son intense fatigue physique, la douleur naissante de son dos transpercé par le poignard de Thecia s'évanouit peu à peu : il ne pouvait le voir, mais sa blessure avait totalement disparue, guérie par les bienfaits de Shallya.

- Je suis désolée de tout ce qui a pu vous arriver. Croyez-moi, je suis sincèrement désolée. Je ne peux pas changer le passé, je ne peux pas corriger les erreurs commises. Mais je peux encore vous aider à trouver un futur heureux.

Sans la moindre crainte, Alys s'approcha de Margot, ignorant la bête qui avait pris position sur ses entrailles ensanglantées. Elle leva son bras, et à l'instar d'Armand avec Artur trois jours plus tôt, ferma avec douceur les paupières de feu l'amie d'Armand. Ceci fait, elle se saisit du point fermé de la jeune femme décédée, crispé par la rigidité cadavérique, puis le porta à ses lèvres pour embrasser ses phalanges. Puis, avec une infinie délicatesse, elle desserra un à un ses doigts pour se saisir d'un petit objet que la jeune femme avait gardé contre elle jusque dans la mort.

Alys tendit le petit parchemin chiffonné à Armand, mais ce dernier n'eut pas besoin de le déplier pour savoir ce qu'il y était écrit, car c'était de sa propre main que ce mot fut rédigé;
Margot,

Mes pensées demeurent pour toi. Où que j’aille, quoi que je fasse, ton nom restera sur mes lèvres.

Je reviendrai te chercher.
La foule reprenant ses esprits commençait à s'agiter. Des relents de doutes, de désespoir voire de panique s'élevaient, et bientôt un terrible brouhaha envahit tout le temple. Dans le vacarme des cris et des pleurs, Armand perçut leur chagrin de voir Margot décédée, leur crainte pour la santé de l'Enfant, leur trouble face aux actions de leur Seigneur. Mais étrangement, aucune colère n'était manifestée : personne ne pointait du doigt le meurtrier de Margot, personne ne hurlait son désir de vengeance.

Après s'être frayé un chemin à travers la foule en proie à la détresse, Carlomax apparut devant Armand. Le Sans-Visage n'avait pas changé d'un iota depuis la dernière fois qu'ils s'étaient vus : toujours le même regard acéré, les mêmes mâchoires resserrées avec cet air renfrogné, et cette même détermination dans sa posture et sa démarche.

Il s'arrêta aux côtés de Thecia, puis avec un mélange d'autorité et de douceur, il posa sa main sur les siennes, lui intimant de lâcher la dague qu'elle pointait toujours en direction d'Armand. Elle résista quelques secondes, jetant à l'ancien chef de Derrevin un regard suppliant, mais il resta inflexible. Alors, lentement, elle baissa enfin ses deux bras, et relâcha sa prise pour lui laisser son arme. Thecia n'osa plus relever les yeux du sol, incapable d'affronter le regard d'Armand.

Après que Carlomax ait échangé un hochement de tête avec Maussade, cette dernière rengaina son arme, et tous deux s'avancèrent aux côtés d'Alys et d'Armand. Le regard de l'ancien et du nouveau dirigeant de Derrevin se croisèrent, mais pas plus que la foule Carlomax ne montrait la moindre animosité : il semblait seulement compatissant envers ce que le chevalier avait pu endurer. Puis il observa la créature démoniaque toujours figée dans une posture agressive dirigée vers l'héritier de Lyrie, avant de se retourner vers la foule, et de crier d'une voix puissante et autoritaire :

- Habitants de Derrevin ! Notre bien-aimée Margot nous a quitté, mais cela ne doit pas nous attrister, bien au contraire. Ce n'est pas ce qu'elle aurait voulu pour nous, car même si la cérémonie d'accueil ne s'est pas déroulée comme nous l'attendions, la créature de ténèbres a désormais été vaincue, Le Protecteur a malgré tout émergé et l'Enfant Divin est prêt à nous rejoindre, en pleine santé. Notre Margot s'est sacrifiée pour notre bonheur, alors ne nous lui faisons pas l'injure de souiller sa mémoire avec des émotions négatives. Elle avait une confiance aveugle en son ami et amant, notre nouveau Seigneur, Armand de Derrevin. Alors que nous avions pu douter de sa loyauté envers nous, elle a cru en lui de toutes ses forces jusqu'à sa fin. Elle nous l'a assuré : il serait un bon père pour l'Enfant. Et nous lui avons promis que s'il revenait, quoi qu'il arrive, nous le servirions fidèlement.

- Lorsque j'avais promis à Margot que je la protégerais, poursuivit Alys dans ce discours aux habitants, elle m'avait tendrement enlacée, me confiant que la vie de son Enfant était la seule qui comptait. Nul doute qu'elle savait que son destin était de se sacrifier pour lui aujourd'hui - peut-être même savait-elle déjà que son destin était de mourir des mains de son amant, pour expier de ses fautes. Alors honorons ses désirs, et ne pleurons pas de tristesse pour elle, mais de bonheur pour la naissance de l'Enfant Divin.

Leurs deux discours eurent un effet hypnotique sur la foule, qui retrouva immédiatement sa sérénité.

Alys posa sa paume sur l'abdomen enflé de la créature, et lui parla avec douceur :

- Il est en sécurité désormais. Margot lui faisait confiance, il est le Seigneur-Père. Tout va bien.

La chose gargouilla en réponse, un borborygme malaisant qui semblait presque menaçant. Ses épines frétillèrent, et un instant elle sembla presque prête à ignorer la prêtresse pour finalement attaquer Armand. Mais ce moment passa, et la bête sembla se détendre. Ses muscles visibles sous sa chair s'affaissèrent, et dans un sifflement répugnant, elle se mit à fondre. A l'instar du tapis de chair qui avait précédemment recouvert les murs du temple, la créature se répandait en un amas de charogne rosâtre qui s'écoulait à la fois aux pieds de l'autel, mais aussi dans les entrailles encore ouvertes de Margot. Seul son abdomen enflé resta intact, cocon orangé qui semblait tenir sur les carcasses de sa mère et de la bête comme sur un piédestal de chair.

Puis la poche d'ichor s'ouvrit à son tour, se fissurant au point de contact avec la paume d'Alys pour peu à peu se déchirer de haut en bas, déversant de la bile orangée partout. Alys glissa alors ses mains à l'intérieur de l'abdomen, sa robe blanche se faisant atrocement souiller par le fluide vital. Lorsqu'elle les retira, elle tenait entre ses mains un minuscule bébé encore recouvert de sang, dont le cordon ombilical le reliait encore à l'ignoble créature fondue. Il paraissait pourtant tout ce qu'il y avait de plus humain, de son petit crâne chauve à ses petits pieds fripés, jusqu'à ces premiers timides hurlements alors qu'il respirait pour la première fois.

Carlomax tendit la dague de Thecia à Armand, et lui dit d'un air solennel :

- L'Enfant Divin est votre fils, Armand. C'est à vous que revient de couper son cordon. Et la responsabilité vous incombe de le nommer, lui dont le nom sera sur les lèvres du monde entier.





Tu avais été prévenu vis-à-vis du danger de sympathiser avec l'âme parasite de ta mère : la première fois seul ton reflet avait évolué, la seconde fois tu avais eu des changements très mineurs physiques, cette fois en choisissant d'encore une fois prendre le parti de ta maman les conséquences sont plus importantes. Ton aspect s'est donc clairement féminisé : pilosité bien plus réduite, naissance d'une poitrine féminine (légère et invisible sous tes vêtements, mais dénudé ça sera clairement visible et troublant...), ta voix s'est clairement adoucie d'un ton ou deux.
En gameplay, tes stats sont modifiées ainsi :
-1 en FOR et END, +1 en CHA et INT.

DE PLUS.

Tu peux désormais invoquer une fois par jour la banshee, symbole de toute la colère que ta mère peut déployer pour te protéger. Elle a tes stats, mais aussi une carac de 12 en magie et 3 points de Maitrise de l'Aethyr (légèrement nerfée par rapport à avant pour la raison inverse de toi). Globalement, son livre de sorts couvre toute la nécromancie à l'exception de ce qui invoque des MV.
ATTENTION : la banshee est liée à toi de manière très étroite. Elle et toi partagez les mêmes points de vie, donc si elle prend des dégâts tu en prend aussi et inversement. De plus, si elle déploie des sorts de nécromancie trop puissants (majeurs et légendaires), lors de son "retour dans son enveloppe" tu auras de gros contrecoups de fatigue, avec malus possibles de stats pendant 24h. Elle peut rester dehors INT tours avant de devoir retourner en toi.

Have fun, chevalier possédé du royaume.

Autres effets rigolos :
==> Tu as échoué à ton voeu de pureté, en conséquence tu subis désormais son effet inverse : -2 aux résistances mentales face aux tentations terrestres, magiques ou non. Tu pourras acquérir des dépendances très facilement selon tes actes à venir.
==> Ta récente attitude a bien entendu fortement déplu à La Dame : -5 pdc Dame.


Les jets du tour :
Guérison des blessures version moyenne : 15, réussi tout juste.
==> Soigne 25+8 pvs : Armand est full vie.

Jet de perception d'Armand : 10 : Raté de 1. Tant pis.

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Armand de Lyrie
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par Armand de Lyrie »

Mon nom est Armand de Lyrie.

Rarement une phrase si banale ne m’a paru être si vide de sens. Aucun mot dans cette sentence ne peut encore être considéré comme exact. Ce serait déjà prétendre qu’elle ait pu être vraie à un moment de ma vie. Pourquoi les Bretonniens réutilisent leur propre prénom pour leur aîné ? C’est bien pour les enserrer. Mon nom ne m’a jamais véritablement appartenu.
Mais je savais ce que j’étais. Je voyais une partie de moi, et à moi seule, que j’essayais d’atteindre, à laquelle je tentais de m’accrocher. Malgré l’éducation de mon père. Malgré l’étreinte de ma mère, qui me poursuit depuis vingt années que j’exhale l’air de cette terre. Tous mes sens étaient miens, tous – surtout lorsque je les reniais.



Mon nom est Armand de Lyrie.

Je suis né le 14 du mois de l’été, en l’An de Gilles 1530. Je suis l’enfant de deux nobles familles du duché d’Aquitanie. D’un comte charismatique, et d’une seigneuresse talentueuse. J’ai grandi chétif et choyé. Puis j’ai appris la selle et l’éperon à travers le Royaume. J’ai reçu l’accolade de mon Duc, et brisé des lances sur des lices de tournoi. J’étais jeune. J’étais beau. J’étais destiné à servir la Dame et mon pays.
J’ai découvert l’ampleur des vices et des fautes de ma famille. La félonie de mes amis d’enfance. La sorcellerie de mes propres parents. Ils étaient prêts à tout m’offrir – en faisant ce que je croyais juste, j’ai renié mes ancêtres et mon fief. Mais tout le courage qu’il m’a fallu pour la délation, m’a échappé lorsque l’on m’a envoyé tuer personnellement ma propre mère, une criminelle prédatrice, qui a toujours souhaité m’attacher à elle et me garder rien que pour elle.
Je suis tombé dans la nuit, sous une pluie verglacée, en ayant convaincu d’autres d’une vertu que je n’ai en fait pas su brandir. Je suis mort en hurlant de douleur.



Mon nom est Anne de Lanneray.

Je suis née le 5 du mois de la Dame, en l’année 1506. J’ai grandi dans un château austère, d’un père distant, et d’une mère qui m’a offert moins d’attentions que ma nourrice. J’étais dans l’ombre de deux grands frères, brutaux et idiots. Mon pays n’aime pas les femmes – j’ai appris à coudre, à bien me tenir, et à me taire. J’étais destinée à épouser un châtelain qui pourrait perpétuer son nom, et qui irait aimer dans des bras adultères, privilège que je n’aurais jamais. Je broyais du noir, chaque jour et chaque nuit, errant dans ce monde sans chercher à vivre.
Et puis, un homme est venu. Un homme séduisant, agréable, éduqué. Il aurait pu avoir n’importe quelle femme, rien que par son rang – mais il m’a choisi moi. Il m’a beaucoup offert, plus que tout ce que la vie aurait dû me réserver. Mais la plus belle chose qu’il m’ait donné, ce fut un petit garçon. J’aurais tout fait pour lui – et j’ai tout fait, pour lui. Tant détruit, tant sacrifié, jusqu’à moi-même. Et il m’a trahie, et reniée.
Je suis tombée dans les flammes de mon château, en perdant tout ce que j’avais construit, tout ce que je trouvais de beau, et de noble, et d’hospitalier. Je suis morte en me résignant.



Et quelque chose d’autre a fait surface. Quelque chose d’impie, et d’ignoble. Et de merveilleux. Quelque chose de contre-nature. Prohibé. Incompréhensible. Permis uniquement par le vice et la magie noire. Une insulte respirante, et pensante, envers les Dieux.

Je ne sais plus exactement ce que je suis. J’ai eu une longue semaine. Mais… Mais je vois ce dont je suis capable. Si j’ignore mon identité, j’ai découvert ma vraie nature. Ce qui est sorti du domaine de Lyrie. Ce qui s’est relevé de la tombe de mes ancêtres.
Je respire, oui. Je souffre. Je vois autour de moi. Je sens mon cœur battre, et mon sang couler dans mes veines. Je suis en vie.
Et, comme ma famille l’a toujours fait, je ne cesse de détruire ce qu’il y a autour de moi.




Une espèce de pesanteur s’est emparée du temple. Je m’attendais à la fin. Je me résignais à la fin. J’attends, fébrile, la lame qui viendrait me couper la gorge, comme moi-même j’ai ouvert la gorge de Margot. J’attends qu’on me fasse payer. Qu’on se venge de moi, et qu’on mette fin à l’engeance que je suis – tout le monde a vu. Tout le monde a vu ce qui est sorti de mon être. Tout le monde a vu l’horreur que j’ai appelée. Si on se refuse, pour une quelconque raison, à m’occire, alors la chose la plus saine qui puisse s’en rapprocher serait de m’assommer. De m’enchaîner. De m’enfermer dans une cage de fer où l’on pourrait me sédater à la mandragore. Quitte à être innocent, au moins pourrais-je être docile.

Et si ce n’est pas aux habitants de Derrevin de se venger eux-mêmes, alors peut-être que la créature qui se balade sur l’autel, au milieu de la chair arrachée de Margot, peut bien se charger du forfait. Si minuscule, et si terrifiante.
J’ai épargné Derrevin pour ça. Pour… Pour ça. Pour ce que tous mes sens chevaleresques souhaiteraient encore détruire. L’horreur. L’horreur.



Mais rien de tout ça. Non. Rien du tout. Les lames se baissent. Alys ne montre aucune hostilité. Elle me laisse là, à terre, anéanti, vidé de toute substance. Elle va s’occuper de Margot. Je n’ose pas la regarder. Je n’ose pas regarder l’atrocité de son corps déchiqueté. C’est trop fort. Des sentiments pulsent, comme des bourdonnements qui me parasiteraient ; J’ai aimé cette femme. Et je l’ai haïe. Et les deux sensations, loin de s’annuler, ne forment qu’un maelstrom insupportable. Je me sens jalouse de Margot. Plus jeune, plus belle que moi… Elle voulait me voler mon fils. Est-ce qu’elle aurait réussi ? Je me sens malade à vomir, à le revoir en train de la désirer. Mais il l’a égorgée. Pour moi il l’a égorgée. J’ai envie de rire. Rire de joie ; et j’ai envie de pleurer de colère. Comment ai-je pu faire ça ?

Alys me tend le mot qu’elle tenait entre ses mains. D’une main tremblante, j’attrape le vélin. Je le reconnais. Le brouillon subtilisé à un régisseur absent. Je sais ce que j’ai écris. Je l’ai pensé. Rien ne m’obligeait à rédiger ça, mais si, je l’ai fait. Je l’ai aimée. Et je l’ai tuée.

Bon débarras.
Personne ne t’aimera jamais comme je t’aime.




Une sorte de normalité semble prendre le dessus sur l’horreur. Sans aucune haine, Carlomax et Alys parlent à Derrevin. Et tous honorent Margot. Et je reste là, hagard, détruit, dans le coaltar. Je ne suis tiré de mes pensées que lorsqu’Alys s’approche de cette foutue bestiole immonde, qui ne cesse de me dévisager. Pleine de haine.
Elle disparaît. Retraite. Se transforme. Mute en quelque chose d’ignoble. Et enfin, on me demande d’agir.

Je me relève. Pas Armand. Moi. Ce que je suis devenu. Ce qui a pris le dessus. Autre chose. Un mélange…
Je m’approche de l’autel.

J’avais juré à Armand de le laisser tranquille une fois la chienne morte. Soit. Si c’est ce qu’il souhaite. Tant que je peux le garder. Tant que nous sommes ensemble.

De l’horreur, Alys tire un bébé. Mes yeux écarquillés découvrent l’enfant. Elle l’approche de moi. J’essaye de déceler ce que mon regard m’a présenté il y a peu ; mais non. Ni chitine, ni tentacule, ni autre signe de corruption. Un bébé. Et Carlomax, dans le dos, me tend une dague. J’en éloigne la main comme si on me tendait un tison enflammé.
Comment peuvent-ils me faire confiance ? Comment peuvent-ils m’armer après ce que je viens de leur faire subir ? Ils ont souffert. Tous, autour de moi. Tous ont hurlé, tous ont été terrifiés, et écorchés par de la magie noire, par ma faute. Et ils me donnent une dague ?

Je pourrais accomplir la volonté de la Dame, encore une fois. Mourir, en tuant, encore. Faire souffrir les autres.
Mais je ne ferai pas ça.

Je trouve de la normalité dans l’horreur.

Je me saisis enfin du manche de la dague, tout en hochant la tête à la déclaration prophétique de Carlomax. J’ignore encore quel est mon rôle dans tout ça. Mais ce que j’étais a été achevé. Armand et Anne ont un autre devoir. Je dois cesser de regarder vers le passé. J’ai une seconde chance. Combien d’êtres peuvent s’en vanter ?
Ce bébé, je ne sais pas ce qu’il est. Ce qu’il doit être. Mais je sais qu’il sera plus important que ce que j’aurais jamais pu être.

« Je ne peux pas le nommer comme moi. Il mérite bien mieux. »

J’approche le couteau du cordon, très soigneusement. Le tremblement de mes mains semble se calmer. Et je me sens apaisé par le regard de cette bouille boursouflée et sanguinolente.

« Que chacun ne s’adresse à toi que par un seul nom : Gilles. Celui qui a fondé notre nation. Celui qui était si pur, et si noble, avant que des rats ne détruisent tout ce qu’il a construit.
Puisses-tu toi être plus digne que tous les sires et les nobles de ce pays. »

Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 27 nov. 2020, 14:55, modifié 1 fois.
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par [MJ] Katarin »

La foule pleurait toujours, désormais non plus de tristesse face à la mort de Margot, mais bel et bien de bonheur maintenant qu'est apparu L'Enfant Divin. Le prénom "Gilles" est d'abord murmuré avec surprise par quelques-uns, puis répété avec plus de fermeté par d'autres, pour finalement être peu à peu ovationné par tous dans une étrange allégresse générale.

" Gilles ! Gilles ! Loué soit Gilles, l'Enfant Divin !"

Le comportement de la foule était surréaliste. Non seulement ils déversaient des larmes de bonheur, mais les manifestations de joie ne s'arrêtaient pas là : comme si cette euphorie avait besoin d'être communiquée, partout, on s'enlaçait, on se félicitait, on s'embrassait même sans vraiment se soucier de l'identité de son voisin. Face à eux, Carlomax, Alys et même Maussade souriaient joyeusement, comme enchantés de voir le peuple de Derrevin nager dans ce bonheur onirique. Seule Thecia ne semblait pas à sa place dans cet étrange rêve, tandis qu'elle n'arrivait plus à décrocher son regard désespéré du sol, incapable de relever la tête en direction d'Armand et de son fils.

La grande prêtresse vint apporter un lange pour y emmitoufler délicatement le bébé dont les hurlements s'amplifiaient, avant de le confier à Carlomax qui s'en saisit religieusement, avec des gestes un peu gauches.

- Je crois que le petit Gilles est affamé, Seigneur. En l'absence de sa mère, il a besoin d'une nourrice. Malheureusement, de par sa nature divine, votre enfant ne peut se contenter du lait de la première femme allaitante venue : cela ne suffirait pas à lui donner toutes les forces dont il a besoin, et il ne pourrait alors que lentement dépérir. Gilles a besoin de son Protecteur pour bien grandir, car c'est son rôle comme au nôtre de le protéger pour l'éternité.

Ce disant, Alys se dirigea vers le tas de chair fondue qu'était devenu le démon-fœtus, et plongea à nouveau son bras à l'intérieur de la masse visqueuse qui se mêlait aux entrailles de Margot. Quelques secondes plus tard, elle en retira un petit morceau de chair qu'elle saisissait entre son index et son majeur, et qu'elle vint présenter à Armand. Celui-ci put constater que la chose qu'elle tenait n'était pas du tout inerte : il s'agissait d'un petit ver, grand de quelques centimètres seulement, avec quatre minuscules parodies de griffes tentaculaires, et deux improbables testicules tombant sous lui. La chose s'agitait entre les doigts de la grande prêtresse, comme animée du désir de se jeter sur le premier individu venu.
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- Vous avez nommé votre fils, Armand. Maintenant, il convient que vous choisissiez l'élue qui deviendra l'hôte du Protecteur, afin d'obtenir le privilège d'être la nourrice de Gilles, l'Enfant Divin.

Aussi absurde la situation pouvait-elle être, la folie monta d'un cran encore quand la foule réagit aussi vivement que bruyamment à cette déclaration. Toutes les femmes présentes se manifestèrent en même temps, poussant les hommes pour apparaître aux premiers rangs, implorant dans une cacophonie globale afin d'être choisies, listant leurs qualités à la volée pour démontrer les excellentes nourrices qu'elles pourraient être. Certaines n'hésitèrent pas une seconde à joindre le geste à la parole, et à exhiber sans retenue leurs poitrines pour montrer leurs atouts dans le rôle qu'elles convoitaient. Elles étaient pour la majorité d'origine paysanne, mais Armand vit aussi s'avancer les deux femmes chevalier qu'il avait observé s'entrainer à la caserne de Derrevin, la jeune et la vieille, toutes deux en armure, toutes deux suppliant d'une même voix pour être choisies. Il reconnut également Gervaise, la jeune adolescente, fille de Jaquot, qui avait été séduite par la force brute d'Armand à la taverne, qui se proposait avec enthousiasme malgré son jeune âge.

Plus improbable encore, Maussade vint se poster devant Armand. Elle avait un sourire tendre, qui sur sa tronche balafrée était peut-être plus terrifiant encore que les rares rictus qu'elle avait jamais offert à Armand. Sans mot dire, sans artifice aucun, son regard trahissait lui aussi son volontariat.

Et comme si cela ne suffisait pas, la voix d'Alys se distinguait de la cacophonie des autres, peut-être car elle était plus proche que les autres, ou peut-être parce que quelque chose dans sa prestance naturelle lui permettait d'avoir davantage de présence

- Margot m'a faite confiance pour mettre au monde l'Enfant, pour le protéger, et ce serait un immense honneur que vous me feriez de me permettre de perpétuer cette tâche en lui offrant mon corps, pour l'aider à grandir et à s'épanouir.

Dans cette réalité étrange où le monde entier semblait en transe, Thecia était la seule à faire tâche. Son regard s'était détaché du marbre au sol, pour observer avec crainte la minuscule créature entre les doigts de la grande prêtresse. Machinalement, elle avait fait un pas en arrière comme pour chercher une échappatoire : mais il n'y en avait aucune, la foule compacte représentant une muraille humaine bloquant la sortie.

Jet de perception / empathie / mémoire (INT+INI/2) : 2.
==> Si toutes les femmes semblent convoiter le poste de "nourrice", tu remarques néanmoins qu'aucun débordement violent ne survient : personne ne critique les qualités d'une autre, ou n'en pousse volontairement une autre pour prendre sa place. Aussi agitée que soit la foule, tout se passe non pas dans le calme, mais au moins la bonne entente.
==> De plus, si tout le monde semble partager la même béatitude, tu remarques une différence certes chez Thecia, mais aussi chez Alys. Tu ne saurais expliquer pourquoi, mais là où la foule semble sous l'effet d'une drogue euphorisante avec une voix un peu altérée, un regard un peu brillant, et un peu de rouge aux joues, Alys ne semble pas présenter ce genre d'altération : elle est "normale" si tant est que ça ait encore du sens dans cette situation.
==> Pour Armand/Anne, l'état des gens fait directement écho à leurs souvenirs : pour Armand, cela lui rappelle la manière dont se comportaient les admirateurs de Margot prêts à tout pour avoir son attention, et pour Anne cela lui évoque l'étrange pouvoir d'attraction que possédait Loyse sur les gens, qui lui a permis de peu à peu de s'emparer du pouvoir du culte qu'elle dirigeait.

Dans l'éventualité où tu souhaites nommer une nourrice et que cette dernière est choisie parmi les paysannes, tu es libre de créer un PNJ sur mesure à ta guise, soumis à ma validation.

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Armand de Lyrie
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par Armand de Lyrie »

On scande le prénom que j’ai choisi. On le répète comme le cantique d’un livre de prière. On le loue. On le répète dans une fierté et une allégresse portées par les alcôves de pierre de cette magnifique chapelle rurale. Il vibre au creux de mes tympans, alors que ma face barbouillée du sang de Margot se tourne vers les hommes et les femmes de Derrevin.

Je les imagine brûler. Je les imagine hurler de peur et se tordre de douleur, comme lorsque j’ai déchaîné la Banshee de mes entrailles pour les punir dans un accès de colère. J’imagine les Justes et les Bons en robes de bure et mantels tailladés, tonnant d’une voix calme ou vociférant avec une hargne fanatisée les crimes pour lesquels ils vont expier.
Je me tiens en procureur. Je tourne mes yeux vers le cadavre de la femme que j’ai aimée. Son abdomen troué. Son mélange de chair, de viscères orangeâtes et de corruption. Alys a clos ses yeux, mais ça suffit pas à dissiper la vision de ses pupilles exorbitées, dardées vers moi.

Rien autour de moi n’est normal. Rien. Rien depuis une semaine n’est normal. Mettons que je quitte les portes de ce temple, que je me jette sur la selle de Ravel, que je cavale pour me distancer d’une lieue : je prends un des sergents de Maisne, je ficelle un paysan ou un marchand qui passe par là, et je le ramène de force ici – est-ce qu’il se fondra dans ce décor ? Ou bien se mettra-t-il à hurler de terreur ?
Mais la normalité c’est qu’une question de nombre. C’est la pression des puissants. C’est la force des tyrans. C’est ceux qui terrorisent le monde, par le gibet, le bûcher, l’échafaud, le billot, la hache et la claymore. C’est ceux qui se maintiennent en place par la froideur des pères, par le plat de l’épée sur l’épaule, par les veillées et les jeûnes, par les fers du mariage, des convenances et du rang. Ceux qui fantasment de voir les autres s’agenouiller devant eux, en cachant bien leur délice de le faire dans leurs propres chambres.

Oui. C’est vrai. Rien autour de moi n’est normal. Tout n’est qu’une immense folie insane.

Et je ne le voudrais plus d’aucune autre façon.



Je suis tout de même encore un peu sous le choc. Vide, et secoué. Mes oreilles bourdonnent. Mes yeux se perdent un peu dans le vide. Je crois comprendre qu’on s’occupe de Gilles – on l’éloigne de moi, on va le laver, le soigner, le réchauffer. J’ai encore du mal à tout encaisser, à bien comprendre qu’il est à moi – que c’est mon enfant. Je ressens… Quelque chose se serrer dans mon ventre. Le jeune garçon de vingt ans n’a pas trop idée de ce que tout cela signifie. La femme qui a perdu tant de nourrissons est prise d’une espèce de sentiment de panique soudaine, qui vient de se réveiller quelque part dans mon âme fragmentée.
On rode autour de moi. Des femmes m’entourent, avec des mains empressées, et des sourires larmoyants, des visages pleins d’émotion. Les hommes ont des mines fières, et émues – l’émotion de gros paysans bourrus, qui transparaît à travers les sillons de leurs visages rudes. J’ai un peu du mal à tout comprendre, tous les mots, toutes les phrases, les timbres de voix si différents qui se font entendre…

« Du calme- »

Je me tais après avoir dit deux mots. Ma voix est sortie aiguë. Douce. Ce corps a été contenu plus longtemps par une autre voix, celle de quelqu’un qui aimait beaucoup trop parler.
Je passe ma main sur mes lèvres. Il n’y a plus de poils qui piquent sous elle. Plutôt une espèce de duvet doucereux. Je crois que j’aime mes lèvres – et pourtant, je sens une grande horreur à les sentir ainsi.

On ne m’a pas entendu. Tout le monde autour de moi sourit, discute, avec moi ou entre eux – et je reste là, un peu abasourdi. Je sens un début de panique m’envahir. Je lève la main vers la première femme qui se trouve devant moi – c’est la petite Gervaise. Je lui attrape le poignet, et pourtant, elle ne se crispe pas.

« Du calme, s’il te plaît.
S’il vous plaît. »

Je lui offre un sourire tremblant. Elle se met à rougir, et à se confondre en courtes excuses, comme presque tout le monde, dans une obéissance zélée.
C’est… C’est presque inquiétant, leur zèle dans les excuses, et les soudains petits pas qu’ils font en arrière, en s’assurant que je ne suis pas dérangé.
J’ai pourtant toujours vu des roturiers s’excuser devant des nobles – mais j’ai toujours su déceler comment ce n’était jamais sincère. Chez les paysans, il y avait cette peur, cet effroi immense à l’idée de gratter la patience d’un sire : « S’cusez moé, m’sire, s’cusez un idiot comme moé… » Je prenais presque plaisir à provoquer ce sentiment chez eux, par une simple phrase : ils étaient prêts à se vautrer par terre pour se faire oublier, parfois littéralement… Chez les bourgeois c’est plus subtil, plus maniéré – ils sont souvent éduqués, et riches, ils savent ce qu’ils valent, alors ils se permettent des petites audaces devant ceux qu’ils font mine de craindre : « Je n’espère pas déranger monseigneur… » qu’ils minaudent tout en réfléchissant à la meilleure manière de vous la faire à l’envers. Mais le pire, c’est chez les sergents les plus vétérans, les hommes d’armes qui ont cinq, dix, quinze ans de service dans l’ost de leur seigneur, qui savent mieux que lui comment faire la guerre, la vraie, et qui veulent juste de l’argent pour buter des choses sans trop penser aux horreurs qu’ils ont vu : Eux, il y a de l’insulte insufflée dans leurs excuses. « J’veux surtout pô faire chier, hein, mais là faudrait qu’on s’bouge l’fion, sire. » Peu de chevaliers osent vraiment relever leur vocabulaire, même quand ils les entendent bien cracher au sol sitôt qu’ils leur tournent le dos – c’est eux leurs sbires, c’est eux qui martyrisent les paysans quand on leur donne l’ordre. Gamet et Laurens n’auraient jamais trahi, alors on pardonnait bien leurs manières.

Rien de tout ça chez les habitants de Derrevin. C’est ça qui me fait peur – aucune hypocrisie dans leurs regards, ou dans leurs voix. Aucune rancœur. J’ai buté Margot. J’ai déchaîné une Banshee. Et ils me sourient, ils me parlent avec gentillesse. Ils cherchent mon approbation, ils veulent me toucher, sans oser le faire. Il n’y a bien que Thecia pour mettre de l’ombre à ce tableau. Et pourtant, lorsque je me retourne et que je la vois regarder le sol, n’osant même pas me dévisager, j’ai comme l’impression qu’elle est la plus importante de tous ici.
Qu’est-ce que mon père lui trouvait ? Pourquoi mon mari lui achetait des robes ? Je lui pardonnais bien ses distractions – aucune d’entre elle n’a eu la moindre conséquence, certaines étaient même assez agréables pour que je lui en propose moi-même, de quoi égayer quelques soirées. Mais elle… Je porte mon regard longuement dessus. Je m’approche, et m’arrête juste à côté. Assez pour qu’elle sente bien mes yeux sur elle.
Elle doit croire que c’est du défi. Elle me hait. Je ressemblais tellement à mon père – est-ce que je lui rappelle son souvenir ? Je ne lui rends pas ce sentiment. En fait, une petite partie de moi est même fascinée. Ce n’est pas n’importe qui qui pouvait intéresser le Sybarite de Lyrie. Elle devait sûrement être le jouet de Loyse. Elle était loyale à Margot. Mais il n’y a plus de Margot. Alors, elle est à moi maintenant.

Je la contourne en restant tout près d’elle, assez pour qu’elle sente bien ma présence. Que je ne l’aie pas oubliée juste parce qu’elle choisit de regarder le sol et de faire voyager son esprit dans les nuages. Mon fils adorait tellement faire ça chaque fois qu’il avait peur. C’est louable quand on est devant du public, ça fait contenu, c’est mieux que de se faire remarquer par une crise d’hystérie – mais c’est une bien pauvre défense quand on l’a déjà percée. Est-ce qu’elle va silencieusement trembler ? Ou bien enfin daigner lever un regard noir vers moi ? C’est pas important, l’effet sera le même.
Je l’ignore vite en attrapant ce que je suis venu chercher à côté d’elle : un drap. Un long drap blanc de liturgie, un sur lequel on pourrait poser les livres saints et les objets du culte. Je pivote, et m’approche de l’autel.
Il est hors de question de supporter plus longtemps la vision de cette traînée nue et ouverte, comme une putain de dinde vidée…

Je déplie le drap. Le fait voler en l’air, avant de la recouvrir presque toute entière. J’approche mes lèvres de son visage.
Et soudain, je me sens triste. Plus que triste, même – effondré. Et coupable. J’essaye de ne pas regarder le trou que j’ai laissé dans sa gorge, mais j’échoue. J’ai commis ce meurtre. Mon fils n’avait jamais tué personne.
Ma mère, oui. Tellement de gens. Elle n’éprouvait plus aucune culpabilité depuis bien longtemps. Le tout premier, elle en a fait des cauchemars, elle essayait de se convaincre que son époux l’avait forcée, qu’elle n’avait pas eut le choix… Et puis, il y eut un moment, difficile à situer, où prendre la vie était devenu si naturel.

Vous savez ce qui est génial, avec le culte de Morr ? C’est comment il impose la froideur sur les émotions. Anne et Armand sont pétris d’émotions. Ils chialent, ils hurlent, ils haïssent, ils aiment… Ils ont jamais été capables de se contrôler, passant de l’une à l’autre sans forcément trop de logique. Tous deux, ils pouvaient rigoler, papillonner autour d’amis durant des jours, puis soudain croire qu’on parlait dans leur dos, et se vautrer dans leur chagrin sans parler à personne la semaine suivante…
Mais Morr ? Morr il n’inspire rien. Il est inéluctable. Il est froid, mais froid dans le bon sens. Morr c’est celui qui va dire à une famille dont l’enfant a été tué par un ignoble assassin : « Le meurtrier aussi doit avoir une sépulture. » Morr se contrefout des conflits des vivants. Des haines, des rancœurs, des amours, des amitiés. Tout disparaît devant lui. Il ne reste que la mort.
Anne et Armand peuvent bien me torturer devant le cadavre de Margot. Il y en a un qui veut la serrer dans ses bras et pleurer. Il y en a une autre qui veut rire de joie, extatique à l’idée de voir la progéniture de Loyse enfin pulvérisée hors de ce monde. Mais tous les deux peuvent me foutre la paix en se mettant d’accord sur un point fondamental : C’est fait. C’est fini. Il n’y a plus rien à tirer de ce corps. Elle est en paix, et tout ce qui compte, maintenant, ce sont les vivants.

Alors, je caresse le visage de Margot. Et je lui parle à voix basse, à son fragment d’âme paniquée :

« Je sais, ce qu’il y a après la mort, Margot. Il ne faut pas que tu en aies peur : tu n’iras pas là où ta mère avait juré que tu finirais…
Il n’y a qu’une chose que je peux encore te promettre, une seule : Ton fils, je vais le protéger. Il va grandir. Il va accomplir tous les rêves que tu avais pour lui. Je lui parlerai de toi.
Alors va. Va voir les roses noires. Tu ne seras jamais oubliée. »

Je pose mes lèvres sur son front. Je la recouvre de son linceul improvisé. Je ferme mes yeux, force mes paupières, serre mes dents ; et je tente de chasser son image dans un coin de ma tête. Dans une boîte que je rouvrirai dans un cauchemar.





J’ai du mal à adopter une pose. Deux êtres si différents se partagent mon corps. Je place un poing fermé dans le dos, un air martial bien masculin. Et juste après, je lie mes mains devant moi, comme la femme inquiète qui se rongeait discrètement les ongles, avant de vite se raviser en se remémorant les interdictions de sa nourrice. Je comprends ce qu’on attend de moi, mais ce n’est pas une question facile. Anne voulait allaiter Armand – on l’a déconseillée, maintes fois, que ce soit des remontrances de sa famille, ou des médecins bien éduqués, il n’y avait que son époux pour la soutenir et la comprendre ; pourquoi ne pourrait-elle pas allaiter Gilles ? C’est le fils de Margot. Mais en l’allaitant elle-même, il deviendrait le sien. Elle n’aimait pas Armand lorsqu’il est né. Elle ne voyait qu’une espèce de tas de chair tuméfié et sanglant – c’est lorsqu’il s’est accroché à son sein qu’elle a décidé que l'univers tout entier ne valait rien contre lui. J’ai envie d’allaiter Gilles. Mais le Protecteur me terrifie. Le volontarisme appuyé de tous les habitants autour de moi me fait froid dans le dos. Ils ont l’air si heureux, si aimants, si honnêtes – on a envie de se perdre dans cette joie. Mais il ne faut pas finir comme Hubert. Il ne faut pas avoir tué Loyse et Margot pour sombrer maintenant. Tant de choses à reconstruire… La Loi va venir. Elle est terrifiante la Loi. Elle m’a déjà tout pris, ma demeure, mon époux, jusqu’à mes chiens… je ne veux pas perdre mon fils à nouveau.

Tant de femmes à choisir. Comment reconnaître la meilleure ? C’est tout un choix de prendre une nourrice. En prendre une trop jeune n’est pas une bonne idée, mais pas trop vieille non plus. Une femme aimante, et douce, mais pas trop – il faut qu’elle puisse s’effacer au bon moment, sinon, ça entraîne des problèmes. Il arrive que des enfants s’attachent à leur nourrice plus qu’à leur propre mère. J’aimerais bien une femme qui ait déjà des enfants, ça permettrait à Gilles d’avoir un frère ou une sœur de lait, un vrai ami. Mon Armand n’avait pas beaucoup d’amis, à part Margot, mais Margot… Non. Non, en fait, je ne veux pas d’une femme avec d’autres enfants.

« C’est… Une très lourde responsabilité qui me revient, révérende mère. J’ignore quelle personne serait la meilleure pour accueillir le Protecteur. »


Je souris. Encore un peu triste, mon sourire, mais c’est déjà un sourire – ça faisait tellement longtemps que je n’avais pas souris.

Ce qui est étonnant, c’est comment il n’y a pas… De jalousie. Comme si tout le monde souhaitait sincèrement servir Gilles, pour Gilles, sans penser à son propre intérêt. Sans vouloir espérer le garder tout pour soi.

« J’ai peu de temps pour prendre une telle décision, mais je suis heureux de voir comment Gilles sera toujours entouré de femmes – il ne manquera jamais de mères, de sœurs, et d’amantes, cela m’émeut… Mais nous pouvons en discuter tous un peu ensemble. Révérende Mère, quel genre de femme faudrait-il pour accueillir le Protecteur ? »

Je ne connais personne ici. Ce ne sont que des inconnues. J’ai des sentiments. Difficile de choisir quelqu’un uniquement par pur instinct. Peut-être qu’une des femmes chevaleresses ferait une très bonne candidate – allez savoir pourquoi, je me sens soudainement moins misogyne face à l’Impériale venue de l’Ordre de l’Ours qu’il y a deux semaines. Une femme chevaleresse, ce serait une femme forte, résiliente, mais la jeune fille a un accent Bretonnien ; si elle venait d’un lignage noble, de sang bleu, elle pourrait être parfaite si j’avais à justifier la naissance de Gilles devant la Loi. Elle est emmerdante, la Loi, elle attend de bons récits bien carrés, elle n’accepterait pas que tout un village se considère comme la famille d’un garçon…

Mais alors que je commence enfin à prendre part aux débats, et à poser des questions avec une petite voix douce, je me tourne vers celle qui reste bien silencieuse. Je la regarde, lui offre un magnifique sourire, et c’est avec un ton guilleret que je lui demande :

« Et toi, sœur Thecia, qu’en penses-tu ?
Aimerais-tu être nourrice ? »


Modifié en dernier par [MJ] Katarin le 28 déc. 2020, 17:28, modifié 1 fois.
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Échiqueté d'or et d'azur à la bordure de gueules à la guivre de gueules halissante
Stats :
FOR 9 / END 9 / HAB 11 / CHA 15* (14) / INT 9 / INI 8** (10) / ATT 13** (15) / PAR 11** (13) / TIR 8 / NA 2 / PV 70/70
*Bonus grâce à la chevalière portée à l'auriculaire
**Malus à cause du harnois (inférieur)

État temporaire :
Compassion : +2 aux jets d'empathie (Reste une journée)
Esprit compatissant : +3 aux jets de résistance à la peur/terreur (Reste une journée)
Pompette : +1 CHA, -1 INT.
Migraine : -1 CHA
Visière épaisse : -2 aux jets de perception (Lorsque le casque est porté)

Compétences :
- Anticipation : +1 en ATT et +1 en PAR à partir du 3e round face au même ennemi
- Coup précis (1) : Malus atténué de 1 lors de la visée d'une partie précise
- Coups puissants : +1d3 de dégâts
- Coriace : Résiste à 1d3 dégâts de plus
- Dégainer l'épée : +1 en INI lors du premier round
- Parade : Valeurs de parade doublées
- Sang-froid : +1 lors d'actions réalisées sous stress
- Volonté de fer : +1 sur les tests pour résister à la peur

- Baratin : +1 pour embobiner quelqu'un à l'oral.
- Empathie : Capable, sur un test, de lire les émotions sur le visage de quelqu'un.
- Empathie animale : Capable, sur un test, de deviner les émotions d'un animal.
- Étiquette : +1 lors des interactions avec la haute société
- Humour : +1 pour divertir et amuser.
- Intrigue de cour : Capable de déceler et deviner des intrigues.
- Monte : Ne craint pas de chutes lors d'une montée normale
- Vœu de la Pureté échoué : -2 dans la résistance aux tentations terrestres

- Alphabétisé : Capable d'écrire et de lire le Bretonnien
- Art (Peinture) : Sait peindre des tableaux.
- Danse : Excellent danseur
- Héraldique : Capable de reconnaître les blasons des familles nobles, et d'en savoir plus sur eux sur un test

Équipement de combat :
- Épée bâtarde (Inférieure) : 2 mains / 23+1d10(+1d3*) / 22** (11) parade
- Lance d'arçon : 1 main / uniquement à cheval / 20+1d10(+1d3)* / 16** (8) parade / "Long" (Malus de -2 ATT pour les adversaires) / "Épuisante" (Malus de -1 d'utilisation après END/2 tours, à chaque tour, max -4) / "Percutante" (Relance du jet de dégât, meilleur résultat gardé) / "Rapide" (Malus de -2 PAR et/ou -2 HAB pour toute esquive tentée par l'adversaire) / Se brise après 4/5 utilisations
*Avec la compétence Coups puissants
**Avec la compétence Parade


Tête : 13 protection
Torse : 13 protection
Bras : 13 protection
Jambes : 8 protection

- Destrier Bretonnien (Ravel) : FOR 10 / END 13 / SAU 8 / RAP 10 / INT 9 / DOC 12 / ATT 9
Équipement divers :
3 Eo

- Un beau doublet
- Un grand manteau
- Des bottes neuves
- Une jolie écharpe

- Nourriture
- Hydromel

- Bague affichant un lion - +1 CHA

- Insigne argenté marqué du blason de Lyrie
- Pendentif monté en clou
- Un flacon à l'odeur immonde
- 3 bouteilles de tonique miraculeux
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Re: [Anne de Lanneray] Des comptes à régler

Message par [MJ] Katarin »

Alors qu'Armand rôde autour de Thecia, cette dernière ne trouve pas le courage de lever les yeux mais les tremblements incontrôlés de son corps trahissent sa perception du danger qui la menace. Quelques minutes plus tôt, c'était le seigneur de Derrevin l'intrus de la pièce, l'anomalie qui perturbait l'harmonie du tableau, mais désormais il avait confié ce rôle à la jeune prêtresse. Les poings serrés, des larmes coulant en silence sur le sol en marbre blanc, le jouet d'Armand VII de Lyrie se savait sans échappatoire.

Alors qu'Armand recouvre le corps de son amie d'enfance d'un drap blanc, la foule s'adapte immédiatement à la dignité de l'instant en cessant toute manifestation bruyante, pour la remplacer par des inclinations respectueuses. Désormais, à l'instar de Thecia, tous observent le sol, comme s'il n'appartenait à cet instant qu'à Armand de faire ses adieux à la mère de Gilles. Le petit est d'ailleurs le seul à rompre le silence, avec ses gémissements plaintifs trahissant son appétit grandissant et son besoin de réconfort maternel.

Lorsque vint le moment de choisir une nourrice, Alys répondit du tac-au-tac à l'hésitation d'Armand :

- Assurément, je serais la plus qualifiée pour remplir ce rôle, mon seigneur. Rien ne me tient plus à cœur que de voir votre enfant grandir et s'épanouir, et je l'ai prouvé ici-même en le protégeant de ma personne lorsque vous êtes venu tester notre foi pour sa venue au monde. J'ai une longue expérience de soins et de dévotion envers mon prochain, et saurait mieux que personne détecter un quelconque problème de santé chez l'enfant divin, et y remédier aussitôt.

Son regard était brillant, sa voix assurée, et alors qu'elle pinçait le petit ver démoniaque par la queue d'une main, elle utilisait son autre index pour caresser le corps frétillant du monstre. Comme en réponse, il tremblait et se tortillait à son contact, s'enroulant autour de son doigt et lui griffant la chair de ses crocs avant de relâcher sa pression et de se dandiner à nouveau en observant son entourage.

Voyant que le regard d'Armand s'attardait sur elles, les deux chevalières s'avancèrent et prirent spontanément la parole. Ce fut la plus âgée qui commença, avec un accent impérial à couper au couteau - elle était à peine compréhensible, et Armand devait deviner plus qu'il ne comprenait la moitié de ses mots. Néanmoins, son vocabulaire était riche et ses phrases longues, comme si elle avait appris la langue par l'intermédiaire de livres mais très peu par l'écoute ou la pratique orale.

- Je m'appelle Gotlinde Weinbaum messire. Je suis née roturière à Averheim, ait rejoint la garnison sous les ordres du capitaine Marcus Baerfaust où j'ai servi pendant quelques années, en me démarquant notamment lors de la troisième bataille du Col du Feu Noir. Ayant été remarquée par un chevalier de l'Ordre de l'Ours Noir, j'ai pu rejoindre leur ordre malgré mes origines. Malheureusement, le Grand Maitre m'ayant invitée au sein de l'Ordre s'est vu mourir en duel contre un ours des glaces kislévites un an plus tard, et son ouverture d'esprit quant à la présence d'une femme roturière au sein de l'Ordre a disparu avec lui. Les années passant, constatant que nul exploit ne serait assez grand pour me permettre d'obtenir grâce auprès de mes camarades, j'ai laissé l'amertume me ronger, jusqu'à perdre le contrôle de ma colère lors d'un tournoi, tuant volontairement un chevalier du cercle intérieur particulièrement mesquin. J'ai fui mon ordre avant qu'ils ne puissent statuer d'une punition adéquate, et ai trouvé refuge en Bretonnie, chez les herrimaults. L'Enfant Divin va attirer toutes les convoitises, et en tant que Nourrice je serais toujours au plus prêt de lui pour le défendre - nulle autre femme à Derrevin ne dispose de mon talent martial, couplée à la bonne éducation que j'ai reçue au sein de l'Ordre et que je pourrais lui transmettre.

Maussade lui jeta un regard mauvais, mais ne releva pas davantage l'affront qui lui avait été fait.

- Jehanne de Montagu, pour vous servir mon seigneur.

La jeune chevaleresse au visage juvénile dévoilait un sourire timide mais non dénué de charme - nul doute que Gotlinde, avec ses rides, son œil blanc, ses cicatrices et sa mine austère, faisait un excellent faire-valoir à ses côtés.

- Il y a quelques mois, j'étais en route pour Castel Maisne, mon père et Brandan organisant les prémices du mariage de leurs enfants afin de sceller leur alliance. Mais mon carrosse a été pris en embuscade par les herrimaults, menés par dame Weinbaum ci-présente. Après avoir neutralisé les chevaliers qui me protégeaient et dérobé tous nos biens dans une attaque rondement menée, elle m'a invitée à reprendre ma liberté en rejoignant son groupe de hors-la-loi... et je ne savais pas encore pourquoi à ce moment, mais j'ai accepté sa proposition. Aujourd'hui, je suis convaincue que ces évènements étaient l'œuvre du destin, afin que je puisse me mettre au service non pas de quelque alliance politique nauséabonde, mais de l'Enfant Divin qui apportera la paix et le bonheur à toute la Bretonnie. Mon père me fit rechercher dans tout le pays, il a mobilisé des centaines de chevaliers errants afin de me retrouver, promettant fortune à quiconque me ramènera. Je n'ai pas de compétences martiales, pas d'affinité avec Shallya, je ne sais à la vérité pas faire grand chose mon seigneur, mais je suis une héritière disparue, et donc une parfaite prétendante pour être non seulement la nourrice, mais aussi la Mère politique de l'Enfant Divin. A défaut de qualités, je peux vous offrir mon lignage, afin que l'Enfant Divin dispose d'un terreau politique fertile dans lequel développer aisément son influence.

Puis vint le tour de Thecia. Quand Armand lui adressa la parole, elle sursauta de peur, comme si elle avait sincèrement cru que son immobilisme lui permettrait de bénéficier qu'une invisibilité magique. Après un silence qui traina en longueur, elle releva lentement la tête, deux flammes étincelantes de colère dansant dans le fond de ses yeux tandis qu'elle répondait d'une voix grave pleine d'émotion.

- Vas-y, fais-le, sale pourceau. Et la première chose que je ferais une fois en possession des pouvoirs du Protecteur, c'est te mettre en pièce pour protéger l'Enfant de ton ignominie. Je vous conchie, toi, ton père, et toute votre famille de dégénérés.

Elle se tourna vers la foule, s'adressant à eux en élevant la voix de colère :

- Vous ne voyez donc pas ? Margot est morte à cause de lui ! Notre Margot ! Il porte le mal en lui, il tient cette souillure de son ribaud de père, et si on le laisse faire il va contaminer l'Enfant Divin ! On ne peut pas le laisser faire, les enjeux sont trop grands, il faut...

Thecia n'eut pas le temps de dire davantage. En deux enjambées véloces, Maussade s'était jetée sur elle et avait envoyé avec tout son élan un magnifique crochet du droit droit dans sa joue. L'impact fut terrible, percutant la frêle prêtresse et l'envoyant directement sur le sol. La guerrière n'en resta pas là : elle se saisit de Thecia par les cheveux, et la traina comme un sac devant Armand, avant de tirer brutalement pour la forcer à relever la tête devant le seigneur de Derrevin. Du sang coulait de sa bouche ouverte, tandis que sa joue prenait des teintes cramoisies : si elle n'avait pas encore craché les dents que le coup lui avait déchaussé, cela ne saurait tarder.

- Je suis désolée, soupira Alys telle une mère déçue, mais tes griefs personnels sont une hérésie à l'encontre de l'Enfant, et de la volonté de sa défunte Mère. Elle nous a demandé de croire en lui, et si tu en es incapable, c'est que ta foi est trop fragile. J'espère que notre Seigneur prendra en compte ton passé difficile et saura se montrer miséricordieux envers tes pêchés pour t'offrir un chemin vers la rédemption.

Alys fit un signe de tête à Maussade, qui réagit en conséquence. Elle relâcha les cheveux de la jeune prêtresse pour la saisir par la robe, avant de la dévêtir de force. Thecia tenta bien de résister, mais Maussade était bien trop forte pour elle : malmenée comme une poupée de chiffon, sa faible tentative pour frapper Maussade fut accueilli par un coup de boule qui l'assomma à moitié. Nue sous sa bure, la jeune femme se retrouva en une poignée de secondes gisante au sol, sans plus aucun vêtement pour protéger sa peau des regards. Dans un dernier reflexe de dignité, elle tenta de se prostrer en boule pour cacher son corps, mais là encore Maussade ne le lui permit pas, l'attrapant par la nuque pour la soulever comme un pantin qu'elle exhibait à Armand.

Thecia était une œuvre d'art particulièrement dérangeante. De ses chevilles à la base de son cou, son corps était recouvert de stigmates d'une torture désordonnée et chaotique. Il lui manquait des morceaux de chair à plusieurs endroits, l'un de ses tétons avait été tranché, tandis que toutes sortes de petits morceaux de métal doré avaient été abandonnés dans diverses parties de son corps. Certaines cicatrices montraient que des clous ou des anneaux avaient été retirés de force, mais les autres étaient sans doutes trop profondément enfoncés dans ses organes pour pouvoir être enlevés. Mais la ferraille n'était pas le plus dérangeant ; le pire était les mots taillés au couteau absolument partout dans sa chair. Armand VII avait souillé chaque parcelle disponible pour écrire des centaines de phrases sibyllines :

"Tu es ma chose"
"A moi, pas à toi"
"Mon esprit m'appartient"
"PUTE"
"Je te contrôle, pas l'inverse"
"Je suis moi"
"SORS DE MA TETE"
"Rester libre"
"Sac à foutre d'Armand"
"Trouver et brûler le tableau"
"Tu aimes Anne. Pas Loyse."
"Tu es toi. Reste toi"
"Qui est la Dame Rouge ? Ma PUTE"
"PUTE"
"N'oublie pas"
"PUTE"
"PUTE"
"JE TE BAISE SORCIERE"
"PUTE"





Tu ne sais pas si l'âme de Margot pourra rejoindre les jardins ou sera dévorée par Slaanesh - si tu souhaites la recommander à Morr, il te faut dépenser 1 à 2 pdc Morr pour cela.
Jet de héraldique pour les Montagu : 16, raté. Tu sais que les Montagu c'est pas rien : le père possède le titre de baron, et ses terres sont au nord de l'alliance entre la famille Maisne et ses vassaux, voisines de celles de Symonnet Gencien. Néanmoins, tu ne sais plus vraiment quelles étaient les relations entre la Lyrie et eux, pas plus que tu ne te rappelles de la nature exacte de la relation entre les Maisne et eux : Tristan de Montagu est une personnalité plutôt discrète, et mystérieuse, qui ne participait que très peu aux mondanités ou aux tournois en Aquitanie. Sa fille unique était comme lui, si bien que tu ne sais rien du tout d'elle - tu avais rapidement entendu parler de sa disparition et des recherches à son sujet, mais c'est guère tout - et d'ailleurs passés les trois premiers mois, on s'est mis à admettre qu'elle était sans doutes morte.
Jet d'empathie sur Jehanne : 10, réussi. son sourire timide cache une certaine roublardise - quelque chose dans son ton de voix et son expression te laisse penser qu'elle est plus futée que ce que son apparente docilité laisse supposer. Sa façon de parler, son phrasé, ses expressions, pas de doutes, elle est rompue aux usages politiques de la cour.
Jet d'intimidation (CHA+END) sur Thecia : 13, raté de 2. Jet de mental de Thecia (END+INT) = 12, raté de 2. Ah. Bon bah je recommence, j'ai besoin d'un résultat là :D
==> 18 pour Armand, 10 pour Thecia. OK, elle gagne. Ce qui n'est pas forcément une bonne nouvelle pour elle.

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