Errer dans la nuit n'a jamais rien eu d'amusant. Tu ne le sais que trop bien, aujourd'hui - quand que puisse vouloir dire ce mot, "aujourd'hui". En réalité, tu erres dans le brouillard depuis si longtemps... Il n'y a rien. Tant de rien, que tu ne sais pas vraiment s'il s'agit encore d'une errance, si tu avances véritablement dans un hypothétique quelque part. Mais il y a quand même une chose que tu sais, dans cette insondable noirceur qui te cerne. C'est ta mémoire."Qui peut dire quelle est la réalité, et quel est le rêve ? Vous me frappez et j'ai mal, vous me dites : "voilà la réalité". Je vous dis : "vous croyez m'avoir frappé. Voilà votre rêve." Alors, je vous repose la question... qui peut dire quelle est la réalité, et quel est le rêve ?
Votre cœur. Là où votre cœur est le plus fort, là est la réalité. Car là vous vivez. Et tout le monde sait que qui vit, existe..."
Ecrit anonyme
Ta mémoire qui a disparu, dévorée par les ténèbres.
Oui. Rassurants...
- Comment vous sentez-vous, Messire von Barov ?
Une femme se fraie un chemin autour des badauds que tes yeux encore embrumés voient flous et anonymes. Elle se penche sur toi, alors qu'une invisible main fraîche se pose sur ton front. Dans ses bras tu reconnais des affaires qui t'appartiennent...
Le manteau sombre dont tu te vêtais pour remplir ton office. La rapière acérée avec laquelle tu perforais le Démon. Le pistolet fidèle qui abattait la Bête.
S'il y a une chose dont tu rappelles... c'est que tu es un Répurgateur, un fils dévoué de l'Eglise. C'est bien la seule pensée qui t'aide un peu, alors que les ténèbres reviennent avidement chercher leur dû... ta conscience.
Toutefois... toutefois, oui, il te semble bien qu'à droite, derrière les volutes vaporeuses, tu entends des rires enfantins. Tu peux même discerner quelques coloris fugaces, joyeux, d'or solaire et de vert sylvestre qui se laissent apercevoir. Dans cette direction tu crois ressentir comme un parfum d'innocence.
Sur ta gauche, la route disparaît également dans la brume mais de temps à autres, elle s'écarte fugitivement pour laisser surprendre par ton regard acéré des formes sombres au sol. Rien ne remue, sinon l'éclat tremblant de quelques braseros sinistres qui fleurent dangereusement la vérité.