[Prestenent d'Affreloi] Silence, ça tourne...

La Bretonnie, c'est aussi les villes de Parravon et Gisoreux, les cités portuaires de Bordeleaux et Brionne, Quenelles et ses nombreuses chapelles à la gloire de la Dame du Lac, mais aussi le Défilé de la Hache, le lieu de passage principal à travers les montagnes qui sépare l'Empire de la Bretonnie, les forêts de Chalons et d'Arden et, pour finir, les duchés de L'Anguille, la Lyonnesse, l'Artenois, la Bastogne, l'Aquilanie et la Gasconnie.

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[MJ] Le Grand Duc
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[Prestenent d'Affreloi] Silence, ça tourne...

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Rédigé par Snorri Sturillson, Assistant MJ



"Je donne mon corps, cœur et âme, à la Dame que je cherche..." Ainsi commence le long Vœu de Chevalerie, prononcé partout et en tout temps dans le Royaume de Bretonnie. Enfin, presque partout.

Quand vous naissez dans une famille aristocrate, la tradition veut que tous les enfants mâles passent le serment de chevalerie, où comme il est parfois appelé en Briton Local "Le Vow du Errantry". Ce vœu amène l'enfant à faire ses premiers pas dans le long périple qui tient tant à cœur à la noblesse du Royaume. Après tout, c'est le meilleur moyen de faire ses preuves, tout en se montrant digne de son rang : ceux qui reviennent sont couronnés de succès, d'honneur et de gloire. Ceux qui ne reviennent pas ...


*** Image
C'est ainsi que Prestenent s'en va quérir le Monde et plus encore, armé de son fer, la cervelle débordant des légendes de Gilles & de ses compagnons. Mais quand on vit au milieu de ces marais, parmi la fange, les herbes folles et les amphibiens, difficile de s'imaginer trouver le prestige ici. N'importe quel maraud est capable d'inventer des sottises, comme ce faquin qui prétendait hier encore avoir vu un colosse adipeux haut comme une lance, large comme une tour, accompagné d'un minet blond tout ferré. Vraiment, n'importe quoi, ces gens-du-bas...

Les jours passant, à force de galvauder entre les charniers et les bois morbides, voilà qu'on s'en quérit d'une issue hors de ces lieux. L'ancien Duché n'avait plus fière allure, et celle-ci ne s'améliorait pas alors que l'on s'approche de la Cité du même nom. Mais Prestenent d'Affreloi était un miracle de chair et d'os, et fort s'en fût pour le décourager si facilement. Contournant les collines, ignorant les charniers, le jeunot capte un des nombreux canots laissés à l'abandon sur la berge. Puisque ceux-là n'avaient aucun propriétaire, voilà qu'un d'eux en aurait un nouveau en la personne de Prestenent ! Mais contrairement à la vie de château, cette embarcation était diablement fatigante. Rendez-vous compte : il fallait ramer ! Et ce, malgré l'eau trouble et bosselée ! Quel diable de roturier avait pu donc inventer un tel supplice ?

Quelqu'en soit la réponse, une fois le soir venu sur l'espèce de périssoire, il n'y avait plus un seul bonhomme pour faire avancer l'engin (à vrai dire, il n'y en avait jamais eu d'autre). Maints coups de pagaie plus tard - aux yeux du canotier, c'en faisait au moins trente ! -, et voilà la carangue coincée entre deux effluves. Les tentatives de mouvement s'accumulent, jusqu'à ce qu'une ombre, certainement l'inventeur de ce supplice, vienne décrocher puis renverser toute l'embarcation.

Le bois claque, l'eau s'agite, mais il est trop tard : les affluents grisonnants enveloppent déjà l'intrépide chevalier, forçant le passage fluvial dans son nez, remuant les bronches et les braies.

Et soudain... Une femme ?

***

Lorsque Prestenent rouvre les yeux, il est en vie, endolori, affalé sur une bande sablonneuse, la gorge tiraillée par une amertume inégalée. Malgré l'humidité permanente sous sa ceinture et dans ses bottes, il avait le visage asséché, craquelé. Ce poids, trempé sur son dos, indique qu'il n'a au moins pas perdu son barda. Qui plus est, l'on entendait un lent reflux derrière lui, mais aussi...

- " Atchez ce qu'j'ai arranquer à lo-berge ! Un vrai bestiou, atal ! Astin, atche ! T'ça vaut ben coup d'treille, oh qu'si !"

Un bruit de déglutition répété vient compléter l'autre voix, plus sèche et basse, mais tout aussi désagréable.
- " Vin-nom, t'veux t'escaner la tronc' ? T'attir'ras les pégueux, Tais-to, lô! J'ira aux caguanés."

Quelques bruits mous viennent clore le débat, puis ce fut un ruissellement, à quelque distance sur la gauche.

- "Cré-ben, quequ'ço lô ? Rané ... ? Rané ?"

Il fait nuit, la lumière est assez faible, mais les sons "vifs" portent loin.

Test de perception (INT) pour Prestenent : 16, raté.
Test de perception (INT) pour l'individu : 6, réussi.
Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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Prestenent d’Affreloi est alors parcouru d’un frisson étrange dont il aurait aimé pouvoir se persuader que ce n’était que le vent froid sur ses vêtements trempés. Son premier réflexe est de s’assurer de la présence de son écu dans son dos et de son épée à sa ceinture.
Ceci fait, il se redresse aussi dignement que le permettent ses muscles endoloris et se fait la réflexion qu’il lui faudra surement rajouter l’acte de pagayer à la longue liste des travaux physiques inadaptés à un chevalier. Il hésite un peu avant de se mettre debout. Il a entendu des bruits étranges qui à ses oreilles pourraient aussi bien être les caquètements de bêtes sauvages que les braiments ineptes d’un humain n’ayant pas la présence d’esprit de parler la même langue que lui. Dans tous les cas, il reste sur ses gardes. Il sait que s’il est tombé entre les griffes des soldats du cordon sanitaire, il devrait pouvoir s’en tirer en montrant son écu blasonné ; en revanche s’il a affaire à des contrebandiers comme ceux qui font hélas transiter des marchandises à travers le Moussillon, il lui faudra au moins montrer son épée.

Une fois debout, du moins autant que possible, Prestenent s’immobilise, une main cherchant le pommeau de son épée. Il a beau scruter la noirceur de la nuit, ses yeux ne lui montrent rien au-delà de quelques mètres, et comme son ne vient heurter son ouïe que celui de l’eau se déversant non loin de là avec la vigueur des choses de la nature. On dirait que, quoi qu’il ait entendu s’exprimer en langage barbare, c’était désormais parti.
Rien d’anormal à ce qu’il lui semble, sinon cette persistante impression qu’un regard est posé sur sa personne. Un rapide calcul se fait dans son esprit, pesant le pour et le contre. Finalement, il résout que rien ne sert de vouloir se cacher puisqu’un humain l’aurait forcément remarqué. Difficile de louper un être aussi rayonnant et majestueux que lui en effet.

Toujours alerte, tournant la tête de tous côtés à la recherche des voix qu’il avait entendu, il finit par simplement s’exclamer :

"Héla ! S’il se trouve ici quelqu’un qu’il ose me répondre. S’il se trouve créature qu’elle me montre son mufle."

Le fait de parler décrispe un peu ses muscles tout en rassurant son esprit. Il ne s’attend pas à une réponse et finit même par relâcher la pressions sur le manche de son épée. Dans son esprit, si rien ne se fait entendre en réponse, alors il pourra reprendre son chemin l'esprit tranquille en s'éloignant de cette eau saumâtre qui coule non loin et dans laquelle il n'a plus aucune envie de se risquer. Mourir noyé ? Voilà bien une mort qui siérait mal au dernier chevalier de la lignée d'Affreloi. Heureusement que la Dame du Lac l'a préservé d'un sort aussi funeste.
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Rédigé par Snorri Sturillson, Assistant MJ



Mettant genou à terre pour se relever, l'apprenti-batelier sent la pointe de son écu qui balotte contre sa chemise plissée. Le sol est mou, visqueux, comme... la tourbe des marais ? Quoiqu'il en soit, une pâle lueur orangée semblait la seule capable de percer l'ombre nuageuse tout autour de Prestenent - ce qui, admettons le, laisse franchement à désirer quand il s'agit de discerner ses environs.

Main à la ceinture, dos à la rive, baladant ses doigts à la recherche d'un manche ou d'un pommeau, il cherche quelque source de bruit : Là, une silhouette, et là une autre, à quelques mètres du premier. Le récent ruisselement s'arrête soudainement tandis qu'une silhouette semble trembler, puis se redresser.

- " Rané... Y'a quequ'ço lô qu'a bougé... Vin vou-

- Héla ! S’il se trouve ici quelqu’un qu’il ose me répondre. S’il se trouve créature qu’elle me montre son mufle. "
Test de CHA pour Prestenent : 8, tout juste !

Retrouvant enfin fourreau et lame à son bord, le chevalier voit son interjection reçue avec quelque déglutition et hoquetement de la part de ses interlocuteurs. S'en suit une seconde d'hésitation, puis deux, puis un râle buccal vient conclure cet entracte.

- "Astin, le pégueux il cause... T'entendra comme y t'cause ben ?"

- "T-T-T... Tais-to !"

Les deux silhouettes recule d'un pas, comme deux chiens apeurés. En ballotant des bras, l'un d'eux reprend soudainement :

- " Hôla, m'sire pégueux, on t'y veux pô d'mal, m'sire.

- " On atche juste les aoûzet et les bartasse, m'si-

- " T'vô t'taire ? C't'un m'sire pégueux, t'y veux pô tes sornettes le m'sire, gros barjaque

- " Mais le-euh m'sire, c't'un cadeau d'la Dame des Ô, t'y crois ?

Un autre pas en arrière, plus hasardeux cette fois, comme s'ils titubaient.
Désormais redressé entièrement, la main crispée sur sa lame, les jambes fraîche et trempées, Prestenent reprend petit à petit contrôle de ses capacités naturelles.
Test de perception (INT) pour Prestenent : 4, réussi !

L'air ambiant était moite, sans doute à cause de la baignade précédente. Le visage à moitié obstrué par le limon de la berge, des relents chauds se percevaient dans l'air. Des humeurs rêches, âpres, comme... de l'alcool ? Oui, et sans doute une quantité faramineuse, juste au-devant de Prestenent. Maintenant qu'il l'avait remarqué, elle semblait omniprésente, comme s'il pouvait sentir l'âge de la boisson dans l'air...
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Message par Prestenent d'Affreloi »

Le chevalier attendit quelques instants, immobile dans la noirceur brumeuse de la nuit. Prestenent avait senti ses muscles se tendre alors que le son d'un râle buccal qui lui semblait difficilement humain se faisait entendre. Mais la voix, ou plutôt les voix qui répondirent, semblaient humaines. Plus encore, Prestenent avait vaguement compris ce qu'ils essayaient de dire, prouvant ainsi son grand intellect. Une chose toutefois restait nébuleuse: ce qu'ils faisaient ici. Et puis, qu'est-ce que ça pouvait bien vouloir dire "atche", "bartasse" et encore plus "aoûzet" ?
Baste ! C'était de peu d'importance. Ce qui lui semblait devoir être des humains avaient prononcé l'expression "m'sire" que Prestenent avait déjà entendu bien des fois. Cela prouvait qu'il avait affaire à de simples paysans.

C'est alors que l'odeur lui vint jusqu'aux narines. Cette odeur il la reconnait au bout d'un instant comme étant le parfum âpre et capiteux du vin pur avant qu'on ne l'ai coupé.
Le chevalier souffle alors bruyamment des narines pour chasser ce parfum délétère. Puis, c'est alors que son esprit s'éclaire d'une idée.

"Serait-ce possible... Personne en Moussillon ne peut faire ou obtenir du vin en telle quantité à moins d'être noble, et ce n'est manifestement pas le cas ici."

Bien qu'ignorant complet en géographie, Prestenent d'Affreloi pouvait se targuer d'un esprit suffisamment vif pour tirer la conclusion qui s'imposait dans cette situation.
Tout en cherchant du regard à mieux discerner ses interlocuteurs, Prestenent leur demande alors:
" Dites moi mes braves. J'espère juste de vous un renseignement. Nous sommes bien ici dans le duché de Bordeleau n'est-ce pas ?"

Il avait décidément de la chance. Si ces gens étaient bien ce qu'il pensait, ils pourraient le mener à la plus proche ville. Prestenent rêvait d'en voir une en vrai, une cité Bretonnienne resplendissante, un château bien entretenu, toutes ces choses qu'il n'avait jamais connu autrement que sous forme de ruines froides à moitié abandonnées par les vivants et plus qu'à moitié hantées par les morts ou une cité crépusculaire servant de repère aux pirates et contrebandiers. Peut-être rencontrerait-il alors d'autres chevaliers. Peut-être trouverait-il un cheval pour participer à un tournoi. Peut-être trouverait-il là bas le véritable début de sa quête de chevalier errant sous une forme ou une autre.
Les rêves que s'echaffaudait le jeune chevalier le portèrent si loin dans des paysages glorieux et illuminés qu'il faillit bien ne pas entendre la réponse à sa question.
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Rédigé par Snorri Sturillson, Assistant MJ



- " Bord'lô ? Ah que qu'si, ce sera ben ici-t', m'sire pégueux.

Sitôt relancé, le voilà interrompu par son homologue
- " Vous d'vez-êt' vin-ben paumé m'si-

- " J't'ô di quô, vin-nom?! Tais-tô Rané, ô j'te 'laque ton bavoir. J'y causera au pégueux, pas tô.

Un grand geste silencieux et évocateur vint clore leur dispute, comme un grenouiller menaçant sa proie d'un vilain coup d'épuisette. A la lueur de la lune, le froid commençait à se faire sentir, et hormis les bouffées d'éther tiède et fruité, il ne semblait rien y avoir d'autre à remarquer dans cet endroit, sauf si l'on souhaitait méditer au rythme des souffles hoqueteux à proximité.

Bordeleau donc - ou Bordeleaux, selon les récits - ...
Une terre proche, à priori riche en terres et bienfaits, où l'on savait vivre, faire du bon vin, et extirper toutes les richesses des alentours. Et à en croire les gens de l'extérieur, il y en avait bien assez, des richesses alentours ! Engoncé entre la Gilleau au Sud, la Grismerie au Nord, le Grand Océan à l'Ouest et le voisin Bastogne à l'Est, le Duché de Bordeleau était, selon les dires du Moussillon, pourvu de moult pâturages, de champs fertiles florissants, de falaises praticables et solides et surtout, d'une population honnête, saine et travailleuse...

En somme, le Bordeleau semblait avoir tout ce dont Moussillon manquait, y compris un Duc respecté. Alb... Alric... Albé... Aldric qu'il s'appelait, ou quelque chose comme ça. Non, Albéric que c'était. Albéric le Juste, le Fier, le... Discipliné ? Là encore, les avis divergeaient peu sur l'intéressé : Un homme mûr, fort, intelligent, ... Un Duc de Bretonnie, en somme.

Quant à la population locale, Prestenent en avait probablement deux exemples en face de lui. Ces derniers n'avaient visiblement aucun souci pour distinguer le Sieur d'Affreloi malgré la brume et la pénombre, mais ils gardaient tous deux quelque trouble plus ou moins passager quand il s'agissait de respirer en silence, se tenir droit, ou même rester en place.

- "Mais dis-voèr', m'sire pégueux, vô connaîtra à l'm'sire rigiss' ? Si vous voudra, ovec -heuh- Rané on peut t'y aller. Leu m'sire rigiss' c't'un bon gars, qui cause ben comm'-y-fôdra. Et l'm'sire rigiss', il voudra ben t'y dire qu..."

La suite se perdit dans un bruit des plus explicites, tel une poche d'air qui s'échappe d'un instrument caverneux.
Faisant comme si de rien n'était, ou comme si tout s'était passé sans perturbation, l'une des silhouettes s'approcha de l'autre, attrapa une sorte de flacon cylindrique qu'ils avaient chacun en main, et en profita pour dire :

- "Ben tin, au m'sire Rigiss', et à le-oh m'sire pégueux"

Les bruits de déglutition, expressément suivis par la descente cinglante du bras de son camarade sur sa trogne, furent tout aussi explicites quant à la situation actuelle de la silhouette, sinon des deux : Ils étaient saouls, n'avaient nullement l'idée de s'en soucier, et encore moins celle de vouloir y remédier.
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Message par Prestenent d'Affreloi »

Après avoir laissé passer une seconde pour chercher à déchiffrer autant qu'il le pouvait le langage des deux paysans, le chevalier dut se retenir avec dignité de sauter de joie. Cet accomplissement était insignifiant, et pourtant il y voyait un point de départ d'une importance incroyable. Il avait quitté sa famille, tourné définitivement le dos à toute autre alternative et serait désormais chevalier ou mourrait en essayant. Bien qu'aucun doute ne l'aie jamais habité sur sa destiné, Prestenent avait toujours eu hâte de s'éloigner de certains éléments de sa famille qui l'auraient par trop freinés dans sa quêtes, tels son petit frère Halion qui avait d'un côté préparé son équipement, et d'un autre avait tenté jusqu'au dernier instant de le faire changer d'avis. Le pauvre imbécile. Prestenent n'était pas pressé de le revoir. Le dernier chevalier d'Affreloi avait toujours su que ce destin était celui pour lequel la Dame du Lac elle même avait permis sa naissance, et aujourd'hui la preuve en était déjà là, si la déesse avait voulu l'empêcher d'accomplir son devoir, elle l'aurait noyé dans ce fleuve.

Ainsi donc, il l'avait fait. Prestenent ne pouvait réprimer une certaine fierté du fait d'avoir, seul et sans véritable connaissance géographique, atteint son objectif en quittant le Moussillon. Il avait atteint Bordeleaux. À n'en pas douter un pays charmant, une noblesse toujours aussi illustre qu'aux temps anciens et un climat qui ne pouvait-être que mille fois meilleur que celui qu'avait toujours connu Prestenent au cours de sa courte vie. Le chevalier, pris d'une joie profonde, inspira profondément cet air nouveau, l'air de Bordeleaux. Un air pur, épargné des malédictions impies qui fleurissent sur le sol de Moussillon comme un tapis de roses aux teintes glauques. Ici ne poussaient que des plantes pures, marquant la bienheureuse influence de la Dame sur la très sainte terre de Bretonnie. Ici régnait une douceur qu'il ne lui semblait pas avoir déjà connue sinon en rêve dans ses visions fantasmées d'un paradis vert et pur. Ici, un territoire verdoyant et irrigué par une eau pure et saine, l'air était aussi frais que revigorant, dénué de ces miasmes invisibles qui encouragent à expirer sous peine d'être agressé de l'odeur tourbeuse. Ici, rien n'empêchait Prestenent, pour la première fois de sa vie, d'inspirer un grand coup pour savourer les délices d'une nature telle que la Dame a toujours voulu qu'elle soit.

Rien sinon l'odeur persistante et âcre de l'alcool. Prestenent souffla brusquement du nez pour se débarrasser de ce parfum écœurant et capiteux ; il toussota un peu puis se reprit en main. L'alcool l'avait toujours indisposé, mais pas question de salir son image devant public, même si l'envie le démangeait d'attraper cette bouteille de poison et de la jeter de toutes ses forces dans une direction aléatoire. Voilà qui aurait bien servi de leçon à ces sots ivrognes.

Ils lui parlèrent d'un certain Rigiss. Ce que ce terme ou nom pouvait bien signifier dans le patois dégénéré de ces gens là échappait totalement au chevalier. "Un régisseur peut-être ?"

Son corps s'excitait à l'idée de démarrer sa quête. N'avait-il pas déjà perdu bien assez de temps ? Sans compter qu'il était peut-être resté inconscient un long moment, cette conversation à grand renfort de mécompréhensions et de billevesées lui avaient fait perdre plusieurs poignées de secondes. Des secondes qui auraient pu être utiles à pourfendre des ennemis de la Bretonnie où à faire la rencontre de beaux et preux chevaliers. Du moins c'est ainsi que se présentait la chose dans l'esprit surexcité de Prestenent.

"Palsambleu ! Mais qu'attendons nous ? Menez moi devant ce nommé Ré... Ri... celui dont vous parliez à l'instant. Si vous pouvez me guider jusqu'à lui sans plus attendre, faites le ! Si vous n'êtes pas en état de marcher jusque là, indiquez moi le chemin que j'y aille. Pressons ! Pressons ! Votre vin ne va pas disparaitre en aussi peu de temps et vous pourrez le savourer à loisir sitôt que vous vous serez occupés de moi. Allez ! Sans plus attendre !"

Peut-être était-il en train de faire une erreur. Peut-être ce Rigiss faisait-il partie du cordon sanitaire et en se présentant devant lui Prestenent se révélerait tout à fait, ruinant toute la discrétion de son affaire. Peut-être aussi ces hommes étaient ils des brigands le menant vers un guet-apens.
"Baste ! J'aviserai en temps et en heure. En cet instant je me sens de me jeter tête première s'il le faut vers n'importe quel type d'adversité ou de piège. J'y suis préparé."

En vérité, sa plus grande crainte était encore que l'on lui fasse payer des frais de douane. C'est que sa bourse ne devait contenir qu'une poignée d'écus et il avait besoin de chacun d'entre eux pour espérer faire l'acquisition d'un cheval. Mais ces préoccupations matérielles n'étaient que secondaires, et pour l'instant la seule chose dont il avait à s'occuper était de suivre les deux paysans.
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Message par [MJ] Le Grand Duc »

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Voyant le naufragé respirer à grandes bolées, l'un des paysans s'approcha, voulant quérir quelque mal ou quelque indice de réaction. Quelque peu bousculé par la requête tonnante du chevalier, il prit quelque mal à l'encaisser puis à se redresser, manquant maintes de foi de tomber à la renverse durant sa marche rétrograde. Visiblement ahuri, l'ordre mit un certain temps à outrepasser la barrière de leur crâne.

- "Occupé d'vô ? Haaaa-in? Com-hoc-ment çô ? " fit l'un en claudiquant pour se rapprocher.

Une fois à portée suffisante- c'est à dire assez pour sentir plus fermement les relents d'alcool, mais pas non plus au point où il aurait à quitter son équilibre précaire -, l'autre en profita pour compléter :

- " Disparaît' ? Mé-j'y-b... L'y-t'y pas un peu barjaque, dis voèr? Astin, j'crois qu'y jase qu'la treille va s'effilocher comme du b... Oh caraffe ! Mon bestiou ! Vin-nom qu'c'e-êêê qu'il est mon bestiou?!"

Sans aucune réponse qui puisse s'entendre, les deux s'affairèrent à ce qui parut alors comme une tâche nécessaire, et diablement corsée : Guetter et pivoter sur soi, sans compromettre boisson ou stabilité. Et au vu de leur vire-voltage désaccordé et désarticulé, il est une chose que tous remarqueront en cet instant : Si saoul que l'on puisse être en Bordeleaux, il n'est d'aucune façon possible pour un autochtone de renverser sa boisson.

A dire vrai, si les mouvements avaient été conscients et maitrisés, cela aurait été digne des plus grandes souplesses humaines : pirouettes, extensions, trajectoires affolantes,... Ah, si seulement ces gestes étaient volontaires... Quoi qu'il en soit, une fois leur duet clôturé - et cette longue minute d'investigation écoulée -, peu s'en fût pour les gaillards de s'en aller d'un pas hasardeux mais téméraire, avec ou sans leur interlocuteur (non pas qu'ils soient difficiles à rattraper ou à suivre de toute façon).

Aux yeux des nantis et des étrangers, cette cavalcade brinquebalante aurait très bien pu s'apparenter à une démarche animale, partiellement bovine et partiellement autre chose, comme si l'éther vitreux qu'ils consommaient à intervalles irréguliers leur permettaient ce prodige de camouflage. Car oui, c'est avant tout cela qui se remarquait une fois éloigné de cet étrange et nauséabond duo : Sans apanage ou outil visuel luttant contre le ciel nocturne, ils auraient très bien pu être deux créatures de l'ombre, marchant au hasard parmi les monticules terreux qui séparaient la berge vaseuse des chemins alentours. Vu leur dialecte et leurs efforts, d'aucuns diraient sans doute que cela était fortuit, ou simple coïncidence, ou encore quelque stratagème inné chez les gens de la basse-vie bordeline, mais pour les autres... Laissons cela aux contes et racontars d'ivrognes et de - Ah tiens, encore un talent des ivrognes. Décidément, que de talents et de mystères chez ces personnages crasseux !

Tantôt épaulé par l'un, sitôt vautré sur l'autre, les compères avaient brusquement changé d'attitude, oubliant tout caractère bruyant pour une allure plus calme, désormais partisans des chuchots et de gestuelle étrange... si l'on oubliait bien sûr leur relation actuelle avec la boisson. Ils tendirent bientôt en direction de quelque ombres bigarrées et fixes dans le paysage. A vue de nez, cela semblait être quelque structures de taille raisonnable, se dressant mollement au-dessus de la brume environnante.

Test de perception, visuelle, de nuit, avec les yeux acclimatés aux environs (-3) : 4, réussi !

Une fois approchés, ils s'arrêtèrent brusquement, manquant de piétiner ou bousculer leur mécène actuel... Comme s'ils attendaient quelque chose. L'instant qui suivit, le mouvement repris. Dans toutes les directions désormais, s'élevaient des sortes de bâtisse - ou du moins l'on avait cherché à ce que cela y ressemble-, toutes en bois ou en terre, qui s'accoutumaient de planches, de paille brunâtre, de renforts bricolés, le tout étant coiffé de chaume tout aussi grotesque. Çà et là, des piquets traînaient, sur lesquels étaient affalés fils et filets, broches et branchages, destinés à d'inconnus usages locaux.
Exemple de visuel d'un tel endroit, en considérant qu'il fait nuit noire, et qu'aucun édifice n'est en pierre :
Image

L'air était ici affublé d'un fumet nouveau, mais pas forcément plus agréable. Si le Sieur d'Affreloi avait été extirpé de toute torpeur par quelque relent capiteux, ici il était ramené à une autre réalité : celle de la rivière. Les effluves de poisson, de crasse et de bois mou, voilà ce qui s'ouvrait à Prestenent en ces lieux. Soudain, son étrange escorte s'arrêta devant une masure un peu plus droite que les autres, et un peu plus esseulée. S'appuyant à un relief mural, ils partagèrent une lampée sans rien dire, comme si cela faisait partie de leur devoir. Et enfin l'on toqua à la porte.

- " M'sieur l'rigiss' !" s'éprit l'un d'eux maladroitement, à mi-chemin entre le chuchot et le cri. "M'sire rigiss', vin v'nir, c'est Rané ! M'sire rigiss' !"

Une fois... deux fois... trois fois...

Ah, enfin du nouveau. Un bruit, venant probablement de l'intérieur de cette bâtisse, suivi d'un pas, ou d'un choc.

- " Rané? Vin-de-bleu ("eu" prononcé comme un "e" neutre), qu'est-t'y fous l'vé à c't'heure? T'veux t'ficeler la carafe? T'es barjaque ? Qui c'est qu'est avec tô-a ?"

- " Ah m'sire rigiss', c't'Astin-é-Rané qu'es là, 'vec un m'sire paumé sur lo-berge. Ouvrez ben, y'a rien t'y-z'aut'!"
- " Un m'sire d'la berge? Hein ? Mais qu'est-ce-t'y jase encore ?"

Quelques tintements et autres bruits de bric et de broc se firent entendre de l'autre coté de la porte, avant que celle-ci s'ouvre doucement, sans un grincement.

- "Où qu'il est ton m'sire de lô berge, hin ? Oû qu'il- Vin-nom, va s'enfagner c'te matraque ..."

Quelque bruits rocailleux et poisseux vinrent conclure cette interrogation, à laquelle les deux compères ne surent dire mot.

Et toujours l'obscurité complète de la masure semblait grogner, souffler, comme si un trouble avait pris la voix à l'intérieur...
Si tu souhaites parler aux deux énergumènes qui t'ont amené jusqu'ici, tu peux poser les questions que tu souhaites dans ton prochain post, bien qu'ils ne soient pas forcément enclin ou capable d'y répondre.
Sinon, je te laisse lancer quoi que ce soit que tu souhaites lancer.

Notifie moi sur DIscord dans tous les cas :D
Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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Prestenent d'Affreloi
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Re: [Prestenent d'Affreloi] Silence ça tourne

Message par Prestenent d'Affreloi »

Prstenent s'était déplacé à la suite de ses deux guides à la démarche titubante en retenant les tressaillements d'énervement de son corps. Chaque fois qu'un des deux hommes trébuchait ou s'arrêtait pour lamper une gorgée de sa drogue liquide, le chevalier serrait ses poings gantés avec un crissement de cuir qui aurait sûrement glacé le sang des paysans si celui qui coulait dans leurs veines n'avait pas été intégralement remplacé par du pinard. Il y avait presque une sorte déplorable de grâce dans la façon qu'avaient les ivrognes bordelins de se mouvoir, une grâce telle que Prestenent avait presque peur d'être aperçu en compagnie de ces dégénérés. Il espérait au fond que ce n'était pas un échantillon représentatif de la population de Bordeleaux, sans quoi les échanges futurs risquaient d'être exténuants.

Ils le menèrent jusqu'à une bâtisse au sein d'un vague hameau de pêcheurs. Une fois devant la porte, ils crièrent quelque chose dans leur dialecte barbare et une voix de l'intérieur répondit. Après quelques échanges aussi élevés que l'on peut s'attendre, une porte s'ouvrit.

Prestenent n'attendit pas beaucoup plus. Il était déjà sur les nerfs. Chaque seconde comptait, il le savait. L'espace d'un instant, il allait s'adresser encore à ses deux guides pour leur demander qui était l'homme devant lequel ils l'avaient mené, mais en posant les yeux sur ces deux ombres qui peinaient à rester debout, il en conçut de manière fort peu chevaleresque une sorte de répugnance qui le poussa à se détourner une fois pour toute de ces individus patibulaires.
Prestenent d'Affreloi tremblait presque tant l'impatience se faisait sentir dans ses veines, comme une bile qui sature tout son corps et lui monte à la tête. Si encore il avait eu, pour calmer son esprit contrit, un cheval sur lequel assoir son postérieur, mais non, même ce privilège lui avait été dénigré. D'un mouvement vif, il leva un bras presque aussi violemment que s'il avait voulu jeter un couteau sur la personne, mais il se contenta de lever une main vers le nouvel arrivant en s'écriant avec dans la voix une impatience qui paraissait presque virulente:

"Monsieur Réglisse je présume ? Je suis Prestenent d'Affreloi, chevalier errant, et je cherche à accomplir n'importe quelle quête. Ces deux énergu... ces deux braves hommes m'ont conseillé de venir vous voir. Voici ce que je veux savoir: où suis-je présentement ? où est la plus proche ville ? et surtout, est-ce qu'on trouverait emploi pour un chevalier errant tel que moi dans cette région ? Ah, et au passage, si la chose est possible j'apprécierais de pouvoir me laver."
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[MJ] Le Grand Duc
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Re: [Prestenent d'Affreloi] Silence ça tourne

Message par [MJ] Le Grand Duc »

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Rédigé par Snorri Sturillson, Assistant MJ




- " Chevalier ? Oh de-bleu..."

Quelque chose racla un fer, et la lumière fut. Une lumière faiblarde, tout aussi orangée que la lune lointaine. Dans l'embrasure, à moitié renfrogné et encore submergé par quelque mal ou torpeur, un homme tassé se tenait. Oui, tassé, c'était le mot qui convenait : pas très haut, pas très fin, pas très beau, les épaules basses et tendues, le front petit, et un buste qui semblait avoir glissé vers le bas avec les années. Il y avait quelque chose de malingre, de dépareillé dans cette ossature noueuse... Comme si la belle et fière silhouette du vaillant bretonnien avait laissé place à une forme molle, tombante, qui la différenciait alors de l'idéal chevaleresque. À peine au-delà du centre de sa figure siégeait un tarin dur, pointu, d’où partaient des sillons craquelés dans toutes les directions, soulignant les autres pièces de sa face grossière. D'un grand œil noir, il scruta le chevalier.
Voilà l'individu, en chair et en poils.
Image
- " J'dis quequ' c't'un cadeau d'la Dame des Ô, pas vrai m'sire Rigiss' ?

- " Ah ben p'tet ben va !" La voix du nouvel interlocuteur changea soudainement. " Allons, missire ! V'nez donc... J'me nomme Déan, et j'suis l'rigisseur d'icitte. Benv'nu à Carcassin, missire, j'ai justement une chambre pour vous, la meilleure du coin. Ne faites po attention à ces deux barj... ces deux bravez'omme, missire, ce sont juste des gens-commun, voyez?"

Laissant prestement entrer le Sieur dans la masure, il chassa les deux ignares du bras, accompagnant le tout d'un jappement sec dans leur direction.

"La ville, missire? Eh ben y'a..." Quelques secondes vinrent ponctuer sa phrase, ainsi qu'un tic à son oeil prédominant. " Bois-giron, si l'on suivra la passe de berge. Ca prendra quequ'jours à y'aller, et Y'aura l'Marquis là-bas, qui gèrera toud'ces environs. Y s'ra un bon m'sire le missire Morqui', un brav'omme, pour sûr. C't'un chevalier, comme missire, sauf qu'il a-ra son domaine à gérer. Il aura ben plus d'emploi qu'nouzaut' à Carcassin, ça oui-da. Vous z'avez ben voyagé, missire? Oh là, Vous voudra sans doute vous r'poser? manger? V'nez donc, j'vais vous montrer... Pour s'qu'est du rinçage, nouz'aut' on va à lô berge, mais l'on va vous am'ner un bac pour vous missire chavalier... "

Il s'assit sur un maigre tabouret, après avoir brièvement remis quelque ordre dans cette bâtisse grossière. En réalité, il n'y avait qu'un seul étage, assez vaste pour accueillir 4 personnes, si l'on oubliait les lits. L'air était relativement sain, bien que l'on puisse trouver quelque odeur viciée ou fermentée çà et là. Le sol était exclusivement composé de paille brunie, accommodé d'une sorte de paillasse dans un coin de la pièce, et à l'opposé une cloison en bois et en terre séparait les deux moitiés de l'endroit, produisant ainsi une salle à part, que Déan indiqua comme la chambre de Sieur d'Affreloi.

On laissa "Missire" d'Affreloi disposer de ses quartiers grisonnants, constater le lit blanc délavé et le reste des babioles et blasons partiellement effacés qui ornaient l'endroit, en veillant toujours à ce que "Missire" soit toujours suivi du regard dépareillé du régisseur. En effet, ce dernier, bien qu'il reste tantôt vissé devant son tabouret tantôt à s'incliner devant les injonctions de Prestenent, il ne le perdait jamais du regard, comme si le chevalier était quelque chose d'inhabituel, d'étrange, ou de merveilleux à ses yeux.

Quelque temps passa, et l'on amena, non sans bruit, un bac d'eau fraîche devant les quartiers de Prestenent.

- "V'la votre bassin' , missire d'Affre... d'Affreloi. Astin, Rané, v'nez donc j'ter un boque en l'honneur du missire."

Les deux compères s'exécutèrent sur-le-champ, comme des chiens dressés.
Test secret : 15, échec
Pendant que Prestenent se rinçait tant bien que mal de la vase et de l'eau trouble de la Grismerie, on cala un malle vétuste et deux tabourets hors de ses quartiers, afin que ce dernier puisse avoir de quoi reposer son séant et son dos contre quelque chose. Et à peine eut-il finit son décrassage, qu'apparurent quatre gobelet de bois, et une bouteille de couleur violacée... une fois que la porte fut délicatement fermée.

Soudain, le trio, mené par Déan, se leva devant le chevalier, gobelet en main. Le régisseur jeta un oeil baladeur vers chacun de ses invités...

- "Pour le Chevalier ! "

Voilà que l'on trinque une fois, et chacun prit une lampée dans son verre.

- "Pour la nuitée ! "

On trinque une seconde fois, et que l'on engouffre une autre lampée. Reprenant son souffle, Astin reprit mollement :

- "Po-eurr' eul' gosier ..."

Et l'on re-trinque, buvant cette fois-ci une goutte minuscule, vu l'inclinaison très légère de chaque récipient.

- "... Et lô Dame d'-hoc !", Rané lança-t-il, sous le regard bovin des deux autres autochtones.

À chaque toast, tous attendaient la réaction de Prestenent, l’œil fou du régisseur se permettant quelque tremblement alors qu'il se tournait une nouvelle fois indépendamment vers le chevalier.
Et enfin, ce fut un étrange silence, comme s'il manquait quelque chose à cette nouvelle célébration...
Te voilà donc à Carcassin, premier lieu-dit ou village de ton voyage en Bordeleaux.

Durant le temps où tu es seul avec lui, tu peux demander quoi que ce soit au régisseur Déan, tant que cela ne demande pas trop de moyens.
Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois. Je vis avec mes gens, loin de la folie des hommes. La nuit je vole dans les sombres profondeurs de la forêt. Mon regard d'acier partout se pose, et sans bruit, comme le vent, je file entre les branches des arbres séculiers. Je suis le Grand Duc, seigneur de ces bois.

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Re: [Prestenent d'Affreloi] Silence ça tourne

Message par Prestenent d'Affreloi »

Après que le nommé Déan ait répondu à ses questions et lui ait proposé son logis pour la nuit, l'esprit ardent de Prestenent se calma légèrement. Quelques jours seraient nécessaires pour atteindre la plus proche ville. Évidemment. Il aurait dû se douter que sa quête ne se ferait pas instantanément, qu'il ne lui suffirait pas de traverser la Grismerie pour se retrouver pris dans une croisade ou emporté dans dans un combat à mort contre un féroce troll des marais. Il lui fallait aiguiser sa patience autant qu'il le pouvait, et cela lui était difficile. Alors qu'on lui faisait visiter les quelques mètres carrés de ce qui servait d'auberge, il continuait de lutter contre les gestes parasites de ses bras qui sinon auraient remué comme des poissons tirés de l'eau. Mais il se rassurait en se disant qu'à coup sûr ce "marquis" aurait une noble tâche à lui confier.

Prestenent savoura l'accueil privilégié qu'on lui faisait. Son regard n'était pas encore assez habitué au luxe des régions civilisées, si bien qu'il trouva la chambre tout à fait agréable et la décoration d'assez bon aloi. En se dédiant à l'errance, il ne s'était pas attendu à ce que chaque nuit se passe dans un lit propre, et effectivement ce n'était pas le cas car ce lit qu'on lui proposait ne correspondait pas tout à fait à son idée du propre ; mais un lit restait un lit.
Seul détail perturbant, l'œil de son hôte qui paraissait revendiquer hardiment son indépendance du reste du visage ; à moins que ce ne soit la seule part du dit visage à suivre les réelles pensées de ce Déan. Prestenent remercia l'homme avec amabilité pour toutes ses attentions, mais à aucun moment ne cessa de l'observer avec suspicion.

Lorsque l'on lui apporta son bac derrière la cloison qui fermait sa chambre, une sorte de panique effleura son esprit. Heureusement, les paysans lui avaient laissé son intimité, mais il n'en était pas moins saisi d'une sorte de frénésie paranoiaque alors qu'il s'apprêtait à se dévêtir. Le regard de Déan avait semblé le suivre curieusement depuis qu'il était entré, avec une sorte de fascination. Est-ce qu'il savait ? Non il ne savait pas et d'ailleurs il n'y avait rien à savoir. Qu'aurait-il pu découvrir ? Rien. Non rien. Mais tout de même, et s'il savait ?

Pourtant c'est bien lui même qui avait fait cette requête. Rien de plus nécessaire en effet que de se laver, surtout après ce qui lui était arrivé. L'eau abjecte de la Grismerie, charriant des miasmes abominables des déchets innommables et des cadavres de serf tous plus puants les uns que les autres, s'était insinuée jusque dans ses beaux vêtements. Toute sa vie durant, il avait esquivé les maladies incurables du Moussillon, ça n'était pas pour tomber malade maintenant à cause d'une eau viciée ou même simplement d'attraper un gros rhume à cause du froid.

Prestenent prit un moment à tourner en rond autour du bac, hésitant. Il s'agenouilla et pria pendant quelques secondes, surtout pour pouvoir discrètement écouter ce qui se passait derrière la cloison. Assez rapidement, il décida de se risquer, après s'être persuadé que les trois autres étaient occupés à aménager la grande salle. Son récurage fut liquidé en vitesse, bien que son corps soit parsemé de vase. Il aurait pu prendre du temps pour se réchauffer lui qui avait dû marcher dans la nuit fraiche avec ses vêtements trempés, mais n'en fit rien, se sécha et se rhabilla aussi vite qu'il le pouvait, se souciant peu que les seuls habits dont il disposait soient encore humides.

Ceci fait, Prestenent souffla. Une fois encore il venait de se débrouiller avec brio. Pour un peu il se serait applaudi. Il n'eut toutefois nul besoin de le faire car sitôt qu'il franchit la porte pour retourner dans la grande salle, il vit les trois comparses lever leurs verres. Ils trinquèrent trois fois d'affilée, beaucoup trop vite pour que Prestenent puisse tout à fait suivre ce qui se passait. Au quatrième toast, il constata qu'il y avait un quatrième verre sur la table. Le sien ?

Lorsque le dénommé Rané porta un toast à la Dame, Prestenent tenta de se joindre à eux. Toutefois, peu habitué au vin, il n'aurait pu, même avec toute sa volonté, se forcer à boire cul sec un verre entier sans vomir. Tout de suite après, il tenta de feinter pour détourner l'attention en déclarant:

- Pour le duc Albéric et le Roy Louen !

Avant de boire derechef dans le même verre. Il tomba presque sur son siège et resta quelques secondes, le regard dans le vide, le visage fermé et sombre comme si de terribles choses venaient hanter son esprit. Il se demandait s'il n'allait pas dégobiller.

Les civilités passées, quand le chevalier eut l'occasion de parler seul à seul avec son hôte, il réfléchit puissamment à la meilleure marche à suivre pour traiter avec et individu, visiblement plein de bonne volonté mais qui suscitait tout de même sa méfiance ne serait-ce que pour l'attention éxagérée qu'il portait au chevalier. Les conclusions de sa reflexion se résumèrent ainsi:

"Baste ! Je me contrefiche de ce que cet homme a derrière la tête. Il n'a pas pu découvrir de secret puisque je n'ai pas de secret."

Le minimum de prudence restait de mise, et Prestenent n'entendait pas dormir nu ; d'autant que c'eut été à la fois indécent et fort peu hygiénique, l'hygiène étant de ces problématiques dont Prestenent d'Affreloi pouvait se targuer d'être le seul à prendre en compte l'importance capitale. Aussi, sous le prétexte que les nuits étaient fraiches, il demanda à son hôte s'il aurait pour lui permettre de dormir habillé une tunique pour homme adaptée et de préférence aussi ample que possible.

Ceci fait, il reporta son attention sur la chose réellement importante, à savoir la suite de sa quête. Il demanda à Déan de lui en dire plus sur cete ville qu'il appelait Bois-giron et au final se permit même de demander si le villageois possédait une carte de la région. Une fois ces affaires réglées, Prestenent, dont l'esprit était sûrement quelque peu influencé par son verre de vin, demanda simplement à l'hôte de lui parler de lui, de sa vie, et aussi du marquis qu'il allait rencontrer ; du moins autant qu'il le pouvait ou le voulait. Prestenent écouta d'un air aussi béat qu'endormi, et il se fit la réflexion que si au réveil le lendemain il ne se souvenait pas d'un traitre mot de cette histoire il n'en serait nullement étonné.

Une fois la conversation terminée et le repas expédié, le sommeil gagna le chevalier qui se leva pour aller rejoindre son lit. Désormais, lavé, logé, et quelque peu torché lui aussi, Prestenent se sentait léger, léger comme jamais auparavant ; et sa réussite dans la traversée du fleuve y était pour beaucoup. Dans un murmure, il remercia encore son hôte, pour lequel il n'avait déjà plus aucune méfiance car un homme avec une telle barbe ne pouvait après tout qu'être honnête.

- Ahh, monsieur Déan je vous suis très reconnaissant pour tout. Comment pourrais-je jamais assez vous remercier..." commença-t-il.
Prestement, avant que l'homme ne puisse lui réclamer de l'argent, il tourna sur ses talons et se dirigea vers sa chambre en répétant dans un murmure:
- "Oui... comment pourrais-je jamais vous remercier ?"

Sans attendre le moindre semblant de réponse, il se coula dans sa chambre et s'installa douillettement. La paranoïa l'avait quitté, mais il prit tout de même soin, plus par principe que par necessité, de garder son épée et son écu juste à portée de main. Puis il s'affala sur le ventre et constata le matelas bien assez confortable pour trouver le sommeil.
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