Le secret du Père Siegfried

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Le Voyageur
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Le secret du Père Siegfried

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Le soleil tapait fort sur le village de Borgas, quelque part dans les plaines fertiles du nord de l’Estalie.

Les maisons blanches absorbaient la lumière de l’astre diurne et jetaient leurs ombres fraîches sur une petite place encadrée d’orangers. A cette heure-ci de la journée, la plupart des villageois s’accordaient un peu de repos dans l’obscurité de leur foyer pour fuir la chaleur. Les ruelles étaient alors désertes, tout comme les halles du marché aux bestiaux ou le parvis de l’église de Myrmidia l’Immaculée dont le dôme aux tuiles couleur ocre dominait la bourgade tranquille.

Pourtant, et malgré l’heure de la sieste, une petite foule était pressée près du lavoir bordé de joncs. Des hommes aux habits bariolés débattaient bruyamment tandis que des femmes aux cheveux voilés de pastel éloignaient les enfants. Si le curieux s’approchait, il pouvait voir qu’un corps gisait aux pieds des villageois basanés. Il s’agissait d’un homme en soutane grise et portant des sandales à lacet. Son visage crispé était rasé de près et il portait la tonsure. Sa peau était plus pâle que celles des gens du cru. Il était recroquevillé en position fœtale, les mains posées sur le ventre comme pour essayer de retenir la flaque de sang qui tâchait déjà le sentier crayeux. Le regard éteint indiquait que Mórr avait déjà réclamé son âme.

Il s’agissait du Père Siegfried, un voyageur venu du lointain Empire. Il était arrivé dans la région une décennie auparavant, se présentant comme un prêtre de Sigmar, que vénérait sa patrie d’origine. Pour les estaliens, Sigmar était un dieu grossier dont la foi militariste et austère allait à l’encontre des enseignements éveillés du culte de Myrmidia. Mais le Père Siegfried parlait la langue du pays, semblait honnête homme et était venu avec de quoi subvenir à ses besoins. On l’avait alors laissé s’installer dans le village où il occupait l’ancienne forge, dont l’atelier était laissé à l’abandon.

Le prêtre entreprit tout d’abord de rénover l’endroit. Sa nouvelle demeure, qu’il entreprit de réparer, ne comptait alors qu’un lit de camp et un autel dédié à son dieu et croulant sous les bougies. Il se contentait de peu et ses repas étaient des plus frugaux, composés seulement de pain, d’huile d’olive et d’un peu de fromage de chèvre. Il devint dès le premier jour une curiosité à Borgas et, dans les premières semaines, les enfants venaient observer son installation avant de déguerpir en riant aux éclats lorsque l’impérial s’apercevait de leur présence. Les lavandières le regardaient s’affairer avec curiosité et les hommes lui donnaient parfois un coup de main pour les travaux en rentrant de leur journée de labeur.

Cet étranger devint très apprécié par les locaux. Il prenait des nouvelles de chacun au marché, aidait aux travaux des champs et transforma même l’atelier de la forge en une petite salle de classe où il apprenait aux enfants du village à lire et à écrire l’estalien, le reikspiel et le classique. Il fut invité à accompagner les éleveurs à la foire aux taureaux de la Sainte Vierge et participait toujours d’une manière ou d’une autre aux évènements qui égayaient la vie de la bourgade. Seul le prêtre de Myrmidia qui officiait à Borgas semblait sceptique quant à l’attitude à adopter face à celui qui pouvait bien devenir un concurrent. Le Père Siegfried n’était pourtant pas prosélyte, même si il lui arrivait d’apprendre des passages de la vie terrestre de Sigmar à ses jeunes élèves. Face aux inquiétudes des myrmidéens, il se contentait de dire que ces psaumes servaient simplement de support à son enseignement de la lecture. Du reste, l’impérial s’intégra très bien et fut bientôt considéré comme un membre à part entière de la communauté.

Mais tout changea lorsque, une nuit, une compagnie de cavaliers encapuchonnés et vêtus de longues capes sombres fit irruption dans le village endormi. Les torches éclairaient les fourreaux de leurs épées. Les chevaux qu’ils montaient n’étaient pas d’ici, trop lourds pour venir des élevages de la région. C’était des destriers, des montures de guerre, montées par des guerriers. Les villageois prirent peur et restèrent enfermés dans leurs maisons, suivant cette sinistre troupe depuis la protection de leurs fenêtres. Les cavaliers traversèrent la bourgade et s’arrêtèrent devant le bosquet où se trouvait l’ancienne forge. Ils semblaient savoir où trouver le Père Siegfried. Le prêtre les connaissait-ils ? Etait-ce lui qui les avait appelé ? Il est vrai qu’il entretenait une petite volière de pigeons ramiers derrière son atelier … Un des cavaliers mit pied à terre et entra dans la forge tandis que les autres restaient en selle, immobiles. Nul ne sait ce qu’il se passa entre le prêtre de Sigmar et le mystérieux étranger mais ce dernier ne sortit de la forge qu’au petit matin. Il remonta sur son cheval et l’inquiétant escadron quitta Borgas au galop par la route de la rivière.

Aussitôt les cavaliers hors de vue, les villageois sortirent de leurs maisons et vinrent s’enquérir du sort de Siegfried. Ce dernier resta enfermé dans la forge, criant à ceux qui l’avait accueilli de s’en aller et de le laisser en paix. Il en alla de même pour ses élèves qui revinrent quelques jours plus tard pour reprendre les leçons. Le sigmarite restait cloîtré et l’on pouvait voir sous la porte que les bougies de son autel restaient allumées toutes les nuits. La journée, un martellement incessant résonnait depuis la forge, comme si quelqu’un taillait la pierre à l’aide d’un burin ou creusait un trou à la pioche. L’homme de foi ne sortait plus, même pour acheter des provisions au marché. Quiconque venait frapper à sa porte était brutalement éconduit.

Cet étrange manège dura une dizaine de jours jusqu’à ce qu’un matin, ce soit au tour du prêtre de Myrmidia d’essayer de raisonner son confrère. Plutôt que de l’aider, il avait en tête de savoir ce qui se tramait, et surtout de découvrir l’identité de leurs curieux visiteurs de la semaine passée. Si une menace planait sur Borgas], il était de son devoir de s’en préoccuper et d’avertir sa hiérarchie. Il trouva la porte de la forge grande ouverte. A l’intérieur, pas de Père Siegfried mais une trainée de sang qui courait depuis le lit jusqu’à l’arrière-cour, puis par-delà, dans le pré en pente en direction de la rivière. Le myrmidéen rameuta les hommes des maisons les plus proches et ils remontèrent ensemble cette piste sanglante pour trouver le cadavre de l’ecclésiastique, recroquevillé du côté du lavoir.

On ne trouva rien dans la forge qui pouvait indiquer ce qu’il s’était passé. Ni arme du crime, ni trace de lutte, ni correspondance. L’identité des cavaliers demeurait un mystère, comme celle du meurtrier. Un maillet et des burins en fer furent retrouvés dans l’atelier, dans le sol duquel avait été creusée une large cavité aux bords grossiers. Une poudre jaunâtre tapissait le fond de ce trou sans que quiconque ne puisse déterminer de quoi il s’agissait.

Le Père Siegfried fut enterré dans le cimetière du village, la forge et l’atelier furent rasés et remplacés par un oratoire dédié à Myrmidia. L’évènement fut classé sans suite et peu à peu oublié, jusqu’à ce que les ronces recouvrent le mystérieux endroit où le sigmarite avait creusé le sol avant de se faire assassiner.
Je ne suis qu'un voyageur
Sous le soleil et la pluie
Je ne suis qu'un voyageur
Et je retourne au pays

Je n'ai plus que mon cheval
Mon cheval et mes habits
Des habits qui me vont mal
Et je retourne au pays

J'ai couru le monde, mais ma raison
M'a dit que le monde, c'était ma maison

Je ne suis qu'un voyageur
Qui chemine dans la nuit
Et je sens battre mon coeur
Car je retourne au pays

J'ai quitté ma blonde, qui m'avait dit
Va courir le monde si c'est ça ta vie

Je ne suis qu'un voyageur
Elle ne m'a jamais écrit
Et maintenant ah j'ai peur
De retourner au pays

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