Rédigé par Snorri Sturillson, Assistant MJ
Une fois l'embrasure franchie, l'obscurité enveloppa le chevalier, juste quelques instants, le temps de s'acclimater au vestibule et aux panneaux de bois accrochés au murs. Une tranche blanchâtre apparaissait devant lui, comme une anomalie à l'obscurité, en totale opposition à l'ouverture sombre qu'il venait de franchir. Le silence ambiant continuait sur la lancée, puisque les seuls signes alentours étaient lumineux. Une fois, la seconde porte franchie, la lumière revint à sa portée.
La salle était grande, grandiose en apparence, mais sobre dans ses détails. Ici, aucune statue d'or ou d'argent, aucune colonne de marbre tiléen, aucune peinture gigantesque au plafond. Simplement de la pierre de taille, parfois gravée, et des vitraux. De larges vitraux, pas très hauts, représentant des scènes plus ou moins connues du folklore de la Dame.
Au centre siégeait dans l'évidence la plus pure et la plus totale, un vitrail ovale, finement coloré, représentant le réceptacle sacré de la Dame : le Graal
Autour de cela siégeait quelque écriture trop fine pour être décelée dans cette demi-lumière, ce qui dénotait assez fortement avec l'éclat du verre central. Juste en dessous siégeait évidemment l'autel principal et les ustensiles de la Foi, tous taillés ou construits à base de pierre blanche ou grise. Juste derrière l'autel, une autre enclave rocheuse abritait un vitrail quasiment uniforme, qui semblait représenter une scène (ou une partie d'une scène) marine, avec l'écume et la lune en fond qui semblait virer à l'orange à l'heure actuelle.
À partir de l'autel central s'élançait l'allée principale, courte mais suffisante à une chapelle, ainsi que les rangées de bancs inclinés servant au repos et à la prière. La sobriété de l'endroit semblait se refléter aussi sur les séants proposés à chacun, étant donné la simplicité de leur structure et l'unicité de leur composition : de la pierre lisse, encore une fois, bien qu'elle parut presque grumeleuse ou poreuse.
Appliqués contre les épais murs latéraux, d'autres vitraux ornaient la structure, représentant tantôt des champs vallonnés, des vignobles luxuriants, des embarcations chargées de richesses et de victuailles, etc. Tout cela était assez typique des lieux de recueillement en campagne, car malgré l'état assez décousu ou rapiécé du Duché de Prestenent, il y avait parfois des chapelles survivantes qui présentaient de tels apanages ruraux dans leurs enluminures ou gravures (Bien que le Duché ne soit plus vraiment au fait vis-à-vis de la fertilité agricole et de la beauté des paysages. Mais ce n'est pas Prestenent qui irait vous dire cela, bien évidemment.)
Et enfin venait le dernier vitrail, opposé et surélevé par rapport aux autres, qui siégeait sans effort au-dessus de la porte que le chevalier venait de franchir. Un visage féminin y résidait, un visage fier et altier, mais aussi calme, et étrangement perçant du regard. Enveloppé dans une chevelure claire qui lui couvrait oreilles et nuque, elle semblait flotter au-dessus de tout, lèvres closes, telle une figure pensive et séduisante qui trônait parmi les... Nénuphars. Oui, il n'y avait aucun doute. Les plantes qui agrémentaient le portrait étaient des nénuphars d'un vert vif et puissant, qui contrebalançait assez bien les grands yeux pâles de la demoiselle.
Alors qu'il penchait la tête pour accompagner l'obscur tracé, le chevalier eut un étrange pressentiment. Levant les yeux au ciel, il croisa prestement le regard de la Divine et...
Ses yeux pâles avaient bien viré à l'or, non ? Juste un inst...
Venait-elle de cligner des paupières, ou était autre chose ?
L'air sec s'était-il soudainement rafraîchi, ou s'en rendait-il compte qu'à présent ?
L'embrasure de la porte extérieure venait-elle bien de grincer subitement ?